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Chapitre 57

— Arrête, Luffy !

Après le départ du chevalier, Luffy avait recommencé à se débattre. Malgré l'emprise du granit marin, il arrivait à se mouvoir un peu, ce qui lui donnait des airs de petit ver qui convulsait. Puisqu'il était près des barreaux, il tentait de distribuer des coups de pied dessus comme il le pouvait. Le choc de ses tongs contre le fer de la prison résonnait, tambour fou, à intervalles réguliers.

Voir Luffy dans cet état attristait Nami. Elle n'aimait pas que son capitaine soit ainsi. Prisonnier. Pris au piège. Impuissant. Il fallait dire que la situation n'était pas bonne. On les avait emprisonnés dans un château plein de gardes. S'ils étaient plusieurs à avoir le niveau de leur geôlier... Le combat risquait de se compliquer. Ils allaient être retardés.

Elle eut une pensée pour Kinemon et les autres. Ils n'avaient probablement pas encore atteint Zou. Enfin, elle n'en savait rien. Où se trouvait cette île ? D'après ce qu'elle avait entendu dire, on ne la trouvait que grâce à une Vivre Card. Autant dire que ça ne semblait pas être la destination de rêve ! Plutôt une chasse au trésor... Elle pouvait être n'importe où, cette fichue île ! Le groupe de Kinemon pouvait très bien être en danger. Il pouvait lui arriver n'importe quoi. En quelque temps, ils avaient intégré le groupe. Nami ressentait beaucoup de tendresse pour Momonosuke, même si ce gamin partageait les mêmes désirs que Sanji... C'était un enfant, et il n'avait rien à voir avec le talentueux cuisinier.

D'ailleurs, comment cela se passait-il pour lui ? Lui manquait-elle ? Attendait-il le retour de celui qu'il surnommait avec amour sa princesse des océans ? Son estomac dansa dans son ventre, le parfum épicé de ses plats se rappelant à son esprit. Elle se promit de lui demander son meilleur plat à son retour. En attendant, elle ne devait pas se détourner de leur situation. Trouver une solution. S'échapper. Rejoindre les autres. Rejoindre Sanji. Sauver l'île et partir. Maintenant qu'ils étaient coincés ici, il valait mieux résoudre les problèmes de ce peuple, non ? Elle doutait de toute façon que Luffy veuille s'éclipser sans rien faire. Elle jeta un regard aux alentours.

Les jardins grouillaient de vie. Le vert des plantes les encerclait, tacheté de couleurs. Le piaillement des bestioles répondait au bruit des ailes des papillons et autres insectes volants. Des buissons et des fleurs larges comme deux hommes s'étendaient fièrement, les pétales vers les cieux, desquelles se dégageait un parfum d'été. L'odeur des fruits se mêlait à celle du printemps fleuri, rappelant les orangers et les paysages de l'enfance. Pour peu, Nami se serait laissée bercer par l'ivresse de son odorat.

C'était sans compter sur le rappel de sa conscience. Cet endroit était une prison. Une prison luxuriante. Une question lui brûla les lèvres : pourquoi ? Pourquoi les avait-on enfermés ici ? D'ordinaire, les geôles n'avaient pas des airs de promenades de luxe. Les ombres entouraient les prisons, ne laissant passer que les tentacules du désespoir et de l'attente insensée. Alors pourquoi ? Pourquoi les faisait-on languir ainsi ? N'était-ce pas trop beau pour des pirates ?

La première chose qui lui vint à l'esprit était que cette île se peuplait de gens bien trop sûrs de leur force et de leur système de sécurité. Peut-être les sous-estimaient-ils ? C'était pourtant peu probable. Le nom de Luffy courait les océans depuis plusieurs années. Impossible qu'ils ne le connaissent pas. D'autant plus qu'ils l'avaient bien identifié ! Non, elle écarta cette hypothèse. S'ils savaient qui était Luffy, alors la dernière chose à faire serait de les prendre à la légère. Non pas qu'ils se trouvaient particulièrement dangereux, mais en Nami dormait l'intime conviction que rien ne pouvait les arrêter.

Elle pensa ensuite qu'ils cachaient peut-être quelque chose. Quelqu'un de plus fort que Yvan ? Une nouvelle menace ? Une arme secrète ? Plus elle y songeait et plus les possibilités se multipliaient. Dans ce cas, pourquoi ne pas avoir utilisé leur arme tout de suite ? Pourquoi attendre ? Une possibilité terrifiante hanta l'esprit de la navigatrice. Ils avaient besoin d'eux vivants. Mais pourquoi faire ? Pour les échanger contre quelque chose ? L'île semblait souffrir d'une situation politique catastrophique, d'après les dires de Charlie, et le regard mélancolique du chevalier ne trompait personne. Il s'était passé quelque chose de grave, et leur arrivée n'avait fait qu'ajouter plus de chaos à tout ce chaos.

Pourtant, leur réaction vis-à-vis d'eux avait quelque chose d'étrange... Comme s'ils ne réagissaient pas de la même manière que tous les royaumes dans lesquels ils ont débarqué... Nami songea ensuite qu'ils prévoyaient peut-être quelque chose. Quoi donc ? Une possibilité farfelue lui vint en tête ; et s'ils étaient destinés à croupir là durant un certain temps ? Yvan avait parlé d'une réunion au sommet... Et si... Si leur souhait était que cette réunion se passe au mieux ? Nami n'était pas née de la dernière pluie. Le gouvernement de l'île y accordait un grand intérêt. Il n'y avait qu'à entendre Yvan ! Charlie semblait d'ailleurs en savoir plus que ce qu'il avait pu leur dire au début. Agneau devenu loup déchaîné, il avait lancé ses regards les plus sombres et ses mots les plus tranchants face au geôlier. Nami ne doutait pas que ça devait le toucher personnellement... Elle aurait bien eu envie de lui poser des questions, mais la priorité n'était pas là.

En fait, elle en voyait deux : premièrement, ils devaient sortir de là. Ils devaient s'extirper de cette prison et partir du château au plus vite. Et enfin, retrouver Balor. Il n'était pas avec eux, signe que les gardes l'avaient enfermé ailleurs. Ils en avaient fait un prisonnier spécial. Allaient-ils en faire un exemple ? Le tuer ? Le temps courait, et eux, ils restaient immobiles. D'après leur geôlier, Balor avait accompli des méfaits et des crimes. Ses paroles, vagues, n'abreuvaient pas plus les curieux en explications. Nami et les autres, toujours dans le flou, n'avaient aucune idée de ce qui avait eu lieu.

Non loin d'elle, Luffy continuait de distribuer des coups de pied aléatoirement. Parfois, il heurtait les barreaux de la cellule, parfois le vide. Loin de s'épuiser, les assauts féroces redoublaient à mesure que sa frustration gonflait comme un volcan prêt à entrer en éruption. Pourtant, il n'obtenait aucun résultat. Les barreaux ne bougeaient pas d'un millimètre. Après plusieurs minutes d'acharnement, Luffy tenta une toute nouvelle stratégie, qui, assurément, fonctionnerait aussi bien que la première : utiliser une autre partie de son corps pour heurter les barreaux. Puisque les chaînes le restreignaient, il devait se passer de ses poings, et ses tentatives avec ses genoux et ses épaules n'étaient pas plus fructueuses. Ses gesticulations restaient sans effet.

— Arrête, Mugiwara.

Luffy frappa une nouvelle fois l'un des barreaux, puis il s'arrêta. Charlie avait parlé d'une voix claire, prononçant ces quelques petits mots à travers l'autre geôle, à quelques mètres de là. Il avait dû élever le ton pour se faire entendre en raison de la distance qui les séparait.

— C'est inutile. Les barreaux sont beaucoup trop solides...

Nami n'entendait pas très bien ce qu'il disait. Charlie dut s'en rendre compte, parce qu'il s'arrêta un instant et regarda les murs. Enfermé avec Usopp et Chopper, il scruta ce qui l'entourait. Les parois de la geôle... Elles étaient collées à celles de la geôle de Nami et Luffy.

— Long-nez !

— Quoi ? demanda Usopp, suspicieux.

— Vois-tu ce mur ?

— Bah ouais, je le vois...

— Vois-tu la fissure ?

