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XXVII. L'Archiviste



Au levé du jour, j'observe une fois encore les rayons caresser lentement l'horizon de l'île de Londinium.

Accoudé au petit balcon, une chemise légère pour simple vêtement de nuit, je jette un coup d'œil par-dessus mon épaule pour observer la silhouette du boulanger endormi. Trop ivre pour rentrer, trop ivre pour contrôler ses mots, pleurnichant que je lui manquais, qu'il m'aimait et qu'il voulait passer une dernière nuit à mes côtés, je l'ai simplement laissé s'échouer sur le matelas, le couvrant de couvertures alors que je vivais une énième insomnie. 

Toutes mes pensées sont dirigées vers une seule et unique personne, n'entendant qu'une seule et une voix en peine, tandis que je me ronge les ongles de le rejoindre. C'est une pure torture, depuis mon départ d'Agora, à la fin de l'automne dernier, soit quasiment neuf mois, jamais je n'ai ressenti cette sensation de proximité, sans pouvoir la franchir. Ce déchirement dans mon âme alors que je l'entends pleurer.

Je dois partir. Il le faut. Sans attendre une minute de plus car je ne sais combien il lui en reste.

Penchant ma tête en avant, épuisé moralement et physiquement, mes muscles lâchent et mon souffle s'extirpe dans une longue agonie d'impatience et de frustration. Je me redresse et je reviens à l'intérieur, passant à côté de la couche où dort encore profondément Ben pour rejoindre l'étage inférieur. 

L'auberge est silencieuse, le craquement du bois par instant ne témoigne que de mes propres pas alors que j'arrive jusqu'au bureau de Sire Neven. La porte n'est pas totalement fermée et je vois s'en échapper une légère lueur mêlée de sa bougie au début de la matinée, un certain soulagement détend mes épaules.


« Tu étais bien moins timide à venir me déranger enfant », sourit Neven sans même relever les yeux de son parchemin mais j'en devine le sourire amusé.


Je pousse le battant de la porte pour la refermer ensuite lentement derrière moi. Je m'avance jusqu'à la chaise face à son bureau et je m'y installe, sans un mot.


« Tu es anxieux.

- Comment ne pas l'être ? Je souffle. Vous avez toujours su qui j'étais, ce que j'allais devenir. Et maintenant...Maintenant que je le suis, j'ai une personne qui a besoin de moi de l'autre côté du continent et je me retrouve bloqué ici, à attendre. Je n'ai jamais été bon pour ça.

- C'est vrai, sourit Sire Neven. Tu as toujours été un enfant fougueux et impatient. Toujours à te jeter dans le vide sans réfléchir aux conséquences. Tu as beaucoup de chance, tu étais doué naturellement pour te sortir du pétrin mais aujourd'hui tu as une responsabilité plus grande que toi, qui pèse sur tes épaules. Plus grande que tes sentiments personnels, et si tu n'arrive pas à l'accepter, tu finiras comme ton prédécesseur. »


Je déglutis, comprenant qu'il en sait encore plus que ce que je peux imaginer. 

Avec le temps, en apprenant peu à peu mon histoire, celle du monde, je me suis rendu compte que Sire Neven devait la connaître depuis longtemps. Dès le premier jour où j'ai voulu me réfugier à l'auberge enfant, et à chaque fois que l'évolution de mes signes apparaissait. Mais qu'il s'était tut tout du long, sans jamais me forcer à l'accepter alors même que je peinais à survivre, poussé par un destin silencieux à vouloir quitter l'île.

Je ne lui en veux pas d'avoir gardé tout ça pour lui. Je devine que ça n'a pas dû être facile de se taire comme de trouver les bons mots, si tant est qu'il ait un jour envisagé de me relever ce qu'il avait appris. Aujourd'hui, je peux au moins me dire qu'il peut avoir des réponses à me donner, maintenant que je sais, et l'une d'entre elle me brûle les lèvres.


« Comment lever la malédiction ? »


Sire Neven sait de quoi je parle, il ne tique même pas alors que je plante un regard si sérieux dans les siens que je peux sentir mes muscles même se crisper sur les accoudoirs de ma chaise. Il esquisse un sourire paternel et se lève de son fauteuil de sa grande stature pour récupérer un ouvrage niché en haut de sa bibliothèque. Une reliure verte, pas très grand et pas très gros, il le pose devant moi après avoir épousseté le peu de poussière qui couvrait le titre.


