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XVIII. l'Espion



« Tu le sens ? Le flux spirituel qui vient du sol ?

- Je sens surtout que j'ai le cul gelé à force de rester assis ici sans rien faire, je me plains en m'étirant. »


Seungmin ne semble même pas surpris de ma réponse, il commence à avoir l'habitude maintenant.

Cela fait maintenant trois jours que nous avons gagné Calcano, la capitale de Pandore.


Cette dernière ne ressemblait en rien à Mirin et encore moins à Londinium.

Son paysage se rapprochait davantage des terres ocres, parfois noires, de Vulci. Mais là où Vulci était au bord de la mer, border par des falaises et un port qui jadis était le plus grand du continent, Calcano était un enchevêtrement de plateau de verdures joint par des ponts de pierres à des dizaines de mètres au-dessus de bras de mer qui s'insinuaient dans la roche. Une végétation plus exotique, tropicale, des vêtements plus amples pour laisser passer la fraîcheur des eaux. Des maisons plutôt petites, fondues dans l'environnement mais si blanches qu'elles s'illuminaient à l'instar des vagues, lécher par les rayons du soleil.

Au plus haut de la montagne, relié par un seul pont de pierre de plusieurs centaines mètres et si étroit qu'on pouvait à peine y faire passer une calèche, le Palais érigé au-dessus des chutes d'eaux qui se jetaient plus bas dans un bruit environnement constant et qui faisait échos dans le flan creusé, jusqu'à la mer.

Je comprends mieux pourquoi on dit de Calcano que c'est une terre imprenable. Entre les plateaux de falaise pleine de végétation, parfois dense et difficile de pratique. Les ponts de pierre qui pouvaient être tombés d'un simple tir de catapulte et qui rendrait dès lors le Palais inaccessible, et ce dernier bâtiment, perché sur la cascade avec une cour si petite qu'aucun siège ne semblait possible, je ne voyais pas quel Roi se risquerait à tenter de faire tomber une citée presque aussi ancienne que la forêt des Quatre Cent Dieux elle-même.

Sans compter le spiritisme omniprésent. Mirin était une terre de culture, de commerce et pourtant figé dans le temps. Calcano était mystérieuse, presque en autarcie, les cultes étaient nombreux mais l'un d'entre se démarquait. Celui du Grand Phoenix. Le symbole du royaume, l'oiseau de feu couronné.

Sa figure était sur toutes les maisons et parfois sur des coupoles plus grandes dont l'architecture attirait mon attention par sa couleur sombre, se distinguant des petites maisons blanches.

Le temple du Phoenix était un ordre de religieux qui vénérait les Terres Obscures et les créatures primaires. Les dieux avant la division des mondes. Avant la création du Geai Bleu. De ce monde sortait des créatures aussi ancestrales que les Moires ou encore le Voleur de Visage, représenter un mille pattes géantes au visage de porcelaine.

Les adeptes étaient nombreux et les frères du Temple étaient habillé d'une tunique noire, longue, le symbole de l'oiseau de feu dans le dos. Le Grand Prêtre se distinguait par son bâton de pèlerin, étrangement familier.


« C'est le même que celui d'Enkil. M'avait dit Seungmin lorsque nous venions de franchir les portes du Palais. Certains disent même que c'est celui du Mage Blanc, du tout premier. Le Grand Prêtre en serait le gardien, attendant que les mondes se réunissent de nouveau en un seul Dieu. Le Phoenix couronné.

- Ils ont passion pour les oiseaux », je marmonne pour moi-même.


Seungmin n'avait jamais été très friand des cultes créer par l'homme. Ils n'avaient pas de fondement, empirique mais forcer de constater que parfois des légendes pouvaient avoir un fond de vrai. Seulement, en tant qu'Erudit, il avait lu bien assez pour savoir que le temple du Phoenix était essentiellement composé de chamanes un peu trop fanatiques. Il était même persuadé que ceux qui avait aidé à garder Zephilis enfermé, était membre de l'ordre. Des mages aux affinités avec les Terres Obscures et ayant passé un marché avec les Moires.


