J'échappe un bâillement tandis que monsieur Eaton nous informe de la nature de l'entraînement d'aujourd'hui, ma foi un peu particulier.

-...vous allez devoir vous défier en duels dans des conditions réelles ! Il est donc interdit aux épées, poignards, dagues ou toute autre arme, uniquement du corps-à-corps !

Je sens une boule se créer dans mon ventre et s'accroître au fil du temps. Les guerriers de l'Ombre sont réputés -dans notre royaume, car nous vivons cachés des autres- pour être surentraînés au corps-à-corps. Je ne fais certainement pas le poids...

Monsieur Eaton siffle le début des combats, puis une femme d'une trentaine d'années à la peau mate s'approche de moi. Ses cheveux bruns tressés lui arrivent aux omoplates et dans ses yeux jaunes brille une lueur malveillante. Elle esquisse un rictus moqueur en voyant ma silhouette, dépourvue de muscles.
-Amène-toi, m'ordonne-t-elle

Et je ne me fais pas prier, je préfère mourir dans ce combat que tuée car j'ai rejeté sa proposition. Mon cœur me crie de m'arrêter tandis que je m'approche lentement d'elle. Nous nous rendons dans un des espaces de combat et elle lance le duel.

Je déglutis lorsqu'elle crache au sol tout en faisant craquer ses doigts -un véritable cliché d'antagoniste-, je mets mes mains devant moi pour me protéger puis tente de me ressaisir. Tout mon corps tremble d'effroi. J'ai beau n'avoir passé que quelques jours ici, j'ai tout de même appris quelques techniques grâce à Jonas.

Je sursaute quand elle fonce sur moi, tel un faucon fondant sur sa proie. J'esquive vers le bas, passant sous elle et la soulève pour la faire chuter, avec succès. Mais, au sol, elle me donne un coup de tête dans la poitrine lorsque je la plaque, ce qui me fait basculer en arrière. J'essaie de me relever au plus vite, en vain, elle m'a déjà plaqué de son corps de la tête aux pieds, j'essaie de me débattre, mais tous mes efforts sont vains. Je dois me rendre.

C'est lamentable, je ne suis même pas foutue de gagner ne serait-ce qu'un seul combat. Je suis ce genre de personne qui a l'âme, mais pas la force.

-Lars, éliminé ! Crie Eaton

Je pars dans les couloirs et atteins les vestiaires où je ne prends même pas la peine de me changer, je prends juste mon sac et pars dans l'obscurité de la forêt pour être seule.

J'ai beau ne pas être jalouse, perdre ce combat m'a énormément frustré, je ne saurai dire pourquoi. Peut-être est-ce le ridicule qui n'a pas plu à mon ego.

Les envoûtantes odeurs de la forêt envahissent mes narines et m'apaisent. Je lâche mes cheveux, qui tombent sur mes épaules et couvrent mes oreilles gelées. Je suis soudainement reconnaissante de ma veste en cuir, qui me tient chaud.

Les fougères frémissent légèrement, ce qui attire mon attention. Je m'approche du buisson prudemment. J'éclate de rire quand j'aperçois une tarentule en sortir.

-Rizzy ! Tu m'as beaucoup manqué !

La petite bête s'approche de moi et me monte sur la jambe, puis je frémis lorsqu'elle chatouille ma main de ses petites pattes et m'observe de ses adorables yeux. Depuis toute petite, je n'en ai parlé à personne, mais je communique avec cette araignée par la pensée, ce qui peut paraître dingue au premier abord.
As-tu passé un bon été auprès de ta famille ? Je commence
Oui, mais je préfère ici, il pleut plus et les arbres me sécurisent ! Me répond-elle
Je comprends, tu m'as rapporté un cadeau, au moins ?
Non, je...

Elle s'interrompt au retentissement d'un bruit assourdissant. Je tourne la tête, les sourcils froncés, personne de censé ne s'aventurerait dans la forêt par un temps pareil. Je m'avance vers la source du bruit et fais un pas, puis deux, en arrière quand je regarde derrière le chêne qui se trouve là.

Une jeune femme, d'à peu près mon âge est là, étourdie mais malgré tout présente. Elle a des yeux noirs, des cheveux blonds et bouclés lui arrivant aux épaules et est vêtue d'une tenue ressemblant à celles que l'on m'oblige à mettre. Elle doit venir de se prendre l'arbre en courant, ce qui expliquerait le bruit. Mais pourquoi courait-elle ? Doit-elle fuir quelqu'un ? Je ne le saurai que quand elle arrêtera de compter les étoiles qui l'entourent.

Elle cligne des yeux, encore un peu hébétée, puis secoue la tête, ce qui, étonnament, lui fait l'effet d'une douche froide. Elle me scrute, son nez rosi par le froid se plissant, puis se lève et époussette ses jupes en me tendant une main.

