IX. Aphrodite / Partie 1
- Et Rama, mate un peu la gonzesse, murmura le Messager.
Wladimir, qui était dos au mur du bar, jeta un œil sur la jeune femme que désignait leur protégée.
- Pas mal mais, pour le moment, je préfère me concentrer sur toi, beauté, rétorqua l'intéressé.
- Je pense que le Ministère va finir par désapprouver ce trio que nous formons, soupira l'ancien tuteur créaturien.
- Au Diable le Ministère !, s'exclama Rama. Je me suis éloigné une fois de vous deux... et on ne m'y reprendra plus !
La semaine suivant le mariage de ses amis et leur départ, en voyage de noces, vers leurs origines chinoises, Marie B convint avec Wladimir d'une disponibilité pour passer voir Rama avant la prochaine réunion du Ministère. Orlando, tout comme Ho Sang et Shinji, n'était pas d'accord avec ce qu'ils appelaient un « pouponnage excessif », mais sa femme était têtue et voulait comprendre le problème de son frère d'armes. Sa présence lui manquait beaucoup et elle craignait de le perdre à jamais si elle ne faisait rien pour lui. Le matin même, elle avait haussé le ton contre son époux et, chose peu courante, il avait lui aussi élevé la voix. Même s'ils avaient ensuite discuté tous les deux au téléphone pour s'expliquer plus calmement, elle restait en colère, en grande partie contre elle-même. Elle ne savait pas pourquoi Rama la rejetait et se demandait sans cesse ce qu'elle avait pu faire, ou ne pas faire, pour le contrarier de la sorte. Tous les jours, elle cherchait dans sa mémoire où se situait cette faille qu'elle ne parvenait pas à trouver. Elle était certaine qu'il y avait eu un élément déclencheur et que son frère d'armes ne s'était pas levé un matin en se disant « Tiens, je vais éviter Marie B et Wlad ! ». Il devait y avoir une raison plus profonde qui, jusque-là, lui avait échappée, mais qu'elle espérait découvrir au plus vite.
- Wladimir semble préoccupé par son frère d'armes, annonça Lucifer à sa femme.
- Ah bon ?, demanda-t-elle innocemment, soucieuse d'avoir des détails.
- Apparemment, notre Don Juan s'est mis en tête de trouver l'amour. J'ai l'impression, à écouter Wladimir, qu'il serait prêt à fondre pour la première créature femelle venue... Heureusement que je sais que tu lui as parlé, sinon j'aurais pu craindre pour l'avenir de notre couple.
- Mais tu sais bien que je n'aime que toi, Luci, lui répondit Uranie, l'enlaçant. Je dois partir deux-trois jours préparer la future convention des esclaves créaturiens.
- Encore ? Mais c'est dans sept mois !
- Oui, mais nous aurons beaucoup d'invités, dont des humains.
Lucifer regarda sa femme, perplexe. Ces conventions étaient devenues sa nouvelle lubie, ces derniers temps. Mais elle était heureuse, et ils s'étaient retrouvés. C'était là l'essentiel pour lui.
- Notre plan va se dérouler à merveille, Arès, déclara Uranie.
Elle se sentait plus proche de lui que d'Apophis ou sa femme. Comme elle, il avait été esclave, il avait vécu cet enfer.
- Magnifique, répondit l'homme. Le nouveau Messager de la Vie et de la Mort a encore progressé. Il n'a pas encore de pouvoir, comme la précédente version, mais sa rage aura le dessus et, en plus, il n'est pas mâture.
Uranie observa Hermès. Il arrachait les branches d'un arbre que voulait couper son « père » à mains nues. Elle se demanda si elle avait faut le bon choix en rejoignant le clan de Satan. Mais les cris de plaisir de Marie B lui revinrent à l'esprit et elle sut qu'elle aurait sa vengeance.
- Bon. Crache le morceau, on va trier !, cria Marie B à Rama, enfermé dans un mutisme pesant depuis leur arrivée.
La réunion du Ministère avait lieu la semaine suivante, et la femme commençait à s'impatienter. Elle ne comprenait pas l'attitude de son frère d'armes, ce n'était pas le Rama qu'elle connaissait et aimait. Celui-ci était, tout simplement, lobotomisé.
- Mais bordel, tu vas dire quelque chose !, s'énerva-t-elle.
- Petit loup, laisse-nous seuls quelques minutes, l'interrompit son ancien tuteur créaturien.
- Mais...
- S'il-te-plait.
Devant le regard insistant de Wladimir, elle s'exécuta et sortit du salon. Elle en profita pour montrer à l'étage et fut surprise de constater que toutes les photographies encadrées du couloir avaient été enlevées. Elle enleva dans la chambre qui était la sienne depuis des années, et ne trouva pas ses affaires dans son armoire. Une question l'assaillit soudain : Rama voulait-il l'éluder de sa vie ?
- Pourquoi êtes-vous là ?, demanda Rama à son frère d'armes.
- Parce que nous nous faisons du souci pour toi.
- Cela ne l'empêche pas de faire sa vie d'humaine et de s'éclater en soirée !
- Et toi, pourquoi as-tu enlevé les photos et mes affaires ?, demanda agressivement Marie B, qui venait de revenir dans le salon.
- Petit loup, je t'avais demandé de nous laisser...
- Parce que moi aussi, je veux faire ma vie, trouver l'amour, être aimé comme je suis et pour ce que je suis, et pas dans l'ombre de quelqu'un !, répondit Rama, tout aussi agressif.
