Chapitre 9 : Le grand soir
Deux jours plus tard, le soir du bal, je suis allée à l'entrainement de kung-fu plus tôt, pour avoit le temps de passer chez le coiffeur; j'ai fait un brushing ultra-lisse avec des paillettes partout. C'est étincelant. Je fais vraiment des efforts pour ce bal.
Rentrée dans ma chambre, je me fais un beau maquillage noir style « smooky », pour aller avec ma robe de la même couleur.
Ma robe est assez simple. C'est une robe de soirée courte. Le bustier est en forme de cœur sur le décolleté, recouvert de petites fleurs noires. Le reste de la robe est en tulle froncé qui descend juste au-dessus du genou. Pour ne pas faire trop « vulgaire », j'ai acheté un fond de teint spécial pour cacher les taches de vin. Ça me permet de dissimuler mes tatouages. Je sais que ça ne se fait pas trop, mais j'ai décidé de mettre des bottes noires brillantes et des petites mitaines en dentelle noir. Je me suis aspergée de parfum. Je veux qu'on le sente à chacun de mes pas.
Avant de partir, je me demande si c'est bien prudent de se rendre sans pieu à une soirée où il y a des Vampires ? J'en glisse un dans la jarretelle de mes bas.
Je dois rejoindre Marck, Jeff et Christie, qui sont déjà sur place. Je voulais prendre mon temps pour être belle. Yann sera là... Et je veux qu'il voie ce qu'il perd. C'est typiquement féminin, oui... je sais. FUUUUccck ! Je m'en fous ! J'en ai marre d'avoir toujours cette petite voix culpabilisante dans la tête, parfois elle m'horripile.
Arrivée au bal, je rejoins Marck et Jeff.
Celui-ci me montre Christie du doigt, qui danse avec le Vampire dans des tourbillons incessants d'une valse d'une autre époque, mais c'est sans grand intérêt.
- T'as vu? me demande Jeff. C'est la personne de la photo.
- Oh mais je rêve ! C'est bien le père de Yann !
- C'est impressionnant quand même de voir un immortel.
Après la valse, le DJ met de la musique un peu plus contemporaine, et heureusement...
Christie et son Vampire s'arrêtent de danser et il l'emmène au bar.
- Bon, j'y vais.
Jeff me rattrape par le bras.
- Alex, ce n'est peut-être pas le moment !
- Ce sera le moment quand ? Quand il aura sucé son sang... comme Stepf ?
A ces mots, Jeff me lâche le bras, un peu comme si je l'avais foudroyé sur place. Marck, qui m'a à peine vue arriver, se demande quoi. Il n'a pas le temps de dire « Ouf » que je suis déjà en direction du bar.
- Christie, lui dis-je.
Elle semble mitigée. Je ne sais pas si elle est contente de me voir ou si elle regrette que je sois venue.
- Bonsoir, chère Alex. Je te présente Carl ...
- Carl Macurtis ! Le père de Yann.
Christie semble surprise.
Je regarde autour de moi discrètement. Je suis entourée par leurs goules. Je les reconnais à force de les voir roder autour de Yann.
- C'est donc toi, la petite Sorcière? me demande Carl.
- Les nouvelles vont vite.
- A qui le dis-tu... Il paraît que tu as perdu une camarade de chambre ?
... Il me teste, mais il arrive à ce qu'il veut ! Il veut me mettre en colère. Moi qui pars en 5 secondes, montre en main... Il va être servi dans 1....2....3....4....5 !
- Je vous interdis de souiller sa mémoire avec vos sarcasmes et encore moins d'approcher Christie.
- ça, ce n'est pas à toi d'en décider.
Il regarde Christie et lui dit :
- Venez ma chère, allons danser. Nous avons assez perdu de temps à bavasser.
Je tente de le suivre. Je sais que dans ces cas-là, je suis assez ingérable. Mais il claque des doigts et la bande de chiens fous me repousse. Il crie à un autre petit groupe « Messieurs.... »
Mais je n'ai pas le temps d'entendre ce qu'il dit que je suis poussée jusqu'à l'entrée. Pendant la traversée de la salle, entourée des chiens fous, je l'ai senti. Je sais qu'il m'a vue... Il m'a laissée... qu'est-ce que j'espérais?....
