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16 Avril 2013

Alan était plongé dans une intense réflexion : comment avait-elle pu se trouver chez ce type ? Chez LE type qu'il était censé corriger ! Non, ce n'était pas de la tristesse ou de la colère qu'il ressentait en ce moment mais simplement de l'incompréhension. Peut-être était-ce sans doute dû au fait qu'il se préparait à l'instant où elle le quitterait depuis des mois ? Il avait toujours su que cela se produirait un jour où l'autre. Et la voir, dans cette tenue, dans la chambre du gars qui venait de se prendre une raclée ne lui avait fait mal que le temps nécessaire à ce que la surprise ne disparaisse.

Après, il s'était rendu compte qu'elle l'avait trompé et qu'il s'en était toujours douté. Finalement, il était sans doute resté avec elle parce qu'il se savait en compétition avec quelqu'un d'autre et refusait d'ouvrir les yeux à ce sujet.

C'est pourquoi aujourd'hui il ne se sentait pas mal pour lui. Il était blessé, certes, détruit de l'intérieur de s'être fait avoir et humilié mais il était, avant tout, interloqué par la tournure des événements.

Il fit les cents pas dans son petit appartement. Ce n'était pas très grand ni très luxueux mais il s'y sentait bien, surtout dans ce genre de période où il devait rapidement comprendre pourquoi tout ne tournait pas rond autour de lui.

Un long canapé en tissu noir prenait la majorité de la place du salon. Il était rabattable et pouvait lui servir de lit. Heureusement car il n'avait pas la place pour un autre lit !

Le canapé était tourné vers une baie vitrée donnant sur une vue imprenable où Alan pouvait contempler tout Paris. Il était au vingt-troisième étage d'un building réputé pour n'être que le repère des fils à papa dont les riches parents se permettaient d'avoir un pied à terre dans cette tour afin d'en faire profiter des enfants sans plus grande ambition que celle de vivre aux crochets des dits parents. La tour en question n'était ni plus ni moins qu'une immense façade de verre aux allures richissimes qui se contentait de cacher un squelette de métal emprisonnant ses habitants dans leur propre détresse. Pour la plupart, il s'agissait de relents de drogue, de sexe et d'alcool et pour d'autres, comme Alan, les problèmes étaient plus sérieux.

Depuis qu'il avait eu le premier contact avec l'homme chauve au volant de l'Audi noire, le jeune homme avait tenté de se débarrasser d'eux ou de glaner quelques informations sur ceux qui avaient pariés sur les gens qu'il allait corriger. Evidemment, toutes ses tentatives s'étaient soldées par des échecs cuisants : le conducteur le menaçait régulièrement de le balancer à la police pour tous les méfaits qu'il avait commis depuis le premier jour, ce qui ne l'incitait pas du tout à avoir confiance en lui ou à utiliser la force pour larguer cet imposant commanditaire. Par ailleurs, la possibilité que ce dernier n'aille s'en prendre à sa famille l'avait convaincu de rester dans le « droit » chemin.

Quant aux renseignements, il aurait tout aussi bien pu s'adresser à une porte, il en aurait probablement appris davantage ! Ce qu'il savait aujourd'hui il ne le devait qu'à lui-même et à ses recherches.

Alan se leva de son canapé et alla chercher dans le meuble de sa cuisine le fond d'une bouteille de whisky. Elle avait été entamée avec des amis, elle serait finie alors qu'il se trouvait seul. Il s'en servit un verre qu'il posa sur la table basse rouge qui lui servait de table de nuit, de table pour manger et de bureau pour écrire. Finalement, lorsqu'il regardait autour de lui, la pièce lui paraissait étrangement vide, dénuée de décorations, vide de sens, dénuée de chaleur humaine.

En se rasseyant, il se souvint d'une des affaires qu'on lui avait confié : Il avait attendu l'individu à la sortie d'une boîte de nuit du nom de Strange Hat où l'enseigne représentait le chapeau du Chapelier fou de Alice au pays des merveilles. L'homme était sorti de l'établissement en compagnie de deux demoiselles. Alan n'en n'aurait pas mis sa main à couper mais les deux femmes en questions avaient un petit quelque chose de « professionnel » dans le regard. Obligé d'attendre qu'il n'y ait plus de témoins, le jeune homme avait suivi sa cible discrètement et était parvenu à rentrer dans l'appartement gardé par un visiophone et un concierge relativement à l'affût en cette nuit d'hiver.

Il avait patienté dans les escaliers pendant plusieurs heures, attendant que les femmes ne s'épuisent et qu'elles repartent au petit matin, les poches pleines de billets de toutes tailles. Il avait gardé son sweat à capuche pour se tenir chaud et avait fait très attention à ne pas être vu lorsqu'il se faufilerait par la porte que les deux tentatrices n'avaient pas pris la peine de claquer. L'appartement, luxueux et particulièrement soigné, avait donné à Alan un sentiment de garçonnière. L'endroit respirait le renfermé et l'image du lieu ne rendait pas justice à la majorité des hommes célibataires qui habitaient Paris : la plupart du temps, leur appartement est un champ de ruines où se battent en duel les chaussettes et les caleçons sales tandis que des monticules de papiers administratifs finissent par former une pile assez haute pour entrer en compétition avec celle de la vaisselle à nettoyer. En revanche, ces hommes là possèdent en général une voiture qu'ils entretiennent avec un soin tout particulier, bichonnant l'engin comme un gentleman le ferait avec une femme. Ici, la cible d'Alan n'avait que sa carte de crédit, se déplaçait à pied et avait ramené deux prostituées dans une garçonnière. Le jeune homme n'était pas stupide : cet individu était suspect rien que dans sa façon d'agir. La manière dont il avait acquis tout cet argent ne pouvait donc être que malhonnête !

