9 - Aller-retour
Léopard gara la voiture de la Capitale un peu à l'entrée de la forêt d'arbres morts. Il aida Alexandre à descendre de la voiture, puis ils dissimulèrent le véhicule comme ils le purent, entassant des branches ainsi que des fougères. Lorsqu'elle fut suffisamment discrète, ils se mirent en route vers l'ancienne demeure de Léopard. Ce dernier glissa ses doigts dans l'unique main d'Alexandre, et ils marchèrent côte-à-côte.
« Oscar... commença Alexandre, je sais que ce n'est peut-être pas le meilleur moment pour parler de cela, mais... Ton nom de famille, c'est quoi ?
Oscar eut un rire nerveux.
— Tu vas trouver ça stupide, mais... Je l'ai oublié. Depuis des années.
— Comment tu peux oublier ton propre nom ?
Oscar haussa les épaules.
— J'imagine qu'à force de porter un pseudonyme durant des années, j'ai perdu une part de moi.
— Mais tu te souvenais de ton prénom.
— Oui... Mais au fond, j'estimais que je n'en avais pas vraiment besoin, d'un nom de famille. Je n'ai plus de famille, alors, à quoi bon porter un nom ?
— Mais... Tu as les Activistes.
— J'avais les Activistes.
— Tu m'as moi, répliqua Alexandre avec un sourire, je ne fais pas partie de ta famille ?
Les doigts d'Oscar se resserrèrent autour de la main d'Alexandre.
— Ne doute jamais de l'amour que je te porte. Tu es de loin la personne la plus importante à mes yeux. Alors... Oui, d'une certaine façon, tu fais partie de ma famille. De moi.
— Oh, mais je ne doute pas. Tu me l'as prouvé il y a environ deux heures, sur la banquette arrière. C'était chouette.
Oscar rigola et embrassa Alexandre sur la tempe.
— J'adore te montrer que je t'aime, conclu-t-il. »
———————
Lorsqu'ils arrivèrent enfin devant les portes qui encerclaient le Casino et ses alentours, Oscar ne put s'empêcher de sourire. Cela faisait très longtemps qu'il n'était pas venu ici. Le garde n'en cru pas ses yeux non plus et manqua de tomber de son poste, avant d'hurler à ses camarades d'ouvrir les portes. Ils entrèrent dans l'enceinte et ils se rendirent compte à quel point l'endroit était toujours aussi animé que dans leur souvenir.
« Léopard ! cria un de ses hommes, on se doutait que tu finirais par revenir !
Oscar eut un large sourire.
— J'imagine que vous êtes tous surpris de mon retour ?
— Plutôt, oui !
— La Capitale va se faire envahir d'irradiés. On a préféré prendre les devant et partir, mais par mesure de sécurité j'aimerais installer un couvre-feu et plus de tour de garde. Est-ce que c'est possible ?
— Bien sûr ! Je fais passer le message ! Au fait, Léopard !
— Oui ?
— D'autre personnes sont déjà arrivées. Elles t'attendent chez Gazelle et Luciole.
— Merci, j'y vais tout de suite.
Le garde le salua d'un bref coup de tête et partit reprendre son poste. Léopard souffla et ils marchèrent en direction de la maison de Gazelle et Luciole.
Léopard salua beaucoup de monde sur le chemin. Le retour de l'ex-chef des Activistes s'était répandu comme une trainée de poudre, et il n'avait fallu que quelques minutes pour qu'une grande majorité du Casino ne soit au courant.
Alexandre, lui, se faisait extrêmement discret. Cela faisait également très longtemps qu'il n'avait pas mit les pieds dans ces lieux, et il ne s'y sentait pas à sa place. À vrai dire, il ne s'y était jamais vraiment sentit comme chez lui. Léopard sentit son anxiété et il l'écarta à l'abri des regards.
— Alexandre, tout va bien, tu sais ? J'ai donné des indications à mes gars, personne ne viendra ici pour te récupérer. T'es avec moi maintenant, d'accord ?
Le roux se contenta d'hocher la tête en silence.
— Je te promet, on se sentira bien, même si c'est provisoire. On a des livres, et de la musique. Tout ce que tu aimes.
— Et pour les irradiés ?
— Ce n'est pas un problème pour l'instant, ne t'inquiète pas.
Alexandre lui sourit timidement et il se mit sur la pointe des pieds pour embrasser Oscar.