« C'est quoi exactement les Moires ? Tout ce qu'on m'a appris sur elles, c'est qu'il s'agit de trois sorcières qui attirent les enfants dans la forêt avec des bonbons.

- Les Moires sont effectivement trois anciens esprits qui prennent la forme de trois sœurs. Il y a plusieurs interprétation et histoires sur elles mais celle qui est la plus proche de la vérité est sans doute qu'il s'agit de créatures des Terres Obscures. Qui était là bien avant le Geai Bleu et qui sont restés cachés dans le marécage. Elles exaucent des vœux en contrepartie de sacrifice et souvent il s'agit de la vie d'un innocent ou de plusieurs, en fonction de l'importance du vœu. Elles les mangent.

- Pardon ? Je m'étrangle presque.

- Elles mangent leurs âmes, leurs corps. Le coup des enfants, c'était uniquement dû au conte sur un village qui était frappé par la famine et qui a prié les Moires pour les nourrir, en contrepartie, ils ont conduit les enfants sur le sentier des délices, dans les marécages et elles les ont mangés.

- Mais c'est vrai ? C'est réellement arrivé ?

- D'après les livres, oui.

- Et le Temple vénère ces saloperies ?

- Je comprends que tu sois choqué Felix mais tu dois comprendre que c'est un culte très ancien, plus ancien que nous. Il faut le respecter, ce ne sont pas nos terres, ni celle de Minho d'ailleurs. Les Moires vivent dans une zone aussi indépendante que peut l'être la forêt des Quatre Cent Dieux.

- Putain j'ai hâte de rentrer à la maison, je soupirais en jetant un regard circulaire sur les habitants qui semblaient presque aussi hostile que les morts-vivants de la forêt.

- Moi aussi, me souriait Seungmin. »


Seungmin avait eu la délicatesse de me laisser une journée pour m'acclimater aux alentours avant de commencer l'entrainement de Mage. La visite dans le donjon de Vulci m'avait étrangement rendu plus sensible aux liens spirituels qui m'entouraient. J'avais développé une sorte de sixième sens, de réflexe et je sentais des perturbations, parfois invisible, qui avait de réels impacts physiques.

Mon coeur battait plus vite, ma tête plus lourde et parfois même main se mouvait seule, comme si elle essayait de saisir quelque chose.


« Tu t'ouvres au monde spirituel, tout va bien, m'avait rassuré Seungmin. Il nous faut pousser cette sensibilité. La magie élémentaire est particulière car elle concerne le monde physique qui t'entoure, mais pas seulement. Comme son nom l'indique, tu contrôleras les éléments primaires : le feu, l'eau, la terre et l'air. Ainsi que tous les dérivés qui combinent un ou plusieurs éléments. Comme l'électricité, la lave, la végétation, le métal. Ça peut aller jusqu'au corps humain, le sang, les os, dans sa forme la plus poussée. Il faut des décennies de pratique normalement pour réussir à maîtriser des éléments combinés, aucun Zephilis n'a maîtrisé la totalité de ses capacités et ce n'est pas non plus inné. Tu dois t'entrainer, même lorsque tu auras eu l'achèvement de réincarnation.

Tu peux aussi faire des invocations élémentaires, la plupart du temps il s'agit de Golem. C'était la spécialité de ta précédente réincarnation.

- Ils ont des spécialités en fonction des réincarnations ?

- Parfaitement. Iris par exemple, celle avant moi, était spécialisé dans la téléportation. Le contrôle de l'espace-temps. C'est quelque chose que j'ai beaucoup de mal à contrôler, me concernant.

- Et le Roi Christopher, lui qui a achevé sa réincarnation, qu'est-ce que c'est ?

- Callum est un Mage-Guerrier, il maîtrise l'énergie et le combat. Ils ont des forces de frappes qui dépassent l'entendement. Et le Roi Christopher est un Hallebardier, une immense lance avec une tête tranchante. Sa vitesse, c'est quelque chose, souriait fièrement Seungmin. Je ne l'ai vu qu'une fois en combat sérieux. Changbin avait bien failli y passer.

- Il s'était battu avec Changbin ? Je lui demandais stupéfait.