Je retourne à pied jusque chez moi.
Pour y accéder, je rentre par les nouveaux quartiers. De grands immeubles blancs entourant une grande place avec des pavés de digue. C'est la fac de l'audiovisuel. Je sens que je suis suivie... je l'entends aussi. Ils sont plusieurs.
Je me retourne et je vois la bande de hyènes qui se rapproche assez rapidement et qui m'entoure.
L'un dit :
- C'est elle ? »
Un autre répond :
- Oui...
Un autre enchérit :
- Faut arrêter d'énerver le patron, ma jolie...
Il jette son poing sur moi.
Toute la colère emmagasinée sort d'un coup. J'attrape son poing et lui tord le bras, il se casse. Je le saisis ensuite et le mets devant moi comme bouclier. J'attrape mon pieu et je crie :
- Vous êtes des Humains... Partez, je ne veux pas vous tuer.
Un autre se jette dans ma direction, mais je pousse ma victime sur lui. Je jette le pieu sur le sol, sinon je vais commettre un acte que je ne me pardonnerai pas.
Tout à coup, mes mains picotent, mais pas comme à leur habitude. Je me sens envahie d'une telle force, que je n'attends même plus qu'on vienne me chercher, je fonce sur eux, plus enragée que jamais. Même si je sais me battre proprement, ça n'a plus rien de gracieux, je deviens complétement animale ! Je mords, j'arrache une oreille avec mes dents, je suis dans un tel état de transe que je ne contrôle plus rien, plus aucun de mes gestes n'est calculé.
J'en perds toute réalité. Quand je reviens à moi, j'ai du sang partout et les individus sont couchés sur le sol. Ils sont dans un sale état, mais après vérification ils ne sont pas morts. Ouf !
ça valait bien la peine que je me ruine pour cette soirée, pour le peu de temps que j'y suis restée et ensuite être attaquée ...
Je me faufile en courant dans les rues des habitations étudiantes. Quand je me sens hors d'atteinte, je ralentis le pas pour récupérer mon souffle. Il commence à pleuvoir à verse. Ça, c'est le bouquet ! C'est l'Angleterre et quand il pleut, c'est épouvantable. Je n'arrive même plus à voir clair tant j'ai de l'eau dans les yeux. Pour couronner le tout, un des étudiants a mis sa musique à plein volume pour en faire profiter tous ses petits camarades. Donc, j'ai droit à du Rihanna et son « Umbrella ». Il a le sens de l'humour. J'en ai plein les oreilles, en plus des tapotis de la pluie...
Mes mains redeviennent folles. Il est là... encore, à chaque fois qu'il y a un truc qui dérape. Je craque. Je fonds en sanglots. C'est même bien plus que des sanglots, c'est un gros chagrin. Je suis épuisée par tout ça....
- Ça suffit, laisse-moi maintenant. Je suis à bout, j'en peux plus de lutter contre toi.
Ma tristesse ne cesse de grandir.
Je le sens, il est derrière moi. C'est une manie ces derniers temps. Il pose ses deux mains sur mes poignets.
J'entends toujours la musique de Rihanna, et finalement, elle n'a jamais eu autant de sens pour moi que cette nuit sous la pluie.
Je murmure... :
- Arrête.....
- Tu ne le veux pas... Et puis, tu es à moi. C'est écrit comme ça.
Non... je ne le veux pas. Il a raison. En fait, j'ai besoin de lui. Il est mon air et là... j'ai besoin de respirer.
Une de ses mains remonte le long de mon bras jusqu'à ma gorge, qu'il étrangle un peu.
Je sens son attirance pour moi comme si je pouvais la toucher. Je n'ai plus envie de lutter. Je l'aime... vraiment.
J'entends de loin :
- Aleeeex ! Aleeeex, t'es ou ????
C'est Marck, il ne m'a pas vue.
Yann me murmure à l'oreille :
- Je viens te chercher cette nuit. Rentre chez toi et prépare ton sac. Je viendrai...
Il s'échappe par des ruelles peu éclairées.
Marck m'a repérée et court vers moi.
- Mais qu'est-ce qui t'a pris de partir comme ça de la soirée ? »
- Je ne suis pas partie... On m'a fichue dehors.
