Chapitre 3
Le contexte change énormément notre façon de voir les choses. Il décide de si nous devons rire ou bien pleurer, si le temps est beau ou mauvais, si nous devons être heureux ou tristes...
Il y a à peine dix minutes, je me sentais pleine de joie, libre et enivrée par l'immensité et le vide de ma ville déserte. Ma mère était censée être à la maison, je n'avais aucun soucis à me faire. Mais elle n'y était pas. Et maintenant, je me retrouve à avancer dans le noir presque complet de la nuit, seule et effrayée. Effrayée de ce qu'il pourrait arriver à ma génitrice. Effrayée d'enfreindre cette loi qui nous interdit d'être dehors à cette heure-ci. Effrayée de ce que ma mère pourrait subir parce que JE suis trop curieuse. Effrayée de ne pas être aussi courageuse que ce que je prétendais être.
Je rebrousse chemin et emprunte le même passage qu'il y a quelques minutes, regardant partout autour de moi, à l'affut du moindre mouvement. La chevalière, qui se trouve dans ma poche, me semble lourde. Ce n'est pourtant que psychologique. Elle me rappelle juste que je ne sais où est ma mère, et qu'elle est peut-être en danger.
Au contraire de tout à l'heure, les rues me paraissent sinistres, dénuées de toute humanité et témoins de choses horribles, que personne ne saura jamais. Ma peau mate est glacée, tout comme mon coeur en ce moment. Glacée par la peur. Ce n'est peut-être pas la meilleure métaphore, mais c'est comme cela que je le ressens. Seul le bruit du vent se fait entendre, et je me demande s'il n'essaie pas de me mettre en garde. Me mettre en garde contre le fait de rester dehors après le couvre-feu.
Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours voulu savoir. Savoir ce qu'il se passait réellement les soirs d'Echange, savoir si les rumeurs étaient vraies. Pourtant, maintenant que j'en ai l'occasion, toute forme de courage et de curiosité s'est envolée. C'est la crainte qui a pris possession de moi. Elle me pousse à frissonner alors que la température est plus qu'agréable, à avoir peur du bruit que produisent mes pieds qui marchent sur le sol, à sursauter à chaque fois que mes cheveux frôlent mon cou...
Et surtout, maintenant que je sais que ma mère est livrée à elle-même, je ne peux m'empêcher de me faire peur en spéculant moi-même sur ce qu'il se passe lors de l'échange. Car normalement, il s'agit du moment où le pont est ouvert, quinze minutes après le couvre-feu. Des échanges commerciaux se font à cette occasion entre les deux villes rivales, et une cinquantaine de gardes sont requis de chaque côté afin de s'assurer que tout est dans les règles. La circulation n'est pas libre d'accès. Les marchands qui viennent de Téllisia traverse le pont, donne les produits aux gardes de Réliah et repartent, et de même dans l'autre sens. Une fois que c'est fini, le pont se referme, et il est impossible d'aller à Tellisia. Enfin, il s'agit de la version officielle des faits. Mais est-ce seulement la vérité?
J'arrive sur la place centrale de Réliah, et me colle au mur de l'aéroposte. Les voitures volantes en forme d'oiseaux sont rangée dans ce bâtiment, car c'est ici que les taxis-man commencent leur service. Je longe le mur et arrive devant la Boulanrélienne. Cette boulangerie est la principale de Réliah.
Soudain, j'entends des bruits de pas, et des voix bourrues discutant sans gêne. Je me précipite discrètement dans une rue adjacente, et écoute la conversation avec intérêt.
- Mais dis-moi, Hector! rit une des personnes, T'étais pas supposé au pont aujourd'hui? Que fais-tu là?
Je place immédiatement ma main devant ma bouche, et bloque ma respiration sans même m'en rendre compte. Ce sont des gardes. Ce sont des gardes! Je m'accroupis, afin de prendre encore moins de place, et continue de tendre l'oreille, alors que leurs pas se rapprochent petit à petit de ma cachette. Puisse la chance être avec moi et qu'ils ne me découvrent pas!
- Le chef nous a dit de patrouiller avec votre équipe, apparemment une jeune femme traîne dans les rues! répond le dénommé Hector.