- Non, mais Changbin avait essayé de l'arrêter avant qu'il ne détruise le Palais. C'était contre le traître qui avait essayé d'assassiner Hyunjin. Le pauvre imbécile n'avait aucune chance...

- Et Minho ?

- Le Nécromancien. Le Mage Noir. Il préfère les invocations, comme l'ancien Zephilis. Sauf que lui, ce sont des démons qu'il invoque. Difficile de contrôle, les libérer c'est prendre le risque qu'il dépasse le manipulateur et qu'ils s'échappent dans notre monde. Minho est plutôt doué mais sans Enkil pour pouvoir contre-carrer et pouvoir mettre une sorte de barrière à son invocation, c'est dangereux. Chan déteste quand il le fait.

- Enkil et Felane sont donc complémentaires ?

- Bien sûr, sourit Seungmin. On l'est tous. Mais les deux Mages Noire et Blanc le sont d'autant plus. Depuis toujours. Ils ont une connexion, un lien, différent des anciens Zephilis et Callum. Eux, ils étaient un couple. Enkil et Felane, ça relève plus de la nature de leur pouvoir et surement qu'il y a une autre raison mais Minho est le seul à la connaître, en tant que Felane il doit savoir mais n'en a jamais parlé. Ni à moi ni à Chan. »


Chaque jour, Seungmin m'en apprenait plus sur le Geai Bleu, la source de nos pouvoirs, les anciens dieux, les anciennes légendes. Chaque jour, je devais m'asseoir pendant des heures à même le sol, au beau milieu du jardin du Palais, au pied d'un arbre qui venait de la forêt des Quatre Cent Dieux. Savoir comment cet arbre était arrivé là, personne n'en était capable, mais ce dernier suivait les fleuraisons d'Agora, même à des milliers de kilomètres et personnes n'avaient jamais essayé de le déraciner. Il était un symbole d'un lien entre les différents mondes et même si Pandore détestait le Geai Bleu, ils étaient un peuple mystique et superstitieux, inutile d'essayer de vexer les dieux. Si cet arbre était là, c'était qu'il y avait une raison.

Dès lors je devais faire de la méditation, essayer de me concentrer sur la moindre sensation, le moindre changement dans l'air. Parfois j'avais la sensation que quelque chose me parvenait, que je sentais mon ventre se presser et tout mon corps s'agiter mais cela disparaissait la seconde suivante.

J'essayais de rester sérieux, de ne pas montrer les signes de mon ennui ou de ma frustration. Je savais que Seungmin savait de quoi il parlait, je lui faisais confiance mais je commençais de plus en plus à douter de mes propres capacités. Zephilis n'avait peut-être pas choisi le cheval le plus rapide et en toute honnêteté, je commençais même à croire que cet idiot de mage demi-dieu, n'avait pas tellement eu le choix.

Je taisais mes inquiétudes mais Seungmin devait le voir. Il essayait toujours de me rassurer, de me dire que c'était normal. Il y a seulement quelques semaines que j'avais compris que je n'étais pas qu'un simple gamin des rues. La sensibilité au monde spirituelle devait se nourrir, se travailler chaque jour et plus on laissait ce don s'essouffler, plus il devenait difficile à maîtriser.

Les jours défilaient et j'avais la sensation de stagner. Lorsque je ne méditais pas, je m'essayais à des entrainements plus physiques avec Jeongin et Yeonjun. Les deux garçons avaient des instructions de Changbin et cela m'allait très bien. Au moins quelque chose dans lequel j'étais doué.

D'autres jours encore, je devais me plonger dans des études runes, de mots incompréhensibles mais qui devenaient limpides à mesure que je les lisais. C'était impressionnant de voir toutes ces connaissances dû à une ancienne vie cachée, à une âme immortelle qui m'avait élu comme son hôte. Minho venait parfois m'aider à l'apprentissage des invocations. Il me donnait des astuces pour retenir les divinités les plus hostiles, les invocations à éviter à moins d'être parfaitement au point.