Usopp regarda un peu plus attentivement ce que Charlie désignait du menton. Une fissure lézardait l'un des murs, celui à l'opposé d'où se trouvait les trois prisonniers. Usopp acquiesça d'un petit bruit de gorge.

— Ton arme, peut-elle créer une ouverture ?

— Bien sûr ! Tu demandes au grand Usopp s'il peut percer un simple mur ? Mais mon arme pourrait percer une forêt entière !

— Qu'est-ce que tu comptes faire ? demanda Chopper.

— Alors essaie de creuser un petit trou dedans. Cela pourra nous aider à communiquer, ajouta-t-il en regardant Chopper.

Usopp se mit au travail. Il attrapa son arme avec difficulté, puisqu'elle avait glissé lors de la riposte du chevalier, prit une de ses billes, banda son arc et lança son attaque. La petite bille fusa contre la fissure. Lors du choc, une explosion retentit. Heureusement, elle était localisée et les cailloux atterrirent au sol dans un bruissement caractéristique de poussière. Cela n'empêcha pas Nami de pousser un cri de surprise, elle qui ne s'y attendait pas. Luffy, lui, avait l'air surpris mais continua de frapper le barreau.

— Mugiwara ! Je t'ai dit que c'est inutile. Cette cellule... Les barreaux sont extrêmement solides. Il y a du granit marin, mais pas seulement, c'est aussi un alliage de métaux spéciaux...

— M'en fous !

— Et que comptes-tu faire sinon t'épuiser ? Tu vas juste finir par perdre tes forces !

— Et alors ?! répliqua Luffy avec hargne, le tout en distribuant un nouveau coup de pied sur l'un des barreaux.

— On risque d'alerter des gardes en plus, non ? s'inquiéta Chopper.

Charlie grinça des dents. La situation était catastrophique. Absolument désastreuse. Chaque seconde qu'ils perdaient, chaque minute qui s'écoulait sans agir... Tout cela les rapprochait d'un chaos sans précédent. Un point de non-retour. Plus il y pensait, plus ça le rendait malade. Il devait bouger. Maintenant. Les pensées embrumées par l'épuisement provoqué par le granit marin, il luttait pour rassembler ses idées. Il devait se concentrer sur l'essentiel. Son objectif. Sa quête.

— Non. Les jardins sont... excentrés. Du reste, dit Charlie, la journée d'aujourd'hui accapare toute leur attention. Même s'il y a un garde, ils n'enverront pas un chevalier comme Yvan.

— Mais qu'est-ce que c'est, cette réunion dont tu parles depuis tout à l'heure ?

Les yeux bleus de Charlie plongèrent vers Nami. L'océan qui dansait à l'intérieur n'avait rien des plates étendues d'East Blue. On y lisait une insondable émotion. Puis il détourna le regard, poussant un soupir résigné.

— Chaque année, notre bon royaume organise une réunion au sommet. C'est l'occasion de renouveler les politiques internes et externes du pays. Le roi se rassemble avec ses plus fidèles conseillers, mais cette réunion est également l'occasion d'organiser des... alliances avec d'autres royaumes.

— Des alliances ?

— Oui. Le royaume de Pastaland, Glass Cup, le royaume de Brambles, même celui de Vodka... Notre terre a noué beaucoup de liens par le passé, certains ont tenu, d'autres non. Le Sommet est une occasion de discuter la politique externe.

— Mais vous ne pouvez pas faire ça dans les réunions officielles du gouvernement ?

Charlie nia d'un signe de tête.

— Notre royaume n'est pas affilié au gouvernement mondial. Enfin... Pas encore.

— C'est pour ça qu'il n'y avait pas de soldats de la marine ! comprit Usopp. Je trouvais ça bizarre.

— Mais les pays non-affiliés au gouvernement sont connus pour leur... chaos.

Un rire qui transpirait le mépris secoua les épaules du poète. Une moue d'agacement se dessina sur le visage de la rousse. Qu'est-ce qu'il pouvait être agaçant quand il faisait ça !

— S'il y a bien une chose que nous devons apprendre dans la vie, c'est de nous méfier. Revoir toujours l'information. Surtout quand la corruption est partout. Notre île n'est pas en proie au chaos mais ne te fie pas aux apparences...

Charlie baissa la tête. Les épaules affaissées par un poids invisible, tout le monde semblait s'écrouler sur son corps. Il serra la mâchoire si fort qu'une veine pulsa contre son front.

— Qu'est-ce que tu veux dire par là ?

— Que les temps sont bien sombres ! Voilà ce que je dis ! Le royaume... n'est pas aussi accueillant qu'on veut bien le faire croire.

Le poète marqua une pause. Lui qui aimait chanter les louanges d'une nature parfaite, lui qui passait son temps à abreuver de mots quiconque voulait bien l'entendre ou le lire, voilà qu'il était réduit au silence le plus absolu, le plus douloureux. Un silence long comme l'agonie de cent hommes. Voilà à quoi est réduite même l'âme poétesse en des temps de chaos.

Les Mugiwara le regardèrent avec sérieux, tout aussi silencieux que lui. Ils n'avaient plus à côté d'eux leur guide, mais un homme, un citoyen, une âme perdue comme ils en avaient vu tant d'autres sur les îles qu'ils avaient visitées.

— Notre bon royaume... n'est qu'une imposture ! Le roi... n'est qu'un pantin !

¤¤¤¤¤¤¤

Le château d'Avalon était un lieu peu commun sur l'île.

Situé au milieu de la capitale, il surplombait la ville de ses hautes tours improbables. D'un gris-blanc de marbre noble, il resplendissait au milieu d'une ville colorée. On dit qu'il abritait la famille royale d'Edens Shield depuis plus de cinq cents ans. Une façade immobile, immuable, dont l'accès faisait rêver les âmes enfantines. Il ne respirait pourtant ni le luxe, ni l'opulence, mais une simplicité singulière, une nature d'une pureté improbable.

— Vous avez tout vérifié ? La table doit être parfaite ! Les rideaux ont-ils été changés ? Le lustre poli ? Les chaises ? Le tapis ? L'apparence a son importance !

— Oui ! On s'occupe de tout, ne vous en faites pas !

Les instructions pleuvaient et volaient dans le château. Par une petite fenêtre s'échappaient les éclats de voix de dernière minute, celles de la précipitation, du chaos, de l'indécision et du désir de perfection. Elles venaient d'une grande pièce, qui ressemblait à une chambre royale. Comme toutes les chambres royales, cette chambre était ornée de luxe et parée de belles choses. Pourtant, elle humait la modestie des petits royaumes excentrés, ceux qui ne voulaient pas imiter le royaume absurde qui se tenait au sommet de Red Line. Une tapisserie émeraude recouvrait le sol, contrastant avec la blancheur des murs et des rideaux. Une fenêtre offrait une vue parfaite sur la capitale et le ciel bleu qui, au loin, s'étreignaient comme deux amis en pleines retrouvailles. En un mot comme en cent, cette chambre royale ne ressemblait à rien de plus qu'à une autre chambre royale.

Une personne regardait vers l'horizon comme un oiseau en cage. Un soupir passa ses lèvres alors qu'elle était accompagnée d'une autre personne — le beau petit tableau bien rangé d'une princesse encombrée de servant. Cette princesse aurait pu être confondue avec n'importe quelle princesse ; une stature altière, la jeunesse irradiant de sa peau lisse, ses cheveux parfaitement arrangés en une tresse guerrière. Apprêtée d'une robe aussi ordinaire que n'importe quelle robe royale, la seule chose qui la différenciait, en dehors de cette coupe de cheveux, n'était peut-être rien d'autre que ses yeux. Elle avait volé tout le vert des forêts, toute la menthe des plantes, tout l'émeraude des sols pour en recouvrir ses Iris. C'était d'ailleurs pour cela que son père le Roi l'avait nommée ainsi : Iris, Princesse du Royaume d'Eden.

— Princesse, n'oubliez pas votre diadème cette fois-ci, lança la servante en lui tendant l'objet brillant.

Iris poussa un petit soupir et regarda longuement l'objet.

— Est-ce vraiment obligé ?

— Sa Majesté votre Père souhaite que vous le portiez. Il appartenait à...

— Je sais.