— Aller. Luciole et Gazelle seront vraiment heureux de te revoir.
— Ils sont au courant que je suis sortit de coma ?
— Non... Je n'ai eu le temps de prévenir personne. »
Alexandre haussa les épaules, avant qu'ils ne reprennent la direction de la maison. Léopard frappa deux fois avant de pousser la pousser. Ils n'entendirent rien les deux premières secondes, avant qu'un petit garçon aux cheveux crépus ne surgisse dans la pièce, une peluche d'ours dans les mains. Ils se fixèrent pendant quelques secondes.
« Salut petit ! dit Léopard en lui souriant.
— Maman ! cria-t-il, maman !!!
Il courut hors de la pièce, et quelques secondes après, Gazelle passa le pas de la porte, Luciole juste derrière elle, portant le petit garçon dans ses bras.
— Léopard ! cria-t-elle en se jetant dans ses bras.
— Bonjour Gazelle, désolé de passer à l'improviste, je...
— Oh, Alexandre est là aussi !
Elle attrapa le roux d'un bras pour la serrer contre elle.
— Maman, c'est qui ?
Gazelle les lâcha, puis elle attrapa son fils pour le mettre à la bonne hauteur.
— Ça, c'est mon ami Léopard, et ça, c'est son ami, Alexandre. Je vous présente Lucio, les garçons.
— C'est marrant, il a un nom comme toi, maman, rigola Lucio, et dit, pourquoi tu caches ta main dans ta manche ?
Alexandre sursauta et cacha son bras mutilé derrière son dos.
— Mon cœur, ce n'est pas poli de demander quelque chose à quelqu'un que tu ne connais pas !
Ils entendirent ensuite des bruits de pas précipités dans l'escaliers et ils virent une tornade de cheveux blonds passer la porte.
— M'sieur Alexandre !
Fleur se rua dans les bras d'Alexandre, l'enserrant avec toute la force dont elle était capable. Alexandre lui rendit maladroitement son étreinte.
— Y'a qui d'autre avec toi ? demanda-t-il une fois que Fleur l'ai eu lâché.
— Mes parents, Archange et sa sœur.
Léopard et Alexandre déglutirent.
— Personne n'a de nouvelles de Charlie et d'Alpha ? demanda Alexandre.
Ils eurent tous une mine attristée, sauf Lucio qui trouvait que certains amis de ses parents avaient décidément de drôle de prénoms. Les parents de Fleurs arrivèrent à leur tour dans la cuisine, serrèrent chaleureusement Alexandre et Léopard dans leurs bras comme s'ils étaient leurs fils, et Archange arriva.
— Alice est en train de dormir. Encore merci de l'avoir permise de rester ici, ajouta-t-il en s'adressant à Luciole et Gazelle.
Ils eurent un sourire sincère, et Luciole attrapa son fils.
— On va laisser les grandes personnes parler entre elles, d'accord ? »
Luciole et son fils sortirent de la pièce. Gazelle les conduit dans leur salon, où ils prirent place autour de la petite table basse.
« Personne n'a de nouvelles de Charlie ? demanda Léopard.
— Non, mais à mon avis, lui et Alpha sont ensemble, donc il n'y a pas vraiment de soucis à se faire sur eux, répondit Fleur.
— Comment tu peux en être sûre ?
— Hier, Alpha et Charlie sont repartis ensemble.
— Pourquoi personne n'a répondu lorsque je vous ai appelé ? demanda Léopard.
— On est partit trop précipitamment. On a pas pensé aux montres, juste à l'endroit où Fleur et Archange nous conseillaient d'aller, expliqua Ella.
— Et toi, pourquoi tu ne nous as pas dit qu'Alexandre était réveillé ? demanda Fleur.
— Je me suis réveillé hier soir, expliqua Alexandre, et je n'avais pas vraiment la tête à rien, alors Oscar m'a juste raccompagné et j'ai beaucoup dormi. Le lendemain, on est...
— C'est qui, Oscar ? demanda Fleur.
Il y eut un blanc et toutes les personnes autour de la table se regardèrent à leur tour dans leurs yeux, sauf Léopard qui fixait Alexandre.
— Euh, c'est moi, finit par dire Léopard en agitant sa main, mais, euh, notre priorité, c'est Charlie.
Alexandre lui adressa un regard appuyé.
