Chapitre I : Rétrogradation - Partie 1/2
Le Messager se posa dans le canapé, une douleur lancinante dans le ventre la forçant à se tordre en deux.
- De qui parles-tu ?, lui demanda Wladimir, en s'asseyant à ses côtés.
- J'ai senti sa douleur lors de notre promenade... Tellement de douleur...
- Tu as assez payé pour nous tous, ma belle, rétorqua Rama en posant la tête de la femme sur son torse. Ne l'oublie pas...
- Je ne l'ai jamais oublié, mon frère. Je ne l'oublierai jamais...
- Qu'as-tu à dire pour ta défense, Marie-Béatrice ?, interrogea Natacha.
- Rien, répondit Marie B. Mis-à-part le fait d'avoir sauvé un être vivant, je ne suis coupable de rien...
- Cet animal que tu as sauvé était sous le joug d'une loi !, rétorqua la comtesse. Personne n'a le droit de transgresser les lois ! Tu es coupable de trahison ! Et, pour cette raison, je demande la réinstauration de la peine de mort !
Wladimir hurla, d'un son qui lui était presque inconnu. Le cri du désespoir, le même que lorsqu'il avait appris que sa Blanche était décédée. Comment sa mère avait-elle pu oser demander la mise en place de la peine de mort ? Il aurait dû la tuer ce matin où ses parents lui avaient avoué leur secret concernant son épouse. Il ne comprenait pas qu'elle puisse remettre sur le tapis une peine qu'elle avait elle-même poussé à faire abolir bien des années auparavant.
Il sentit les bras puissant de son frère d'armes le retenir et la voix d'Uranie luttant pour Marie B. Ses yeux, brumeux, ne lui permettaient pas de voir tout ce qu'il se déroulait devant et autour de lui. Tout espoir ne pouvait être perdu... La société créaturienne ne pourrait pas laisser voter une telle loi... L'espoir faisait vivre mais, en ce jour, il lui semblait que l'espoir ne tenait qu'à un fil.
- Ne t'inquiète pas, gamine. Beaucoup d'entre eux sont de vieux grincheux, mais ils détestent tuer, murmura Rama.
- Je sais, mon frère, lui répondit-elle, en se blottissant dans ses bras.
Le vent glacé de fin décembre claquait dans les jambes des deux amis, mais ils préféraient rester dehors le temps du dépouillement. Le tatoueur avait hésité un instant à fuir avec sa sœur d'armes, mais il croyait en ce qu'il lui avait dit. La peine de mort avait été supprimée car elle était considérée comme abusive. Lorsque Natacha elle-même avait fait son discours contre cette peine, elle avait mis en avant le fait que les créatures ne pouvaient détenir le droit de tuer une des leurs. Et toutes les personnes qui siégeaient au Ministère à cette époque étaient unanimes : ce discours avait été l'un des plus applaudis depuis de nombreuses décennies. Personne ne prendrait le risque de suivre la comtesse de Kergianov dans cette direction bien trop dangereuse.
Rama leva les yeux vers la porte de l'hôtel particulier. Il avait laissé à Lucifer et Uranie la lourde tâche de contrôler son frère d'armes tandis que lui-même s'occupait de Marie B. Il savait que les créatures auraient du travail car, malgré sa gentillesse et sa bonté naturelles, il avait lu l'énervement et la rage dans ses yeux. Si la loi sur la peine de mort était votée, il serait certain que l'ancien tuteur créaturien exploserait... et que Natacha risquerait sa vie...
- Calme-toi, Wlad, chuchota Uranie. Ton père vient de dire que la peine de mort n'a pas été réinstaurée.
L'intéressé ne répondit pas, se contentant de hocher la tête. Il regardait Natacha, qui se trouvait en face de lui, fixant l'assistance de ses yeux verts semblables aux siens. Non contente de lui avoir volé sa femme presque quatre-vingt-dix ans plus tôt, elle tentait à présent de lui enlever sa protégée. Elle allait payer. Tôt ou tard, elle paierait...
- Marie-Béatrice, tu peux remercier tes alliés, tonna la comtesse. La peine de mort n'ayant pas été votée, tu ne pourras donc pas être punie de cette façon !
L'agacement s'entendait dans la voix de la créature. Si la loi n'avait pas été instaurée, c'était parce que les membres de son clan ne l'avaient pas soutenue. En réinstaurant la peine de mort, elle aurait pu mettre un terme au danger que contenait en elle, sans même s'en douter, la femme. Ce danger que tous faisaient fi d'ignorer, la laissant seule pour l'affronter, telle une harpie dangereuse et dégénérée.
Elle devait à tous prix trouver une solution pour stopper la zizanie qu'avait provoquée depuis son arrivée dans la vie de son fils, et du Ministère, Marie B. La femme était dangereuse, elle suivait son instinct et n'avait pas hésité à désobéir et transgresser les lois. Il ne fallait pas que ce genre de comportement ne devienne « normal », voire que Marie B ne soit une sorte de référence au Ministère. Natacha se devait de l'exclure.
- Merci, belle panthère, murmura Marie B à Uranie. Je sais que tu as parlé en ma faveur aux membres du clan. C'est grâce à toi que cette loi n'a pas été votée.
La créature regarda avec stupéfaction la femme. Son frère d'armes avait déteint sur elle, voilà à présent qu'elle ajoutait des « belles » devant le prénom des femelles. Si l'instant n'avait pas été aussi tragique, Uranie lui en aurait fait la remarque et elles en auraient ri. Mais, au lieu de cela, elle lui répondit :
- Natacha a plus d'un tour dans son sac. Sa vengeance contre toi va être magistrale...
Marie B regarda la comtesse se rapprocher de la tribune pour prendre la parole et chuchota à son alliée :
- Certes...
Rama encra une nouvelle fois ses mains dans les épaules de son frère d'armes à la nouvelle annonce de la comtesse de Kergianov. Il vit bien que Wladimir voulait se dégager de son emprise, mais serra davantage. Ce n'était ni le lieu, ni le moment pour le musicien de craquer et de faire quelque chose de complètement stupide. Ils allaient devoir affronter ensemble les conséquences des actes de Marie B, et le tatoueur aurait besoin de son frère d'armes pour l'y aider.
- Pense à la gamine, chuchota-t-il. Elle va avoir plus que jamais besoin de nous. Et, si tu tuais ta mère, tu ne pourrais plus protéger Marie B.
Il sentit le musicien se contracter mais le lâcha. Les mots avaient atteint Wladimir, et il ne tenterait rien contre Natacha... en tous cas, pour le moment.
Dimitri fut chargé par son épouse de la lourde tâche de récapituler la sanction proposée au vote contre Marie B. Il n'avait pas envie de le faire, mais monta tout de même sur l'estrade et annonça :
- Membres du Ministère. Vous allez devoir voter pour ou contre la rétrogradation du Messager pour une période de quinze ans. Je vous rappelle que cela inclut une exclusion immédiate du Ministère, la perte de son nom et de son clan. Tous les membres du Ministère sont appelés au vote, mis-à-part, bien entendu, le Messager. Ce vote aura lieu après la pause.
Et voici la première partie du tome 3 !
Vous arrivez à resituer, c'est bon ? Le jugement pour avoir défendu Hermès ? Sinon, vous pouvez juste relire le dernier chapitre du tome 2 ;)
Alors, que pensez-vous qu'il va arriver à Marie B ?
La suite mercredi ! ^^
Sanguinement-vôtre,
Gothycka
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