Ce raisonnement l'avait laissé penser qu'avant de faire son travail, il aurait mieux valu qu'il en apprenne un peu plus sur ceux qui l'employaient.

Alan avait fait le tour de la pièce principale à pas de loup, veillant à ce qu'aucune dalle de carrelage ne trahisse sa présence et avait commencé à ouvrir les tiroirs et les meubles qui occupaient le salon.

A son grand désarroi, ils étaient pour la plupart aussi vides qu'on pouvait l'être. Ça et là s'étaient trouvés quelques livres pour donner le change mais il n'avait rien trouvé de concret. Sur la table du salon reposait un vase avec des fleurs fraîchement achetées chez le fleuriste, des roses rouges. Le vase avait été peint de façon bariolée de telle sorte qu'il ressortait particulièrement bien avec les tableaux qui occupaient presque tous les murs du salon.

Alan avait vu assez de films policiers pour savoir que, souvent, les méchants gardaient leur argent et leurs trésors derrière un tableau de cette taille, à l'endroit le plus évident possible. Evidemment, ce genre de scénario n'appartenait qu'au cinéma et les peintures ne cachaient rien d'autre que le mur dont la tapisserie blanche était ternie par le temps.

En y repensant, Alan but une nouvelle gorgée de whisky. Après tout, qui était le méchant dans cette histoire ? L'homme qu'il venait tabasser ou le cogneur lui-même ? L'idée qu'il puisse être l'homme de main du diable lui avait traversé l'esprit plus d'une fois depuis cette nuit où il s'était infiltré dans la garçonnière et bien que son esprit essayait à grands coups de stratagèmes de lui rappeler qu'il n'avait pas le choix, petit à petit, sa conscience reprenait le dessus et lui insufflait son propre dégoût. Il se dégoûtait autant qu'il était possible de se haïr et pourtant, toutes les semaines il recommençait. De toute façon, elle était partie pour de bon cette fois, il n'avait absolument plus rien à perdre. Quid de son honneur ? Quid de son ambition de devenir le plus grand avocat qui ait jamais existé sur cette planète ? Tout cela était parti aux oubliettes lorsqu'il s'était rendu compte, en première année de droit, que le droit n'existait pas, seulement la loi du plus gros portefeuille... Il avait continué le droit pour avoir un but dans la vie mais les événements qui s'étaient déroulés depuis le 14 Février dernier avaient radicalement changé sa vie et les études n'étaient plus qu'un lointain souvenir duquel il s'était à présent détourné. Aujourd'hui, il ne dormait plus ou presque, il passait ses nuits à revoir les différentes techniques de crochetage qu'il avait apprise grâce à son père, un serrurier aux allures d'ours mais au cœur en or, ou bien à s'entraîner encore et encore en répétant les mouvements de base et les mouvements avancés des arts martiaux qu'il connaissait depuis l'âge de onze ans. De ce fait, il avait continué à développer son agilité et la puissance de ses coups.

Alan reposa le verre vide sur la table basse et s'allongea de tout son long sur le canapé. Il avait tout de même découvert des choses intéressantes cette nuit-là, il y a un mois.

Déçu par ce qu'il avait trouvé dans le salon et la cuisine, absolument rien, il avait décidé de se diriger dans la chambre à coucher. L'homme à corriger, un certain Richard Baxter âgé de trente-sept ans, dormait à poings fermés, dans un lit aux dimensions tout à fait exagérées. Il était complètement nu et ses vêtements étaient étalés sur le sol tels les lambeaux de chair d'un lépreux. D'après ce qu'il avait pu voir, Alan s'était amusé à penser qu'il avait passé une très bonne nuit avant le passage du cogneur : Richard était encore attaché à la tête de lit grâce à une paire de menottes en velours rouge. Ses jambes, écartées, laissaient apercevoir son précieux matériel. Alan avait eut une idée en tête mais cela n'aurait été que pure méchanceté et s'il n'avait pas encore sombré dans la folie ou un dégoût assez profond de lui-même pour le pousser au suicide, c'était uniquement parce qu'il se contentait du minimum : en effet, lorsque ses victimes le voyaient arriver, ils prenaient peur et tentaient de le frapper en premier. L'unique barrière constituant son excuse était qu'il agissait en état de légitime défense. C'était mince, très mince ! Mais cela suffisait pour l'instant.

Il n'était pas un monstre et refusait de le devenir. Il avait senti, coup après coup, nuit après nuit, que son cœur devenait de plus en plus noir et que la tâche lui devenait de moins en moins imposante. Il avait de plus en plus peur de lui-même, sentant ces poisons qu'étaient la puissance et le pouvoir s'insinuant dans ses veines. Le venin était déjà injecté et l'infection commençait doucement à se propager jusqu'à sa tête, remplissant ses pensées de noires idées, aussi noires qu'elles pouvaient l'être.

