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Chapitre 8

J'ai fait décoller un avion. Je crois que le sourire extatique qui barre mon visage depuis ce matin n'est pas près de s'estomper.

Bien sûr, ce n'était qu'un rêve. Mais tout paraissait si réel que je peux me souvenir de chaque geste, chaque consigne, comme si j'avais piloté des dizaines de ces engins dans ma vie.

Générateur Un. Deux.

Engine start : ground.

Paré au décollage.

Bon sang. J'ai fait décoller un monstre d'acier, avec deux ailes et des moteurs qui crachent le feu. Et personne n'est mort !

Enfin, personne n'est mort... pour le moment. Mon réveil a sonné avant que j'ai pu faire atterrir la bestiole et cette perspective fait couler des larmes glacées sur ma nuque et dans mon dos. Ces rêves à épisode deviennent franchement effrayants. Est-ce que je suis censée finir la manœuvre la nuit prochaine ? Est-ce que mon gentil cerveau ne pourrait pas sauter directement à la prochaine étape : « Bienvenue à Kansai Kokusai Kūkō. Le commandant et son équipage espèrent que vous avez effectué un agréable voyage ».

Parce que c'est la première chose que j'ai regardée, ce matin. L'aéroport international de Kansai est situé sur une ile artificielle rectangulaire au large d'Osaka. Vu du ciel, ce n'est guère plus qu'un timbre-poste. Un tout petit timbre-poste avec trente mètres d'eau glacée en bout de piste. Je ne sais pas si je suis censée crier « Banzaï ! » en atterrissant, mais je doute qu'on échappe à la trempette.

Hahahaha. Je deviens folle.

Mes nuits sont en train de s'immiscer lentement dans ma vraie vie au lieu de rester sagement confinées à ma chambre et à mon oreiller. A peine arrivée à l'agence, je viens de passer vingt minutes à m'exercer sur un simulateur d'avion en ligne, en faisant un effort désespéré pour retenir les procédure d'atterrissage. Et en apercevant un cutter sur la table des maquettes, je me suis demandé si ça ferait une bonne arme de poing dans un combat rapproché.

- Ben... Comment tu sais ?

Je sursaute et me retourne face à Fred que je n'ai pas entendu débouler. Il est bouche bée et pointe mon écran d'ordinateur d'un doigt accusateur.

- L'avion...

Je me sens prise en faute et je fais disparaitre promptement l'écran du simulateur en ligne.

- Rien, rien... Un petit truc que je regardais.

Fred me scrute d'un air franchement indigné.

- C'est Amir qui t'a dit ?

- Quoi, Amir ?

- Pour la campagne Air France !

Je le fixe à mon tour, un peu désorientée.

- La campagne...

- Oui, m'interrompt-il d'une voix surexcitée, l'agence est en compet' sur Air France. Et Amir m'a prévenu qu'on serait la team en charge de la créa. Mais c'était censé être off !

Amir Saaji est le directeur du développement de l'agence, en chasse des nouveaux clients. Air France serait un compte prestigieux pour une société de notre taille, et qu'on envisage de nous confier le bébé en dit long sur notre progression au sein de l'équipe créative.

- Mais t'as pas besoin d'apprendre à voler, tu sais ! s'amuse mon partenaire avec un rire joyeux. Tout ce qu'on te demande, c'est de trouver des idées !

Ha ! Si tu savais à quel point ma vie est devenue beaucoup plus compliquée que ça.

Il se laisse tomber sur son fauteuil en secouant la tête d'un air incrédule.

- Je ne sais pas comment t'as réussi à avoir le scoop.

Puis il cligne d'un œil admiratif dans ma direction.

- L'information c'est le pouvoir, hein ?

Je me contente de sourire d'un air modeste pendant que mon cerveau lui, turbine à la vitesse d'un quadriréacteur survolté : est-ce que mon rêve cette nuit est lié à cette annonce ? Une bribe d'information que j'aurais surprise sans bien la comprendre ? Un bruit de couloir ? Une intuition ? Le stress de porter sur mes épaules ce qui sera sans doute le plus gros projet de l'agence cette année ?