J'étais loin d'être un puit de science comme Seungmin mais je devais avouer que l'apprentissage d'un monde au-delà du monde était intéressant, fascinant même.

Comme de découvrir une vie antérieure que je savais avoir vécu et qui me revenait avec nostalgie quand Minho me racontait avec un petit sourire en coin, les périples de nos anciens nous. La complicité qui existait entre les cinq mages, semblable à une famille.

J'aimais cette idée et pourtant à mesure que j'essayais de l'imaginer, je sentais comme une rature, une fausse note. Le verre du tableau qui se brisait alors qu'au bout du cadre, assis sur sa chaise, Enkil avait le regard rivé sur Zephilis qui frappait dans ses mains devant la danse d'Iris. Enkil et son air constamment concerné qui maintenait la distance avec le reste du groupe. Le dernier réincarné.

Je me suis soudainement réveillé en sueur. Un cauchemar ou plutôt les réminiscences de souvenirs qui n'étaient pas les miens.

Depuis que nous avions été dans le donjon, que nous avions compris qu'Enkil avait aidé à la construction de la prison de l'ancien Zephilis, Seungmin n'est plus revenu en discuter. Nous avions mon propre entrainement en tête. Je ne pouvais pas réellement me rendre compte de l'implication, de la gravité qu'était d'imaginer que les circonstances de l'enfermement de Zephilis, de la perte de pouvoir de l'ensemble des cinq, était dûes à la trahison même de l'un d'entre eux. Je pouvais en revanche le ressentir. Une douleur vive, la colère, celle qui avait gagné mon ancienne vie. Elle avait empoisonné son cœur, et c'était ça, qui l'avait fait sombrer.

Je suis persuadé que Minho est maintenant au courant, sans doute que Seungmin a pu contacter le Roi Christopher aussi, mais aucun d'eux ne m'en a touché mot. Je ne suis pas allé les interroger non plus car je ne me sens pas encore légitime.

Mais cela n'empêche pas mon esprit de vagabonder, à chaque fois que le Mage Blanc est mentionné, j'essaie de comprendre. Et il faut croire que mon âme immortelle, essaie maintenant par le monde des songes, de m'attirer sur ce chemin. Zephilis avait il même compris lui aussi ? Prisonnier dans ce donjon, attaché par ces chaînes magiques qui maintenait sa puissance dans un état stationnaire, le fatiguait à mesure qu'il sentait les autres âmes immortelles s'effondrer les unes après les autres. Quand bien même le Mage Blanc lui aurait expliqué, est-ce qu'il était à même de l'entendre ?

Je soupire, épuisé et sentant que je suis trop agité pour essayer de me rendormir à nouveau, je me lève en retirant mes draps d'un grand geste. Le bruit de la végétation et la vie nocturne enveloppe la chambre qui m'a été attribuée. Je peux encore sentir cette odeur propre au sol chauffé toute la journée, l'odeur la terre encore tiède et le bruit des chutes d'eaux sous le château.

Je récupère une longue robe de chambre pour sortir de mes appartements. L'aile dédié aux invités donnent directement sur les jardins. Baigné par la lumière de la lune, l'odeur des fleurs tropicales est encore plus intense. Je marche doucement jusqu'à atteindre l'herbe, les petites dalles de pierres ocres qui serpentent et je gagne l'arbre. Derrière, dans le ciel, au centre des branches, la pleine Lune.

J'ai alors une sensation douce qui me gagne et à la fois mélancolique, mes bras se resserrent autour de moi-même et j'ai comme la sensation d'être enveloppé d'une autre étreinte. Une chaleur dans le dos, puis un murmure. Un parfum.


« Tu me manques... »


Je sais qu'il n'est pas là, je sais que c'est mon imagination mais je ne peux rien y faire. J'arrive à combler mes journées de tellement d'activité que la plupart du temps, je ne peux penser à rien d'autre. Mais parfois, sans que je ne puisse comprendre comment, ou pourquoi, Hyunjin refait surface. Alors je me bloque, je fixe un point dans le vide et je sens mon cœur littéralement s'écraser dans ma poitrine.