« Celle qui sait ?

- La mère des Moires. Il me dit.

Je sens une pointe nerveuse piquer dans ma poitrine.

« Quand Eivor et Enkil se sont unis pour faire tomber le Geai Bleu, il y a eu deux étapes importantes. La première, fut le sacrifice. Les Moires demandent un sacrifice pour pouvoir exaucer un vœu. Plus le vœu est grand et plus le sacrifice le sera. Eivor a donc sacrifié un village entier pour rompre le pacte qui avait été passé jadis avec le Geai Bleu, ceux du premier cycle et Shinrei Vagari, le tout premier ancêtre connu de la famille Vagari. »


Sire Neven vient s'asseoir à nouveau sur son fauteuil, retirant ses lunettes pour les essuyer.


« La deuxième étape, fut la corruption d'Enkil. Le Mage Blanc a invoqué Celle qui sait, lui a donné une forme et l'a laissé puiser dans ses pouvoirs. Celle qui sait, ou la Mère des Moires, est une vieille entité spirituelle que les Moires avaient emprisonnée sous un arbre de Pandore pour sauver le monde spirituel, bien avant l'existence du Geai Bleu. Tu as déjà dû voir l'arbre en question, il est au Palais de Calcano. »


Aussi tôt je me souviens de l'arbre dans la cour, là où je faisais ma méditation. Cet arbre venait de la forêt et suivait le cycle climatique d'Agora au lieu de Pandore. Un endroit particulier que personne n'avait réussi à expliquer, jusqu'à aujourd'hui.


« Et bien, dans le sous-sol, il y a une immense cave et l'esprit de la Mère y était enfermée. Quand Enkil a trahi les siens, il a en réalité redonner vie à la Mère et elle s'est gavée des pouvoirs du Geai Bleu jusqu'à leur extinction. Bridant ainsi les Moires à nouveau dans leur marécage. Un effet secondaire qui arrangeait Eivor, préférant que les Moires se retrouver bloquées plutôt qu'elles soient à nouveau utilisées contre lui, par exemple. »


J'ai la sensation d'avoir des souvenirs de ma vie antérieure revenir, mon regard sur les chaînes qui tenaient Zephilis piégé, marqué des mêmes runes trouvées dans les marécages, et qui recouvraient les chaînes d'Oro.


« Zephilis était le seul survivant car aucun esprit ne peut le tuer. Même avec une forme matérielle. Et ce fut Felane qui lia les âmes des défunts mages du Geai Bleu à celui de Zephilis, avant de mourir. Zephilis, dans sa spirale de haine vengeresse a choisi d'utiliser la magie noire pour enfermer à nouveau la Mère et pour ça il a utilisé Oro. Oro est le gardien des démons enchainés dans les Terres Obscures. Certains sont si puissant qu'ils ne peuvent être libre, même là-bas. C'est le cas de Maah. L'esprit du serpent à la tête de mort. Zephilis a fait un échange, la Mère a pris la place de Maah en Terres Obscures, et en contrepartie Maah vie à travers les générations de Vagari. Jusqu'à ce qu'il n'y en ait plus un seul. Au dernier jour du dernier descendant dans notre monde, Maah retournera en Terres Obscures. »


Sire Neven me regarde maintenant, terminant son histoire sans réussir à me dire les derniers mots, ceux qu'il sous-entend et qui commence à me faire frissonner. Je fronce les sourcils, craignant de comprendre.


« Vous essayez de me dire que je ne peux pas le sauver ? Qu'il doit mourir ?

- J'essaie de te dire qu'il n'y a qu'un seul moyen pour que la Mère et Maah restent en Terres Obscures, et ce moyen passe par la mort du dernier héritier. Ainsi veut la malédiction lancée par le précédent Zephilis. Je suis désolé Felix.

- Attend, je n'ai pas d'autre choix ? Il doit bien y avoir un autre choix ! Iris m'a dit qu'on avait un procédé ! Qu'il nous affaiblirait tous mais qu'il était possible. On peut le sauver.

