- Alors, jeunes gens, vous faites bande à part ?

Le quatuor se tourna vers Lucifer qui se tenait debout à côté d'eux. La réponse d'Orlando fut immédiate, puisqu'il se décala d'une place pour permettre à la créature de s'asseoir.

- Aucunement ! Tu peux venir avec nous, si tu le veux.

- Avec plaisir ! Ma chère et tendre et en grande conversation avec Astéria et Polymnie, et je crois que cela concerne Wladimir. Je vais devoir rester sans elle quelques temps !

- Je me permets de me joindre à vous également, ajouta Ulysse, qui venait d'arriver. Rama est en train d'expliquer à Wladimir que l'on peut se mettre en couple avec quelqu'un sans avoir d'amour pour lui... Je crois que les mœurs changent et que je ne les comprends plus... Je dois être un peu dépassé !

Ho Sang hésita quelques instants puis, une fois la créature assise à côté d'elle, se tourna vers elle pour demander :

- Mais... cela ne vous gêne pas de vous asseoir à côté d'humains ?

La femme vit aussitôt le regard noir que lui lança son amie, mais continua de fixer Ulysse pour qu'il lui réponde. Elle voulait comprendre le racisme dont il avait fait preuve vis-à-vis de Lucas.

- Bien sûr que non. Pourquoi cela me dérangerait-il ? Vous n'êtes pas à une réunion du clan de Satan !

- Il me semblait, d'après ce que Marie B nous a rapporté et vos réactions au mariage de votre fils, que les humains ne soient pas franchement vos amis..., ajouta la femme.

- Ecoutez, jeune femme. Il y a une grande différence entre apprécier une espèce et vouloir l'offrir à votre enfant. Vous aimez les chiens ? Vous n'allez pas vous marier avec.

Lucifer et Marie B manquèrent de s'étouffer en entendant les propos de leur allié. Et lui, continuait sa tirade, ne se rendant absolument pas compte de ce qu'il venait de dire.

- Vous êtes en train de nous comparer à des chiens par rapport à vous ?, s'offusqua Shinji.

- Stop ! On va arrêter là le massacre avant qu'il ne commence, coupa Lucifer. La façon dont s'est exprimé Ulysse est très malheureuse, mais n'avait pas pour but de vous blesser, d'accord ? Ce qu'il voulait dire, c'est que l'on peut être ami avec des humains, pro-humains, et pourtant ne pas souhaiter que son enfant épouse un membre de votre espèce. Pour des raisons bien précises, bien loin de toute haine ou racisme, mais qu'il vous est malheureusement interdit de connaître, d'accord ?

- Et tu es d'accord avec ça, toi, Marie B ?

- Pourquoi est-ce que ça me retombe toujours dessus, même quand je ne fais rien ? Non, je ne suis pas d'accord avec ça, puisque j'ai défendu mon propre projet de loi, je te le rappelle, Shinji. Mais je comprends les inquiétudes d'Ulysse.

- Jeunes gens, nous sommes le soir du réveillon, nous sommes tous alliés, je pense que ce genre de sujet n'a pas sa place ici..., calma Lucifer.

Tous hochèrent la tête, et la créature profita de l'occasion pour interroger Orlando sur leurs futures vacances, désireux de détourner l'attention. Comprenant cela, l'homme lui répondit, embarquant dans sa discussion ses amis et parvenant même à y intégrer Ulysse, soulagé de ne pas devoir répondre à d'autres questions embarrassantes. Marie B répondit à quelques interrogations, la tête ailleurs et les pensées partagées entre son instinct et son demi-frère.

Assis sur sa chaise, face à la table, Hermès mangeait le repas que lui avait préparé sa demi-sœur pour le réveillon. Attentionnée, elle lui avait fait un gratin et cuit une flamiche aux poireaux, ainsi que deux boudins blancs aux truffes. Elle lui avait également acheté une petite bouteille de vin, pour accompagner le plat. Le repas était excellent, comme à chaque fois, et il le termina avec appétit, avant de placer le reste de la tourte dans son réfrigérateur. Cependant, malgré cette attention, il ne se sentait pas bien. Il ne comprenait pas pourquoi sa demi-sœur ne parvenait pas à passer outre son éducation humaine et à s'offrir à lui. Elle lui avait dit qu'il était beau, il était gentil avec elle, il faisait de nombreux efforts pour s'améliorer. Il n'y avait donc aucune raison pour qu'elle ne l'accepte pas, qu'elle ne veuille pas de ses étreintes, juste une fois. Une seule fois lui aurait suffi pour comprendre son instinct et pour connaître ce sentiment que personne d'autre, il en était persuadé, ne voudrait lui offrir.