La princesse le savait mieux que quiconque ; ce diadème, il ne lui appartenait pas, mais venait de sa mère. Sa mère dont elle n'avait qu'un souvenir aussi lointain que clair.

— Ne faites pas cette tête, Princesse. Votre mère ne souhaiterait pas vous voir emplie de tristesse.

— La tristesse fait partie du charme de tous les humains, répondit Iris, laconique.

— Vous avez raison, mais cette journée est spéciale.

L'éclat du regard d'Iris vacilla un instant. Elle en avait bien conscience. Au loin, les oiseaux chantaient, signe d'une belle journée. Leur conversation perdura quelques instants avant qu'elles ne soient cueillies par le vent. La brise délaissa dans le cœur de la jeune femme — qui ne devait pas avoir plus de dix-huit ans — un brin de mélancolie propres aux âmes qui observent le monde depuis les hauteurs.

— J'en suis bien consciente. Le Sommet est une journée clé pour le royaume. Je dois être à la hauteur.

— Si je puis me permettre, reprit la servante, vous pouvez avoir vos faiblesses, Princesse. Mais il faut juste faire ce qu'il faut faire. Ça ne vous enlève pas votre condition humaine.

Iris considéra les paroles de sa servante. Cette dernière ne devait pas être son aînée de plus de cinq ans. Elle était rentrée au château il y a peu, d'abord pour faire le service, puis avait accompagné la Princesse. Voilà maintenant quatre ans qu'elles se connaissaient et leur lien n'avait fait que se renforcer.

— Je sais, Kathos, souffla Iris. J'ai juste du mal...

Kathos s'arrêta un instant de refaire les plis de la robe d'Iris et croisa le regard de la Princesse. Elle attrapa doucement sa main. Le contact des doigts chauds de la jeune prolétaire soutira un frisson inconnu sur la peau de la fille du roi.

— C'est pour ça que je suis là, Princesse. Ne craignez rien. Pas même d'être vous-même. Mais ne laissez pas la tristesse vous dominer...

— Dominez votre tristesse, récita Iris, toujours aussi laconique.

Le visage de Kathos se para d'un sourire amical. Elle lâcha la main d'Iris tout en essayant de cacher ses joues roses comme un jardin printanier en se détournant.

— Puis si vous arrivez avec cette mine, Berin-san risque de rouspéter.

Cette remarque arracha un rire à Iris. Belin, chargé de commander aux servants du château, était connu pour son caractère. Précis, ordonné, aux ordres du roi, Iris le connaissait comme une grande ombre protectrice, étendant ses tentacules partout dans les couloirs, les chambres et les grands salons pour que tout reste sous contrôle.

Kathos se releva ensuite, heureuse d'avoir aidé la princesse à se préparer. Iris admirait le diadème entre ses mains. Plus fin que la plupart de ceux qu'on pouvait trouver dans les autres royaumes, il brillait pourtant tout autant. Iris hésita un moment. Devait-elle le mettre ?

Elle croisa le regard de sa servante et amie, qui projetait toute son affection silencieuse dans sa direction comme la bénédiction d'une entité supérieure. Le contact froid de l'ornement la paralysait. Courage ! Il lui fallait bien surmonter cette première épreuve, si elle voulait suivre la route de son père. De sa famille. Si elle voulait protéger ce royaume, il lui fallait le faire. Pourtant, elle n'arrivait pas à le poser sur sa tête.

— Je ne sais pas...

— Il n'y a pourtant pas à hésiter, Princesse !

Iris et Kathos sursautèrent. Le diadème royal faillit tomber des mains de la princesse quand elle se retourna. A l'entrée de la pièce se tenait un grand homme. Large comme un boeuf, il projetait son ombre distordue sur le sol. Vêtu d'une tenue à la fois similaire et différente de celle de Kathos, on sentait bien toute la patte du peuple dans ses habits. Bottes, pantalon à la mode des servants, un haut laissant une partie de ses pectoraux à l'air libre, laissant à tous le soin d'admirer la sculpture musculaire de son torse. Mais la caractéristique principale de la tenue de cet homme venait de ses gigantesques brassards recouvrant non pas seulement ses poignets mais aussi une partie de ses avant-bras.

Quand on croisait son regard, aucun mot ne venait vraiment en tête sinon l'image insondable des abysses. De tous petits yeux — tout de même humains et non pas deux petites billes comme on pouvait en retrouver chez certains individus — marquaient son visage sévère. L'automne y reposait. Un marron flamboyant scintillait dans ses pupilles. Deux cicatrices couraient sur son visage, l'une barrant son front dégarni, l'autre, courant d'un bout à l'autre de sa joue gauche jusqu'au niveau de ses yeux. On devinait, à l'apercevoir, que les tragédies de la vie l'avaient heurté comme les boulets de canon heurtent les navires. Ses cheveux, partis depuis longtemps en cavale, avaient abandonné son crâne chauve.

— Chef ! s'exclama Kathos.

— Kathos ! Tu es trop indulgente ! Il faut que tu accomplisses ta tâche jusqu'au bout.

Sans perdre une seconde, le chef du service s'avança vers les deux jeunes filles. Il planta son regard dans celui de la servante. Kathos baissa un menton honteux face aux durs reproches de son supérieur hiérarchique. Il se tourna ensuite vers Iris et suspendit ses lèvres dans une hésitation éphémère. Il courba légèrement sa tête vers l'avant en un signe de salut dont seul lui avait le secret ; assez bas pour être visible, assez haut pour ne perdre aucune dignité face à une position sociale plus élevée.

— Berin-san, salua-t-elle en retour. Ne soyez pas trop dur avec Kathos, c'est ma décision.

— Princesse, lança-t-il d'une voix d'abord teintée de respect, avant de reprendre, plus grave. Vous devez porter ce diadème. Son importance est capitale. Que croyez-vous qu'il symbolise ?

Bien évidemment, la question était rhétorique. Iris fronça des sourcils contrariés. S'il y en avait bien une qui savait précisément ce que cela signifiait, n'était-elle pas cette personne ? Pourtant, il y avait dans l'interrogation de Berin quelque chose d'autre, d'indéfinissable, un rien constellé de sagesse.

— Ce diadème, ce n'est rien d'autre que ce qui vous permet de rester dans le présent. Votre place dans ce château et dans ce monde peut tenir à un objet.

— Sans ce diadème, je reste la princesse de ce royaume, pourtant... Il est bien plus qu'un simple objet royal, c'était celui de ma mère.

— Oui. C'est un symbole royal qui appartenait à votre mère. C'est un objet qui fait partie de vous. Votre costume de princesse en a besoin. Sans ça, vous êtes peut-être une princesse, mais est-ce que le monde vous verra comme telle ? C'est votre devoir de le porter.

— Berin-san...

Kathos, spectatrice de cette leçon de morale, jeta un regard implorant en direction du chef des servants. Berin lui renvoya une œillade égale. Ce n'était pas à elle de s'immiscer dans leur conversation, et elle était nécessaire au bon déroulement des choses. Il fallait qu'elle l'accepte.

Loin de se démonter, Iris tint tête à son interlocuteur :

— Il implique plus que ce que vous croyez, Berin. Je... Je n'en suis que trop consciente.

— En avoir conscience ne fait pas tout. C'est toute une responsabilité.

— Et si je n'étais pas à la hauteur ?

— Iris-hime.

Le ton tranchant de l'homme imposa un temps de silence. Kathos sentit son coeur rater un battement. Berin, tout homme de sagesse qu'il soit, se permettait tant de familiarité avec la princesse ! Malgré le nombre d'années qu'elles se connaissaient, malgré qu'elles passaient le plus clair de leur temps ensemble puisque Kathos aidait quotidiennement Iris, malgré les prémices d'une complicité qui bourgeonnait... Elle ne se permettait pas d'interpeller Iris avec un ton si insolent... si frondeur !

— Savez-vous ce qu'il reste à un homme quand le doute broie son âme ?

Iris déglutit avec difficulté. L'emphase qu'avait mis Berin sur sa question méritait une réponse. Pourtant, rien ne venait. Et à en juger par son air égal, tout comme la profondeur de son regard, Berin le savait bien.

