Chapitre XV : Cérémonie de naissance - Partie 3/4
Les voix autour d'elle hurlaient mais elle n'entendait plus rien. Seuls comptaient les yeux de la fillette, ces yeux marron qui la dévisageaient. Cette connexion qui était en train de se créer et qui la faisait souffrir. Faisant fi de la douleur qui la rongeait, elle se rapprocha de l'enfant et posa sa main sur sa tête, sentant un courant électrique la parcourant de part en part. Elle ressentit soudainement tout ce que ressentait l'enfant. Le sourire de Gaïa, apaisée à son contact, la contamina aussitôt. Elle se sentit bien, comprenant que la fillette allait bien et était rassurée de la voir. Ne comprenant pas tout ce qu'il se passait en elle, Marie B parvint tout de même à prendre conscience que les sentiments de Gaïa influaient sur les siens. Le bonheur et la joie de l'enfant s'immiscèrent en elle, lui procurant un bien être qu'elle n'avait pas ressenti depuis trop longtemps, et taisant tous les sentiments des autres personnes auxquelles elle était connectée. Gaïa face à elle, il lui semblait que, pour son corps et son cerveau, personne d'autre n'existait.
- Viens, Gaïa.
Uranie hésita quelques secondes et fut surprise de voir sa fille tendre les mains vers la femme. Lorsqu'elle lui confia, elle comprit que quelque chose se passait entre les deux. Elles se maintenaient toutes les deux les yeux dans les yeux, presqu'immobiles.
- Reprends Gaïa, souffla Marie B.
- Ma belle !, s'écria Rama.
Il la rattrapa avant qu'elle ne tombe à terre, totalement vidée par ce qui venait de se passer devant leurs yeux, et à quoi ils n'avaient pas compris grand-chose. Il l'allongea sur le canapé et la borda avant de rejoindre Lucifer.
- Je ne sais pas ce qu'il se passe.
- Uranie est partie coucher Gaïa, elle s'est endormie subitement.
- Je me demande si ce n'est pas une connexion... C'est vrai que c'est la première fois que je la vois confrontée à un enfant si jeune. Avec les autres, elle s'est connectée à des adultes. Quant à ses parents, elle était bien trop jeune pour s'en souvenir. Si tant est que la connexion qu'elle avait avec eux n'ait pas été créée alors qu'elle était encore un fœtus.
Après une heure de discussion, et le retour d'Uranie, Marie B murmura, se réveillant :
- Elle a faim...
- Qui ça ?, demanda Rama.
- Gaïa. Elle a faim, elle va se réveiller...
Au même moment, le babyphone fit entendre les pleurs de l'enfant.
- Tu t'es connectée à elle ?
- Oui. Mais c'est différent cette fois, Rama. J'ai l'impression de ressentir bien plus que quelques sentiments... Et pas que pour elle...
- Gaïa est fatiguée, murmura Marie B.
Son époux se tourna vers elle, tandis qu'ils jouaient à un jeu de cartes dans le train qui devait les mener chez Lucifer et Uranie, pour la cérémonie de la naissance qui aurait lieu le lendemain soir. Sa femme lui avait expliqué cette connexion et la manière surprenante dont elle s'était faite, mais il était toujours aussi épaté par elle.
- Tu sais tout de ce qu'elle vit, c'est ça ?
- Oui et non. C'est pire encore. Tu veux que je t'explique ?, et, comme son mari acquiesçait, elle ajouta : Je sais que là, à cet instant, Gaïa est fatiguée, Ho Sang contrariée, Shinji semble... agacé, je dirais ! Rama et Wladimir sont stressés, je pense que c'est à cause de la cérémonie demain, mais ça, je ne fais que le supposer. Hermès... Hermès va bientôt craquer s'il continue à s'énerver. Et toi... toi tu sembles attristé... Pourquoi ?
- Je... Je suis triste pour toi... Je ne sais pas comment tu vas faire pour vivre tranquillement avec tout ça. Tu vis déjà avec les connexions depuis plusieurs années mais, hormis pour Hermès, elles semblaient plus floues, je me trompe ?
- Non, tu ne te trompes pas. Elles venaient à moi uniquement lors de gros changements d'humeur. Tristesse, énervement. Là, c'est moins diffus, plus précis. Et... plus régulier également. Sept personnes à ressentir en plus de moi-même, j'avoue que ce n'est pas ce qu'il y a de plus simple. Mais, voyons le bon côté, je ne serai jamais seule !
- Rama et Wladimir vont bien finir par trouver une solution à tous ces problèmes...
- Je ne sais pas, ma Licorne. Je suis bien différente d'eux ou de toi. Je suis un animal, comme dirait la comtesse de Kergianov !
Natacha et Dimitri s'engouffrèrent dans leur voiture de location, leurs valises posées dans le coffre. Afin d'éviter tout désaccord, l'un comme l'autre avaient évité, durant tout leur trajet en avion, et sans se concerter, d'aborder les sujets délicats, comme Marie B, Rama ou encore leur enfant. Mais, plus la route défilait devant eux, plus ils savaient que la confrontation devrait avoir lieu. A quelques kilomètres de leur arrivée, Dimitri craqua :
- J'espère que tu n'agresseras pas Marie B...
- Pour qui donc me prends-tu, Dimitri ? Une folle qui ne saurait pas se tenir ! Je te rappelle que j'ai fait accoucher Uranie seule, dans une chambre, avec cet animal ! Et nous sommes toutes les quatre toujours vivantes, à ce que je sache...
- Cesse de prendre tout mal... Ce n'était qu'un conseil !
- Non, ce n'était pas un conseil. Les conseils ne sont pas formulés ainsi, et je te connais assez pour savoir quand tu fais un reproche ou un conseil, mon cher. N'oublie pas que cela fait plus de deux-cents ans que je partage ta vie, au cas où tu l'aurais oublié !
- Avec tous tes déplacements, je ne sais pas vraiment combien de temps...
- Comment oses-tu me reprocher cela ? Nous avons décidé ensemble de prendre en charge le Clan de Kergianov ! Nous sommes arrivés, mais sache que la discussion, si elle est en pause, n'est pas close pour autant !
Dimitri regretta aussitôt le reproche qu'il venait de faire à son épouse, mais il était trop tard pour revenir en arrière. Certes, le poids du rôle de cheffe de clan de Natacha avait été un frein à leur bonheur, mais il y avait sa part de responsabilité, et il ne devait pas l'oublier.
Il vit sa femme couper le contact et se précipiter à l'extérieur, récupérant sa valise dans le coffre sans l'attendre. Il n'avait aucun doute sur le fait que leur conversation, le surlendemain, serait très désagréable.
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