- Tu peux le sauver, mais en tant qu'Alchimiste, Iris sait très bien que ce n'est pas sans conséquences. Le procédé dont il parle est une transmutation alchimique avec l'esprit qui a remplacé Maah en Terres Obscures. Si tu fais repartir Maah, tu fais revenir la Mère. Et je te l'ai dit, les Moires avaient enfermé l'esprit de la Mère pour une bonne raison, elle répand la désolation sur son passage dans le monde qu'elle gagne. En Terres Obscures, sa nature est tel qu'elle ne pourrait l'annihiler, mais le monde sensible. Notre monde. Il est fait d'équilibre et en faisant revenir cet esprit, elle va se répandre et tout détruire. Tu ne pourras rien y faire. Même tant que Zephilis.

- Je...Non. Je peux pas l'accepter », je bégaye sentant le gouffre s'ouvrir dans ma poitrine. « Iris, il doit savoir, s'il l'a proposé, il doit savoir quoi faire... », je continue, secouant la tête frénétiquement mais sentant mon souffle se faire rare.


Son regard se fait plus compatissant, alors qu'il se penche un peu plus en avant en espérant toucher ma main mais je m'écarte soudainement, me relevant.


« C'est un jeune mage », il me dit aussi tôt, suivant mes pas angoissés, les muscles de la mâchoire contractés. « Il a conscience du risque et il espère secrètement que tu sauras arrêter la Mère mais d'après ce que je sais, de ce que j'ai lu et d'après ce livre, dit-il en pointant le livre sous mes yeux. Tu ne pourras rien faire. Il n'y a que les Moires pour enfermer à nouveau leur Mère et Enkil les a totalement bridés la première fois. Elles ne feront plus rien pour ce monde. »


Ma gorge devient si sèche et mon cœur me fait si mal que je me tords littéralement, m'arrachant les cheveux. Un flot d'émotion, d'incompréhension me brouille la vue.


« Non. Je peux pas...Vous pouvez pas me faire croire que tout ce que je fais ! Tout ce que j'ai donné n'a servi à rien ! » Je m'écrie les yeux écarquillés, brûlant de cette vive piqure qui m'étouffe jusqu'à me rendre fou.


« Je l'ai laissé, je suis parti de l'autre côté du Monde ! J'ai failli mourir manger par un loup géant, par un dragon ! J'ai combattu des démons, des esprits en Terres Obscures ! J'ai appris la maîtrise des éléments au péril de ma vie et m'efforçant de ne pas le contacter, de ne pas songer à le retrouver alors que je mourrais de la distance ! De le savoir souffrant ! Et si vous me dites que tout ça n'a servi à rien ! Si vous me dites que je suis inutile ! Je..Je...

- Felix...Je n'ai pas de réponse satisfaisante pour toi. Je ressens ta douleur, mon garçon, j'en suis désolé.

- Non. Vous vous trompez. Vous vous trompez forcément ! »


Je pars en courant du bureau, faisant fi de mes cris qui ont réveillé les occupants de l'auberge, la tête ensommeillée d'Eileen en haut des escaliers, le visage légèrement crispé de Minho qui sort de sa chambre tandis que je cours pour sortir du bâtiment. Les rues sont presque désertes, les rayons du soleil caressent lentement mes joues qui s'inondent de larmes alors que je continue de courir, jusqu'à en perdre le souffle.


Hyunjin. Hyunjin...Je suis tellement désolé.


***


Abasourdi par les mots de Sire Neven et de ses explications, le visage consterné de Minho était semblable à celui plus introspectif de Jisung. Les deux hommes avaient pu obtenir les explications nécessaires après le départ de l'Elémentaire. Il n'était pas encore revenu et il leur fallait comprendre avant de penser à le poursuivre.

Ils n'avaient pas été surpris d'entendre que Sire Neven savait toutes ces choses, cela expliquant surement tout le mal qu'il s'était donné pour garder Felix en sécurité sur Londinium toutes ces années, en tant qu'archiviste, il avait nécessairement des données sur le Geai Bleu et la veille Minho avait pu remarquer différent ouvrages qu'il avait déjà vu dans des bibliothèques royales, voire la grande bibliothèque du Culte du Phoenix. Retrouver ces mêmes ouvrages dans un petit bureau n'était pas anodin, il en avait parfaitement conscience.