Il me manque. Et ça me soulage. Malgré la distance, malgré mes doutes, je suis certain maintenant que je n'ai rien inventé. Ce n'est pas simplement la malédiction et nos destins liés.

Je suis totalement et irrévocablement amoureux du Prince.

Mes insomnies continuent d'hanter mes soirées, mes pensées remontent le continent, se perdent dans la voute céleste et j'espère qu'elles atteignent le monarque de l'autre côté, peut-être même que comme moi, il regarde la Lune, assis sur son petit balcon où nous avons passé une bonne partie de notre dernière journée. Peut-être qu'il s'imagine à mes côtés et peut-être que ce n'est pas que mon esprit qui me murmure ses mots que j'ai envie d'entendre.


« Tu me manques tellement... »


***


De l'autre côté du château, enveloppé dans les mêmes draps de soie, éclairé par les lueurs de l'astre nocturne, les courbes du dos du Barde se révèlent aux yeux du Roi de Pandore.

Minho se perd totalement dans sa contemplation, suivant le mouvement léger de sa respiration alors que le musicien est profondément endormi. Il remonte sa peau claire, distingue quelques grains de beauté discret et s'attarde sur les deux cicatrices qui entourent sa colonne, entre ses omoplates. Le trait n'est pas net et encore rouge. Il le sait sensible à cet endroit et bien loin d'être agréable, cela semble même réveiller une certaine panique dans ses yeux, dès la première fois que le Roi a glissé la pointe de son majeur sur cette boursoufflure peu gracieuse mais si intrigante.

Il n'a jamais osé lui demander, après tout, leur relation n'est pas de cet ordre. Il n'est pas question de confidence, de mots d'amour et d'étale de sentiments. Les deux hommes apprécient la compagnie de l'autre, la recherche même, et si Minho avoue bien volontiers qu'il apprécie le musicien, qu'il lui porte une certaine affection, il ne se leurre pas. Il n'est pas comme Chan, il ne se fait pas d'illusion sur les affres de son cœur. Il sait qu'il ne peut pas le contrôler mais ça ne signifie pas qu'il doit pour autant lui obéir. Sa responsabilité lui incombe de ne pas s'attacher et peu importe qui partage son lit, même s'il décidait d'officiellement faire la cour à Jisung – ce qui n'est pas près d'arriver dans un pays aussi archaïque que Pandore – on lui a toujours appris qu'on se mariait non pas par amour mais par obligation. Pour l'héritage et rien d'autre. Il n'est pas question de sentiments, ces derniers ne servent à rien si ce n'est à commettre des erreurs.

Alors quand bien même il commencerait à ressentir quelque chose pour l'ébène à la voix d'ange, ça ne serait pas suffisant. Il ne pouvait rien lui offrir d'autres que des nuits en sa compagnie, que des baisers à l'abri des regards et des œillades au détour d'un énième conseil. En attendant, il pouvait quand même le laisser séjourner au Palais, en tant que barde, il était là pour le divertir, et Jisung était visiblement très doué pour ça.

Minho sourit en songeant au plaisir qu'ils ont partagé. Il se penche sur le dos du garçon, vient déposer un léger baiser sur les cicatrices faisant une seconde frémir la peau du plus jeune. Un léger gémissement presque douloureux s'échappe de ses lèvres pincées, Jisung remue lentement et vient se serrer un peu plus contre lui dormant à poings fermés.

Minho déglutit, le cœur battant.


« Pas la moindre chance... », il murmure pour lui-même.


Sans connaître le futur, ou même l'espérer, Minho s'est donc contenté d'attendre chaque soir en se demandant s'il reverrait encore le garçon exubérant. Il était prêt à parier qu'il finirait par se lasser le premier car à chaque périple, à chaque voyage qu'il se plaisait à conter au monarque, ou à qui voulait l'entendre lorsqu'il chantait, Jisung n'était pas homme à rester plus de quelques semaines au même endroit. Tout au plus, il faisait quelques mois sans jamais aller jusqu'à une année complète. Tel un oiseau migrateur, il changeait de pays au fil des saisons pour continuer de suivre la courbe du soleil et du temps clément, détestant par-dessus tout, le froid de l'hiver.


