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Chapitre 3: Motiver les troupes

Un jour était passé depuis la proposition fatale de Lucas, et Cecily s'en mordait les doigts: elle avait tellement eu les nerfs à vifs qu'elle n'avait réfléchie ni aux mesures ni aux conséquences de ce pari. Maintenant, la jeune fille devait assumer ses actes jusqu'au bout et cela commençait par annoncer la grande nouvelle à ses amies. Mais comment ? Voilà la question qu'elle se posait, en vain. À la fois honteuse et épuisée par cette situation, Cecily souffla et prit sa tête entre les mains.

- Hockwood ! L'interpelée se redressa vivement sur sa chaise et croisa le regard sévère de Madame Chávez, sa professeure d'espagnol. Cette dernière la fusilla du regard avant de lui dire quelque chose dans sa langue natale. Ne comprenant pas, Cecily bégaya, complètement paniquée. Heureusement pour elle, la cloche sonna la pause déjeuner avant que Madame Chávez ne puisse l'humilier. En une fraction de seconde, une masse d'élève en uniforme bleu marine se leva telle un seul homme et se précipita vers la sortie. Cecily en fit autant et se retrouva ainsi plongée dans la longue file menant à la cantine. Pendant que les personnes qui l'entouraient se plaignaient de la lenteur du service ou de la mauvaise qualité du plat du jour, la jeune fille sentit son cœur battre à toute vitesse. Et il prit une allure supplémentaire quand, trente minutes plus tard, elle vit ses amies assises à une table au fond de l'immense réfectoire. Cecily tenta de réprimer sa panique et, tout en avançant vers elles, essaya de trouver un moyen pour aborder le sujet. Finalement, le bout de texte qu'elle venait d'écrire dans son esprit s'envola aussitôt qu'elle s'assit sur une des chaises libre.

- Coucou... dit Cecily d'une voix à moitié étranglée. Les trois filles se contentèrent de la fixer, le visage impassible. Une goutte de sueur perla sur son front.

- Euh... Vous allez bien ? Aucune réaction. Cecily déglutit difficilement et renouvela son approche:

- Vous savez, il m'est arrivée un truc de dingue hi... la main de Keira se dressa devant son visage, la coupant net dans sa tentative désespérée de s'expliquer. Cette dernière baissa sa main, la ramena à son couteau, puis scruta Cecily de ses grands yeux bruns impénétrables.

- On sait tout. Cecily se figea. Avait-elle bien entendue ? L'intéressée ne pu prononcer un seul mot tant elle était choquée. Au même moment, Keira demanda à Lynn, sa voisine, de sortir quelque chose de son sac. Chose que sa deuxième amie tendit à Cecily. Elle était surprise de voir le journal du collège entre ses mains, et davantage encore de voir sa tête accolée à celle de Lucas en première page. La jeune fille tomba alors sur un petit paragraphe.

« Cela s'est passé hier, le Lundi 29 Novembre 1999, sur le terrain emblématique situé derrière le collège Saint-Paul. Il commençait à faire sombre et les éclairs striaient le ciel de leur lumière menaçante, mais c'était cependant sur la terre ferme que se cachait le plus grand des dangers: Cecily Hockwood, une geek bizarroïde et inconnu de tous, décida sur un coup de tête d'affronter le beau, l'irrésistible et surtout insupportable Lucas Mc Millan. Un pari douteux dont l'issue sera forcément sanglante. Maintenant c'est sûr,
LA GUERRE EST DÉCLARÉE !»

Au fur et à mesure de sa lecture, Cecily se décomposa. Comment ça elle était «une geek bizarroïde» ? Et pourquoi ce Mc Millan était qualifié de «beau» et d'«irrésistible» !? La colère commençait à bouillonner, mais elle se ressaisit sachant que son impopularité n'était pas le cœur du sujet.