— Le devoir, répondit-il à la place de la princesse. Le devoir est le seul chemin qu'il lui reste et qu'il peut suivre aveuglément. Et cela, pour le meilleur ou pour le pire. Il se rattache à ce qu'il peut, et ce qu'il peut, c'est accomplir son devoir. Ce n'est seulement qu'une fois engagée sur ce chemin que vous penserez à ce qui fait de vous une personne capable de suivre la meilleure voie.

Berin ponctua sa tirade d'un petit sourire sincère. Ce n'était pas qu'une leçon de morale mais bien un encouragement déguisé. Iris le savait déjà, mais elle put mesurer à quel point le chef de ses servants éprouvait de l'affection et de la loyauté envers lui. Les murs racontaient que sa sévérité n'égalait que sa capacité à bien faire son travail. Ces quelques mots dévoilaient le coeur d'homme sous celui de travailleur.

— Merci, souffla-t-elle.

Pour le meilleur ou pour le pire, quelqu'un devait faire les choses.

— Ne me remerciez pas, répondit-il. La plus belle chose que vous puissiez m'offrir, Princesse, serait de suivre votre chemin jusqu'au bout la tête haute.

— J'essaierai.

Une flamme nouvelle, encore vacillante, s'alluma dans le regard de la princesse. Allait-elle réussir ? C'était une mission nouvelle. Une mission qui contrariait ses désirs profonds de liberté. Une mission qui la renvoyait aux abysses de son être. Mais une mission qui, toutefois, devait être accomplie la tête haute.

— C'est bien.

Berin scruta le reste de la chambre rapidement. Il se tourna vers Kathos :

— Si la princesse est prête, tu devrais aider les autres à la cuisine.

— O... Oui ! Bon courage, Princesse !

— Merci, Kathos ! Bon courage à toi aussi !

Kathos s'empressa de quitter les lieux après un dernier signe adressé à son amie. Berin, lui, ne la regarda pas partir. Il restait fixé sur la princesse.

— C'est bien. La santé de votre père n'est pas au beau fixe, malheureusement. La capitale sent bien le vacillement de Sa Majesté et...

— Mon père est solide, ne l'enterrez pas trop vite.

— Ce n'est pas mon intention. Je lui souhaite une longue vie. Mais il faut rester avisé. Et votre père ne pourra pas régner éternellement.

Iris raffermit sa prise sur le diadème, une prise pleine de ressentiment et d'amertume. Elle mesurait chaque jour combien la réalité se montrait cruelle et sans pitié. Les forces de son père s'amenuisaient, quand bien même il faisait tout pour montrer l'inverse. Il se tenait droit, il recevait les petites gens, affichait un air convivial sans délaisser son masque de roi, mais plus le temps passait et plus on le sentait ailleurs, plus son visage hagard se remarquait, plus sa voix prenait de temps à donner ses ordres.

— Vous serez la prochaine à vous asseoir au sommet. Et vous savez bien ce que cela implique.

Oui, elle le savait mieux que quiconque. Ces dernières années tumultueuses...

— Je ne me permettrai pas de vous l'expliquer, continua Berin. La politique est un domaine hors de ma portée. Mais vous, vous devrez en connaître tous les secrets.

— J'ai encore du temps. Je ferai de mon mieux.

— Moins que ce que vous pensez le croire, répliqua durement le serviteur.

Un soupir franchit ses lèvres. Le temps pressait. Le monde changeait à une vitesse folle, il bouillonnait, et des mers jaillissaient un millier de bulles de chaos. Le sang coulait dans les royaumes, les rois tournaient leurs têtes couronnées vers les sommets.

— La couronne peut tomber sur une tête bien plus vite qu'on ne le pense.

— Tu penses que mon père... ?

— Je n'en sais rien, Princesse. Je dis juste que vous devez être prête.

— A cause de... la tentative de révolution ?

A ce moment précis, les yeux de Berin semblaient aussi foudroyants qu'un orage du Nouveau Monde, aussi froids qu'une lame.

— Pas seulement. Le monde change. Je crains que les pirates ne se satisfassent de peu.

— Nous sommes prêts à nous battre, non ?

— Oui.

Mais étaient-ils capables de vaincre l'ennemi ?

Berin se retint de poser la question à Iris. L'important, c'était d'endosser son rôle jusqu'au bout.

— Mais trêve de bavardage. La réunion ne va pas tarder à commencer, nous devrions nous y rendre sans tarder.

— Oui, tu as raison, Berin-san.

Alors qu'il commençait à sortir de la chambre, Berin se retourna et offrit un dernier regard à la princesse. Iris tiqua. Dans ces pupilles dures comme la pierre, impitoyables, perçantes, coulait un rayon de soleil automnales, un de ces rayons qui passait au travers des arbres forestiers à l'orée de l'hiver, doux comme un feu de cheminée.

Berin ouvrit la bouche. Mais aussitôt, une force mystique la lui fit fermer sans qu'aucun son ne traverse ses lèvres. Puis il se retourna et avança, la princesse sur ses talons.

¤¤¤¤¤¤¤

Le regard tourné vers le ciel, Sanji poussa un soupir pensif. Par delà la fenêtre, l'horizon s'étendait dans un bleu tacheté de quelques nuages gris. Il l'avait remarqué ; mais plus la journée défilait, plus le ciel se grisait comme une toile sur laquelle on déposerait quelques coups de crayons à papier. Une envie de clope lui resserrait la gorge. Pourtant, il s'abstint d'en prendre une autre. En moins d'une journée, il s'était enfilé plus de nicotine que de raison, et il se disait qu'il devait se restreindre. Son paquet se vidait à vue d'oeil.

Il fallait dire que cette journée était particulièrement mouvementée. Plusieurs heures s'étaient écoulées depuis qu'ils avaient accosté sur l'île, en début de matinée. Après un premier passage au sein de la ville portuaire, dans laquelle ils avaient arpenté les marchés remplis d'étales aux parfums fruités et épicés, après avoir fait quelques emplettes, ils étaient retournés au navire, avec une île dans leur viseur : Zou. Mais c'était sans compter sur leur chance légendaire. Après tout, quelles étaient les probabilités pour que l'île sur laquelle ils venaient de tomber les impliquerait dans une nouvelle course ?

Nombreuses, certes, on ne pouvait que le reconnaître. Le monde se métamorphose de jour en jour. De bon matin, combien de fois avait-il aperçu le visage de sa douce dulcinée prendre des traits effarés à la lecture du journal ? Chaque première du World Economic News Paper pouvait bouleverser le monde. Et c'était encore pire depuis la bataille au sommet à Marineford, deux ans plus tôt. Sanji s'en rappelait bien. Les quelques mois qui ont suivi cet événement majeur... Si l'île sur laquelle il avait échoué transpirait les couleurs, le bonheur, la guimauve et la bienveillance, le visage de sa reine s'était crispé d'un sourire forcé. Le monde changeait, et Ivankov avait bien à faire. Il avait même surpris une conversation entre deux Okamas :

Elle est tendue, Ivankov-sama, en ce moment !

Il lui faut un peu de repos.

Tu n'y penses pas ! Notre Ivan-sama a beaucoup à faire... Je vais lui préparer un petit plat, ça va lui faire du bien.

Quand même, avait rétorqué l'autre. Rien ne va plus... Tout est en train de déraper.

Le monde est peut-être bouleversé, mais ça ne veut pas dire qu'on doit se morfondre ! Toujours avoir l'esprit positif, mon choupinou !

C'étaient peut-être les paroles les plus sensées qu'il avait entendues durant son entraînement. Et peut-être la leçon la plus importante que ces gens, aussi excentriques et loin de sa vision du monde, lui avait apportée. Rester positif. Se concentrer sur son objectif. Le monde changeait. Et alors ? Ils se tenaient prêts. Ils étaient eux-mêmes. Et ça suffisait.

Ce changement, cela dit, affectait le monde entier. L'onde de choc de la guerre au sommet avait ébranlé jusqu'aux fondations des royaumes les plus lointains ; tous les acteurs mondiaux avaient investi une partie de la scène. Les coulisses grondaient. La comédie se préparait. Les rouages se mettaient en branle. Deux ans ont passé depuis cette guerre. Deux ans de préparation. De plans mûrement réfléchis. Deux ans d'alliances, de trahisons, de conquêtes, d'observations, de mise en place, de changement des décors. Deux ans à refaire les costumes, à revoir ses répliques.