Il soupira et se leva, balayant du regard le grenier qui était devenu son habitation depuis plus d'un an. Marie B avait tout fait pour rendre l'espace agréable, malgré son manque de fenêtre. Même si la hauteur sous plafond, de deux mètres dix, ne permettait pas au jeune homme de se tenir debout, la pièce d'une quarantaine de mètres carrés, qui recouvrait à la fois cuisine, salle, salon et salle de bain du rez-de-chaussée, était décorée et meublée avec soin. Le matelas, de grande taille, était confortable, ni dur, ni trop moelleux, et se situait au fond du grenier. Presque à l'opposé, à deux mètres environ à gauche de la porte, se trouvait la table sur laquelle il avait mangé, ainsi que deux chaises et le réfrigérateur. En face, sa demi-sœur et lui avaient créé des rangements qui servaient de stockage à la fois à ses vêtements et à la nourriture. Elle était également parvenue à lui faire amener de l'eau froide, en passant deux jours à bricoler la plomberie du rez-de-chaussée et en installant un lavabo, certes peu esthétique, mais fort utile lorsqu'Orlando était chez lui. Le sol avait été recouvert d'une moquette épaisse, qui permettait au jeune homme de pouvoir se déplacer, tout en amortissant au maximum les chocs dus à son poids. Quant aux murs, l'épaisse couche d'isolant avait été masquée par des planches de bois clair, et Hermès les avait décorées avec des posters que sa demi-sœur avait commandés pour lui, représentant bien souvent son film préféré : Hulk. Sur les rangements se trouvaient des bibelots, souvent des objets en bois qu'il travaillait lui-même, ou des cadeaux que lui avait fait Marie B, comme la statuette de son héros.

Hermès se posa sur son matelas, l'âme en peine. Malgré ce confort, sa seule fenêtre sur le monde, à part Internet, restait sa demi-sœur. Et elle ne semblait pas vouloir tout lui accorder...

- Tu sembles soucieux, Wladimir ?, lui murmura Astéria.

- Le clan de Satan va s'étoffer avec la naissance de l'enfant d'Aphrodite. Il est certain qu'ils vont en faire une véritable machine..., soupira l'intéressé.

- Au soir du réveillon toi, tu penses à ça ! Et sinon, bonne année 2027 ! Sérieusement, ne réfléchis pas à ce problème... Nous pourrons voir ça plus tard...

Le regard du musicien se posa sur Marie B, qui dansait avec les autres invités. Encore un masque, pensa-t-il. Décidemment, sa protégée était devenue maîtresse en la matière. Elle savait à merveille donner l'illusion que tout allait bien, alors que son cœur était broyé. Croisant son regard, elle lui fit signe de s'occuper d'Astéria. L'ancien tuteur créaturien observa la créature. Après tout, Rama et Marie B avaient surement raison. Il ne risquait rien à tenter un couple avec la femme. Ils s'étaient rapprochés et découverts de nombreux points communs. En plus, il était bien loin de ne pas l'apprécier.

- Astéria ?, chuchota-t-il doucement.

- Oui ?, interrogea la créature en tournant ses magnifiques yeux verts vers lui.

- Serais-tu d'accord pour tenter de partager ma vie ?

La femme ne répondit pas immédiatement, craignant de ne pas comprendre, et de se faire une fausse joie. Elle interrogea :

- En gros, tu me demandes de sortir avec toi ?

- En résumé... oui.

Elle sauta dans les bras de Wladimir, sous les regards complices de Rama et Marie B. Ils avaient enfin réussi à mettre leur ami dans les bras de la créature. Mais, la joie de la femme laissa rapidement la place à la douleur. Hermès était seul... et il en souffrait. 

Bonjour à tous ! 

Un chapitre de plus en moins ! On avance vite ! Je vous rappelle le rythme de publication : une partie par jour :)

Alors : 

- Que pensez-vous de l'évolution d'Hermès ? Les réactions de Marie B ?  Leur instinct ? 

- La mise en couple de Wlad et Astéria ? 

- Le clan de Satan ? 

Bonne journée à tous :)

Sanguinement-vôtre, 

Gothycka