Pourtant les saisons commençaient peu à peu à défiler. L'automne était presque achevé, Felix avait témoigné les premiers signes d'une source magique émanant de sa paume, au point d'en exulter. Il avait fêté ça avec les deux soldats agoriens et Jisung qui le félicitait comme s'il s'agissait d'un membre de sa famille. Les deux garçons avaient commencé à développer une complicité certaine et si Felix était méfiant au départ, il se laissait de plus en plus aller. Il faut dire qu'il était difficile de résister au grand sourire de Jisung.

Et le soir, le barde revenait près du Roi.

L'hiver était maintenant aux portes de Pandore, mais les hivers dans le Sud du continent étaient doux, simplement le vent était plus frais et l'eau glacial sous leurs pieds plus sombre. Ils étaient loin de la bise qui s'engouffrait à Mirin et encore plus loin des terres gelées d'Haendel qui se fermaient complètement au monde quand frappait le solstice.

Les jours étaient plus courts, la nuit tombait plus vite et Minho retrouvait les bras de son musicien plus rapidement, pour son plus grand plaisir.

Jisung se perdait des fois dans la contemplation des couchers de soleil sur la capitale, il trouvait le ciel d'hiver plus chaleureux qu'en été, ce dernier était peint de cette teinte rose-orangé et parfois légèrement voilé par des nuages plus cotonneux. Ces couleurs se reflétaient dans les miroirs de l'âme du jeune delion. Dans ces moments, il lui semblait presque mélancolique et Minho se demandait si Jisung ressentait parfois le mal du pays. Il était certain qu'il y songeait, sans pour autant réussir à décrypter le ressenti.

Ce dernier refusait toujours de parler de son passé à Alfost, sa simple énonciation le mettait mal à l'aise et comme un bouclier qu'il brandissait pour faire rempart à ses véritables sentiments, il se parait d'un grand sourire et changeait de sujet, parfois pour jouer de sa silhouette gracile et venir se presser contre lui, attisant son désir plutôt que sa curiosité, ou en chantant, trouvant des anecdotes totalement aléatoires mais toujours amusantes pour le perdre sur un autre chemin de sa vie.

Jisung était un mystère. Il donnait l'apparence d'un garçon accessible, toujours joviale et excentrique mais ce n'était que la poudre aux yeux. Un joli tour de passe-passe et le temps faisant son chemin, les soirs, cet aspect de sa vie caché, Minho n'arrivait plus à le supporter.

Il se risqua à ce qu'il n'avait jamais fait auparavant.


« Raconte moi ton histoire Lyubia, »


Jisung sourit. Il adorait entendre Minho parler le pandorin. C'était une belle langue et il ne lui disait pas, mais il savait exactement ce qui signifiait ce mot.

Le barde vint se coucher à ses côtés, Minho était encore nu, le bras derrière la tête, il regardait le garçon avec douceur, passant négligemment la pointe de ses doigts sur son bras posé sur sa taille.


« Tu sais déjà tout de moi. Ca fait quatre mois que je suis ici maintenant et je crois que personne n'a eu le chance de me voir nu aussi souvent que toi, roucoulait le barde.

- Non, secoua la tête le Roi. Ne change pas de sujet. Je veux connaître ton passé, je veux que tu me racontes ta jeunesse, tes souvenirs, tes instants heureux et tes peines.


A mesure qu'il énonçait, Jisung perdait son sourire, il commença à reculer mais Minho le retint sans pour autant être autoritaire. Il se rapprocha de la même façon, l'obligeant presque à le regarder dans les yeux. Il ne voulait pas l'effrayer mais il voulait savoir. Comme il l'avait dit, cela faisait quatre mois maintenant et il avait besoin d'en apprendre plus. Il avait besoin de faire disparaître cette méfiance qui s'était insinuée dans son esprit, il voulait lui faire confiance.


« Mais je t'en ai déjà parlé, essaya de se défendre Jisung un sourire gêné. Je n'ai pas trop de souvenirs de ma jeunesse, je viens des routes et je les parcours et...