Puis était venu le temps de remonter sur scène.

Et maintenant, ils se trouvaient sur une île perdue du Nouveau Monde. Une île qu'ils avaient arpenté longuement, au point de se séparer pendant un long moment. Une île bien plus étrange que Sanji ne l'aurait pensé au premier abord. Elle ne semblait pourtant pas méchante ! Un port banal, un point de ravitaillement, de jolies plaines à perte de vue, des forêts, une magnifique crique, un banc de sable doré... Une ville charmante. Ils avaient rencontré leur guide, et il y avait cette histoire de poisson. Une bestiole de la taille d'une maison. C'était du moins ce que Sanji avait entendu de la bouche du poète au détour d'un chemin.

Les heures avaient défilé, les amenant jusqu'à ce village reculé. Le village d'Eryn, cette fillette intrépide aux prises avec un gigantesque sanglier. Au fil des lieues parcourues, Sanji avait doucement compris qu'il fallait s'attendre à tout ici. Et c'était encore plus vrai depuis l'arrivée de Naro. Ce... déchet humain qui s'était pointé pour menacer les villageois, puis Nami... Il ne le lui pardonnerait jamais. Comment osait-il ? Comment osait-il s'attaquer à son amour ? Comment osait-il seulement penser à poser ses sales pattes sur son amie ? Sa camarade ? Sa dulcinée ? Celle qui avait plus de piment que celui relevant ses plats ? Celle dont le regard coulait comme un sirop d'orange sur un dessert bien frais ? La colère qu'il avait ressentie lui sciait encore l'estomac. S'il lui mettait la main dessus, il ne manquerait pas de lui offrir une séance de chirurgie plastique à coups de pied. Un être aussi abject ne devrait pas avoir le droit de croiser son regard. Alors la menacer... ! Tout bonnement impensable ! Intolérable !

Mais Sanji le savait : il fallait se montrer patient. Il aurait bien l'occasion de lui régler son compte. C'était maintenant devenu une affaire personnelle. Ils ne le faisaient plus seulement pour le poisson. Il y avait des vies en jeu. Des gens à sauver. Un peuple à délivrer.

Sanji se passa une main dans les cheveux et écarta une mèche blonde rebelle. Si on lui avait dit qu'en prenant la mer un jour, il lutterait pour sortir les gens de la misère aux côtés d'autres gens qui étaient devenus, au fil des vagues et des remous, des êtres bien plus importants que sa propre famille... Non. C'était en lui, minuscule vaguelette à qui le vent offrait une danse suave. Il la sentait s'agiter, son intuition. S'il devait prendre la mer, c'était pour cette raison. Pour aider un gars perdu à réaliser son rêve. Luffy le méritait. Malgré toutes ses bêtises, malgré son comportement de gamin, malgré son inconscience. Face à Robin, il s'était mis le monde à dos. Il leur avait mis le monde à dos. Qu'est-ce qu'il serait prêt à faire d'autre ? Pour les autres ? Pour... lui ?

Un soupir franchit les lèvres du cuistot. Non, ce n'était définitivement pas le bon moment pour y penser. Ils y penseraient le moment venu. Il espérait seulement que ça n'arriverait pas trop tôt. Que tout irait bien. Et même si ce n'était pas le cas... Il ferait de son mieux pour les soutenir. Nami. Luffy. Il leur devait tant...

D'un clignement d'oeil, Sanji chassa ces pensées intruses. Il devait se concentrer sur autre chose. Quelque chose qui le préoccupait. Il grinça des dents. Vraiment, une clope n'aurait pas été de refus. Mais il venait d'en fumer une il y a peu. Peut-être que voir la gente féminine l'aiderait un peu... Il écarta malheureusement très vite cette possibilité. Les femmes du village ne lui accordaient aucune véritable attention — et de toute façon, elles étaient peu nombreuses —, Robin discutait avec l'autre zouave de malheur, et Nami...

Nami n'était pas là.

Et elle n'avait laissé qu'un gouffre immense dans sa poitrine. Un gouffre gourmand, qui voulait toujours plus dévorer. Un gouffre qui ouvrait sa gueule béante pour se repaître de ses désirs inavouables et de sa flamme qui le brûlait avec tant d'ardeur que les flammes de l'enfer ressembleraient à un vulgaire feu de cuisson. Le cuistot espérait que tout se passait bien pour elle, qu'il ne lui arrive rien, qu'elle ne se fasse pas attaquer et qu'on la protège. Il aurait dû venir. Il aurait dû se trouver à ses côtés. Pourquoi ? Pourquoi avait-il choisi de rester ici ?

Perdu dans ses pensées, il balaya la pièce centrale du regard. Les villageois, malgré le regain d'énergie qu'ils avaient eu suite à leur arrivée, étaient dans un sale état. Beaucoup se reposaient, d'autres tentaient de bouger, certains discutaient tranquillement, mais on ne pouvait décemment nier qu'il flottait dans ce village en ruine une lourde atmosphère qui rendait tout le monde à la fois fébrile et léthargique.

Sanji savait pourquoi. Il avait envie de se lever et de partir. Loin. Une colonie entière de fourmis avait décidé d'élire domicile dans ses jambes agacées. Une tension nouait ses épaules. Cette situation... Tout ça le rendait malade. Comment pouvait-on accepter pareille chose ?

C'était peu après le départ de Luffy et des autres. L'oeuf doré avait fait des siennes, tout le monde s'était mis en route en décidant de laisser certains derrière eux. Sanji n'avait vu qu'un seul inconvénient à rester : Nami. Il aurait aimé l'accompagner. Il aurait aimé rester à ses côtés, la protéger, profiter de sa présence, et surtout ne pas la laisser entre les mains de son capitaine.

Peu enclin à rester, il avait d'abord cherché le regard de sa navigatrice, sa princesse, sa moitié. Il avait fini par le trouver. Mais qu'y avait-il lu, sinon la détermination de poursuivre sa quête ? C'était peine perdue. Il le savait : elle ne le laisserait pas venir avec elle, et elle ne renoncerait pas non plus. Après tout, que devait-il craindre ? Tout se passerait bien. Oui, ils avaient une tâche à accomplir et ils allaient la mener jusqu'au bout, parce qu'il le fallait bien. Ils devaient le faire. Se rendre dans ce village avait concrétisé bien des choses. Ce n'était plus seulement la petite Eryn. C'était toute une île qu'ils devaient protéger.

Pourraient-ils seulement se regarder dans une glace s'ils ne venaient pas en aide à ces gens ? Combien de ladies en détresse déshonorerait Sanji s'il ne volait point à leur secours ? Quand bien même son coeur tout entier était offert à Nami, il ne pouvait s'empêcher d'aimer les autres femmes. Il accordait tout son amour à la gente féminine. La seule différence avec son amie, c'était qu'il lui offrait bien plus encore.

C'est pour cette raison qu'il avait décidé de préparer à manger pour les villageois. Voir s'étendre sur leur visage un sourire heureux à l'idée de déguster un plat qu'il avait minutieusement préparé... Sentir les effluves de ses préparations embaumer la pièce... Observer les assiettes vides après que des bouches affamées passent... Le repas s'était déroulé dans une joie toute relative ; épuisés, lessivés par tant de chaos, les villageois avaient dévoré le ragoût de Sanji dans un mélange étrange de discussions et de silences.

Pour Sanji, tant qu'ils mangeaient, tant qu'il pouvait contenter les estomacs faméliques, tout allait bien. Rien ne le contentait plus que l'air ravi des gens repus après avoir goûté à sa cuisine. Encore plus quand il s'agissait de demoiselles. Bon... Certes, le village n'en comptait pas — trop peu à son goût —, mais les voir savourer ce qu'il avait mis tant de coeur à préparer le ravissait.

Installé dans un coin, sur une banquette, Sanji mangeait son propre bol de ragoût. Le repas arrivait à sa fin, tout le monde semblait avoir retrouvé un semblant de joie. Le cuistot lança un regard sur le côté pour voir Luffy aux côtés de Law. Ce dernier avait fini d'opérer la jeune femme et il dégustait à présent son repas en tentant d'être au calme... Ce qui n'était pas facile quand on était collé par un énergumène plus collant encore qu'une gomme à mâcher !