L'idée de torture qu'il venait d'avoir eu pour ce Richard n'était autre que l'une d'elle, l'obligeant à retrouver rapidement ses esprits s'il ne voulait pas se laisser submerger par celle-ci.

Alan avait donc fait quelques pas dans la chambre et attrapé un morceau de plume dépassant de la couture de l'un des deux oreillers, celui sur lequel sa victime ne dormait pas.

Délicatement, il l'avait délogé de son emplacement et était venu la frotter sous le nez de l'homme endormi. Plissant d'abord le nez, il avait failli éternuer mais son corps était profondément endormiet Richard avait donc tenté de se tourner dans son lit pour ne plus être gêné. Sa main menottée avait fait le reste : ne pouvant plus se retourner, il s'était réveillé et la première vision qu'il eut fut celle d'un jeune homme au visage caché par une capuche noire qui lui avait envoyé un crochet direct dans le menton. Sonné, l'homme avait eu du mal à retrouver ses esprits jusqu'à ce que son agresseur ne le saisisse par les épaules et le secoue comme un prunier.

- Ecoute moi bien, bonhomme, j'ai pas beaucoup de temps ! Je suppose que tu sais qui m'a envoyé et pourquoi je suis là ! T'as soixante secondes pour me dire tout ce que tu sais à propos des gens qui m'emploient.

- Je... Je ne sais rien, avait-il bégayé difficilement.

Un nouveau coup de poing s'était chargé de lui remettre les idées en place.

- Et là ? avait demandé Alan, furieux.

- J'ai un marché à te proposer, avait répondu Richard, en pleurs et en proie à une panique sans précédent pour lui. Je te dis tout ce que je sais et tu ne me fais pas de mal !

- Ça dépendra des informations que tu vas me donner...

Alan l'avait lâché, veillant juste à ce que les menottes soient assez résistantes pour qu'il ne puisse pas se libérer et bouger de son lit.

- C'est une société anonyme, Deadline qu'ils s'appellent. Ils sont sur le marché depuis super longtemps apparemment. Moi j'ai entendu parler d'eux par un collègue. On montait notre boîte de conseillers fiscaux privés mais ça démarrait pas et on voulait un gros client. Mon collègue m'a dit que Deadline cherchait des gens comme nous. On est allé les voir et ils nous ont dit qu'ils n'avaient pas besoin de conseillers fiscaux mais que, par contre, ils pouvaient nous prêter de l'argent pour qu'on s'en sorte un moment et nous mettre sur les rails vers des clients pas très fréquentables.

- Combien d'argent ?

- Beaucoup ! Le premier versement était de plusieurs centaines de milliers d'euros et c'était le plus bas paiement qu'ils nous ont fait. Mois après mois ça a continué à augmenter. Sauf qu'on s'est retrouvé dans la merde, Michel et moi. Les gars chez qui ont allaient avaient tous des têtes de mafieux et nous demandaient des choses vraiment pas nettes. On a dû cacher de l'argent, intercepter des virements, ou encore...

- Abrège !

Richard avait sursauté. Il ne s'était pas attendu à ce que son agresseur reprenne la parole de façon aussi brusque.

- Du coup on a mis fin aux virements avec leur accord et on entendait plus parler d'eux. J'ai acheté deux villas, investi beaucoup d'argent en bourse et j'ai perdu beaucoup des mises que j'avais investies. Le problème c'est qu'ils ont commencé à nous demander de rembourser ce qu'ils nous avaient donné. Ils n'avaient jamais mentionné un remboursement ! Michel avait été prévoyant et avait anticipé mais moi... J'étais dans la merde. Alors j'ai plus donné signe de vie jusqu'à ce qu'ils m'envoient votre photo avec un mot derrière.

- Quel mot ?

Richard avait désigné la table de nuit du menton. Sur celle-ci était posé un radio-réveil qui ne donnait pas l'heure, ne semblait même pas branché, mais qui cachait une photographie. En la prenant, Alan s'était rendu compte que c'était une photo de lui prise le jour de la première agression, alors qu'il appelait les urgences. Sur ce portrait, il avait l'air malveillant et portait un blouson de cuir noir qui lui donnait mauvais genre. Son téléphone à la main, il semblait en train de planifier quelque chose. En réalité, Alan se souvenait qu'il était vraiment très inquiet pour la vie de l'homme qu'il venait de frapper et qu'il espérait simplement qu'une ambulance arriverait rapidement.

Au dos de la photo, il y avait un mot inscrit au marqueur indélébile noir : meurtrier. Il y avait également la date de ce jour-ci, 16/03/13. Tout en bas à droite était dessiné un cobra dévoilant ses crochets et entre lesquels le sigle « Deadline » avait été écrit en lettres noires.

Alan n'en avait pas cru ses yeux et compris à présent pourquoi tous les gens qu'il avait corrigé jusqu'ici l'avait reconnu au premier coup d'oeil.