- Parles moi d'Alfost, il doit alors. Parles moi du temps passé à Haendel. »

Jisung déglutit. Il essaya de se dégager mais il n'y arrivait pas. Il ne voulait pas paraître distant ou suspect pourtant c'était exactement ce qui était entrain de se passer.

Le plaisir sans songer au reste, le divertissement pur sans réfléchir aux conséquences, tout ça était terminé. Minho voulait plus et Jisung n'avait rien à lui donner.

« Lyubia...

- Arrête, chuchota Jisung. On sait très bien que ça ne change rien, tu peux m'appeler amour autant que tu veux, ça ne fera pas de moi ton partenaire. Ni officiellement, ni officieusement. »


La voix du barde se faisait brusquement plus sérieuse. Il baissait la tête, ses cheveux venaient maintenant couvrir son regard. L'air devenait plus lourd et les sous-entendus, les secrets, tout pesait sur leurs épaules et les étouffait.


« Tu es un espion Jisung ? »


Le barde leva soudainement les yeux, comme s'il venait de prendre littéralement une claque mais Minho demeurait sérieux, ses yeux améthystes le toisaient presque comme s'ils connaissaient déjà la réponse et qu'il n'attendait pas vraiment d'affirmation de sa part, juste une explication.

Jusque là ce n'était qu'un pressentiment, celui d'un Roi, qui avait trouvé la venue du jeune barde dans sa vie, presque trop bien ficelé. Un barde qui détestait l'hiver et qui restait à ses côtés, qui venait d'Haendel et qui refusait de lui raconter sa jeunesse. De lui raconter la dureté de son existence, de lui dire d'où viennent ses cicatrices. Un barde qui n'espérait rien et ne demandait rien. Qui s'était lié d'amitié avec Zephilis, gravitant autour de lui, l'encourageant tout en l'observant de prêt.

Minho n'aimait pas ce qu'il ressentait, il n'aimait pas douter de lui mais c'était un soupçon qu'il nourrissait depuis des semaines, depuis la première nuit, depuis qu'il était venu dans sa chambre sans se faire repérer, qu'il l'avait vu réagir par réflexe à du flux spirituel, peut-être encore plus rapidement que lui et bien qu'il essaie de le cacher, de jouer les ingénues, il n'arrive plus à fermer les yeux.

Parce qu'il veut savoir, il veut comprendre. Il veut lui faire confiance.

Est-ce qu'ils n'ont vraiment aucune chance ?


« Je vais partir je crois », répondit Jisung la voix chevrotante.


Minho le tenait par le poignet, les yeux ancrés dans les siens. Il lui laissait encore le choix, le choix de revenir en arrière. Jisung se mordit les lèvres et pour la première fois, le monarque eut la sensation de faire face au vrai lui. Pas simplement à un garçon déguisé en troubadour, un garçon blessé, appeuré et qui s'était égaré. Un garçon avec des cicatrices, derrière lequel il pouvait presque sentir l'ombre de Fenrir maintenant.

Jisung retira alors son bras et se leva, il commença à s'habiller, Minho le regardait faire ne sachant pas ce qu'il devait maintenant faire. Devait il l'arrêter ? Il devrait. Le mettre au fer, le faire avouer mais il n'arrivait pas à s'y résigner. Pourtant si Jisung était bel et bien un espion de Fenrir, alors il n'y avait qu'une chose qu'il cherchait.

Zephilis.

L'ébène ouvrit la porte mais cette dernière se referma soudainement. Une étrange pression surgissait brusquement et le fit écarquiller les yeux. Il se retourna et vit Minho debout devant le lit, un halo violet l'entourait comme une fumée quasi vivante, les ondulations d'une créature qui ne prenait pas encore forme. Ses yeux brillaient d'un éclat puissant et Jisung ne put que retenir son souffle.


« Que lui as-tu révélé ?

- Ne fais pas ça, murmura Jisung en se collant contre la porte.

Minho s'approcha d'un pas autoritaire, faisant presque courber l'échine au plus jeune qui sentait sa poitrine s'écraser sous la pression spirituelle qu'exerçait le mage sur lui. Il ferma une seconde les yeux, essayant de garder son calme et de ne pas se trahir.