C'était une des particularités de Luffy : ce gars avait le contact facile, surtout avec les gens qu'il aimait. Et il n'y allait pas de main morte, le bougre. Combien de fois il leur avait imposé un câlin général ? Sanji ne s'en formalisait plus vraiment depuis le temps. Mais voir la réaction de Law lui arrachait un petit sourire narquois. Eux, ils avaient pu s'y habituer. Contrairement au chirurgien, qui devait se contenter d'essayer de garder bonne figure devant tout le monde.

Comme Nami n'était pas bien loin, il lui adressa un sourire et s'enquit de savoir comment elle trouvait le plat. Plus que tout le monde, son avis lui importait vraiment. Surtout qu'elle avait dignement combattu face à l'odieux rat et ses sbires. Elle avait protégé Eryn et les autres. Elle lui rétorqua par un sourire, et il sut qu'un simple sourire pouvait changer la face du monde.

Soudainement, un bruit attira son attention. Un tintement métallique distinct qu'il connaissait mieux que personne. Sanji sentit tous ses sens se mettre en alerte. Le son de la louche. La louche dans le gigantesque chaudron. Le blond se leva. Bien sûr, ça ne pouvait être que lui ! Ce goinfre, ce morfale, ce...

— Oh eh ! Qu'est-ce qui te donne...

La phrase de Sanji mourut dans sa gorge quand il croisa le regard de Luffy. Ce dernier était toujours aux côtés de Law, et il n'avait pas bougé d'un iota. Non, il restait collé à l'autre pirate, tout aussi embarrassé que Sanji ne l'était à ce moment. Car si ce n'était pas Luffy, qui était le coupable ?

Les pupilles de Sanji se rétrécirent sous la surprise, un peu sous la honte aussi. Devant le chaudron brûlant, ce n'était donc pas Luffy, ni même un de ses compagnons. C'était une petite fille. Une petite fille dont le regard lui évoquait une rangée de cristaux fragiles, sur lesquels on aurait saupoudré de la poussière d'étoile. Un regard brillant. Une fleur sous les assauts des tempêtes tropicales aurait moins l'air fragile. Elle se raidit à la vue du cuistot, qui aussitôt abandonna son air renfrogné.

— ... envie ? tenta-t-il de rattraper.

L'enfant resta une fraction de secondes sans bouger. Puis elle afficha un léger sourire dans lequel on pouvait lire combien elle était désolée. Son bol vide en main, elle lorgna avec délectation le chaudron.

— C'était trop bon, monsieur... Désolée...

Sanji haussa un sourcil. C'est vrai. C'était une enfant. Sa petite voix fluette s'élevait avec tant de lenteur qu'elle semblait inaudible. De ses mains tremblotantes, elle posa son bol au milieu de tous les autres, destinés au lavage. Un grand sourire orna le visage de la petite fille.

— Je vais avoir plein de forces pour finir le cadeau de la dame, lui glissa-t-elle doucement.

Il fallut quelques secondes au pirate pour comprendre de qui elle parlait. La fillette désignait Robin du menton.

— Tu vas lui faire un cadeau ? demanda Sanji. C'est très gentil.

— Oui, répondit la fillette. Je... Je l'ai pas encore bien fini, et...

Un grognement interrompit sa phrase. Un grognement caractéristique, un bruit que Sanji reconnaîtrait entre mille. Un bruit qui l'avait habité durant si longtemps que son écho hantait encore son esprit. La fillette — Halen — cacha son ventre de ses mains. Elle baissa la tête.

— Désolée... Je...

— Ne t'excuse pas, répliqua Sanji.

Il le savait. Mieux que quiconque, il la connaissait : cette sensation qui tord les boyaux et qui embrume l'esprit dans un voile de tentation, d'espoir obsessionnel et de douleurs perfides.

— Je... Il n'y en a plus, mais je peux te faire quelque chose, si tu...

Le coeur du pirate se serra. Il aurait aimé pouvoir la resservir. Le compliment qu'il avait reçu plus tôt le culpabilisait encore plus. Si elle avait encore faim, alors c'était son rôle de la nourrir. Et normalement, ça aurait dû la faire réagir.

Mais elle n'eut aucune réaction.

Les yeux d'Halen fixaient désespérément le vide.

Le vide, le vide, le vide.

— Non... Ne vous en faites pas, monsieur le pirate... Tout ira bien...

— Mais si tu as faim...

— J'ai l'habitude... Grizzli est un peu mécontent, en ce moment...

— Grizzli ?

— Le monstre dans mon ventre...

Sanji écarquilla les yeux. Le monstre dans son ventre. A quel point connaissait-elle la faim pour lui donner un nom ?

Le cuisinier regarda autour de lui. Et à bien observer... Tous les regards semblaient courir après le néant. Combien y avait-il de Grizzlis ? Depuis combien de temps ces gens combattaient-ils la faim ? La restriction de nourriture ? Parce que ce ragoût... À quel prix l'avait-il fait ? Les cuisines étaient si faibles en ressources.

Irrité, Sanji se tourna vers un des adultes.

— Oh, toi ! Tu peux m'emmener voir les réserves de nourriture ?

L'adulte en question adressa une oeillade terne à son interlocuteur. Un soubresaut agita ses épaules.

— Quelles réserves ? On a tout perdu, pirate. Notre gardien n'est plus là. Les poissons abondent moins. La taxe de nourriture des grosses pointures de la ville a redoublé.

Les yeux de Sanji se couvrirent d'horreur à mesure que l'homme, pourtant un solide gaillard recouvert de bandages, racontait leur quotidien. Des larmes coulaient à présent sur ses joues meurtries.

— Même les gamins doivent se priver de nourriture alors que certains sont notre avenir. La situation était déjà difficile il y a plusieurs semaines. Mais maintenant que notre gardien s'est fait la malle...

— Il s'est pas fait la malle ! rétorqua Halen. Il... Il a disparu... Il n'a pas pu nous abandonner...

— On n'en sait r...

— Si, moi je le sais !

Et Halen partit. Une bonne partie des conversations s'était arrêtée. Certains des pirates avaient tourné la tête en direction du cuistot.

— Attends, Halen ! tenta le blessé, en vain.

— Alors, ça veut dire que le repas que je vous ai fait, c'était...

Le regard de l'homme ne trompait pas. C'était leur dernier repas. Les dernières réserves.

— Ouais... Mais ça valait le coup. Je crois...

Il n'avait rien ajouté.

Sanji étouffa un grognement. Il n'était pas le seul à l'avoir entendu, il en était sûr. Même si Luffy n'avait rien dit, il était sûr que cette conversation l'avait interpellé. Ces gens manquaient de nourriture. Chaque jour, leurs ressources diminuaient comme peau de chagrin. Ils n'avaient peut-être pas le tribut céleste à payer, mais les taxes avaient tant augmenté que ça devenait impossible pour eux de continuer ainsi. Sans compter cette entreprise qui les harcelait et les dépossédait de leurs terres et de leur forêt petit à petit.

— Encore eux... avait-il entendu, alors que le vieux Cathbad sortait de la bâtisse.

— Ils ne nous laissent aucun répit... ! rageait un autre, poings serrés.

Toute la large pièce s'était surchargée de murmures apeurés et de colère refoulée en quelques secondes, avant que le silence ne retombe comme le toit d'un cercueil morose.

— Ces enfants de l'enfer... ! Ils ne lâcheront rien...

— Notre druide va essayer de négocier... Tout va bien se passer...

— Jusqu'à la prochaine fois... Tout ça pour de nouveaux entrepôts, des nouvelles... des nouvelles usines ! Eh, Brian, toi qui vas souvent en ville, tu sais ce qu'ils trament, non ?!

Brian avait répondu par une grimace de dégoût. Le petit guerrier barbu ne s'était pas départi de cet air depuis qu'ils avaient fait sa rencontre, mais il y avait quelques variations. Au moment de répondre, jamais il n'avait semblé aussi méprisant.

— Je ne sais pas... Ils veulent juste... attirer plus de monde, je crois. Et ils le font au prix de nos vies.

— Mais c'est affreux ! avait soufflé Brook.

Brian acquiesça. Ses poings étaient si serrés que ses phalanges pâlissaient.

