Law s'essuya le front du revers du bras. Ça y est, il avait fini. Il s'était occupé de la plupart des blessés. Et il y en avait beaucoup ! Beaucoup plus qu'il ne l'avait imaginé. Les blessures allaient de superficielles à extrêmement graves, et il dut même enchaîner deux opérations. Courtes, certes, mais nécessaires pour la survie de ses patients. Les réaliser dans un lieu aussi étouffé et étroit — Cathbad l'avait autorisé à s'isoler dans une pièce privée à l'étage — l'avait forcé à user de plus de ressources qu'il ne l'aurait cru. Ce n'était pas qu'il n'était pas habitué à ça ; dans son sous-marin, les conditions n'étaient pas optimales. Mais là... C'était encore pire. Il faisait chaud et il manquait de matériel.

Et bien sûr, ça, c'était sans compter l'électron libre du village. Luffy faisait les allers-retours dans la pièce et alpaguait Law chaque fois qu'il entrait dans son champ de vision... A croire qu'il était incapable de se passer de lui ! Law s'efforçait de toujours répondre, même par un geste ou un regard noir. Mais Luffy ne semblait pas décidé à le laisser tranquille. Quand Monkey D. Luffy avait une idée en tête, elle ne s'en allait pas si facilement !

— Toraooooo !

Law se tendit. Bon sang ! Il avait expressément demandé aux membres de l'équipage de tenir leur capitaine à l'écart. Que faisaient la Jambe noire et la navigatrice ? C'étaient eux qui avaient le plus d'autorité sur Luffy ! Ah, ça, ce n'était pas le robot ou le squelette qui allaient le forcer à se tenir à carreaux... Ils l'encourageaient même parfois dans ses bêtises ! Bon, pas autant que son confrère à fourrure et le sniper, les deux compères préférés du garnement quand il s'agissait de s'amuser. Finalement, il n'y en avait vraiment pas un pour rattraper l'autre.

Il espérait sincèrement que quelqu'un d'autre attire l'attention de Luffy ; il supportait de moins en moins de rester trop près de lui. Chaque fois qu'ils étaient ensemble, le chirurgien de la mort sentait en lui un élastique se tendre dans ses tripes. Non, il fallait qu'ils s'évitent, au moins un peu.

Malheureusement, personne n'accapara son attention, et le petit capitaine, décoiffé de son chapeau de paille, arriva à sa hauteur, une moue bizarre sur le visage.

— Torao !

— Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a, Mugiwara-ya ? répliqua Law.

— Je t'appelle mais tu réponds pas !

— Peut-être parce que je suis occupé...

— Mais tu pourrais quand même répondre !

Face à l'insistance de son allié, une goutte de sueur perla sur le front du docteur Trafalgar. Ne comprenait-il pas quand il lui disait qu'il était occupé ?

— Je ne pouvais pas. Et arrête de crier !

— Mais quand même... Je m'ennuie, moi, sans toi, Torao !

— Il faut bien que je soigne ces gens.

— Et pourquoi on le ferait pas ensemble ? Ce serait amusant !

— Amusant ? Arrête tes conneries, Mugiwara-ya ! C'est sérieux, la médecine !

— Ok, ok ! M'engueule pas, shishishi ! Et tu vois, toi aussi tu cries ! C'est pas bon pour le patient !

Law faillit sentir sa mâchoire se décrocher. Quelle insolence ! Comment osait-il utiliser ses propres arguments contre lui ? Quelle honte ! Quelle disgrâce ! Néanmoins, il marquait un point. Le patient qu'il venait d'opérer avait besoin de repos, et ce n'était pas en entendant des disputes qu'il parviendrait à récupérer.

Le chirurgien poussa un long soupir.

— Qu'est-ce que tu voulais, Mugiwara-ya ?

— Je venais voir si t'avais besoin d'aide...

Instinctivement, Law se détendit. Le dos rond qu'il présentait depuis le début de la conversation s'affaissa, un peu plus amical.

— Je n'ai pas besoin d'aide, Mugiwara-ya.

— Mais je veux t'aider !

— Tu ne peux pas !

— Si, j'suis sûr que j'peux !

— Non !

— La ferme !

— Pardon ?!

Law s'était levé pour rejoindre en deux enjambées Luffy. Ils se trouvaient à présent l'un contre l'autre. Finalement, il avait vraiment le don de l'énerver ! Luffy était irrécupérable... Grinçant tous les deux des dents, aucun des pirates ne voulait céder face à l'autre.

— Eh bien, eh bien ! Quelle agitation ici !

Les deux jeunes hommes se retournèrent. Les pas du druide claquaient contre le sol à mesure qu'il entrait. Son visage barbu affichait un sourire calme. Il porta d'abord une œillade à ses invités, puis à son compatriote, alité.

— Que se passe-t-il ? Oh, vous avez terminé l'opération ! Elle semble être un succès.

— Oui. Son état n'était pas extrêmement grave mais il va avoir besoin...

— Il va avoir besoin de repos, compléta Cathbad en même temps. Nous avons des herbes médicinales qui pourront l'aider. Vous avez fini d'examiner tous les malades, non ?

— Eh bien, oui, c'était le dernier, il me semble... Il ne reste que...

— Oui. Nous parlons de la dernière patiente, expliqua Cathbad à Luffy, alors que ce dernier ouvrait à peine la bouche.

— Waouh, t'es trop fort, grand-père ! J'allais te poser la question, shishishi !