Marie B resta bouche-bée. Elle ne comprenait pas de quoi Rama était jaloux. Leur relation avait toujours été ainsi, et cela ne l'avait jamais gêné avant.
- Petit loup, tu devrais...
- Je vais partir. Au revoir, mon frère. A la semaine prochaine.
Elle sortit, laissant derrière elle un frère d'armes effondré et un ancien tuteur créaturien sans voix.
Lorsqu'elle rentra à Maisons-Alfort, son mari avait mis la table et l'attendait en jouant sur son ordinateur. Mais, en voyant la mine triste de sa femme, Orlando stoppa sa partie et se dirigea vers elle. Elle s'effondra dans ses bras et pleurant.
- Je vais perdre mon frère d'armes...
Orlando ne sut pas quoi dire pour la rassurer. Il se contenta de la serrer fortement contre lui. Il en voulait à Rama. Comment pouvait-il rendre Marie B aussi triste et perdue, alors qu'il avait promis d'être toujours là pour elle ?
La semaine qui précéda la réunion du Ministère parut durer à Marie B, une éternité. Son travail l'ennuyait, les discussions avec les collègues étaient rébarbatives, Ho Sang et Shinji étaient loin, Rama s'éloignait peu à peu. Elle avait l'impression d'être presque seule au monde, et surtout face à ses propres démons, et ses peurs. Pour ne rien arranger aux choses, son angoisse se retranscrivait, une fois de plus, en insomnies, et elle passait le plus clair de ses nuits à tenter d'écrire des poèmes ou des morceaux d'histoires sans queue ni tête, ce qui l'agaçait profondément. Elle essayait de se recentrer sur Orlando, mais elle sentait qu'il lui manquait quelque chose, qu'une plaie s'était ouverte en elle. Elle souffrait...
- La souffrance ! Regarde ce que font les humains aux plus faibles qu'eux !
Arès montrait à Hermès une vidéo reportage sur les guerres dans le monde. Des enfants torturés, des femmes éventrées, des hommes tailladés. Telle était l'humanité, la vraie humanité. Une espèce qui transperçait une femme enceinte ne méritait pas de vivre. De rage, le garçon s'empara de la télévision et la lança contre le mur.
- Cruels. Les humains sont cruels.
- Bien. Et que faut-il faire ?
- Les détruire.
- Comment ?
- En créant la Mort !
Arès était fier et fit signe à Apophis. Le nouveau Messager de la Vie et de la Mort serait bientôt fonctionnel. Il ne leur restait plus qu'à continuer de l'entrainer en attendant qu'il atteigne l'âge adulte.
- Je pars pour la réunion, ma Licorne. On se retrouve demain au village, ou ici ?
- Je vais faire une LAN chez mon collègue ce soir, tu ne te souviens pas ? On peut se retrouver ici. Prends soin de toi ! Et arrête de t'inquiéter pour Rama.
- Excuse-moi, ma Licorne, j'oublie beaucoup de choses en ce moment...
- Tu es trop accaparée par Rama, tu devrais faire une pause.
Il prit sa femme dans ses bras et l'enlaça tendrement. Il sentit la chaleur de son corps et son souffle court qui montrait qu'elle était encore angoissée. Marie B posa sa tête sur le torse de son mari, profitant de cet instant de calme avant de rejoindre Wladimir et son frère d'armes pour manger avant de se rendre au Ministère. Elle l'embrassa doucement, laissant leurs lèvres se rencontrer, se presser l'une contre l'autre, et leurs langues se caresser délicatement. Après ce baiser enflammé, elle prit son sac à main, ses clefs de l'appartement, et sortit, la tête lourde, pour prendre le RER qu'elle venait d'entendre arriver.
- Ça va mieux, mon frère, on dirait ?, demanda Wladimir.
- Oui, peut-être que je rencontrerai mon âme-sœur ce soir. De nouvelles créatures vont peut-être se présenter au Ministère !
- Je te le souhaite, Rama. J'espère que tu trouveras l'amour... et la paix, répondit Marie B.
Mais Wladimir avait un mauvais pressentiment. Il craignait que son frère d'armes ne tombe sous le charme de la première venue et ne s'y brûle, une fois de plus.
- Kergianov ! Quel plaisir de vous revoir !, s'écria Lucifer en apercevant au loin Wladimir, Rama et Marie B.
Il était debout, une tasse de café à la main, entouré de sa femme, Astéria, Polymnie et Ulysse.
- Il va y avoir du changement ce soir, informa Ulysse.
- Comment ça ?, demanda Wladimir.
- Une créature veut intégrer le Ministère, grogna Astéria.
Les autres furent surpris par le ton de la femme, qui était d'un naturel plutôt enjoué.
- Ça n'a pas l'air de te faire plaisir, remarqua Uranie.
- J'étais dans le clan de Satan, avant de m'en repentir... Et elle y était aussi...
- C'est peut-être une repentie, elle aussi ?, supposa Marie B.
- Et, où est cette inconnue ?, demanda Wladimir.
Astéria fit un mouvement de tête. Rama regarda la femme en question et ses yeux se bloquèrent sur elle. Elle était parfaite...
Et voilà, la première partie de ce nouveau chapitre !!!!
- Que pensez-vous des relations entre Rama, Marie B et Orlando ???
- Le petit Hermès, qui grandit ???
- La nouvelle arrivée, qui ne réjouit pas Astéria ???
Comme toujours, n'hésitez pas à voter, blablater, commenter ^^
Sanguinement-vôtre,
Gothycka
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