XIII- Secrets dévoilés
XIII
Je m'attendais à tout, sauf à ça.
Quand j'avais refermé la porte derrière moi, je m'étais retrouvée face à mon père qui m'attendait, le visage impassible.
Dans ma tête, tout ce mélangeait. J'étais incapable de dire quoi que ce soit, incapable de bouger. Que pouvais-je bien lui dire? D'après ce que j'avais compris, tout ce que j'avais découvert aujourd'hui, il le savait déjà.
J'allais bafouiller une excuse par rapport à l'heure tardive pour rompre le silence mais il me devança. Sans prévenir, il s'approcha de moi et me prit dans ses bras.
C'est dans ses bras que je pris soudain conscience que ma vie ne serait plus du tout comme avant. Je versai une larme, puis deux, puis trois, je m'abandonnai dans les bras de mon père. Je pleurai pour la première fois devant mon père, depuis la naissance de ma sœur.
"-Pourquoi ces larmes?" Me demanda mon père, inquiet.
Il n'avait pas tort...Je ne savais même pas ce qui m'attendait ni ce que signifiaient ces révélations, mais je pleurais quand même. Je disais adieu à ce passé qui était si simple, où je vivais dans l'ignorance et l'insouciance...
Je réussis quand même à lui faire un sourire. Je ne voulais pas qu'il croit que j'étais malheureuse. Apres tout, j'allais enfin avoir des réponses...Et pour la première fois, je me sentais prête à les entendre.
Il se recula et m'observa un moment avant de me demander:
"Est-ce que ça te plait, là bas?"
Je n'en revenais pas. C'était lui qui me posait des questions...Je me rendis compte à quel point il tenait à moi. Je me ressaisis et fis oui de la tête en essuyant mes larmes inutiles. Il parut soulagé.
Il me fit m'asseoir sur le canapé et vint se mettre à coté de moi.
"-Je t'écoute.
Je fus surprise par sa manière d'entamer la conversation. Enfin il allait m'ouvrir la porte de mon passé, enfin il allait répondre à mes questions...Et je savais qu'il faisait un grand effort pour se confier ainsi et je lui en étais reconnaissante.
J'avais tant attendu ce moment. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine. J'allais savoir. Mais les questions se bousculaient dans ma tête. Les mots me brulaient les lèvres mais je ne savais pas par où commencer...Après un long silence, je bégayai:
-Je...eu...Raconte-moi...maman.
Il prit une grande inspiration.
-J'ai rencontré ta mère dans une ...bibliothèque. Me dit-il un sourire en coin.
Je ne pus cacher mon étonnement. Il continua.
-Je travaillais sur un projet avec ton oncle Baptiste. Une femme se baladait dans les rayons, non loin de nous. Tout en travaillant, je la suivais du regard. Elle flânait entre les livres, les feuilletait, les reposait puis en cherchait d'autre. Son regard croisa le mien et je la trouvai alors magnifique. Ses cheveux châtains étaient remontés en queue de cheval et des mèches tombaient sur son visage délicat. Ses yeux sombres posés sur moi me faisaient frissonner. Ils étaient magnifiques. Gris comme un ciel d'orage... comme les tiens.
Il se tut et m'observa un instant. Je le laissai faire.
-Puis ton oncle partit pour un rendez-vous important, me laissant travailler seul. Il se faisait tard, mais la belle inconnue était toujours là. Je continuais de travailler mais la fatigue commençait à me gagner et seul, j'avançai de moins en moins vite.
Alors que je ne trouvais pas de solution à une des nombreuses contraintes du projet, l'inconnue, qui s'était approchée discrètement, me proposa son aide. Je ne pouvais pas refuser. C'est ainsi que nous fîmes connaissance et que nous passâmes la soirée à travailler et à rigoler ensemble. Plus rien n'existait autour de nous et nous ne vîmes pas le temps passer. Quand nous sortîmes de la médiathèque, nous étions seuls. Il faisait nuit et ne voulant pas la quitter, je l'invitai chez moi.
Nous parlâmes pendant des heures. Des heures où j'appris à connaître sa personnalité et où nous nous découvrîmes pleins de points communs. Mais, elle restait tout de même très mystérieuse... Ce qui renforçait ma curiosité. Je sentais naître en moi un sentiment merveilleux. Puis elle m'expliqua, à regret, qu'elle ne pouvait pas rester, qu'elle avait des responsabilités et qu'elle devait partir, ce que je pouvais comprendre. Mais je ne voulais plus la quitter. L'heure qui suivit, je réussis à la convaincre de passer la semaine avec moi.