« Alors Iris se trompe ? Demandait Jisung.

- Non, il ne se trompe pas. Il n'a simplement pas toutes les informations sur les Moires, répétait Sire Neven.

- Lia connait bien les Moires, constata Minho. Elle n'en a jamais parlé.

- Elle n'en a peut-être pas plus conscience, elle connait les Moires mais connait-elle Maah ?

- Personne ne connait Maah, dit alors Jisung. Il est encore plus ancien que la Mère. Il n'y a que les créatures mythiques comme Ysondre ou Oro qui savent et connaissent Maah.

Sire Neven acquiesçait.

- Je ne vois pas pourquoi on épilogue, il y a un moyen. Redonner la magie des Moires pour qu'elles enferment à nouveau la Mère, dit alors Minho.

- Mais c'est impossible. Comment tu veux faire ça ? Lorsque l'on va libérer Hyunjin, on aura épuisé toute notre énergie, débrider ensuite les Moires, ça va nous tuer. On aura pas retrouver nos pouvoirs à temps pour aller directement dans les marécages et libérer ces sorcières, lui dit Jisung.

- Si, on peut le faire. »


Jisung attendait qu'il parle, Minho se mordait la langue peu certain de devoir le dévoiler mais il n'en avait pas le choix. Il souffla à son tour avant de murmurer.


« Avec un dragon. »


Jisung s'arrêta soudainement, Sire Neven lui-même était septique. Minho pourtant était sérieux, même plus que sérieux car il avait l'air de trouver sa solution envisageable.


« Tu veux dompter un dragon ? Demanda Jisung pour être sûr.

- Le dragon est une force inépuisable de magie, comme avec Caïr, si je lie son âme à la mienne, je regagnerai la force de Felane au maximum. On pourra alors retirer le sceau des Moires et les forcer à enfermer la Mère à nouveau sous l'arbre de Calcano. En échange, elles retrouveront leur liberté dans les marécages. »


Sur le principe, ça se tenait et pourtant ni Jisung ni Neven n'était convaincu. Jisung cligna plusieurs fois des yeux, voyant que Minho ne disait pas tout et voulant alors lui rappeler les incohérences de son idée, il continuait en s'approchant.


« Les Moires sont des sorcières qui mangent les enfants. Tu es sûr de ce que tu veux faire ? Tu veux libérer de pareille créature dans ton pays ?

- Les Moires n'agissent que lorsque les hommes viennent les voir. Elles sont neutres en réalité. Elles n'iront pas voler les enfants, ce sont les hommes qui sont mauvais et qui vont les prier. En tant que monarque, il me faudra être plus vigilant. Et puis une fois au complet, elles ne pourront plus rien contre moi qui aurait en plus un dragon. »


Jisung commençait à croire en ses mots, bien que cela paraissait impossible, il avait la sensation qu'il y avait longuement réfléchi alors que le problème venait tout juste de se poser.

Il savait par ailleurs qui lui faudrait l'accompagner car il n'y avait qu'un moyen de procurer un dragon, sans passer par le Lac d'Urenal ce qui reviendrait à perdre à nouveaux des journées entières, sans garantie de réussite. Il leur fallait en voler et il n'y avait qu'un endroit où il pouvait le faire.

Qui plus est, une fois qu'ils avaient le dragon, ils pourraient se rendre dans les marécages avec ce dernier bien plus rapidement qu'avec n'importe quelle créature ailée, les dragons parcouraient des lieux plus vite à une vitesse presque instantanée.


« On doit retourner à Alfost. Il faut voler un dragon à Fenrir alors.

- Inutile, Fenrir a fait bouger ses monteurs.

Les deux mages regardèrent Sire Neven. Ce dernier leur donna le parchemin qu'il lisait plus tôt, avant que Felix ne vienne le voir.