Cette chanson qui continue à résonner...
Je refonds en larmes. Les vannes sont ouvertes et n'ont pas l'air de vouloir se refermer.
- Ecoute Marck.... On va arrêter là. Je vais partir quelques jours faire le point. Je ne sais pas quand je rentre, je ne sais pas si je rentre... mais faut que je parte.
Marck me regarde avec stupeur. Il me voit avec des yeux de raton laveur, car mon maquillage a coulé, une partie de ma robe déchirée, mon fond de teint qui se dissout sous la pluie, mais aussi des traces de sang sur le visage, les épaules et les mains....
- Alex... tu as du sang partout, mais qu'est-ce que tu as eu ?
- Marck... Laisse-moi, s'il te plait. Va rejoindre les autres...
Je rentre chez moi. J'ai besoin d'arrêter cette conversation.
Arrivée chez moi, je suis si trempée qu'on me suit à la trace. On dirait qu'on m'a jetée dans une piscine et que je viens juste d'en sortir.
Yann est devant la porte.
- Dépêche-toi, on n'a pas de temps à perdre.
Je m'exécute.
- Mais qu'est-ce qu'il y a ?
- Tu penses que c'est anodin de se faire poursuivre par des goules ? Elles voulaient te tuer !
Il s'agite dans ma garde-robes et fait mon sac avec moi. Maquillage, brosse à dents, même mes cours... je n'ai jamais été aussi vite pour faire mon sac. Il y a mis tous les vêtements qu'il a pu y mettre, comme si je partais définitivement. Je prends vite mon nounours « raton », c'est le seul objet qui me suit depuis mon enfance et le seul qui pourrait vraiment me manquer.
Il attrape mon sac à peine fermé, avec la queue de mon nounours qui dépasse. Un bref moment, je trouve cette image insensée. Mais il me fait revenir sur terre en m'attrapant les paumes.
Je pensais me retrouver dans sa cabane, pas du tout... On est dans une ruelle sombre.
- Bienvenu à Londres, me dit-il.
La rue semble mal famée ; pourtant, j'y aperçois une petite auberge éclairée, avec des géraniums aux fenêtres.
Il me prend par la main et m'emmène à l'intérieur. Il va directement à l'accueil, demande une chambre et m'y emmène avec hâte.
- Tu me fais mal à tirer sur mon bras comme ça !
Il me pousse à l'intérieur de la chambre et ferme derrière lui !
- Tu t'es mise dans de beaux draps. Ils sont tous à ta recherche. Qu'avais-tu besoin de continuer ton enquête ?
- Comment le sais-tu ?
Je réfléchis deux secondes.
- Mais que je suis idiote. Christie...
- Et ce soir, tu as voulu t'en prendre à Carl. Il est déjà au courant pour les goules.
- Arrête Yann, c'est toi qui lui as dit ? Je t'ai senti. Je sais que j'ai eu une décharge d'adrénaline à un moment lors de la bagarre et qu'elle ne peut venir que de toi.
- Non.
- Si, et tu sais très bien que c'est pour ça que ces froussards ont détalé.
- Non... en fait une autre équipe de goules venait les aider, mais quand ils les ont vus par terre, ils ont prévenu Carl et les ont rapatriés.
Ils te considèrent maintenant comme ingérable et menaçante.
Ils veulent ta peau !
J'ai froid. Je n'ai plus envie de l'écouter. Je me déshabille devant lui et vais prendre une douche bien chaude. Je tente de faire le point dans ma tête. Mais en fait, je suis épuisée. J'ai juste envie de dormir.
Après ma douche, je me sèche à peine les cheveux et je retourne dans la chambre.
Yann est sorti.
Je m'allonge sur le lit, quand j'entends son téléphone portable sonner sur la table de chevet.
Je regarde, c'est un message. ça me démange, j'ai envie de l'ouvrir.
Je l'ouvre.
Je lis « OK » venant de Carl.
Je me demande à quoi répond ce message.
Je vais dans les messages envoyés et je lis :
« Elle est sous contrôle »
A ce moment-là, Yann entre dans la chambre avec un sac du McDo.
Il me voit, son téléphone à la main.
- Sous contrôle de quoi ? Sous ton contrôle à toi ? Tu m'as menti !