C'est peut-être le bruit qu'avaient provoquées les menottes en se brisant ou bien le grincement du lit duquel s'était levé Richard mais ce son lui avait probablement sauvé la vie : Alan s'était retourné brusquement, découvrant sa victime brandissant un pistolet noir dans sa direction. Il avait appuyé sur la gâchette deux fois. La première fois, il avait manqué sa cible qui avait esquivé le coup par pur réflexe. Néanmoins, au deuxième coup, la balle avait été tirée à bout portant et avait traversé le bras d'Alan qui s'était instinctivement protégé les yeux.

Tombant à terre sous l'impact, le jeune homme avait pu sentir son propre cœur retentir dans son avant-bras, le sang coulant lentement, s'échappant de la plaie en bouillonnant sous la violence du choc. La douleur avait très vite enflé jusqu'à ses terminaisons nerveuses et Alan avait dû se retenir pour ne pas crier. Richard s'était alors avancé au-dessus de lui, aussi nu qu'un ver et le menaçant, l'arme au poing.

– Deadline n'aura même pas à se donner la peine de te buter, maintenant que tu sais tout ! Je l'aurais fait pour eux et ils oublieront mes dettes !

Alan avait fermé les yeux, résigné, lorsqu'il avait entendu le bruit de la gâchette. L'arme était vide. L'homme avait tiré ses deux uniques munitions. L'expression de ce dernier quand il comprit sa faute était passée de la jubilation à la détresse. Alan en avait profité pour replier ses jambes tel un ressort aussi puissant que fatal et avait frappé dans les deux genoux de sa victime. Richard avait hurlé de douleur lorsque le craquement des os s'était fait entendre. La vision des deux articulations démembrées avait presque donné un haut-le-cœur à Alan qui en avait profité pour filer aussi vite que possible.

Il avait toutefois pris le temps de laisser un post-it sur la table du salon sur lequel il était écrit : tu mourras peu de temps avant moi mais tu mourras quand même, si jamais tu parles.

Alors il s'était enfuit dans la seule direction qui pouvait le sauver à cette heure-ci avec un bras dans cet état : il allait devoir chercher secours chez son meilleur ami.

Alan releva la manche de sa chemise. L'alcool commençait tout juste à faire effet. Quelle délicate sensation que de se sentir divaguer dans ses pensées alors que sa tête se perdait dans un nuage de coton. Ce nuage deviendrait, bien sûr, un effroyable étau le matin venu mais pas pour l'instant, il était la plus douce des échappatoires. Notamment parce qu'il essayait de ne pas penser à ce qu'elle lui avait fait tout en parvenant à repenser à toutes les informations dont il avait pris connaissance au sujet de Deadline.

Les cicatrices sur son bras étaient bien visibles et il ne restait plus qu'une sorte de boursouflure qui cisaillait sa peau bronzée. Il sourit en y réfléchissant. Il avait échappé de peu à une mort certaine par un coup du sort spectaculaire et, un mois plus tard à peine, il venait de prendre conscience qu'il risquait bien plus encore ! Sa famille n'était plus protégée, ses amis non plus ! En deux mois d'activité pour Deadline, il s'était mis dans le pétrin pour des années sans aucun doute.

Il rit une nouvelle fois en se rendant compte à quel point il avait été idiot. Heureusement qu'Andrew avait été là.

Andrew était pour Alan ce qu'un chien est pour un sans-abri : son unique protection. Il ne l'aime pas forcément, ils se chamaillent régulièrement, mais ils ne pourraient pas vivre l'un sans l'autre. Andrew était le parfait opposé de son ami : alors qu'Alan était grand et bien taillé, Andrew était de taille moyenne et relativement chétif. Il portait constamment sur son nez une paire de lunettes carrées et bleu foncé, agrandissant son visage de manière spectaculaire. Ses yeux foncés contrastaient avec sa peau claire, symbole qu'il ne prenait le soleil qu'en de très rares occasions, lorsqu'il était nécessaire d'aller acheter un nouvel ordinateur par exemple. En effet, Andrew était un mordu d'informatique. Du même âge qu'Alan, ils s'étaient connus à la maternelle. Là où Alan jouait déjà au justicier, son ami s'était déjà tourné vers les écrans des consoles de jeu ou d'ordinateur. Ils avaient appris à grandir ensemble, à se forger une solide amitié mais leurs points de vue divergeaient régulièrement.

En sortant de l'appartement où il s'était fait tiré dessus, Alan savait qu'Andrew ne le recevrait pas de gaîté de cœur. Ils ne s'étaient pas vu depuis plusieurs mois puisqu'elle ne supportait pas la compagnie de son meilleur ami de geek. Andrew avait très mal pris ce rejet, surtout venant de la part du seul être humain réel qu'il n'avait pas peur de côtoyer dans la vraie vie.

Alan allait venir quémander de l'aide et il savait aussi que son ami adorait jouer les héros. Il allait espérer que cela suffirait à l'accueillir chez lui.

L'immeuble dans lequel résidait Andrew n'était pas très grand et pas, non plus, le mieux situé dans Paris. Il avait intégré par dépit le dix-neuvième arrondissement de la ville lumière à cause de ses faibles revenus. Alan savait qu'Andrew refusait de travailler tant qu'il ne serait pas parvenu à monter sa propre entreprise de création de logiciels informatiques. La bureautique et le code n'étaient pas sa principale passion mais il savait que des investisseurs seraient prêts à payer cher pour un système d'exploitation capable de fonctionner à la vitesse de la lumière, jour et nuit, sans jamais planter. Il passait donc ses journées à tenter de mettre au point cette révolution.