- Une missive d'un ami chercheur à Haendel. Il avait déjà remarqué du mouvement depuis plusieurs semaines dans les forces armées du Roi Fenrir, ses monteurs ont été dépêchés sur les falaises à la limite de la frontière entre Insomia et Agora, au nord du continent où aucun bateau ne peut accoster. Ils se préparent à une attaque. Le Roi Fenrir va déclarer la guerre.

- Si les monteurs sont là-bas, il sera difficile de leur voler un dragon sans risquer de déclencher immédiatement la guerre, songeait Jisung en regardant le parchemin.

- Il y a un dragon qu'il n'a pas fait bouger, se dit alors Minho. Seul dont on a besoin.

- Alors tu as perdu la tête ..., lui répond aussi tôt Jisung comprenant immédiatement à quel dragon il fait référence. Tu veux prendre Glass ? Le dragon du Roi ? Tu sais que leurs deux âmes sont déjà liées pas vrai ? Glass ne te suivra jamais. »


Minho sourit, confiant, sans pour autant être heureux. Encore une fois, c'était une question déjà élucidée et Jisung avait bien du mal à comprendre comment c'était possible. Que cachait réellement le Roi Pandore et dans quel but avait il songé à tout ça ?


« Crois moi, il me suivra. J'en suis certain.

- Et au nom de quoi ? » Croisait les bras Jisung, ne tenant plus de ces mystères.


Neven lui-même ne savait pas vraiment ce que sous entendait le Roi de Pandore, il semblait pourtant parfaitement serein à cette idée. Minho soupira et dû se rendre à l'évidence, il lui faudra dire finalement ce qu'il préparait depuis tout ce temps, depuis le jour même où il avait compris que Fenrir avait convaincu son père d'abdiquer. La graine d'Haendel planter dans sa famille pour la détruire de l'intérieur, il n'avait jamais su si le but du Roi des terres glacées était de réellement faire abdiquer l'ancien Roi de Pandore ou si ce n'était qu'un coup de génie, pour faire agir son ambitieuse mère et de prendre les devants en tuant son propre mari.

Quoi qu'il soit, ce qu'il avait préparé dans un autre but devenait aujourd'hui leur seule issue. Il passait sa main dans ses cheveux, alors que les deux autres attendaient impatiemment de comprendre.


« Sais-tu comment la famille Sørensen se liait aux dragons ? » Dit il à l'attention de Jisung.


Le Mage Blanc fronçait les sourcils, ce n'était pas un secret pour un espion de Fenrir et par ailleurs, ce n'était même un secret pour personne sur les terres glacées.


« Ils leur coupent les ailes quand ils sont encore bébé, il répond d'une petite voix, néanmoins assurée.

- Oui. Ils coupent leurs ailes. Les enferme dans des cages des mois durant puis quand ils ont brisé leur esprit rebelle, ils les soignent avec de la magie et leur donne de la liberté. Au point de les rendre docile. »


Ca ne suffisait pas. Jisung insista.


« Et tu espères qu'un dragon à l'esprit brisé va te suivre ? Où veux tu en venir ?

- Glass n'est pas n'importe quel dragon. Sourit Minho. C'est le fils d'Ysondre. Un de ces fils en tout cas et on ne brise pas l'esprit d'une créature avec le sang pur d'Ysondre. »


Jisung n'avait pas cette information, d'ailleurs personne ne devait l'avoir en dehors de Fenrir et de ceux qui avait pu côtoyer Ysondre lui-même. Rien d'étonnant pour le protecteur des Terres Obscures mais Minho continua, d'une voix calme.


« Il me suivra, parce que je suis le Mage Noire et parce qu'il ne rêve que d'une chose, pouvoir arracher la tête de Fenrir lui aussi.

- Comment tu peux en être aussi sûr ? Personne n'a vu voler Glass depuis des années. Moi-même je n'ai pu le voir, alors que personne n'a été aussi proche du Roi que je ne l'ai été. La Reine Ada elle-même ne peut s'approcher de son dragon.

Minho haussa un sourcil mais Jisung se contente de claquer la langue.

- Arrête. J'étais son meilleur espion, bien sûr que j'étais plus proche de lui que ne l'était la Reine, il lui dit aussi tôt, devinant ses pensées.

