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55. Je me suis souvenu


La solution m'est apparue en rêve : j'étais devant un miroir, et je me montrais, à moi-même, ces feuilles cartonnées remplies de glyphes. En effet, mes commandes rebondissaient sur le Processus de ce rat comme des gouttes de pluie sur un toit d'ardoise ; la seule fenêtre sur l'extérieur, c'est l'esprit. J'ignore si le rat a un esprit assez développé pour interpréter ces symboles ; je ne perdrai pas plus de temps avec lui. Mon prochain cobaye ne sera autre que ce reflet dans le miroir.

Clodomir d'Embert, Journal


« Aucun d'entre nous ne peut traverser ? S'étonna Maïa.

— Oh, je sais ce que tu vas dire. Vous avez tous une bonne raison. Tu es mandatée par Cheshire et toute la clique des Nattväsen du Nord ; Lor est un Sysade ; Aelys est la dernière héritière des Lignées légitimes. Mais nous avons aussi une bonne raison de refuser le passage : tu es une tueuse de Changeants ; Lor est un menteur qui a déjà essayé de nous duper deux fois, et que nous avons juré de tuer s'il recommençait ; quant à Aelys...

— C'est parce que je ne suis pas Sysade ? »

La sirène s'épongea les cheveux avec sensualité, comme si la priorité était de leur faire tourner la tête, plutôt que de répondre à leurs questions pressantes. Ils avaient toute la nuit devant eux ; la barque était quasiment à l'arrêt, et il restait au moins un kilomètre avant la côte.

« Sysade ou non, nous avons un grand respect pour les Lignées, et c'est avec une profonde tristesse que nous avons appris leur disparition. Quant à toi... nous ne pouvons pas te faire confiance, Aelys. À cause de ton odeur.

— Mon odeur ? répéta-t-elle, interloquée.

— C'est vrai qu'elle ne sent pas très bon, confirma Lor, mais au moins, on peut corriger ça avec un peu d'eau de rose. Toi, même en raclant toutes tes écailles avec du savon noir, tu pueras encore la vase.

— Toujours aussi charmant, Lor, dit la sirène avec un sourire gourmand. Maïa, les mots me manquent, mais pourrais-tu lui expliquer ? Tu l'as bien senti, toi aussi, depuis que vous voyagez ensemble. Cette jeune enfant a été altérée. Oh, l'altération est subtile, et tous les Nattväsen ne la voient sans doute pas... mais nous sommes attentifs, et notre instinct nous commande de la tuer et de la confier aux Creux. Car c'est notre rôle, Maïa. Tu ne l'as pas oublié ? À moins que tu te contentes d'obéir aux ordres de Cheshire ? Le monde de la nuit serait-il devenu à ce point semblable aux empires des hommes, dans lesquels il revient à un prince, et non à une loi, de décider de tout ? »

Maïa posa sa main froide sur l'épaule d'Aelys.

« Ce que tu dis est vrai, et je commence à comprendre ce qu'il s'est passé. Mais quand bien même, son code source n'a reçu qu'une altération mineure. La signature numérique ne correspond plus mais les modifications sont pratiquement invisibles, en deçà de ce que les Nattväsen du Nord considéreraient comme une menace. C'est une raison totalement fallacieuse. Avoue-le, vous avez juste peur que nous accédions à Mû et qu'elle découvre que vous avez mal fait votre travail, que vous avez refusé le passage de nombreuses personnes qui étaient tout à fait dignes de le tenter, et que vous êtes devenus des tyrans dans votre Forêt isolée. »

La sirène lâcha brusquement la barque et recula, gardant la tête au-dessus de l'eau.

« Ce n'est pas nous qui avons commencé. Le petit village de Kels s'est agrandi. Les humains ont commencé à couper des arbres ! Il a bien fallu durcir les règles pour leur rappeler que la Forêt était à nous, que le passage ne leur était pas dû, et que la rencontre de Mû était un privilège.

— Un privilège que personne n'a pu exercer depuis soixante-dix ans.

— Ce n'est pas notre problème. »

Elle plongea et passa sous la barque ; Aelys vit une queue de poisson s'enfoncer dans l'eau. La sirène réapparut aussitôt de l'autre côté, face à Lor toujours armé de son couteau.

« Viens avec moi, proposa-t-elle. Je sais que tu en as envie.

— Je ne sais même pas qui tu es. Est-ce que tu as essayé de m'égorger la dernière fois ?

— Peut-être. »

La Changeante replongea ; il la chercha du regard pendant une bonne minute, puis haussa des épaules.

La surface noire de la baie se déchira et la sirène réapparut dans les airs, bondissant en parabole au-dessus de leur frêle embarcation, sur laquelle pleuvait des trombes d'eau salée. En passant, elle percuta Lor, qui fut catapulté dans l'eau.