Cathbad ne se départit pas de son air serein, entre le sérieux qui incombe à un homme de son rang et la douceur que peut ressentir un aîné face à la jeunesse dorée et brillante.

— Je sais. Tu veux te rendre utile, n'est-ce pas ? C'est ce dont tu discutais, avec ton compagnon ?

— Oui, c'est ça !

— Je vois.

Le druide esquissa un sourire énigmatique et se dirigea vers une autre pièce, dans le fond, d'un pas tranquille. Un regard en coin invita les deux pirates à le suivre. Si Luffy suivit gaiement, Law resta de marbre un instant...

Mon compagnon, hein... ?

Il finit par fermer la marche, sachant très bien où se dirigeait Cathbad. Dans un coin reculé de la salle, protégé par des ombres bienveillantes, une couchette se trouvait là. Et dessus, une femme s'y reposée, les yeux fermés. On devinait à ses paupières qu'une fièvre terrible la saisissait.

— C'est qui ? demanda Luffy de but en blanc.

— Finda.

— Finda ? Drôle de nom...

Law se retint de donner une claque à l'arrière du crâne de son allié et se contenta d'un regard noir.

— La ferme, Mugiwara-ya.

— Mais...

Cathbad la regardait avec une attention toute particulière, comme jamais il n'avait regardé aucun membre de sa tribu. Il porta une de ses mains ridées vers la joue de la jeune femme. C'était une trentenaire vêtue d'une robe traditionnelle, d'une blancheur comparable à celle de ses cheveux. Sa peau était si pâle qu'on aurait dit qu'elle se trouvait dans un linceul.

Les yeux de Luffy s'écarquillèrent. Même un idiot comme lui avait compris.

— C'est la maman d'Eryn !

— Oui.

Luffy fit volte-face. Dans son dos se trouvait Balor. Le visage fier du guerrier avait fait place à une masse de chagrin contenu.

— Finda est ma petite-fille, expliqua soudainement Cathbad. Elle a combattu fièrement à nos côtés pour protéger le village, mais... La bataille a révélé sa fragilité. Son esprit est peut-être le plus brillant ici. Seulement, ma petite-fille a aussi un corps fragile. Et malheureusement... Je ne vois qu'une seule chose qui pourrait la sauver.

— Quoi ? s'exclama Luffy.

— Grand-père. Nous en avons déjà discuté. Ceci est trop dangereux.

— Mais c'est l'unique solution, et le temps presse.

— Quoi, quoi ? répéta le pirate au chapeau de paille.

Law se tourna vers lui pour lui expliquer :

— La griffe-de-dragon, Mugiwara-ya. C'est une plante très rare et qui contient en elle une substance très puissante qui pourrait peut-être la sauver.

— Mais... Et toi, Torao... Tu peux pas la sauver avec ton pouvoir ?

Le docteur ferma les yeux et poussa un long soupir. Sa casquette projetait un peu d'ombre sur son visage, une ombre presque rassurante.

— En réalité, je pourrais la sauver avec les pouvoirs de mon fruit du démon. Mais l'opération est coûteuse en énergie, et la griffe-du-dragon est peut-être la seule chose qui lui permettra de tenir le choc.

— Mais... Tu peux tout guérir, Torao... T'es le meilleur...

Law sentit ses yeux briller étrangement. Il détestait décevoir son allié, encore plus quand il plaçait une telle confiance en lui. Les regards de Cathbad et Balor ne l'aidaient pas à se concentrer.

— Peut-être, mais je vais avoir besoin d'un coup de main.

— Bah j'ai qu'à aller chercher la plante, alors ! s'écria Luffy.

Chercher la plante ? Non ! Quelle idée ! Il fallait une certaine acuité pour la repérer, et encore plus d'agilité pour la récupérer. On ne faisait pas n'importe quoi avec la griffe-de-dragon.

— C'est trop risqué, Mugiwara-ya.

— Mais la maman d'Eryn a besoin de cette plante ! Et je veux pas l'abandonner ! Et je veux t'aider, Torao !

— Il faut faire extrêmement attention à cette plante, elle est très rare...

Luffy acquiesça et tourna les talons sous le regard médusé de son ami. Quelle tête de mule ! Il ne l'écoutait pas du tout ! Bon, d'accord, il ne l'écoutait jamais, et petit à petit, Law commençait à perdre espoir. Mais quelque part, il ne pouvait renoncer à ce qu'il désirait : que le petit capitaine suive ses plans.

— T'inquiète ! Je ferai attention ! lança Luffy en partant.

— Mugiwara-ya, non !

Law tendit le bras, dans l'espoir de retenir son ami. Mais il était trop tard.

Luffy avait disparu par la fenêtre.

¤¤ To be continued... ¤¤

Bonjour, bonjour !

J'espère que vous allez bien, chers lecteurs, chères lectrices ! Personnellement, ça va !

Voilà le chapitre 36 ! Un chapitre, ma foi, plutôt court... On en apprend un peu plus sur la famille d'Eryn et on a le début du nouvel objectif : la recherche de la griffe-de-dragon... ou comme dirait Luffy, l'ongle-de-gros-lézard, shishishi ! Une plante absolument pas anodine... Est-ce que Finda sera sauvée ? Est-ce qu'elle va mourir ? On verra bien... 

Comment ça, je suis sadique ? N'oubliez pas : c'est One Piece... Tout n'y est pas rose, mais alors pas du tout...

Bref ! J'espère que vous avez passé un bon moment en lisant ce chapitre !

On se retrouve la semaine prochaine pour la suite. En attendant, prenez soin de vous. Je vous embrasse,

Umi