- Ok.
Il ouvre la porte de la chambre.
- Si tu crois que je t'ai menti, sors !
- Yann... Je suis fatiguée... J'en peux plus. Je ne comprends pas ce qui se passe. Avec toutes ces disparitions ? Je ne comprends même pas qu'avec toutes ces années, rien ne soit apparu au grand jour. Personne ne se pose de questions ?
- Mais qu'est-ce que tu crois, Alex. Ils sont au courant.
- Ils sont au courant ?Qui est au courant ? Mais qu'est-ce que tu racontes ?Mais toi, tu les connais, tu es avec les Vampires ? Tu dis que c'est ton monde. Tu autorises qu'on tue des gens... Je ne comprends pas !
- Tu autorises aussi qu'on tue les animaux ! C'est la chaîne alimentaire ça, Alex.
- Mais tu t'entends ? Tu compares l'Humain à des animaux ?
Il est fou ?
- Mais c'est-ce qu'on est, Alex, évolués certes, mais des animaux quand même.
- Ton discours m'écœure.
- D'où je viens, on ne peut plus s'autoriser à penser autrement.
- Mais ces gens ont une famille, ils comptent pour quelqu'un.
- Imaginons que tu aies une famille avec des enfants et qu'on soit dans un moment de crise aigüe. Tu n'arrives plus à les nourrir. Tu vois que le voisin a un chien bien gras. Ce n'est pas pensable maintenant, mais en temps de crise ?
- Mais stop YANN ! Tu es dans un pur délire, là ? C'est la crise chez les Vampires, peut-être ? Tu tentes de justifier l'injustifiable en racontant n'importe quoi !
- Ici, la plupart des jeunes sont sans attache. Donc, ils ne manquent à personne et personne ne les recherche. Tu penses que cette île a été colonisée pour quoi ?
- Comment ça ?
- Pendant le 19ème siècle, sous Victoria, beaucoup de disparitions ont eu lieu en Angleterre. Mon arrière-arrière-grand-père fut chargé de fonder cette université pour débarrasser l'Angleterre de ses Vampires. D'où les bourses d'études pour appâter l'étudiant. Et l'étudiant s'en accommode, car c'est la seule unif qu'il peut s'offrir. Alors tes remords sur la chaîne alimentaire, Alex... Tout est parti d'une idée Humaine.
- La reine Victoria ?
- Non, un de ses ministres de la Sécurité interieure. Victoria était trop « Humaine » pour penser à ça. Et lui, il a pensé à la sécurité de son pays. Mets-toi à sa place ! C'est tout à fait légitime. Le bon vieil instinct de survie qui nous caractérise tous, Humains, Animaux, Vampires...
Toute cette humanité dans laquelle je croyais s'effondre.
Je mets les mains sur mon visage pour cacher mes émotions et surtout les contrôler.
- Arrête, je ne sais plus où j'en suis.
- Ton petit monde s'écroule, Alex ?
- Je suis en colère, et tu continues à être cynique ?ça t'amuse... sadique !
- Toute ma famille, Alex, a été condamnée à vivre cet enfer, alors je pense que tu peux pardonner mon cynisme peut-être..., me dit-il énervé. C'est clair quand on vit dans ta petite campagne...
- Plus je t'écoute, plus je perds pieds. Dans ma campagne, au moins, on est civilisé.
- Repose-toi pour cette nuit. Ici, on est en sécurité. Ils ne viendront pas te chercher à Londres. Ils ne savent pas qu'on peut se téléporter. Tiens... mange ! me dit-il en me tendant un hamburger.
ça me change des barquettes Igloo, j'apprécie. C'est bon la « junk food », quand même.
Après le repas, j'enfile quelques vêtements confortables pour la nuit. Je n'aime pas les pyjamas.
Yann me prend dans ses bras, en mode « cuillère », comme pour me protéger ou me réconforter.
Je me rends compte qu'il a pris des risques pour moi cette nuit. Mais je ne sais pas encore dans quelle mesure. Je le découvrirai assez tôt. Là, j'en ai eu pour ma soirée. J'ai plutôt envie d'appliquer la politique de l'autruche et de dormir... Dormir, ... Dormir.....
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