Chapitre 23 - Inconscience (Partie 2)
Nicolas avait besoin d'aller voir Ariana. Il voulait vérifier qu'elle était bien réelle, que tout ce qui était raconté là était bien advenu. Une nouvelle fois, la jalousie le rongeait alors qu'il voyait évoluer la relation de la jeune fille avec Will. Il voulait la questionner, savoir ce qu'il en était.
Il sortit de son lit alors que la nuit était déjà tombée depuis longtemps. Il avait pour habitude de lire tard, le soir, pour profiter de son livre dans le silence apaisant de la nuit. Mais, cette fois, même la pâle lueur de la lune ne put calmer les émotions qui bouillaient en lui.
Il descendit le grand escalier d'acajou sur la pointe des pieds et, à son grand soulagement, trouva le garde endormi devant l'entrée de la prison. Une fois de plus, il descendit les étroites marches de pierre qui menaient aux geôles. Il approcha sa torche de la grille. Ariana était invisible, sans doute cachée dans l'ombre. Il l'appela. Il appela encore.
Enfin, la jeune fille jaillit de la pénombre.
– Ah, c'est toi, dit-elle, d'une voix encore ensommeillée.
Malgré ses cheveux en bataille et la saleté de sa peau, Nicolas la trouva belle. Il savait ce qui se cachait derrière cette apparence. Il plongea son regard dans les yeux verts d'Ariana et en ressentit toute la profondeur. Il ne savait pas encore toute l'histoire cette extraordinaire jeune femme mais il commençait à comprendre sa personnalité et à l'apprécier.
Ariana reprit la parole, devant le silence de son interlocuteur.
– Tu as quelques chose à me dire ? demanda-t-elle.
– Oui... enfin non... peut-être... bredouilla Nicolas. Il ne savait pas par où commencer.
Ariana l'encouragea du regard.
– Tu es si courageuse, dit Nicolas.
– Ah oui ? répondit Ariana, amusée.
– Je ne sais pas comment tu fais ne pas te décourager, pour tenir tête à tous ces hommes, pour...
Ariana l'arrêta d'un geste.
– Ce n'est pas du courage, c'est de l'inconscience, dit-elle, avec un sourire. Il en faut une bonne dose, pour être pirate. Et tu n'en manques pas.
Ariana expliqua à Nicolas ce qu'elle entendait par là. En effet, il était venu la voir, malgré l'interdiction formelle de son père, avait volé de la nourriture pour elle, venait régulièrement lui tenir compagnie...
– Il faut encore plus de courage – ou d'inconscience – pour s'opposer à ceux qu'on aime, conclut-elle.
Nicolas lui posa encore de nombreuses questions et ils parlèrent de la vie de pirate. Plus elle parlait, plus Ariana s'enflammait. Il semblait que la piraterie allumait en elle un brasier qui, au lieu de la consumer, la poussait à aller de l'avant, à continuer.
Quand Nicolas sentit qu'une sorte d'intimité s'était installée entre eux, il osa interroger Ariana à propos de Will.
– Et le second, Will, quelle relation as-tu avec lui exactement ?
Ariana se ferma comme une huître. Elle baissa les yeux et se mordilla la lèvre.
– C'est... compliqué, dit-elle, sans regarder Nicolas.
– Vous semblez très proches, dans ton journal, se hasarda le jeune homme.
– Écoute Nicolas, je... je n'ai pas envie d'en parler. Jusqu'à présent, tu m'as vue comme une pirate, forte, courageuse. Je t'ai dit que je ne redoutais pas la potence. C'est vrai. C'est vrai tant que je ne pense pas à ceux que j'aime. Mon père, Will.
Ariana tourna la tête vers le fond de sa cellule. Elle ne voulait pas que Nicolas la voit pleurer mais celui-ci ne le devinait que trop bien.
– Je suis désolé, Ariana. Je ne voulais pas.
– Ce n'est pas grave, lui répondit-elle. Elle essuya ses yeux et voulut faire de nouveau face à Nicolas, mais, avant qu'elle n'ait pu se retourner vers lui, elle s'effondra.
– Ariana ! hurla le jeune homme.
Aussitôt, des pas retentirent dans l'escalier. Le cri de Nicolas avait réveillé le garde. Celui-ci arriva dans la prison, à brûle-pourpoint. Il lança un regard interrogateur au fils du gouverneur.
– Elle s'est évanouie ! Il faut faire quelque chose ! cria encore le jeune homme.
Le garde s'approcha des barreaux, méfiant.