— Et Alpha. Charlie et Alpha. Des idées d'où ils peuvent se trouver ?
— Oui ! s'exclama Alexandre, tu sais, là où vis Alpha, dans l'ancienne villa ! Ils sont forcément là.
— Pourquoi forcément ?
— Parce que c'est le lieu le plus sûr pour Alpha, depuis que la mine s'est effondrée.
Oscar acquiesça silencieusement.
— Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent de le amener ici ? demanda Archange.
— Oui, c'est vrai, mais... S'il vient, Alpha aussi va venir, dit Oscar d'un ton réticent.
— Pourquoi ça serait un problème ? demanda Fleur.
— Parce qu'Alpha est...
Il soupira.
— Ouais, non, si, il peut venir aussi.
Il n'avait pas l'air particulièrement réjouit, mais Alpha refuserait de laisser Charlie partir seul, même avec eux. Et le Casino était plus sûr que là où le président se trouvait actuellement.
— Il faudrait y aller le plus rapidement possible, par contre. Gazelle, est-ce qu'il y a encore de l'essence dans les voitures ?
— Bien sûr ! Il y a même la tienne qui dort sagement dans le garage. Elle n'attend que toi.
Oscar se releva, suivit par Alexandre.
— Moi et Alexandre allons chercher Charlie, et on revient de suite après. J'aimerai que vous restiez là et que vous renforcez la sécurité, c'est le plus important. Exceptionnellement, le Casino fermera plus tôt, et on va demander à tous les résidents de faire le moins de bruit possible. Alerter les irradiés de notre présence serait la dernière des idioties à faire.
— Mais Alexandre, tu ne contrôlais pas les irradiés ? demanda Fleur.
— Plus maintenant. Pas depuis mon réveil...
Voyant qu'elle avait touché un point sensible, Fleur se précipita vers lui pour s'excuser. Luciole entra dans la pièce à ce moment-là avec un objet dans les mains.
— Alexandre, j'ai fouillé un peu et j'ai trouvé une attelle. Je sais que ça ne remplacera jamais le bras que tu as perdu, mais...
— Merci beaucoup, murmura Alexandre en prenant l'attelle.
— On y va ! déclara Oscar.
— Je vais ouvrir la porte du garage, répondit Gazelle. »
Ils saluèrent rapidement le petit groupe, et ils partirent en direction du garage. Au milieu de toutes les carcasses de voitures qui prenaient la poussière se trouvait une immense bâche.
Oscar la tira d'un coup avec un grand sourire et il contempla sa voiture, qui sembla encore plus abimée qu'avant aux yeux d'Alexandre.
« Mon bébé, dit-il niaisement en ouvrant la portière.
Il se retourna vers Alexandre.
— Oh, pardon, mes bébés...
— Je préfère, répondit Alexandre.
— Viens, je vais t'aider à mettre l'attelle. Enlève ta veste.
Alexandre s'exécuta avec difficulté. Oscar l'aida ensuite à monter dans le véhicule. Il plaça l'attelle sur le roux. Elle était principalement composée de cuir, et à la place de la main se trouvait quatre crochets recourbés en fer, qui ressemblaient à des serres d'aigle. Grâce au système de sangles, lorsqu'Alexandre levait son bras, les crochets se resserraient, et lorsqu'il le baissait, les crochets s'écartaient.
— Tu es à l'aise avec ? demanda Oscar.
— Oui... Enfin, c'est un peu bizarre, mais je m'y ferai. Il faudra que je remercie Luciole.
— Tu auras l'occasion, ne t'inquiète pas !
Il mit le moteur de la voiture en marche, qui s'alluma dans un doux ronronnement qu'il affectionnait particulièrement. Derrière eux, la porte du garage s'ouvrit, et il conduit la voiture dehors.
— On fait au plus vite, dit-il à Gazelle, on espère rentrer au plus tard demain. Ça ira pour vous ?
— Oui, ne t'inquiète pas. Tout le monde est à l'abri, et on va poster plus de garde et de patrouille. À très vite, Oscar.
Ce dernier hocha la tête en faisant la grimace.
— À plus tard, Apolline, répondit-il.
Gazelle leva les yeux au ciel.
— Aller, bonne route ! »
Gazelle regarda la voiture disparaitre au loin avant de refermer les lourdes portes et d'isoler le Casino.
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