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3- Escapade

Trois cents ans plus tard...


Adossée au creux de la fourche confortable d'une grosse branche, Mélise crache sans vergogne le noyau de la cerise qu'elle vient de croquer pour en faire jaillir le jus. Un fruit à peine mûr, acide, mais délicieux. Elle observe la chute de la petite chose où s'accrochent encore quelques bribes de pulpe sanguinolente, qui  échoue sur la coiffe empesée de sa gouvernante, la très plantureuse Olna. Douce revanche de regarder la tache violine s'agrandir sur la fine dentelle.

En bas, l'horrible bonne femme s'égosille avec outrance et affole tous les volatiles alentours. À cette vitesse, le lait tournera dans la mamelle des vaches ou, dans le meilleur cas, sortira déjà transformé en beurre... Juste au-dessous du chêne où son élève a trouvé refuge. Secouée d'un rire silencieux, Mélise s'empresse de tirer de la poche de son tablier un nouveau fruit dont le jus dégouline sur son menton quand elle le croque. Sans respect des bonnes manières, elle s'essuie d'un revers de manche et note au passage la traînée violette laissée sur le poignet de sa robe.

Voilà qui lui vaudra, comme son escapade, une bonne correction. De préférence, avec l'une des baguettes de noisetier qu'affectionne la vieille harpie. Goûter à plusieurs heures de liberté et se conduire en petite peste, en toute quiétude, mérite bien d'avoir de la peine à s'asseoir pendant un temps que l'adolescente espère limité.

Enfin tranquille... Mélise soupire de bonheur. Elle libère son opulente chevelure bouclée du ruban dont l'a affublée Olna. Au matin, la gouvernante lui a enserré le crâne, sans aucune douceur, ce morceau de satin, pour bien emprisonner chaque mèche. Bien sûr, quelques accroche-cœurs rebelles et malicieux se sont dérobés pour chatouiller le front têtu et les joues rondes de la jeune fille. Cette révolte bouclée a suscité l'énorme frustration de son bourreau, décidé à poursuivre la séance de torture jusqu'à ce que mort s'en suive pour chaque révolutionnaire chevelu. À la première occasion, Mélise a fui à toutes jambes.

De loin en loin, elle capte la voix puissante hurler son nom à tous les vents, mais se garde bien de bouger un orteil. En mauvaise élève, la jeune fille échappera au programme de la matinée : leçons en tout genre pour future jeune fille accomplie. Maintien, broderie, couture, dessin, musique, danse, jardinage, conversation de salon... Autant d'activités passionnantes qui la révulsent.

Elle, rêve de monter à cheval, de battre la campagne, de s'amuser comme lorsqu'elle était encore une enfant comme les autres et que personne ne s'étonnait de la voir grimper aux arbres. En ce temps-là, la gamine espiègle pouvait capturer des grenouilles dans les mares environnantes et revenir crottée jusqu'aux sourcils sans essuyer plus que les protestations scandalisées de sa vieille nourrice.

Les journées filaient, à baguenauder avec des petits vauriens de son âge, à traîner dans les vergers pour dérober des fruits à peine mûrs dont l'acidité les ravissait, à fabriquer arcs et flèches pour des compétions impromptues... Puis un jour, toutes ses passionnantes activités lui ont été tout simplement interdites.

Monter à cheval se limite depuis à des promenades en amazone, au pas, telle une dame, dans les allées du parc. Plus question de galoper à califourchon, cheveux au vent. Pour mieux lui inculquer tout le savoir indispensable à une future épouse, elle subit depuis déjà deux très longues années l'insupportable férule d'Olna, bien décidée à briser la résistance de cette héritière mal élevée et que la propre mère de l'enfant lui a demandé de transformer en cygne gracieux.

Et depuis peu, les choses se gâtent.