Alan était parvenu jusqu'à la tour qu'occupait son ami en question sans se faire repérer par les jeunes malfrats du coin qui squattaient les lieux à cette heure matinale du jour. La plupart d'entre eux rentraient se coucher, laissant le champ libre au jeune homme.

En grimpant les marches qui le conduiraient au neuvième étage, il fut obligé de s'arrêter pour se reposer. Sa tête était prise de vertiges, sans doute dû au sang qu'il avait perdu sur le trajet jusqu'ici et la douleur dans son bras n'avait cessé de le faire grimacer.

Il avait continué son ascension et était parvenu à atteindre le palier d'Andrew. Un regard à droite et à gauche dans le couloir tagué, mal éclairé et sentant l'urine à plein nez lui avait indiqué que la voie était libre et le blessé était allé frapper à la porte de son ami.

Il dut attendre presque trois minutes qu'Andrew ne daigne lui ouvrir la porte. Son visage n'avait pas spécialement changé mais son expression suffisante lui avait indiqué qu'il n'était pas spécialement heureux de le recevoir.

– Qu'est-ce que tu veux ?

Il n'était pas habillé pour aller dormir. Il faut dire que le geek en question ne dormait pratiquement jamais. Il prenait une heure de repos par-ci par-là de temps à autre mais jamais plus de deux à la fois. Il avait appris à devenir insomniaque devant ses machines.

Alan ne lui avait pas répondu, montrant simplement son bras et la marque vive que lui avait laissé la balle. Andrew avait ouvert des yeux ronds et l'avait tiré d'un coup sec par la manche de son sweat pour qu'il rentre dans son appartement.

Il avait fermé la porte et commencé à exulter.

– On se voit pas pendant presque dix mois et toi tu te ramènes avec une blessure par balle ? Mais t'es fêlé ou quoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ?

– Tu veux bien la fermer, oui ? J'ai pas envie que Miss levrette le répète à tout ton étage.

Andrew avait une voisine qui passait toutes ses journées à s'adonner aux plaisirs charnels sans jamais sortir de son appartement ou presque. Son homme en question était un repris de justice arrêté trois fois pour viol aggravé mais avait été relâché tout autant de fois par manque de preuve ou vice de procédure. Il avait donc trouvé la compagne idéale et ils ne vivaient que des pensions que l'armée versait à cet ancien militaire et des allocations que la France accordait si généreusement.

S'ils sortaient de leur appartement, c'était uniquement pour aller faire quelques courses et se remettre au lit par la suite. Les deux compères avaient donc surnommé cette voisine Miss levrette car sa phrase préférée, audible à toute heure du jour ou de la nuit était : « Oui, comme ça, à quatre pattes ! ».

– Raconte ! avait dit Andrew sur un ton plus raisonnable.

Et c'est ce qu'avait entreprit Alan sans omettre le moindre détail. Il lui avait raconté comment elle avait ruiné leur St-Valentin, comment il s'était senti seul et abandonné durant les derniers mois qui avaient précédés ces événements, comment il avait tabassé le premier type dans la rue et comment il en était arrivé là à présent.

Andrew avait fait la moue à plusieurs reprises, ouvert sa bouche comme s'il allait parler mais sans qu'aucun son ne sorte de sa voix, puis il avait écouté attentivement. L'histoire avait prise près d'une heure pour être racontée dans son intégralité. Le soleil avait déjà commencé à se montrer lorsque Alan eut terminé.

– Pourquoi tu n'as pas prévenu la police dès la première fois ? Pourquoi tu t'es laissé embarquer là-dedans ?

– Parce que... je sais pas. J'ai aucune excuse, ça je le sais. Sur le coup je me suis donné bonne conscience : je protégeais mes amis, je protégeais ma famille. Et puis comme ça j'évitais d'avoir un casier judiciaire pour pouvoir toujours devenir avocat. Et c'est après, quand j'ai eu le nom du premier type en tête et quand j'ai vu son expression de terreur sur le visage que je me suis dit qu'il me prenait pour un monstre et que je devais arrêter tout ça.

– Pourquoi tu l'as pas fait ?

Alan allait répondre qu'il ne le savait pas lorsque la réponse s'était installée d'elle-même dans son esprit. Il savait parfaitement pourquoi il n'avait pas arrêté : la souffrance qu'il avait ressenti à cause de son abandon l'avait rendu malheureux et sa colère n'avait cessé de croître depuis qu'elle avait commencé tout ce cirque. On lui avait donné la possibilité de laisser sortir cette rage qui sommeillait en lui. De façon atroce, certes, mais jouissive. Il s'était senti puissant, conquérant, l'espace de deux mois. Maintenant, il savait qu'il avait à faire avec une entreprise mafieuse et qu'il était, clairement, leur homme de main. Et un homme de main se contentait d'agir, pas de réfléchir !

Il savait très bien qu'à présent, les hommes de Deadline le poursuivraient pour avoir voulu en savoir plus sur eux. Il ne pourrait pas indéfiniment se cacher.