« Répond, insista Minho.

Sa voix sifflait, comme celle d'un courant d'air ou comme la voix d'une conscience qui pouvait totalement nous manipuler. Soudainement Jisung rouvrit les yeux, il sentait sa gorge se serrer et ses mains bouger toutes seules. Felane, c'était elle. La puissance du mage noire, la manipulation des âmes.

« Non. Ne fais pas ça, continua de supplier Jisung.

- Dis moi ce que tu lui as révélé ! » Cria maintenant le monarque.


Le barde sursauta. Il était maintenant si près de lui, le surplombait de toute sa stature mais alors qu'ils faisaient normalement la même taille, Jisung se sentit totalement écrasé.

Minho était furieux et le château entier devait maintenant ressentir sa colère et l'air était chargé de l'essence du Mage Noire. Dans peu de temps, les gardes et même Seungmin allait rappliquer dans les appartements du Roi. Jisung n'avait plus le temps. Il se mordit les lèvres et baissa la tête, renvoyant par un flash accéléré les moments qu'ils avaient partagés ces dernières semaines et en parallèle, les cris de douleur d'un jeune garçon dans un prison à flan de montagne, au cœur de l'hiver d'Haendel.

Brusquement, au milieu de cette fumée sombre qui enveloppait le Roi, une perturbation vint resserrer la protection de son invocation. Une perturbation qui le fit reculer d'un pas. Jisung se courbait davantage, approchant sa main à son épaule alors qu'un dessin commençait à apparaître, se révélait sur son cou, partant de sa nuque et remontant sur sa trachée. La tête d'un oiseau.


« C'est...Impossible », souffla Minho estomaqué.


Jisung releva les yeux, le visage maintenant déformer par la douleur. Il se pliait un peu plus, gémissant alors qu'un étrange bruit résonnait dans la pièce, celui du craquement d'un os ou d'une articulation.


« Je suis désolé, il murmura les dents serrées. Tu dois me croire, si j'avais eu le choix... »


Minho recula à nouveau ne sachant pas à quoi s'attendre. Son invocation l'entourait totalement, se refermait sur lui pour le protéger. Jisung se détacha de la porte, il jeta un coup d'œil à la fenêtre ouverte et déjà des pas précipités dans le couloir lui parvenaient. Il regarda derrière lui une seconde, puis il soupira.


« Je n'ai jamais voulu te faire du mal. Ni à toi, ni à Felix. Minho...Qu'importe qui tu es et qui je suis. Je n'ai jamais été que le gentil barde, qui voulait un peu oublier le poids de son existence et ce qu'elle signifiait.

- Tu es...

- Pas encore », il sourit maladroitement.


Complètement désorienté au point de ne pas réagir assez vite, Minho fut brusquement repousser contre le lit, sans être violenté pour autant. Jisung au-dessus de lui déployait maintenant deux grandes ailes au plumage bleu et blanc, semblable à un oiseau qui balayait la pièce d'un claquement.

Jamais il n'avait vu pareille transformation, de tous ses souvenirs, de cette vie et de l'ancienne, il n'avait jamais vu Enkil voler.

Les bras autour du visage du monarque, Jisung se pencha juste assez pour un dernier baiser et alors que la porte s'ouvrait soudainement dans un énorme fracas, le garçon disparu. Au loin, dans le ciel froid, s'envolait la silhouette du Mage Blanc.

Depuis l'arbre au milieu des jardins, Felix le regardait disparaître. 



.





Et oui les choses s'accélèrent et se compliquent ! Jisung était bel et bien Enkil (le Mage Blanc), le dernier des cinq Mages, celui qui jadis a enfermé Zephilis ! 

Et il espionne pour le compte de Fenrir...


On en sera bientôt plus, également sur le passé de Jisung qui n'est vraiment pas facile mais cela je vous le réserve pour plus tard...Notamment dans les Interludes.


Vous l'aurez compris, nous avons fait un petit bon dans le temps au milieu du chapitre, et cela va continuer dans les prochains 😀


A bientôt !

D.

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