- Pourquoi, Cecily ? Demanda June désabusée. L'interpelée leva la tête de l'article et se tourna vers son amie installée à côté d'elle. La jeune fille soupira et expliqua, sous l'oreille attentive de ses amies, tout ce qui s'était passé en détail.

- Voilà, conclut-elle. Mais ce n'est pas moi qui ai proposé ce stupide pari ! C'est ce pourri de Mc Millan.

- Certes, contra immédiatement Keira, mais tu l'a quand même accepté de ton plein gré. Ce qui te rend également responsable. Et n'accuse pas le coup de la colère, ajouta t'elle en voyant Cecily qui s'apprêtait à contester.

- Je sais combien Lucas peut être énervant, dit June. Au cours de français que je viens juste d'avoir avec Ella, il n'arrêtait pas de me jeter des boulettes en papier en riant comme une baleine avec ses potes. Ça m'a agacée, or je n'ai rien fait de compromettant.

- Je t'adore vraiment June, répondit Cecily, mais tu es trop gentille et généreuse pour faire quoique ce soit aux autres... D'ailleurs où est passé Ella ?

- Elle avait une affaire importante à régler, intervint Lynn jusque-là silencieuse. Je l'ai croiser en sortant de mon cours d'histoire. Cecily acquiesça en espérant qu'elle aille bien.

- Tu sais, reprit Lynn, depuis tout à l'heure tu nous parle de ce pari. Cependant, on en connaît toujours pas la clause... À ces mots, toute la tablée fut suspendu aux lèvres de la jeune fille, qui rougit, gênée. C'était un des points qu'elle redoutait le plus d'aborder.

- Bah... hésita t'elle. Si Mc Millan perd le match, lui et ses amis devront se faire une coupe mulet et porter un costume de princesse pendant toute une semaine. Et bien sûr, il devra reconnaître devant tout le monde qu'on est les meilleurs.

- Mais si ON perd ? Demandèrent-elles en coeur. Cecily se sentit de nouveau mal à l'aise.

- Euh... On devra faire leur devoir jusqu'à la fin de l'année.

- QUOI !!? S'écria Keira en tapant du poing sur la table, faisant retourner les têtes de quelques curieux. On est foutu d'avance !

- C'est vrai, renchérit June les yeux écarquillés de stupeur, on est nulle en sport. Alors du foot, contre des garçons qui font ça tout le temps, à chaque heure de la journée, et en plus en club ! C'est fini pour nous.

- On est des intellectuels, en plus d'être des geek accomplies, ajouta Lynn. Les battre sur MarioKart, oui, mais pas sur un terrain de foot ancré dans la réalité. Cecily se massa les tempes, assaillie par l'intégralité des exclamations de ses amies. Un silence tendu finit par tomber sur le petit groupe.

- Soyons positives, les filles, dit posément Cecily. On peut le faire. Et puis ça ne vous ferait pas plaisir de voir Mc Millan et sa bande déguisés en princesse à coupe mulet ? Keira sourit, plongée dans ses pensées, tandis que Lynn dodelina de la tête. June, quant à elle, resta de marbre.

- Ça sera drôle et j'ai déjà un super entraîneur.
Cecily hocha la tête devant la surprise générale.

- Le match est prévu dans environ un mois, soit le 31 Décembre 1999. Quoi de mieux pour clôturer ce siècle qu'avec une belle et bonne victoire ?

- Je te suis, dit Keira convaincue. Par contre, on les écrase ! Lynn esquissa un sourire triomphant. June soupira.

- Bon bah, allons-y... se prononça cette dernière.

Une discussion joviale s'entama alors avec la venue d'Ella. Toutes les cinq mangèrent leur purée et leur steak trop cuit sous des éclats de rire. Même si Cecily était heureuse d'avoir réussi à les persuader, elle ne parvenait pas à prendre part de l'enthousiasme générale. Parce qu'un autre problème se profilait à l'horizon: celui de trouver un entraîneur.

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