— Tout ce qui les intéresse, c'est le profit... Et on ne peut rien faire... Ils s'en moquent, de nous. Dans peu de temps, la forêt sera réduite de moitié. C'est pour ça qu'on ne peut pas abandonner, même si toutes nos tentatives de résister sont de plus en plus vaines.

Il jeta un regard vers deux enfants.

— Pour qu'ils puissent sourire et vivre en paix.

Sanji souffla d'agacement en repensant au désespoir qui vibrait dans la voix de Brian. Ils perdaient du terrain. Ils étaient acculés. Et pourtant... Ils continuaient de lutter, de résister. D'employer tous les moyens possibles.

Aucun peuple ne devait mourir de faim pour une question d'argent.

Aucune bouche ne devrait souffrir de la famine pour des questions d'ego, de luxe, de parade. La nécessité de survie devrait trôner au-dessus du pouvoir.

Sanji se leva et s'étira les jambes. Il leva la tête vers les nuages, en direction de la forêt. Nami devra le pardonner. Il avait décidé d'arrêter de fumer aujourd'hui parce qu'elle n'aimait pas ça. Mais après tout ça...

Il avait bien besoin d'une autre clope.

¤¤¤¤¤¤¤

Trente minutes plus tôt...

Edens Shield était une île de taille moyenne, et pourtant, elle se payait le luxe d'avoir trois villes. Enfin, si l'on pouvait appeler cela des villes. La première, Ann Port, était la plus connue des trois. Tout simplement parce que c'était là que se trouvait toute l'activité humaine extérieure. Marins, marchands, pirates... Ann Port était le premier aperçu que l'extérieur avait de cette île si particulière.

Les rares guides touristiques qui la mentionnaient — car, lorsqu'on se trouve en marge du gouvernement, avait-on seulement le droit d'exister à leurs yeux ? — décrivaient cette ville comme accueillante et timide. Une timidité troublée par les tempéraments des visiteurs, beaucoup moins enclins et paisibles que les habitants. Et encore ! On disait d'eux qu'ils étaient pareils à l'eau qui ronfle aux abords de leur petit coin de paradis : on ne sait pas ce qui dort au plus profond d'eux-mêmes. Comme toute île non gouvernementale, ses secrets nimbaient les habitants d'un voile horrifique. Ce sont des monstres... ! Ils accueillent puis dévorent femmes et enfants ! Les pirates s'en vont l'air terrassé ! Même les plus grands n'y trouvent aucun intérêt ! Kaido, Shanks, Big Mom ! Tous ont délaissé ce lopin de terre oublié et oubliable ! Pourquoi ? Parce qu'il est trop dangereux, trop pourri ! Pas assez fiable ! A la fois trop tranquille et trop pervers !

C'était du moins ce qu'on pouvait penser de cette terre absurde, où le bleu du ciel enfilait bien souvent un manteau de brume épais. De sacrés bobards, répondraient certains. Un fond de vérité, rajouteraient d'autres à voix basse. Ann Port était une ville entre deux mondes : entre la quiétude et l'ennui des petites îles isolées et le chaos inhérent des laissés pour compte...

La seconde ville qui compose la triade de l'île n'est autre que la ville de Torai. On connaissait Torai pour son caractère majoritairement industriel. Ville aux allures de gros village de campagne, les bâtiments respiraient l'austérité, la tristesse et le travail. Y avait-il grand-chose à dire dessus ? Les discussions de bar l'évoquaient comme le paradis des usines et des ateliers de travail.

Et enfin, il y avait Guru, la capitale. La première chose que l'on pouvait dire d'elle tenait dans son manque de ressemblance avec ses deux autres sœurs. Bien plus large que les deux autres villes, elle évoquait les grandes autres cités de Grand Line et du Nouveau Monde : Dressrosa, Jaya, Water Seven... Située au cœur de la forêt, sur un plateau plus élevé que le reste de l'île, elle trônait sur les alentours avec fierté.

Que dirait un oiseau assez chanceux pour survoler cette capitale ? Peut-être commencerait-il par se dire que, quand bien même Guru n'avait rien à envier à ses jumelles sur les autres îles, sa taille était assez large pour contenter son esprit curieux et assez petite pour ne pas constituer un obstacle. Entourée de solides murailles circulaires dont la porte centrale pour accéder à la rue principale constituait un rempart massif, elle exposait d'un air triomphal son charme traditionnel empreint de modernité.

De là-haut, on distinguait un centre-ville musclé, chargé de bâtisses de tailles variées. La ville était coupée en deux par le fleuve qui coulait déjà beaucoup plus bas. Plusieurs ponts faisaient le lien entre les deux parties de la ville, tandis que son réseau de rues s'étendait comme les branches d'un arbre millénaire. Mais s'il y avait bien quelque chose qui attirait l'oeil, c'était bien le centre de la capitale.

Au milieu de Guru, sur l'eau, flottait un îlot. Un îlot qui abritait un château. Le château d'Avalon. Sa façade opalescente contrastait avec les teintes chatoyantes des toits qui peuplaient la ville. Les bâtisses arboraient des chapeaux et même des manteaux colorés. L'ocre côtoyait le bleu du ciel, le blanc chatouillait certains murs verts. Comme une pupille au milieu d'un iris, le château d'Avalon siégeait au coeur de Guru. Et aussi étrange que cela puisse paraître, une brume légère flottait constamment au-dessus des têtes citadines qui arpentaient les rues. Parfois, le bruit de quelques tambours claironnait.

L'oiseau, satisfait de sa promenade, dessina quelques cercles avant de rebrousser chemin. Il n'avait rien à faire, ce n'était pas son heure ; il lui fallait partir. Il battit l'air et s'éloigna des hautes collines. Il fixa de son regard perçant une dizaine de points qui se situaient sur une colline verte, quasiment aux portes de Guru. Une goutte de sueur perla sur son front plumé ; il lui semblait qu'on le regardait en retour, de yeux perçants, deux fentes froides qui décoraient des yeux bicolores.

— Humpf, grogna Karna. Il... m'aurait plu...

— Ce n'est peut-être pas le moment.

C'était la voix dure de Vila Nova. Vêtue de son ample manteau, elle se tenait aux côtés de son capitaine et jetait un regard désapprobateur en direction du guerrier chat. Ce dernier dévisagea l'oiseau, là-haut dans le ciel, et caressa le point d'encochage de son arc.

— Ce n'est pas bien de blesser des animaux, lâcha une petite voix.

— Oh ça y est, feula Karna, t'as réveillé le rabat-joie de service. Et mon instinct à moi, t'en fais quoi ?

— Je... Je sais pas...

Kyuri baissa les yeux. C'est vrai ; Karna était un Minks chat. Tous les Minks ne se comportaient peut-être pas comme lui, mais il ne pouvait pas aller contre sa nature.

— Je sais juste qu'il ne faut pas le faire gratuitement.

Karna leva les yeux au ciel. Plus évident que ça, tu meurs ! Il existait certes des êtres humains en mesure de réaliser les pires atrocités et ce pour satisfaire leurs pulsions les plus sauvages, mais lui, il n'était pas comme ces satanés monstres. Il fit un petit signe de la main à son compagnon, l'air de lui dire d'abandonner. Kyuri suivit son ami du regard, son expression passant de la tristesse à une sorte d'indifférence.

— On devrait se dépêcher.

Cette injonction ne venait d'aucun pirate, mais bien d'un intrus. Un intrus lâche, un intrus qui ressemblait plus à de la vermine de luxe qu'à toute autre chose. Naro réajustait les bagues sur ses doigts. L'archer Minks lui renvoya un regard exaspéré. Ne cessait-il donc jamais de jacasser, celui-là ? Il avait piaillé durant toute la route ! Insupportable ! Mais qu'on le fasse taire !

— Je suis de son avis, dit Varua. Plus vite on y arrive, plus vite on partira. Ça pue vraiment trop le luxe.

Contrairement à Naro qui avait enfilé son plus beau costume — qui pourrait sortir tout droit du placard d'un dragon céleste si ces parasites de nobliaux avaient un peu de goût —, Varua portait des vêtements simples. Une cotte de maille, un pantalon qui semblait avoir vu plusieurs champs de bataille et une cape de vagabond.