Alan avait donc simplement haussé les épaules pour répondre à son ami.

Durant toute son histoire, Andrew n'avait pas cessé de s'affairer sur le bras blessé de ce dernier. Cela servait enfin à quelque chose d'avoir eu une mère qui passait toutes ses nuits dehors à soigner les sans-abris plutôt qu'à élever son fils correctement. Il l'avait vu faire un million de fois avec des morceaux de verre enfoncés à même la chair de ses patients et il était vital de vite les retirer et bien.

Bien qu'il n'avait pas eu de matériel professionnel, Andrew avait désinfecté une pince coupante à l'aide d'un chalumeau dont il se servait pour les petites soudures qu'il effectuait sur les différents composants de ses machines et il avait toujours possédé quelques rouleaux de pansements, juste au cas où.

– Tu pouvais pas passer à l'hôpital ?

– Le droit ça sert un peu, tu sais : la procédure dans ce genre d'admission à l'hôpital c'est de soigner le patient et d'avertir la police judiciaire d'une blessure par balle. Comme je n'aurais pas voulu dire qui était mon agresseur, je partais pour quelques heures de garde-à-vue afin de me faire tirer les vers du nez. Et habillé comme ça, tu comprends bien que j'aurais très bien pu être pris pour un dealer pris au milieu d'une fusillade pour règlement de comptes entre deux bandes rivales.

– Oh ça va ! On est pas à Marseille, non plus !

Ils avaient ri jusqu'à ce qu'Andrew ne retire la balle coincée dans le muscle de son ami. La blessure était profonde et le sang avait déjà commencé à s'écouler rapidement dès que le projectile avait été enlevé. Alan avait fait de son mieux pour ne pas crier mais là était l'inconvénient des soins clandestins : l'anesthésie n'existait pas.

Après une suture impeccable et un bandage quasi-professionnel, les deux compagnons avaient repris leur discussion autour d'un verre de jus d'orange, Andrew ne carburant qu'à l'orange, matin, midi et soir.

– Qu'est-ce que tu comptes faire maintenant ? avait demandé ce dernier.

– J'en sais rien. J'aurais besoin de plus d'infos sur Deadline mais j'ai pas la moindre idée d'où chercher...

– J'ai bien réussi à savoir que le chéri de Miss levrette était un gros vilain, je peux bien te trouver ça si tu veux !

Alan n'en avait pas espéré moins de la part de son meilleur ami. Le jeu en valait la chandelle et le jeune homme était certain que son ami voyait cela comme le défi paraît. Hacker la mafia !

– Tu te rends compte de ce que je veux que tu fasses, hein ? l'avait averti Alan. Je veux que tu pirates les données d'un groupe de mafieux. On parle de tueurs là !

– Ouais, j'ai bien compris ! avait répondu Andrew d'un ton nonchalant. C'est pas parce que c'est la mafia que ça va être plus compliqué que d'habitude !

– Oui, non, c'est pas ce que je voulais te dire : il y a un risque important de décès précoce si on s'introduit chez eux ! T'imprimes ?

– Tu sais, s'ils apprennent que tu m'as tout raconté j'y passerai aussi alors bon... Autant jouer le jeu à fond ! Et puis ça changera de jouer à WoW toute la journée !

– Je croyais que tu bossais ? s'était exclamé Alan, surpris.

– Même les génies ont besoin de repos !

Ils avaient ri à nouveau et s'étaient pris dans les bras l'un de l'autre.

– Ça m'a manqué de pas pouvoir déconner avec toi pendant tout ce temps, lui avait dit Andrew.

– Moi aussi. Et je tiens à m'excuser du comportement que j'ai eu depuis que j'étais avec elle. J'ai été un sale con et j'aurais pas dû te laisser seul comme ça.

– Ça c'est vrai que t'as été hors-concours pendant un bon moment !

Et ils s'étaient mis au boulot.

Alan avait du mal à garder les yeux ouverts cette nuit-là. On était pourtant au beau milieu de la nuit et l'alcool aurait dû le garder éveillé un peu plus longtemps. Cependant, la voûte céleste qui s'étirait devant lui ne parvenait qu'à le faire rêver un peu plus et sombrer petit à petit dans un état comateux dont il ne parvenait pas à se tirer.

Le jeune homme fit l'effort de se remettre debout et d'aller jusqu'à la fenêtre pour voir le ciel de plus près. Dans deux jours il allait devoir se rendre sur le même banc que d'habitude, prendre l'argent et accepter un nouveau deal. S'il ne le faisait pas, les ennuis commenceraient dans peu de temps.

Étonnamment, malgré sa perquisition chez Richard Baxter, Deadline n'avait pas encore cherché à le mettre hors concours. C'est pour cette raison qu'Alan savait que cela ne tarderait pas. On ne pouvait pas reculer une échéance comme celle-ci éternellement.

Pourtant, il n'avait rien de solide sous la main pour permettre l'arrêt complet de leur réseau et ainsi ne plus rien risquer. C'était la dure vérité que lui avait fait comprendre Andrew...

– Regarde, avait expliqué l'informaticien derrière ses grosses lunettes, j'entre dans la base de données de Deadline.

– Comment t'as fait ça ?