Ce fut une des plus belles semaines de ma vie, je ne l'oublierai jamais...Puis, la veille de son départ, ta mère m'annonça qu'elle était enceinte.Elle m'expliqua alors qu'elle avait des choses importantes à me dire.
A mon grand étonnement, elle m'avoua qu'elle connaissait mon secret. Elle me confia alors le sien, elle aussi était différente. Elle me parla alors de l'Olympe et de la mythologie, de ses responsabilités et m'explique pourquoi tu ne serais pas une enfant comme les autres. Je l'écoutais, je comprenais, mais je ne savais pas comment réagir. Puis elle me fit ses adieux.
Le lendemain, elle était déjà partie. Je ressentis soudain un vide immense dans mon corps, dans ma vie. Je commençai à douter de ce que j'avais vu, vécu, de ce qu'elle m'avait dit... Puis je te vis, toi. Tu étais couchée dans un berceau, une fine couronne de laurier sur la tête. Je te pris dans mes bras et je souris. Tu redonnas un sens à ma vie.
Il se racla la gorge.
Voilà, tu connais l'histoire.
Un long silence suivit. Je sentis alors le poids énorme qui pesait sur mes épaules depuis tant d'années disparaitre.
-Et Tia?
-Quand je suis parti en Grèce, j'ai été au temple dédié à ta mère et je l'ai prié de venir. Je voulais la revoir, c'était plus fort que moi... Elle a répondu à mon appel et est restée quelques jours avec moi...Puis ta sœur est arrivée.
Mais nous ne savions pas si elle avait hérité des mêmes gênes que toi. Ta mère pensait que vous seriez différentes...
J'encaissai l'information. Ma mère était donc bel-et-bien une déesse grecque...
-Mais...Chiron a dit que je serai différente des autres demi-dieux...Pourquoi?
Il parut d'abord gêné, puis il inspira profondément.
-Ce que je vais t'annoncer est plus simple habituellement. Mais dans ton cas, il va falloir jongler avec deux cultures en permanence...Je vais donc te demander un instant d'oublier ta mère, la colonie, et tout ce qui concerne la mythologie grecque.
Oublier? Il me demande d'oublier? Comment voulait-il que je pense à autre chose? J'acquiesçai malgré moi, je voulais avoir des réponses.
-Nous ne sommes pas humains.
En temps normal, j'aurais ris. Je me serais dit : "Mais bien sur! Et puis quoi encore!?" Mais après la journée que je venais de passer, je ne pouvais pas me le permettre. J'écoutai alors attentivement, voulant en savoir plus.
-Nous faisons partie d'un peuple que nous appelons les Enkidars. Les Enkidars vivent sur terre depuis la création de la vie, nous vivons parmi les hommes et les protégeons, en quelque sorte.
-C'est-à-dire?
-Certains pourraient nous qualifier d'anges...
-Vous avez des ailes? Demandais-je, osant à peine y croire.
Il esquissa un sourire en coin. Il était beau quand il souriait.
-Oui, Nous avons des ailes...
J'en restai muette.
-Et je dis "nous" car je te considère parmi nous, même si tu n'as pas encore eu ton réveil...
-Qu'est ce que le réveil?
-Toi, pour le moment, tu es une non-née car ton réveil n'a pas encore eu lieux. Mais, notre monde est assez...compliqué. Je préférerais tout expliquer une autre fois...
A quelle heure finis-tu demain?
-Je rentre à, 15heures...
-Parfait! J'aurai tout le temps pour tout t'expliquer et répondre à tes questions...
Il se leva.
-Tu as faim?
Mais je restais assise sur le canapé, ébahie, ne pouvant répondre. Comment pouvait-il me laisser comme ça? Mais son regard, où était apparue une lueur que je ne lui connaissais pas, se fit insistant.
-Eu... non.
-Bien, vas te coucher, tu as besoin d'une bonne nuit de sommeil...
Je réussis à m'extraire du canapé et me dirigeai vers ma chambre.
-Eu...Papa?
-Je t'écoute.
-Nous...eu...les Enkidars, on est nombreux?
-Oh oui! Et beaucoup plus que tu ne le penses!
-J'en connais?
Il me regarda tendrement.
-Ta grand-mère en était une. " dit-il d'une voix douce.
Je le regardai un instant, ne pouvant cacher ma surprise, puis je refermai la porte. Mon corps se mit alors en pilotage automatique. Je me changeai, me brossai les dents et fis mon sac mais mon esprit était ailleurs...Dans deux autres mondes que je ne connaissais pas encore...
Oui car cette seule et unique journée avait bel et bien transformé ma vie.
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