- Et moi je suis le Nécromancien. Je connais bien Glass car comme toutes les créatures de sa nature, il peut projeter son âme en Terres Obscures quand il le souhaite et où il le souhaite. C'est ce qui faisait qu'il n'était pas vraiment emprisonné comme Fenrir l'espérait. La réalité c'est qu'il a vu trop gros en domptant un petit d'Ysondre mais on ne dompte jamais vraiment un dragon au sang pur. On communique avec et on le respecte. Fenrir aura signé sa perte. Ca fait des années que je suis déjà prêt à lier mon âme avec Glass, j'attendais juste le bon moment... »


Un silence s'installa entre eux. Et puis finalement tout devenait clair. Le plan de Minho résonnait avec les incertitudes de Jisung, avec ce qu'il avait lui-même chercher à faire et il comprenait tout. Lorsqu'ils étaient tous les deux sous le Lac, alors que Minho semblait si confiant dans l'idée de pouvoir détruire Fenrir sans utiliser Ysondre et son pouvoir. Ce n'était pas tout à fait vrai et aujourd'hui il comprenait enfin. Il écarquillait les yeux.


« Alors c'était ça ? Il s'exclama. Tu ne voulais pas que j'apprenne à tuer Fenrir parce que tu savais déjà comment le faire et tu n'allais même pas te mouiller pour ça. Tu utiliserais son propre dragon. Tu n'aurais même pas besoin de lui enlever son immunité ! Il peut mourir des crocs de son propre dragon parce qu'il a le sang pur d'Ysondre ! »


Minho ne prit même pas la peine de lui confirmer. Neven releva à son tour la tête, tout aussi surpris. Jisung en était certain et bien que le silence des conclusions d'un plan échafauder depuis des années se dessinaient sous les yeux du Mage Blanc, un autre plus bancal se dessinait dans l'esprit de Sire Neven. Il y avait peut-être un moyen de réussir, une option possible pour sauver Hwang Hyunjin sans risquer de détruire le monde.


« Ça peut fonctionner, il dit alors. Mais vous n'avez pas de temps à perdre. »


Il fouilla à nouvelle fois dans ses ouvrages empilés les uns sur les autres, les deux mages regardaient l'archiviste, intrigués et quand ce dernier sortit deux grands livres qu'il déposait dans leur bras, il semblait tout excité.


« Celui-ci ! Dit il à Minho. Il vous permettra de trouver les sceaux nécessaires pour bloquer la Mère un petit temps, une fois que vous aurez fait tomber la malédiction. Quelques jours seulement. Ça vous laissera le temps d'aller récupérer le dragon. Et pour ça... »


Cette fois il pointa le livre dans les bras de Jisung.


« Vous pourrez utiliser celui-ci pour vous téléporter. Iris n'aura plus assez de magie pour le faire et au moment où vous aurez libéré la malédiction, Fenrir rentrera sans doute en guerre donc il vous faudra y aller un claquement de doigts. Pour ça, Zephilis devra utiliser le flux spirituel de la forêt des Quatre Cent Dieux et vous transmettre assez de magie pour créer un passage jusqu'à Alfost. En combinant les pouvoirs du Mage Noir et du Mage Blanc, vous pourrez créer un portail. Un portail à usage unique. Une fois Glass récupéré, vous devrez vous débrouiller seul pour rejoindre les marécages et libérer les Moires sans vous faire tuer. Ça sera extrêmement difficile mais c'est votre seule fenêtre de tir. »


Les deux mages regardaient les livres, puis Sire Neven qui bien que plus confiant, savait tout ce que cela impliquait. Au moment où ils devront récupérer le dragon de glace du Roi Fenrir, ce dernier allait déclarer la guerre et attaquer Agora, pendant que le Geai Bleu serait dispersé et affaibli. Les pertes allaient être terrible, ils ne pourront alors revenir au maximum de leur force qu'une fois à nouveau au complet. Ça pouvait laisser assez de temps à Fenrir pour mettre à feu et à sang ses ennemis. C'était risqué, presque suicidaire mais c'était tout ce qu'ils avaient.


« Quand part le bateau ? Demanda cette fois le Roi de Pandore.