Un vêtement simple pour un esprit simple, aurait volontiers dit Aris. Lui, vêtu de cette cape de vagabond de la tête aux pieds, restait à l'écart.

— C'est vrai que tu vas affronter ton pire cauchemar...

— La ferme, l'emplumé, grogna Varua.

Faust émit un bruit de gorge à la limite du dédain, ce qui redoubla la colère de son compagnon.

En un mot comme en cent, l'équipage des Conquérants, aux portes de la capitale d'Edens Shield, avançait tranquillement. Il y avait ces pirates. Ces pirates aussi étranges que dangereux. Puis il y avait leur capitaine.

Leur capitaine, au sommet de la colline, le regard dans l'horizon brumeux. Une mer grise qui s'étendait devant lui, au-dessus des abysses d'herbe verte. Au loin, la capitale. Cette colline qui donnait des impressions de domination du monde. Ses cheveux flamboyants dont les quelques mèches blanches volaient de façon désordonnée. Et son manteau. Son fidèle manteau vert sur lequel une armoirie de trois vagues en spirale s'imbriquaient les unes dans les autres en une forme de triangle ; son manteau qui s'agitait sous la brise.

Il tenait un petit escargophone en main.

— Nous sommes aux portes de la capitale.

Capitaine... ? Déjà ?

— Comment se porte le Roi ?

Sa santé n'est pas au beau fixe. Il s'affaiblit de plus en plus.

— S'il n'oppose aucune résistance, c'est parfait. Mais je ne t'appelais pas pour ça.

L'escargophone sembla tirer une tête dubitative. Sans rien dire, Finn composa un autre numéro. Mais le silence fut la seule réponse émanant de l'escargophone.

— Maru, tu m'entends ?

Un claquement de doigts lui répondit à la place. Finn esquissa un sourire. Oui, il l'entendait.

— J'imagine que tu es en route.

Nouveau claquement de doigts.

— L'heure est venue de passer à l'action. L'heure est venue de se battre pour ce que nous croyons. Camarades, notre mission va prendre un autre sens désormais.

Puis Finn leva les bras. Il les écarta brusquement, tendit les doigts autant qu'il le put, posa un pied en avant. Il était prêt à embrasser le monde entier de ses deux bras, tendus à l'extrême, prêt à prendre et la capitale, et l'île entière entre ses mains.

— Nous sommes les Conquérants. Mais notre nom n'a de sens que si l'on peut rentrer. Camarades. Bienvenue chez moi... ou plutôt devrais-je dire...

Un sourire en coin marqua ses deux fossettes.

— Bienvenue chez nous !

¤¤ To be continued... ¤¤

NDA : Bonjour, bonjour !

Comment allez-vous ? J'espère que vous allez bien, perso, ça va aussi !

Bon ! Voici le chapitre 57 tant attendu ! Avant toute chose, désolé pour le temps de publication. Je n'ai pas pu poster dimanche. Pour la première fois depuis que j'ai commencé à publier cette histoire, je n'étais tout simplement pas prêt pour le jour-J. Dimanche, pour être honnête, je ne me sentais pas très bien à cause de ça : publier cette histoire, c'est un de mes plaisirs majeurs de la semaine ! (notamment en lisant vos retours).

Mais le voici, avec trois jours de retard ! Et quel chapitre ! Encore une fois, je me suis... comment dire... lâché ? Ce chapitre fait plus de 9000 mots ! Ouais, je sais, c'est long. A tel point que j'ai songé à le séparer en deux. Mais honnêtement, j'ai choisi de publier ce chapitre en un seul à cause de son contenu et notamment d'un jeu de chapitrage.

Dans ce chapitre, on retrouve plein de personnages... Par où commencer ? Peut-être par Luffy et les autres qui sont toujours coincés, mais qui luttent pour trouver une solution, tandis que Charlie commence à se dévoiler peu à peu. Il est temps pour lui de montrer qui il est...

Et tandis que notre groupe adoré lutte pour s'en sortir, nous faisons la rencontre de nouveaux personnages : Iris, Kathos et Berin ! Le trio royal, comme on peut le retrouver sur les autres îles. Il fallait bien une princesse, non ? Que pensez-vous de ces personnages ? Pour ma part, j'ai beaucoup aimé écrire cette partie du chapitre ! Les personnages royaux peuvent être le vecteur de beaucoup de messages...

Je vais vous faire une confidence : je suis particulièrement fier de la réplique de Berin sur le doute et le devoir. J'espère qu'elle vous aura plu ! Parce qu'elle a une résonnance toute particulière et qu'elle n'a pas été écrite au hasard... Aussi, j'espère que les différentes relations entre ces personnages auront su vous toucher !

Si vous voulez, vous pourrez toujours essayer de deviner d'où viennent leurs noms : je les ai choisis soigneusement ! Si vous ne les trouvez pas, de toute façon, vous les retrouverez dans le Databook à un moment ou à un autre, mais si vous êtes joueur ou joueuse, n'hésitez pas !

Dans un troisième temps, on retrouve Sanji avec un flashback sur les habitants du village... Un flashback plus que nécessaire. Dans tout arc de One Piece, il existe ce trope de la faim : et je ne pouvais y échapper. Oui, Edens Shield souffre de conditions économiques poussant les gens à se restreindre et à avoir faim. Oui, les conditions de vie ne sont pas aussi douces qu'on le croit et ce même avant la disparition du Poisson d'Or. Et ce sont des enfants qui en pâtissent. Des enfants comme Halenn, alors que ces enfants continuent de sourire.

Au cas où ça vous aurait échappé, Halenn est celle qui offre le cadeau à Robin. Une gamine adorable...

Et enfin, le dernier morceau de ce chapitre, et pas des moindres : on retrouve Finn et son équipage aux portes de Guru, la capitale ! L'occasion de revenir plus en détails sur la géographie de Edens Shield, bien que ces villes réservent encore quelques surprises... L'occasion, aussi, de réaffirmer la volonté du capitaine pirate et son étrange lien avec l'île... Il vise la couronne, après tout !

Vous vous souvenez quand je vous ai dit que je voulais séparer le chapitre en deux parties et que je ne l'ai pas fait ? Eh bien c'est à cause de cette dernière partie... Car Finn faisait son apparition dans l'ombre exactement 30 chapitres plus tôt (chapitre 27) ! Je ne peux peut-être pas faire des foreshadowing qui prendront leur sens des années plus tard, mais au moins, je peux essayer de donner un semblant de cohésion dans la publication de mes chapitres...

En parlant de ça : petit secret de tournage ! (enfin d'écriture) La description de la scène où Finn écarte les bras face à la capitale est inspirée du tableau "Le voyageur contemplant une mer de nuage" de Caspar David Friedrich, un de mes tableaux préférés et à qui je voulais rendre hommage en raison de sa beauté et de son appartenance au romantisme !

Enfin, trêve de bavardages ! Vous l'aurez compris, ce chapitre est très important car il plante un peu plus la volonté des Mugiwara à se battre pour ce pays, en plus d'introduire de nouveaux personnages (oui, encore, je sais) et à raffermir la volonté de l'antagoniste.

J'espère sincèrement qu'il vous aura fait passer un bon moment ! Il faut au moins ça pour vous remercier et m'excuser de mon retard dimanche. Malheureusement, ça risque de se renouveler et j'en suis navré, parce que j'avance lentement, surtout si quelque chose me bloque.

Aussi, j'en profite pour vous remercier pour les 9K. 9000 vues ! C'est vraiment chouette de voir que mon récit plaît autant. Je reçois beaucoup de soutien, que ce soit par vos votes ou vos commentaires, ou même juste par le fait de lire, alors merci beaucoup, même aux petits lecteurs fantômes...

Dernière petite chose à vous dire (ou rappeler, honnêtement je ne me souviens plus) avant qu'on soit obligé de se quitter : si vous voulez me suivre, j'ai un compte Twitter : Umi_page. J'y parle de certains trucs dont One Piece et cette fanfiction, alors n'hésitez pas à me follow !

 Voilà ! Bon, cette NDA n'a que trop duré, il est temps de se quitter.

J'espère sincèrement que vous aurez passé un bon moment à mes côtés et je vous dis à bientôt. En attendant, prenez soin de vous, je vous aime,

Umi

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