Aelys se précipita en l'appelant, mais l'éclat argenté des écailles s'était déjà dissous dans l'eau, et les constellations d'Avalon réapparaissaient sur la surface à peine troublée. Des bulles d'air remontèrent à la surface. Elle crut voir les formes sombres d'autres Changeants remonter des profondeurs pour se joindre au festin.

« N'y va pas, ordonna Maïa.

— Mais...

— Attends. »

Des éclairs turquoise zigzaguèrent sous l'eau, sans faire le moindre son. D'une poignée, ils se multiplièrent en une véritable tempête de lumière, qui remonta jusqu'à la surface ; Aelys tomba en arrière dans la barque.

Une blessure profonde creva la nappe de pétrole qui semblait recouvrir la baie ; un geyser d'eau écumeuse se souleva à plusieurs mètres de hauteur, comme si une explosion venait d'avoir lieu juste au-dessous. De grosses gouttes d'eau frappèrent la barque ; Aelys les sentit s'écraser sur son visage. Elles étaient accompagnées de petits débris semblables à des gravillons, ou de petits coquillages dragués sur le fond. La jeune femme en ôta un de ses cheveux et découvrit qu'il s'agissait d'un petit morceau de peau grise portant trois ou quatre écailles.

Les eaux retombèrent et Lor demeura en place, flottant entre la brume et le ciel, agrippé à deux lames dentées semblables à des harpons, faites d'un bleu très pur, translucide et brillant. Ses cristaux de Sysade. Aelys reconnut autour d'elle des écailles, des griffes, des cheveux verts et des morceaux spongieux qu'elle n'osa pas identifier. D'autres plus gros flottaient à la surface de l'eau.

« Voilà, cracha Lor, ça vous fera de quoi bouffer pour cette nuit. »

L'odeur était insupportable, celle d'un étal aux poissons en fin de marché, dont les seaux d'abats commencent à mariner au soleil. S'ils n'avaient pas eu un dîner plus que léger, leurs vivres s'étant amenuisées en cours de route, Aelys aurait vidé son estomac sur le champ.

Appuyé sur ses deux armes comme des barres parallèles, Lor se laissa redescendre sur la barque. Ses vêtements étaient couverts d'une sorte de gelée de méduse, ce qui devait tenir lieu de sang ou de chair aux Changeants sous leur forme de sirènes.

« Être un Sysade, ça résout beaucoup de problèmes. »

Il vit l'expression d'horreur et de dégoût sur le visage de ses compagnes de route, et leur opposa un sourire cruel. Enfin, Lor le Menteur avait cessé de mentir !

« C'est elle qui a commencé, hein.

— Tu n'étais pas obligé de la tuer, dit Maïa.

— Toi, la fille de l'ombre, écoute-moi bien. Quand j'étais jeune, je devais avoir cinq ou six ans, je faisais le mur hors de l'orphelinat pour traîner avec d'autres gamins plus âgés. De parfaits délinquants en devenir. On ramassait des grenouilles qu'on mettait dans des bocaux de verre, qu'on abandonnait au soleil des jours entiers, pour voir ce que ça donnait. Il y en avait un, dans le groupe, dont j'étais devenu le souffre-douleur. Il tirait sur mes vêtements pour les déchirer, se moquait de moi en permanence. Un jour, j'en ai eu marre. J'étais en colère. Je l'aurais tué si je pouvais. C'est là que je me suis souvenu que j'étais un tueur. Alors, un jour, quand nous étions tous les deux en train de revenir sur les terrains en jachère de nos méfaits, je lui ai fait un croche-pied. Sa tête a heurté un muret et il est tombé dans les pommes. Je l'ai laissé là et il est mort. »

Maïa croisa les bras sans paraître impressionnée.

« Que dois-je en conclure ?

— Je suis un monstre. Mets-toi ça dans le crâne ! J'ai toujours prétendu être humain parce que c'était plus facile. Mais maintenant cela n'a plus aucune utilité. »

Il fit un pas vers elle, menaçant.

« Je n'ai pas besoin de vous pour atteindre la Forteresse. Je tuerai tous les Changeants qui s'approchent de moi et ils finiront par abandonner.

— Tu ne peux pas rentrer sans répondre à une question. Elle est écrite sur la porte de la Forteresse de Mû, dans la langue des Précurseurs.

— Oh, ne t'en fais pas pour cela. Je devrais y arriver. »

Il esquissa une révérence moqueuse, colla les pierres de Sysade sous ses chaussures dégoulinantes, et s'envola au-dessus d'elles comme s'il marchait sur des bottes de sept lieues.

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