- A midi, il vous emmène sur le port d'Agora en cinq jours, si tout va bien.

- On gagne deux jours.

- Mais ça reste encore trop long..., songe Minho.

- Pas avec l'Elémentaire à bord. Se dit alors Jisung. Il devra utiliser sa magie pour nous faire aller plus vite mais je pense qu'on peut gagner la côte en trois jours. »


Minho sourit.

Il avait raison et il aimait le voir aussi investi. Depuis qu'il avait quitté le Lac d'Urenal, Jisung faisait tous les efforts pour prouver qu'il était digne de confiance, qu'il voulait leur donner une chance et accomplir sa destinée au côté du Geai Bleu. Il sait que convaincre les autres de sa sincérité sera compliqué mais Minho voulait lui faire confiance. Il était sa moitié, son pendant, son équilibre. Le Mage Blanc à ses côtés, il se sentait invincible et enfin complet. Il aurait dû lui parler de son plan plus tôt mais il craignait encore que Jisung ne souhaite reprendre sa promesse où elle était restée.

Jisung ne pouvait lui donner tort. Lui-même se sentait encore tiraillée par les deux chemins de vies mais avec Minho près de lui, difficile de s'en éloigner. Le lien qui les unissait ne faisait que se consolider de jour en jour. Un lien qu'il voulait chérir plus que n'importe quel autre mais qui en plus d'avoir une origine qui les dépassait, était couvert d'un autre sentiment. Celui d'un amour totalement et irrémédiablement humain.

Si Minho lui avait avoué ses sentiments sous le Lac, Jisung n'avait encore rien dit. Il ne trouvait pas le bon moment. Doutant encore. Non pas de ce qu'il ressentait, parce qu'il ne pouvait ignorer que son cœur battait toujours plus vite dès qu'ils étaient l'un à côté de l'autre, dès que ses yeux améthyste se posaient sur les siens, que sa main se glissait dans la sienne. Parfois de manière innocente, d'autre fois à dessein. Il doutait simplement d'en être digne. Sentant toujours cette gêne, cette culpabilité le ronger alors qu'il se remémorait sa fuite.

Et n'ayant pas encore fait totalement son deuil de Jinyoung et de ses propres plans, il savait qu'il lui faudrait totalement se libérer de cette destinée pour se plonger dans celle des cinq mages, de s'abandonner et leur fait confiance.

Il devait croire en Minho, en lui et leur amour, bien que puissant, encore fragilisé des anciennes trahisons. Il devait gagner le droit de se laisser à être aimé et aimer en retour.

Minho l'avait assez bien compris car depuis qu'ils avaient quitté les terres glacées, il n'avait été plus loin que leurs doigts entrelacés sous l'eau chaude des sources, qu'un baiser timide, effrayé, sur la pointe de leurs lèvres orphelines, depuis la nuit de son départ du Palais de Calcano faisant alors remonter un flot de souvenirs et d'émotion qu'ils avaient contenus depuis une éternité.

Ils s'étaient séparés, les lèvres humides et pincées. S'observant, bouleversés et si désireux de recommencer mais il n'en fut rien.

Prendre le temps, réparer ce qui avait été cassé et retrouver ce qu'ils avaient laissé en suspens.

Mais avant ça...


« Je vais aller chercher Felix, lui dit finalement Jisung en posant le livre ses bras. Je vais lui expliquer. Toi, prépare notre départ avec Sire Neven.

- Bien », sourit Minho sur un ton discipliné.


***


Retrouver la trace de l'Elémentaire était chose aisée pour un ancien espion. Jisung se glissait dans la foule comme il l'avait toujours fait, avec aisance et discrétion. Il pouvait aussi bien passer inaperçu qu'être exubérant tout en se faisant oublier. On ne retenait alors qu'un rire communicatif, une sensation agréable, comme après un enchantement qui nous laissait guilleret. C'était sa spécialité, sa marque de fabrique et de cette façon, il avait facilement pu retrouver le garçon aux cheveux bleus, sur le toit d'une vieille bâtisse. Pieds dans le vide et regardant alors le haut des mas de voilier, près du port.


