Chapitre 6
Rétrospectivement, lorsque j'ai dévié de mon chemin pour aller observer cette chevalière, j'aurais au moins pu vérifier que j'avais toujours ma mère en vue. Cela aurait évité bien des problèmes. Mais, non. Isadora Brightside ne recule jamais devant une occasion d'être en danger. C'est bien connu. Pourtant, le peu d'instinct de survie que je possède me crie de ne pas rester chez des inconnus, dont je ne sais rien. À savoir Elie et son frère.
- Pourquoi étais-tu dehors après le couvre-feu? répété-je en fixant Elie droit dans les yeux.
Celle-ci jette un furtif coup d'oeil vers son frère, puis souffle avant d'attraper le croquis qui avait attiré mon attention quelques minutes auparavant.
- Tu vois ce dessin? me questionne-t-elle.
- Dans la mesure où je ne suis pas aveugle. Oui, réponds-je sarcastiquement en fourrant ma main dans ma poche.
J'attrape la chevalière dans mon poing et essaie de rester naturelle. Le croquis est vraiment très bien fait. Si bien fait que j'ai la désagréable impression qu'il ne cesse de m'observer, de me narguer.
- Notre allié, qui vient de Téllisia, était censé nous envoyer une bague similaire. Pourtant, nous ne l'avons trouvée nulle part. Des gens l'ont aperçue dans la rue aujourdhui, mais elle aurait disparu.
Je me mords discrètement la lèvre. Comment est-ce possible ? Je me retrouve toujours dans des situations de ce genre. Quelles étaient les probabilités pour qu'Elie et Adrian soient justement à la recherche de cette mystérieuse chevalière que j'ai découverte quelques heures plus tôt ? J'essaie de me reprendre. Ils ne doivent pas savoir que je possède la bague. Du moins pas de suite. Il faut encore que j'en apprenne un peu plus sur leurs intentions, et ce qu'ils pourraient m'apporter. Non pas que je veuille me servir deux, mais pour retrouver ma mère, je vais avoir besoin daide, et ils me paraissent assez instruits sur la question du pont. En plus de cela, ce n'est pas comme si j'avais l'embarras du choix en terme de coéquipiers potentiels.
- Et alors? encouragé-je Elie à poursuivre.
- Alors, répond à sa place Adrian, Elie avait pour mission de retrouver la bague, mais elle est revenue avec toi à la place.
Les bras croisés, il renvoie une image froide et peu rassurante. Une soudaine envie de sortir de cette maison me prend, comme si je devenais claustrophobe. Elie joue avec ses cheveux, elle parait plus stressée qu'elle ne devrait être. J'ai l'impression d'être paranoïaque, mais en même temps pas assez prudente. Pour l'instant, mes deux interlocuteurs n'ont pourtant pas fait preuve d'une quelconque mauvaise intention à mon égard. Mais ils sont hors la loi. Pire encore: ils communiquent avec des Téllisiens. Allez savoir comment.
- Je suis donc supposée vous faire confiance, commencé-je, alors que vous êtes des hors-la-loi, vous vous baladez le soir après le couvre-feu et vous communiquez avec des Téllisiens? Par Rorin, ça n'a aucun sens!
Les deux Reckless se regardent, hochent la tête de concert et Adrian se lève en nous indiquant de faire de même.
- Viens, on va te montrer quelque chose, m'annonce-t-il.
Il avance devant Elie et moi, qui le suivons de près. La tension que je sens monter au fond de moi s'accentue petit à petit, tandis que différents scénarios s'échafaudent dans ma tête. Et s'ils me séquestraient ? Je me tourne vers la porte. Je ne la vois plus. Nous en sommes trop loin. Si jamais j'en ai besoin, je ne pourrai pas m'échapper. Je reporte mon regard sur l'endroit où je me trouve, essayant de gérer mon angoisse. Nous traversons un couloir rempli de photos, sûrement des portraits de famille, et nous arrivons devant une porte entrouverte. Adrian l'ouvre et, devant cette immense pièce, mes yeux s'exorbitent. Partout, des papiers sont recoupés, des noms sont marqués, des photos sont punaisées aux murs, des faits dans le journal sont encadrés... Je reconnais une tête ou deux, comme celle de Basileus, avec ses yeux vairons si reconnaissables. D'autres noms me marquent, comme celui d'Ephialtès. Il me semble qu'il est un homme politique Téllisien plutôt connu là-bas. Le diable incarné d'après nos hommes politiques à nous. J'ai l'impression de nager en plein délire. Sur le mur du fond, celui qui se trouve en face de nous, une immense carte est placardée. Elle représente le territoire de Réliah, mais pas que. Il y a aussi le pont, et ce que je devine être la ville de Téllisia. Je n'en avais jamais vu de plan auparavant. Elle ressemble un peu à la continuité de Réliah. Le même schéma de rues en étoile, la même fontaine proche du pont Comme si, autrefois, il s'agissait d'une seule et unique grande ville, qui avait été coupée en deux.