– C'est pas très compliqué : il existe, selon le degré de protection que tu préfères, plusieurs types de firewall, de logiciels antifishing et autres conneries que les geeks mettent sur le marché en faisant croire que c'est inviolable. Le problème, pour tous les logiciels existants à l'heure actuelle, c'est qu'il existe des failles réseaux que les pirates peuvent exploiter. Elles sont dû à un codage trop rapide ou pas assez poussé. Même le meilleur codeur laissera une faille quelque part. On met alors au point un code qui génère un algorithme de compression et qui va se charger de rechercher le chemin le plus court qui nous mènera d'abord au point faible de la protection réseau avant de s'introduire dans la faille et récupérer les données recherchées. Évidemment, il y a quelques techniques de code qui permettent de faire la même chose sans être repéré mais c'est un peu plus long. Cependant, je t'ai dit que j'étais un génie et j'en suis un. Notre intrusion sera intraçable, je te le garantie !

– J'ai absolument rien capté mais ça a l'air passionnant, lui avait répondu Alan en souriant.

Il avait dû prendre un antidouleur pour son bras car la flamme de la balle embrasait toujours son muscle sans diminuer en intensité. Andrew en avait profité pour mettre sur papier des idées afin de mettre au point un logiciel inviolable. Il avait semblé tout excité et Alan avait dû le rappeler à l'ordre pour qu'il s'occupe de récupérer ce qui les intéressait.

– Qu'est-ce que tu fais maintenant ? avait-il demandé au hacker.

– Je vais dans les fichiers perso de Deadline pour voir qui ils embauchent, chercher les défauts et savoir ce qu'on peut trouver contre eux. Après j'irai voir leur comptabilité, histoire de tracer un peu les zigotos et pour finir je vais pourrir leur système avec un petit virus de ma fabrication !

Alan ne savait pas ce qui l'avait fasciné le plus : savoir que son meilleur ami était capable de tels prodiges ou le fait qu'il soit totalement inconscient face au danger réel qu'ils risquaient d'affronter ? Quoiqu'il en soit, le jeune homme avait été d'une performance presque divine : il s'était amusé à calibrer l'image du Pac-man engloutissant ses petites baies pendant que son programme cheminait jusqu'aux points faibles de la banque de données. Dès lors qu'il en trouvait un, le logiciel le transformait en fantôme apeuré que le Pac-man dévorait avec appétit.

L'attente avait été courte et le résultat était là : Deadline n'employait réellement que six personnes. Leur statut officiel était « prêteur sur gage ». La réalité était toute autre et Alan le savait plus que quiconque. Leurs employés étaient répertoriés en tant que banquiers d'investissements ou conseillers fiscaux. Seul leur directeur général n'avait pas de casquette particulière. C'était un homme corpulent au visage jovial. Il portait une paire de lunettes assez sobres et arborait fièrement une moustache assez vintage. Son nom était Marco Morreli. En un mot, il n'avait pas du tout l'air d'être le vilain petit canard auquel s'était attendu Alan.

Andrew lui avait rappelé de se méfier de l'eau qui dort et que cet homme avait dû se salir les mains plus d'une fois pour être arrivé à la tête d'un cartel comme celui-ci. Par ailleurs, l'image du serpent entourant les lettres de « Deadline » réapparaissait sur chacune des pages, contribuant à renforcer l'impression de danger qu'il ressentait déjà.

Farfouillant de dossiers en dossiers, Andrew s'était enfoncé de plus en plus dans leur base de données sans comprendre l'importance de tout ce qu'il avait sous les yeux : ils avaient entre leurs mains les fichiers qui comportaient toutes les informations sur les gens et les entreprises dans lesquels ils avaient investi.

Le soleil était levé depuis un bon moment maintenant et le réveil de la chambre indiquait 8h55. Alan s'était aperçu qu'il n'avait pas sommeil le moins du monde avec tout ce qu'il voyait. Il y avait des centaines de gens. Les sommes investies représentaient des centaines de millions d'euros. Tous les dossiers se présentaient de la même façon : il y avait la photo du directeur de la société prisée, ses coordonnées, la somme investie et, en information complémentaire, écrit en capitales rouges, les mots « A corriger » ou « A éliminer ». Alan était tombé à la renverse sur le fauteuil que lui avait prêté son ami. Il avait deviné ne pas être le seul homme de main de la société mais il ne s'était pas attendu à ce que certains d'entre eux aillent jusqu'à tuer des gens.

Évidemment, la plupart des dossiers ne comportaient aucune mention rouge mais leur nombre était si important qu'il était facile de voir ces inscriptions.

– Ça fout les boules de voir ça, hein ? avait commenté Andrew. Heureusement que c'est pas toi qui dois les tuer !

– Merci de ton réconfort mon pote, avait ironisé Alan.

Ils avaient récupéré les informations et commencé le chemin vers la comptabilité lorsque le petit Pac-man avait commencé à s'affoler, l'écran de l'ordinateur devenant noir par intermittence.

– Qu'est-ce qui se passe ? s'était écrié Alan, pris de court.

– Il est neuf heures passé. Leur informaticien a dû nous interférer et il essaye de remonter jusqu'à nous, avait expliqué calmement le hacker.

– C'est possible ça ? Je croyais qu'ils avaient pas d'informaticiens dans leur équipe ?