– Elle fait semblant, dit-il.
– Non ! Je l'ai vue tomber devant mes yeux ! s'exclama Nicolas.
– Et que faites-vous ici, d'abord ? demanda le garde.
– Là n'est pas le problème, s'insurgea le jeune homme. Je vais chercher mon père si vous ne faites rien.
– Et bien, allez-y donc !
Nicolas secoua la tête et partit en courant dans les escaliers. Un grande confusion s'ensuivit. Les gardes furent alertés, le gouverneur dû sortir de sa chambre à la hâte, on envoya chercher un médecin. Ledit médecin ordonna que l'on sorte Ariana de sa cellule : il ne pouvait pas l'examiner dans le noir et c'était "une drôle de façon de traiter une jeune femme", avait-il grommelé.
Le diagnostic fut simple. Ariana mangeait trop peu et une forte émotion avait dû suffire à provoquer cet évanouissement.
Alors que cette discussion tenait place, la jeune femme revint à elle. Aussi rapide que l'éclair, elle s'empara d'un bistouri et le glissa sous la gorge du médecin qu'elle attrapa de l'autre bras.
– Si vous voulez me tuer, je le tuerai d'abord, dit-elle.
– Personne ne te veut de mal, Ariana, dit Nicolas, qui était resté à son chevet.
– Ah bon ? C'est vrai, vous voulez seulement me pendre, dit-elle, ironiquement. Une broutille à vos yeux. Enfin, son cou passera avant le mien, ajouta-t-elle en désignant le médecin.
Elle recula et s'approcha de la porte, qu'elle ouvrit d'un coup de talon. Malheureusement, des soldats attendaient derrière et Ariana sentit la pointe d'une épée se piquer dans son dos. Elle soupira et relâcha le médecin. Son regard semblait dire « Flûte, ce sera pour une autre fois. ».
Ariana fut ramenée à sa cellule et le gouverneur ordonna que l'on double la garde. Il jura qu'elle n'en sortirai plus avant le jour de son exécution. Pour seule réponse, la jeune femme cracha à ses pieds.
Nicolas ne savait plus que penser. Quelle était la Ariana qu'il connaissait ? Était-ce celle qui avait versé des larmes à la seule mention des gens qu'elle aimait ? Où était-ce celle qui avait menacé de tuer un homme pour s'échapper et manqué de respect au gouverneur ?
Il avait du mal à réunir ces deux personnes en une seule. Il comprenait la réaction d'Ariana. Elle n'avait plus rien à perdre après tout. Pourquoi ne pas tout tenter pour s'échapper ? Aurait-elle vraiment tué le médecin alors qu'elle lui avait juré qu'elle n'avait jamais tué personne ?
– Ah ! Je ne sais plus où j'en suis, dit Nicolas en se prenant la tête dans les mains.
– Je ne peux pas t'aider, Nicolas.
Le gouverneur était entré dans la chambre de son fils. Il avait le visage fermé.
– Je ne te reconnais plus. Que faisais-tu dans les cachots ? Ne t'ai-je pas assez interdit de t'y rendre ?
– L'interdit est fait pour être bravé, murmura Nicolas.
– Non. L'interdit est fait pour être respecté comme une consigne de sécurité. Je ne veux que ton bien, Nicolas.
– Vous voulez surtout que je devienne comme vous. Un lâche qui ne fait qu'exécuter les ordres !
Nicolas regretta ces mots au moment même où ils sortirent de sa bouche. C'était la vérité, bien sûr, mais elle était dure à avaler.
– Alors c'est comme cela que tu me vois... murmura le gouverneur. Très bien. Puisque tu aimes tant cette jeune fille, peut-être que tu apprécieras de vivre comme elle.
Le gouverneur se leva sans un autre mot. Il sortit de la chambre et la ferma à clé. Puis, Nicolas l'entendit demander à un soldat de se poster devant la porte.
– Père ! Vous n'avez pas le droit ! Vous ne pouvez pas m'enfermer dans ma propre chambre, cria-t-il.
– Au contraire, je fais ce que tu m'as demandé. Je cesse d'être un lâche et je prends les décisions qu'il faut prendre.
Voilà un nouveau passage avec Nicolas ! Qu'en pensez-vous ?
Ariana a enfin pu mettre un pied en dehors de sa cellule mais cela n'a pas été concluant, et, à présent qu'il est enfermé aussi, cela risque d'être difficile pour Nicolas de faire quoi que ce soit d'autre pour elle...
La situation se corse, tandis qu'Ariana se rapproche de son but...
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