Au centre de la pièce, posée sur une table haute d'environ cinq centimètre de côté et protégée par une vitrine, se trouve une autre chevalière, semblable à celle que je possède, sur laquelle est gravé cette fois le visage d'un homme. Il me parait familier, mais je n'arrive pas à replacer un nom sur ce visage. Je suis pourtant sûre et certaine d'avoir déjà vu certains de ses traits.
Adrian et Elie s'approchent de la bague et viennent se placer à côté de moi.
- Connais-tu Torin, Isa? me demande la jeune femme en replaçant ses courts cheveux bleus derrière son oreille.
- Non Je n'en ai jamais entendu parler, réponds-je sincèrement, Par contre, je connais bien évidemment Rorin.
Elle hoche la tête avec un air entendu, comme si javais trouvé une bonne réponse à sa question. Adrian sort la bague de sa vitrine, et me la plante sous le nez. Les yeux pleins d'audacité de l'homme gravé me font face, ainsi que son nez droit et ses sourcils épais et froncés. Maintenant que j'en ai parlé, je devine peu à peu à qui me faisait penser ce personnage. La ressemblance est si frappante à présent que je pourrais croire que ce petit portrait me la crie à l'oreille de toutes ses forces. Il est le sosie, à quelques détails près, de Rorin. Le légendaire dirigeant de Réliah, mort il y a un siècle, dont chaque enfant apprend l'histoire à l'école.
- Et bien, reprend Elie, voici Torin. C'est normal que tu ne le connaisses pas: c'est un Téllisien. Mais pas n'importe lequel. Il est le légendaire dirigeant de Téllisia. Si tu veux tout savoir, c'est même lui qui a construit la ville, tout comme Rorin a construit Réliah.
J'observe encore un peu les traits du visage de ce Torin sur la bague. Il ressemble énormément à son équivalent Rélien. Un peu trop même. Elie et son frère me regardent réfléchir. J'ai comme l'impression qu'ils attendent quelque chose de moi. Je me creuse l'esprit pour trouver une réflexion intelligente, et me force à ne pas bouger. Dans ces moments-là, jai tendance à regarder partout autour de moi, ce qui trahi totalement mon malaise.
Soudainement, un petit quelque chose fait tilt dans mon cerveau. Ma bouche s'ouvre en grand, et je me demande si ce à quoi je pense est bien la vérité. Je jette un dernier regard au visage, et toute trace de doute s'évapore. Je sais que j'ai raison. Comment ai-je pu mettre autant de temps à comprendre ce qu'ils voulaient m'expliquer? Je relève brusquement la tête vers mes deux compagnons, et je lis dans leurs yeux qu'ils savent que j'ai trouvé.
- Ils étaient de la même famille.
- Perspicace! se moque Elie en replaçant la bague.
- Encore mieux: ils étaient frères, finit par m'annoncer Adrian avec un sourire en coin.
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Salut!
Je vous ai manqué? Je publie un peu ce chapitre à la va vite, et je galère pour écrire parce que comme j'ai eu la merveilleuse idée de mettre mon portable en anglais, ba le clavier est plus le même! (#galérienneunjourgalériennetoujours)
Enfin bref, j'espère que le chapitre vous a plu, et je suis désolée d'avoir mis autant de temps pour le publier!
- Que pensez-vous de Rorin et Torin?
Voilà! Bises! (Ps: pour ceux qui ont eu leur bac, j'espère que ça c'est bien passé! Et ceux qui ont leur brevet, BONNE CHAANCE!)
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