Comme toutes les jeunes filles de son âge, à l'automne, Mélise sera présentée dans le monde : à la Cour de la Reine Béryl en présence de la souveraine. La «Présentation». Dans la bouche d'Olna, le mot tinte comme l'aboutissement de toute chose... Pour Mélise, l'évènement ne représente qu'une nouvelle étape de son calvaire, car à l'approche de ce "grand" moment, la matrone perd toute mesure.

Avec gourmandise, la petite fugueuse examine une nouvelle baie, très charnue, d'un beau rouge grenat. Le jus sucré coule sur sa langue et elle se délecte de la chair goûteuse. Déterminée, elle fulmine entre ses dents :

— Je n'irai pas ! Elle peut toujours courir. Je ne porterai pas cet horrible chiffon qu'elle ose appeler une robe!

Un rire, tout proche, tinte au-dessus d'elle et l'adolescente sursaute, interdite. Le choix de la fourche la plus confortable l'empêche de perdre l'équilibre et de chuter sans grâce, tant elle est saisie. Persuadée d'être seule, dans cet arbre isolé, juste derrière le castel de Ludes, dont elle devine les tours massives à travers le feuillage fourni, Mélise prenait ses aises. Mais quelqu'un d'autre s'est réfugié là, avant elle ! L'adolescente se reproche son imprudence. Tout à la joie de profiter de quelques heures à sa convenance, elle a foncé vers le chêne, mais sans vérifier qu'elle y serait seule.

D'ailleurs malgré ses efforts et contorsions, la jeune fille ne distingue rien à travers la végétation dense.

En alerte, Mélise, se redresse et lance d'une voix pas très rassurée :

— Qui est là?

Le rire jeune et joyeux retentit à nouveau, très proche.

— Un ami, assure une voix douce et masculine.

Le timbre n'est pas celui d'un enfant, ni même d'un homme mûr, voire âgé, plutôt d'un jouvenceau. Interloquée, la panique la gagne, car malgré tous ses efforts, elle ne parvient toujours pas à situer l'inconnu à travers la masse verdoyante

— Montrez-vous !

Amusée et provocatrice, la voix du visiteur répond :

— Impossible.

La jeune fille fronce les sourcils, avale sa salive avec peine. Elle tend le cou, craintive soudain, puis questionne, hésitante.

—Vous êtes un... Korigann?

Le rire enjoué retentit, mais, à vrai dire, il ne traduit rien de mauvais. Mélise le ressent au plus profond d'elle-même. Il n'appartient pas à un être malfaisant. Non vraiment pas, elle en est persuadée.

— Oh ! Bien sûr que non ! Je ne suis pas un esprit démoniaque! Quelle petite fille tu fais !

La moquerie la froisse un peu alors, avec une pointe d'orgueil, elle réplique, vexée par le jugement de son interlocuteur invisible:

— Je ne suis pas une petite fille et je suis la fille du Duc Léo de Ludes !

L'inconnu devine qu'il a égratigné sa fierté et s'excuse avec une telle promptitude que l'adolescente s'apaise aussitôt :

— Pardon, Mélise. je ne cherchais pas à te blesser. Juste à te taquiner.

Gênée par son propre manque de retenue, autant que par la gentillesse attentive qui perce chez l'inconnu, elle murmure :

— Ce n'est rien..., il est vrai que je ne suis pas très âgée... et vous?

Pas de réponse. La jeune fille s'invective pour sa trop vive curiosité. La voix douce souffle, presque trop bas :

— Si je te le disais, tu me trouverais très vieux, mais si tu me voyais, tu dirais que je suis jeune, presque autant que toi...

Mélise réfléchit. Pour elle, ses propos sibyllins sont dépourvus de sens. La jeune fille n'ose pas insister, car elle décèle cette fois une réelle tristesse dans le ton.

— Pourquoi ne veux-tu pas porter la toilette rouge?

Son interlocuteur souhaite changer de sujet, Mélise en jurerait. Cependant, impossible de résister, et elle affirme, péremptoire :

— Mais elle est parfaitement hideuse ! Elle ressemble à un sac ! Et encore, un sac serait plus élégant !