Comment sont-ils au courant que je ne suis pas chez moi? La jeune femme en question n'est certainement pas ma mère, elle a une quarantaine d'années. Il s'agit forcément de ma petite personne. Les voix des deux vigiles se rapprochent encore, toujours plus près tandis que ma peur grandit à la vitesse de la lumière. Comment vais-je m'en sortir?
Soudainement, des pieds apparaissent au coin de la rue, suivis par deux hommes qui sont sans aucun doute les gardes. Ils ne m'ont pas encore aperçue, mes vêtements entièrement noirs me camouflant. Il faut trouver une solution. Maintenant. Mes yeux fouillent de tous les côtés, cherchant un échappatoire, et mon coeur bat à un rythme si irrégulier que j'ai peur qu'il ne lâche. Quand je réalise que la rue se finit en cul de sac, mon sang se glace dans mes veines. Je ne pourrai pas m'échapper. À moins de courir vers les gardes et espérer qu'ils soient trop surpris pour m'attraper.
Alors que je me préparais à détaler, je me sens tomber en arrière, tirée par une force qui me prend au dépourvu. En moins d'une minute, je me retrouve dans une pièce sombre. La rue a disparu, les gardes se sont volatilisés et ma peur augmente creshendo. Que s'est-il passé? Où suis-je? Par pure mesure de protection, je ne fais pas un bruit, et me fais toute petite. J'observe les lieux, mes yeux s'étant habitués à l'obscurité.
Des boîtes en bois s'entassent dans un coin à ma gauche, et à ma droite se trouvent les voitures volantes. Je suis dans l'aéroposte. Je me retourne d'un coup sec vers l'endroit d'où je suis censée venir alors que mes sourcils se froncent d'incompréhension. Là, je trouve la réponse à la question "Que s'est-il passé?". Au bas du mur, un long rideau noir est dressé, donnant l'accès à la rue de façon masquée. D'ici, on peut voir la supercherie, mais il est impossible de s'en rendre compte depuis la rue. Et à ses côtés se trouve, assise en tailleur, une jeune femme aux cheveux bleus, habillées dans les mêmes tons que moi. Ses yeux brillent d'intelligence et elle m'examine de loin. La surprise s'affichant sur mon visage lui arrache un sourire moqueur.
- Que... Qui es-tu? demandé-je du bout des lèvres, encore éberluée.
Elle reprend un visage sérieux et me scrute, avant de répondre après un long silence.
- Je suis ton père.
Mes yeux s'écarquillent en de grandes soucoupes et ma bouche s'ouvre toute seule. Est-elle en train de se moquer de moi? Il faut croire que oui. Elle rit silencieusement et montre du doigt mon visage.
- T'aurais du voir ta tête, plaisante-t-elle en chuchotant, Ça va me regarde pas comme ça! C'était une blague!
Je ne prends pas la peine de répondre et observe cette fille d'à peu près mon âge, me demandant sur quel genre de personne je suis tombée. Comment trouve-t-elle le courage de rire alors que je suis terrifiée?
- Qui es-tu? persisté-je.
Elle arrête de rire et souffle un bon coup, après être venue s'asseoir en face de moi.
- Je m'appelle Élie. Ces foutus gardes sont à ma recherche. J'allais sortir de l'aéroposte par la brèche quand j'ai senti qu'il y avait quelqu'un devant. J'ai aussi entendu les voix des gardes et je t'ai tirée à l'intérieur pour que tu ne te fasses pas attraper, m'annonce-t-elle d'une traite.
- Mais... articulé-je difficilement, Que faisais-tu... dehors?
Le regard malicieux d'Élie se plante sur moi une fois de plus, et le mystère que j'y décrypte m'angoisse autant qu'il me grise.
~~~
Oyez oyez!
Je suis de retour avec le chapitre 3!
Élie et Isa vous remercient d'avoir lu!
- Que pensez vous d'Élie?
-D'apres vous, que fait-elle dehors après le couvre feu?
-Ce chapitre a-t-il su vous plaire? (Formulation un peu bizarre je sais, mais bon ça sort de l'ordinaire!)
N'hésitez pas, une fois de plus, à me dire dans les commentaires ce que vous en pensez, et à voter si vous avez aimé!
Sur ce, à très bientôt!
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