« C'est une habitude identique à celle du Prince, tu le savais ? Tous les deux vous ne faites que regarder l'horizon depuis des points hauts dans le ciel, depuis que vous êtes enfants. Comme si vous cherchiez inconsciemment le regard de l'autre. »


Felix se tourna en direction du barde qui marchait en funambule sur le rebord, mains dans les poches.


« Enfin je dis ça, continuait le barde un petit sourire mélancolique sur les lèvres en regardant les mouettes dont le cri n'arrivait même pas jusqu'à eux. C'est propre sans doute aux enfants qui se sont toujours senti seul, après tout. »


Felix ne répondait rien. Toujours en proie à un tourment qui lui scellait les lèvres alors Jisung vint soudainement s'asseoir à ses côtés.


« On a peut-être une solution, il dit finalement. Enfin Minho et Sire Neven ont trouvé une idée. Pour sauver ton bien aimé, sans risquer de foutre le monde en l'air. Bien que la guerre soit quand même aux portes d'Agora...On va limiter les dégâts, disons. »


Felix se tourna alors vivement vers le mage. Jisung lui sourit comme il avait l'habitude le de faire, cet air toujours énigmatique qui le démangeait puis finalement il devint plus sincère, compatissant à la peine qui tiraillait son cœur.


« Aller fais pas cette tête, je suis sérieux. Minho a un plan et je crois...Que ça peut marcher. Ca va être compliqué mais rien est impossible pour un homme amoureux, pas vrai ?

Felix rougissait. Il se pinça à nouveau les lèvres.

- Je ne lui ai pas encore dit...Que je l'aimais... », Il avoua la mine basse.


Jisung ne disait rien, regardant le même point de fuite que l'Elémentaire.

Deux handicapés des sentiments, ça ne l'étonnait pas tant que ça et laissa un petit rire secoué sa poitrine. Ils se ressemblaient beaucoup.


« Encore un trait propre aux garçons qui se sont toujours senti seul, dit-il. On a dû mal à se laisser aller. On craint de ne pouvoir revenir en arrière et espère ne pas se tromper parce qu'on a trop souffert. Puis après on regrette comme des idiots, de pas avoir pu saisir notre chance. Mais t'en fais pas, tu pourras lui dire. Tu vas le retrouver et on va le sauver. J'en suis sûr. »


Felix déglutit. Sa main tremblait légèrement alors qu'il posa la question.


« Quel est le plan de Minho ?

- On doit piquer le dragon de Fenrir. »


Felix cligna plusieurs fois des yeux. Finalement la réponse se suffisait à elle-même, il avait envie de rire et il ne savait pourquoi, il sentait que c'était quelque chose de bien aux vues du grand sourire de Jisung, tout à fait fier de cette idée.


« Et on doit partir maintenant, il lui dit alors. Alors prêt à sauver ton homme ? »


Jisung se relevait, toujours en équilibre sur le bord et lui tendait la main, sans aucune crainte. Felix voulait lui faire confiance. D'ailleurs, il lui faisait confiance. A lui et Minho. Il saisit alors sa main, d'une poigne ferme avant de lui répondre.


« Prêt. »


.


Chapitre avant l'heure ! Mais c'est aussi parce qu'il fait encore durer le suspens 👀

Au prochain chapitre on débarque directe sur Agora ! Cette fois pas de surprise !

La légende des Moires trouve ses origines dans plusieurs mythologies, (s'apparente aussi à la légende des Parques dans la mythologie romaine).

En l'occurrence je l'ai réadaptée à ma sauce, en prenant comme inspiration celle décrite de Witcher 3 (le jeu) avec l'histoire de la Mère. Sachant que dans le jeu, vous trouvez le livre "Celle qui sait", qui parle justement de la Mère des Moires, enfermée sous un arbre  😊 (d'ailleurs pour la petite histoire, tu as le choix de la libérer ou non dans le jeu. Et si tu la libère alors tu sauves les enfants que veulent manger les Moires mais tu condamne un village entier. En sachant que c'est le village qui a conduit les enfants en guise de sacrifice pour les sauver de la famine... Autant vous dire que j'ai sauvé les gosses ! Tant pis pour le village !). 


Si vous des questions, n'hésitez pas. 


A bientôt !

D.

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