– L'une des boîtes qu'ils embauchent doit servir à leur protection. Et ça doit pas être des tendres vu comment ils sont en train d'exploser mon bébé. Mais t'inquiète, ça va tenir assez longtemps pour qu'on se tire sans laisser de traces.

Andrew s'était mis à taper frénétiquement sur les touches de son clavier, ses doigts ne devenant plus que des éclairs pâles qui passaient d'un endroit à l'autre sans se préoccuper d'autre chose. Son visage était aussi concentré qu'un pilote de course durant un rallye et Alan avait su qu'il ne pouvait pas l'aider le moins du monde. Il n'avait pu qu'attendre et prier pour que leur découverte ne soit pas à l'ordre du jour. Cependant, il n'avait aucune connaissance en informatique et voir le pauvre petit Pac-man se faire martyriser ainsi le rendait presque hystérique.

Finalement, après de longues secondes d'angoisse et le martèlement des touches du clavier d'Andrew, ce dernier s'était arrêté, triomphal, et avait juste murmuré :

– J'ai gagné !

– Sérieux ?

– Sérieux ! Le mec en face, c'était un sacré morceau ! Mais j'ai gagné ! Normalement y'aura aucune trace de notre passage.

– T'es le meilleur, mec !

– Ouais, je sais !

Un nouvel élan d'affection avait ponctué sa remarque. Cependant, lorsque le coeur d'Alan eut repris un rythme moins soutenu, il s'était rendu compte qu'ils n'avaient pas du tout pu finir leur programme de réjouissance, notamment au niveau de la comptabilité et du virus qu'Andrew avait prévu d'envoyer.

– Ouais c'est dommage de pas savoir combien de pognon ils ont volé. Par contre, pour le virus, t'en fais pas. Mon bébé était un kamikaze, paix à son âme ! Il était truffé de déchets. Chaque point faible qu'il a traversé va conserver une mémoire d'une toute petite partie du virus. Et quand le système va s'éteindre, donc toutes les défenses qui s'abaisseront une à une lors de l'extinction du processeur, le virus intégral va s'assembler. Au prochain démarrage du système... Boum !

Alan n'y avait pas cru au début mais, voyant la mine réjouie et satisfaite de son ami, il avait comprit qu'il ne plaisantait pas. Et ça, c'était un sacré coup !

Le jeune homme retourna s'allonger et sortit de sous le canapé son ordinateur. Il ne l'avait pas éteint de façon à ce qu'il soit plus rapidement fonctionnel. Il brancha la clé USB sur le port de celui-ci et balada sa souris de fichier en fichier.

Il avait expliqué à Andrew, lorsqu'ils avaient récupéré ces dossiers, que ces preuves n'étaient pas recevables devant un tribunal pour faire tomber tout Deadline. La première raison était la plus simple : il pouvait s'agir d'un faux. Si son potentiel se révélait exact, il serait impossible de retracer leur intrusion et un avocat, même médiocre, pourrait jouer sur leur invisibilité pour faire passer cette preuve pour un montage amateur.

La deuxième raison était tout aussi simple : s'il s'avérait que l'on pouvait les retracer malgré le génie d'Andrew, cette preuve avait été acquise frauduleusement. Aux yeux d'un juge, elle ne vaudrait absolument rien. Le juge en question ne serait pas même obligé de lancer une instruction en direction de Deadline pour s'intéresser de plus près à leur trafic puisque cette preuve sera considérée comme n'ayant jamais existé.

Enfin, la troisième raison, et de loin la plus complexe à comprendre pour un néophyte, était qu'aucun témoin ne viendrait appuyer leur preuve par peur des représailles. Le programme de protection des témoins n'était qu'un vaste leurre réservé aux témoins les plus importants d'une société riche, pas à de simples directeurs de quartier qui n'auraient pas droit à cette protection. Par ailleurs, qui pouvait les assurer qu'il n'existait aucun juge corrompu par Deadline derrière les lignes si valorisées et prestigieuses du Parquet de Paris ? Ils seraient donc seuls face au juge. Encore fallait-il qu'un juge d'instruction veuille bien faire remonter la plainte jusqu'à un tribunal pénal.

Ils étaient donc presque démunis : les deux hommes se retrouvaient avec une liste de noms sans signification particulière et sans la moindre possibilité de faire sortir Alan de ce cauchemar.

Depuis un mois, maintenant qu'il avait trouvé cette liste, le jeune homme se contentait d'effrayer ses cibles sans les toucher. C'était le programme qu'il avait prévu avec le fameux Lucas de la veille mais les événements ne s'étaient pas déroulés comme prévu et son arrivée n'avait pas arrangé les choses. La situation était on ne peut plus tendue et Alan savait que dans peu de temps elle se complexifierait davantage. En effet, si elle l'avait trompé avec un type associé à Deadline, il y avait forcément un lien entre elle et eux. Cela ne pouvait pas être une coïncidence qu'elle choisisse de son plein gré l'une de ses cibles.

Alan se tourna vers la table basse et saisit le cadre qui trônait dessus. Elle posait avec lui alors qu'ils étaient toujours heureux du temps qu'ils passaient ensemble. Elle semblait comblée, transportée par le bonheur.

– Tu as changé, Irène...

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