-Gwenn Harris, princesse du Royaume de la Lune, enchantée de faire ta connaissance, qui es...
-Royaume... de la Lune ? Tu... hein ? Je m'étonne
-Oui, c'est ça, Royaume de la Lune, quel est le problème, au juste ?
-Tu n'as rien à faire ici, fiche le camp, tout de suite !
-Tu n'as pas le droit de me parler comme ça ! Je me répète, qui es-tu ?
-Va t-en...

Je n'ai pas le temps de finir qu'elle m'attrappe le col et me tire vers elle. Pour une princesse, elle ne manque pas de caractère.

-Ecoute, tu vas tout de suite me dire qui tu es et où nous sommes comme il se doit, tu ne sais pas qui sont mes parents. Ne m'oblige pas à le répéter, me crache-t-elle.
-Du calme, barbie. Je suis Nyx Faron, princesse du Royaume de...
-Royaume de... ?
-Ça te regarde, peut-être ?
-Bien sûr, en tant que princesse, je me dois de garder une relation saine avec les princesses des autres Royaumes ! Alors, de quel Royaume es-tu, Soleil où Vent ?

Et me voilà encore dans une situation difficile, mais je ne peux pas mentir sur un sujet si délicat, je marmonne que je ne viens d'aucun des deux et elle m'observe d'un regard interrogatif, ne m'ayant pas entendu.

-Aucun des deux, je lui crache
-Que... quoi ? Articula Gwenn
-Je suis la princesse du Royaume de l'Ombre ! Voilà !
-Tu parles de... Non, c'est impossible, ce Royaume à déserté notre île il y a des siècles ! Tu mens !
-Et pourtant, je ne mens pas. Tu l'aurais remarqué directement, si je mentais, j'ai toujours été une piètre menteuse.

Elle recule de plusieurs mètres en secouant la tête, comme si elle tentait de se réveiller d'un rêve terrifiant, avant de s'en aller en courant. C'est là que je me mets à paniquer, elle va tout raconter à sa mère, la reine du Royaume de la Lune, et je vais avoir de gros problèmes.

Je rentre en courant au palais, la nuit déjà tombée, tentant d'oublier ce qui vient de se passer, de penser à autre chose. Quelle punition ma mère va m'infliger, cette fois ? Je m'écroule sur mon lit, sentant mon pouls à une vitesse folle. Je respire un bon coup, puis après des heures à somnoler, je dors enfin.

                            👑👑👑

(Narrateur externe pdv Gwenn)

Les talons de Gwenn provoquent un bruit régulier dans le large couloir du château de la Lune, elle marche pendant un moment, la tête fière et le buste droit. Elle s'arrête devant une porte et y toque quatre petits coups réguliers. La jeune femme adresse un signe de tête a l'homme qui lui ouvre la porte avant de pénétrer dans l'immense salle qui se trouve derrière. Un tapis pourpre la traverse dans sa longueur jusqu'à une estrade où figurent trois trônes dont un, celui du milieu qui est aussi le plus grand, est occupé. De part et d'autre du tapis se trouvent deux immenses tables de festin préparées avec soin pour un prochain repas. Gwenn s'avance sur le tapis et arrive près de l'estrade où elle s'incline, puis commence :

-Bonjour, mère, j'ai fait une découverte quelque peu prometteuse au cours de ma promenade.
-Bonjour, Gwenn, la salue la reine. Qu'est-ce donc que cela ?
-Eh bien, il se trouve qu'en fuyant un sanglier massif, je suis arrivée dans une forêt, la forêt de... Fau, il me semble. Enfin, ce n'est pas le sujet. J'y ai fait la rencontre d'une jeune femme qui se dit être la princesse du Royaume de l'Ombre.
La reine braque ses yeux sur Gwenn, d'abord incrédule, puis devient sérieuse. Elle continue.
-Et pourquoi ne t'aurait-elle pas menti ?
-Elle n'aurait pas pu, c'est une piètre menteuse, fait Gwenn, reprenant les mots de Nyx.
-Je vois, ces barbares n'auraient donc pas quitté l'île. Je te crois, et j'en parlerai à l'assemblée de ce soir. Mais... si les autres Royaumes ne te croient pas et qu'ils décident de te bannir, je ne pourrai rien faire.

En effet, dans les trois Royaumes, mentir sur des sujets de cet ampleur était puni par la loi, sous peine de bannissement, voire de mort. Gwenn n'avait pas peur, elle savait qu'on la croirait, qu'elle ne serait pas bannie.
Elle n'aurait pas du en être si sûre.

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Bon, il y a des fautes d'orthographes mais on va pas en tenir compte, hein ? 😅

J'espère que le changement de narrateur ne vous a pas trop perturbé mais j'en avais besoin pour montrer l'action. 😊

Bref, en tout cas j'espère que ça vous a plu, même si c'était court ! ^^