Si c'est vrai, cela confirme une fois de plus que la mécanique des rêves n'est que le recyclage de nos anxiétés bien réelles. Comme si notre subconscient nous préparait à affronter nos craintes ou nos frustrations. Ikvar, Hax, Micham... vous n'êtes que les gentils reflets de ma peur de n'être pas à la hauteur d'un des défis les plus importants de ma carrière. Et les coups de bâton que tu me donnais, Flora, c'était moi-même qui me les infligeais.

- Toc, toc ! Vous avez deux minutes ? interrompt une voix claire qui me sort de ma torpeur.

C'est Amir, charmeur et tout sourire, une chemise blanche qui fait ressortir sa peau mate, et la mine gourmande de celui qui calcule déjà sa prime de fin d'année.

- J'ai rentré la plus grosse compet' du moment ! Tout Paris est dessus et j'ai bien l'intention de gagner ! claironne-t-il en nous tendant un épais dossier relié. Vous êtes prêts à tout défoncer ?

On dirait un GO dans un club de vacances mais il est difficile de résister à son enthousiasme contagieux. Je jette un œil curieux sur la page de garde qui affiche en lettres capitales « Consultation Air France – Brief Créatif » tandis que Fred se charge de l'assurer de notre motivation.

- N'allez pas me planter ce dossier, c'est une lourde responsabilité pour vos fragiles épaules... grince une quatrième voix.

Nos regards convergent vers la porte du bureau : Bernard Varando ne pouvait pas s'empêcher de venir déployer ses ailes de vautour. En voilà un que je recyclerais bien dans un prochain rêve : je le mettrais entre les mains de Flora qui l'éplucherait proprement.

- L'agence vous donne une chance, bien que j'ai fait part de mes craintes concernant votre inexpérience, susurre-t-il d'un ton aigre qui glace aussitôt l'ambiance.

Son regard balaye la pièce, et l'expression est à prendre au sens littéral : j'ai vraiment le sentiment qu'il nous époussette comme deux déchets qui lui offenseraient la vue.

- Bien sûr, tout passe par moi, ajoute-t-il sur un ton lourd de menaces, avant de s'éloigner vers son donjon maléfique à la recherche de sang frais.

Amir nous adresse un sourire désolé, tandis que j'essaie de contenir une nouvelle bouffée de stress. Je vais passer un mois à me ronger les sangs sur la moindre idée qu'on présentera, et que ce vampire se fera un plaisir de dépecer mot par mot.

Bon Dieu, si les rêves servent vraiment à recycler le stress de la journée, je n'ai pas fini d'en faire décoller, moi, des avions !

- Bon faut qu'on passe au studio, temporise Fred en m'arrachant à mes ruminations.

C'est vrai que la prod du film Wild Girl est prévue pour ce matin. Un vingt secondes gentiment girl power sur une fille qui compte les moutons pour s'endormir et les garçons pour se réveiller. Je n'en suis pas très fière mais le client a adoré.

- Te prends pas la tête, ajoute mon binôme en étouffant un bâillement paresseux. Ça va bien se passer.

Il consulte sa montre :

- On y va en scoot' ? C'est à Montreuil...

- Je monte avec toi, j'ai besoin de prendre l'air.

Il acquiesce en faisant tournoyer ses clés tandis que j'attrape le casque de secours que je conserve toujours sous mon bureau. Je n'ai pas envie de mettre ma tête dans celui que Fred garde dans son scooter et dans lequel toutes ses conquêtes d'un soir doivent glisser leurs cheveux transpirants et permanentés.

- J'espère qu'il y aura des croissants, j'ai pas pris mon petit dej, s'inquiète mon partenaire pendant que je range le brief Air France dans mon sac pour le lire à tête reposée.

Assister à un shooting photo ou un tournage de pub, c'est marrant la première fois. Et puis on comprend vite qu'il s'agit surtout de passer une journée interminable à se prendre la tête sur le cadrage d'un arrière-plan ou la couleur d'un accessoire qu'on discernera à peine. Ou à se morfondre tandis qu'une myriade de techniciens affairés règle des détails insignifiants pour justifier leur rémunération.

Je vais avoir du mal à garder les yeux ouverts.


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