Avec une pointe de curiosité, son interlocuteur insiste :

— Tu n'aimes pas la robe ou bien... ce qu'elle symbolise.

Mélise se crispe. Il connaît le coloris de cette fameuse robe. Après tout, une tradition, rien de bien mystérieux... Cependant qu'il l'appelle par son prénom. Comme s'il devinait sa pensée, l'étrange jeune homme indique, narquois :

— Ta gouvernante hurle à tue-tête depuis un moment. Et toutes les jeunes filles pestent contre la même chose, tu sais... Depuis leur création, les robes de présentation à la Cour sont rouges. Je reconnais que moi aussi, je ne les trouve pas très seyantes...

— On dit que la Reine Béryl, comme son arrière-grand-oncle, le Roi Séverin, a interdit que l'on en modifie la coupe.

— Arrière, arrière, arrière-grand-oncle, corrige l'autre occupant du chêne.

— Oui, son ancêtre ! résume Mélise à qui la précision importe peu, c'est vieux tout ça ! Cette tenue doit être identique à celle portée au temps du Prince Endormi. Quelle idée ? Lui s'en ficherait pas mal, j'en suis certaine ! Et c'était il y a si longtemps, c'est horriblement démodé maintenant et moche en plus !

Il rit encore, tout bas.

— Tu as raison... pour la robe, bien sûr. Mais pourquoi craindre ce fameux jour ? Tu pourras t'amuser et te faire des amies une fois la cérémonie achevée...

Découragée, Mélise soupire.

— Ma parole, vous n'avez jamais assisté aux conversations de salon des dames ! Cela se résume à...

Et pour parodier un dialogue né de son imagination fertile et irrévérencieuse, elle adopte un ton guindé et une voix aiguë :

— Ma chère, pour broder ce brin d'herbe, prenez donc ce coton satiné, il se mariera parfaitement avec la tendresse de ce feuillage.

Un gloussement l'encourage à poursuivre :

— Très chère amie, merci de votre aide, je n'aurais pu mieux choisir. Et que me conseillez-vous pour le ciel...? » C'est à vomir, vociféra l'adolescente dégoûtée, faut quand même pas être très dégourdie pour ne pas savoir quelle couleur choisir pour tirer l'aiguille. C'est d'un ennui et je me pique toujours les doigts !

Une explosion de rire salue sa prestation et elle daigne sourire. Même si la parodie trahit la nature très impertinente de son auteure, son mystérieux compagnon ne manque pas d'humour.

— N'es-tu jamais allée à la forteresse royale ? s'enquit-il curieux, enfin au Palais...

La demeure des souverains d'Asfrane conserve une partie ancienne autour de laquelle a été construite l'actuelle résidence, de facture plus moderne.

— Non. On raconte que la partie médiévale n'a guère changé... pour ne pas choquer le Prince Endormi s'il venait à se réveiller. Mais depuis le temps, le pauvre, je doute que cela arrive un jour. À son époque, Flann, la capitale, ne portait pas encore de nom. D'ailleurs, vous ne m'avez pas dit le vôtre? Pourquoi ne voulez-vous pas que je vous voie ? Vous craignez que j'aie peur?

La jeune fille pense un instant que l'inconnu s'est éclipsé, mais pourquoi ne l'a-t-elle pas vu ? Puis, tout à coup, elle saisit la voix tranquille. Trop inexpérimentée, Mélise ne devine pas combien le visiteur en contrôle la moindre inflexion.

— Pour la première question, Sev, comme m'appelait ma mère. Et quant à me voir, ce n'est pas possible pour le moment. Et te faire peur... Je te promets que je ne suis pas monstrueux. Permets-tu que je revienne discuter avec toi, Mélise ?

— Oh oui! s'écrie l'adolescente très spontanée, mais ne vous faites pas prendre...

— N'aie crainte, personne ne sera assez rapide pour cela. Je reviendrai bientôt. Promets-moi de réfléchir pour cette robe ! Flann est si belle en hiver...


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