XV. l'Amant🍋
Au lever du jour, criblé de courbatures, je sentais la fraîcheur caresser lentement la peau nue de mon dos alors que les voiles du lit se mettaient à lentement onduler, laissant passer l'air et les quelques rayons de soleil d'une journée mitigée.
Je me suis mis aussi tôt trembler, cherchant à tâtons un morceau de drap pour me couvrir. Gardant les yeux fermés, je glisse puis je me retrouve à remonter une petite dune au grain piqueté de frissons. Puis redescendre la ligne d'une vague, jusqu'au creux de ses reins, suivant la houle. La sensation douce de la peau, de la fraîcheur sous la pointe de mes doigts qui éveillait ses sens et les miens. Enfin, j'entends un léger grognement, presque un soupire.
J'ouvre alors les yeux, agressé par la lumière, je les referme aussi tôt. La bouche pâteuse et toutes les sensations qui petites à petites font surface. Mes lèvres gercées, ma peau sensible, une tension dans les muscles dorsaux et sur les articulations de mes genoux. A chaque signal, je me revois, dans la baignoire, attrapant les jambes du Prince. J'entends chacun de ses murmures, chacune de ses demandes. Puis l'entrainant hors de l'eau, au milieu de ses draps, recouvrant son corps, me laissant emporter par le chemin traversé de ses mains grandes ouvertes, crispées sur mes bras, mon buste, mes épaules, mes cheveux. Le regard doucereux, implorant, brumeux. Ses lèvres palpitantes, sa langue, ses baisers. Je sens encore l'odeur de sa peau, le goût, le picotement de ses cheveux sur mes yeux.
Je sens ma poitrine compresser, mon souffle devenir de plus en plus en court alors que je me souviens de tout. C'est comme de les revivre en accélérer, de sentir à nouveau mon cœur s'affoler et mon corps se raviver. Pourtant un autre sentiment commence à pointer le bout de son nez, celui de l'angoisse, la peur. La peur d'avoir été trop loin. La peur du regret et la blessure que cela pourrait engendrer. J'étais pleinement conscient de mes actes et lui aussi – en tout cas il en avait l'air – mais peut-on être réellement conscient quand on est autant aspiré par un désir aussi latent qu'incontrôlable ?
Je me retourne appréhensif et je porte enfin mon regard de l'autre côté du lit. Je reste sur le ventre, la main toujours posée sur le flan de son dos. Aussi tôt, ma respiration se coupe. Son visage n'est qu'à quelques centimètres du mien, le poing serré contre l'oreiller, appuyé contre ses lèvres. Il parait si paisible que je sens mon cœur se serré. Ses cheveux éparpillés en cascade, laissant filtrer par endroit la volupté de ses cils chatouillant ses pommettes. Son visage gracile, énervant tant il est parfait, me laisse toujours sans voix. Je n'arrive même pas à détourner mes yeux, compléter hypnotiser par la texture de ses lèvres, légèrement détachées l'une de l'autre par l'appui du haut de son poing, plus rose et dont la texture pourrait s'apparenter à celle d'une pèche juteuse au crépuscule d'un été brûlant.
La peau claire de ses joues et la finesse de son nez. Une légère marque se détache sur le haut de sa mâchoire, une petite griffure et si je redescends encore, je vois qu'il y en a trois autres sur la naissance de ses cheveux. Un échange un peu trop fougueux qui me fait rougir sans en être gêné pour autant. Alors que je continue ma contemplation respectueuse, sans me rendre compte du temps qui s'écoule, je le sens s'agiter. Je recule instinctivement, craignant de le réveiller mais ce n'est pas ce qu'il cherche, au contraire. Il bouge, remue, puis se presse un peu plus jusqu'à m'obliger à ouvrir les bras et l'accueillir contre mon torse. Le plus amusant est que ces épaules sont plus larges que les miennes, mais recroqueviller sur lui-même, il me parait si fragile. Je souris sentant mon cœur fondre devant une telle vision. Et n'y tenant plus, je l'enlace pour le garder tout contre moi, la tête posée sur le coin de la sienne.
Je veux encore profiter de quelques heures de répit dans le déni de nos existences contradictoires, il sera toujours temps de s'occuper de la réalité quand elle viendra frapper à la porte.
Je me laisse peu à peu replonger dans le sommeil. Si jusqu'ici j'ai toujours eu du mal à dormir, rester dans les bras de Hyunjin et me concentrer sur sa respiration ne m'a jamais semblé aussi apaisant. Mon corps se détend rapidement et déjà je me sens tombé.
Les cauchemars, j'en ai fait des dizaines, tous représentant des instants de mon enfance que mon esprit a effacé. Le plus souvent des éclairs de cris, de voix lointaines qui m'appellent, du noir, d'une calle de bateau et l'odeur parfois du sang qui va jusqu'à me réveiller.
Cette fois, c'est le noir le plus total. Un monde de pure imagination vide. C'en est presque effrayant, cet espace froid sans toit ni plancher. Le néant à perte de vue, sans aucun repaire. Et je ne sais pas pourquoi, mon esprit peine à croire qu'il s'agit réellement d'un rêve. Comme si j'étais perdu dans cet espace étrange de transe, où je peux encore percevoir les bruits et les mouvements dans la réalité et que je savais déjà mon esprit prêt à vagabonder dans les méandres de mes songes.
Puis finalement, au milieu du vide, une petite lumière. D'abord un point, brillant comme une étoile au loin dans une galaxie sans aucun autre astre que ce point de fuite de plus en plus perçant. Puis, comme si l'éclat devenait plus clair, plus aveuglant, je sentais une douce brise me faire vaciller alors que l'éclat devenait plus gros, qu'il commençait à déchirer l'horizon en une longue ligne jusqu'à littéralement explosé. Sans aucun bruit ou impact, juste une vive lumière qui se propageait dans le néant noir et le faisant s'enfuir comme l'ombre face à la lumière.
Je me couvrais les yeux, essayant de me protéger des rayons tandis que je sentais un nouveau mouvement, un bruit juste en face de moi.
« Pourquoi te cache tu ? Tu as peur de voir la vérité en face ? »
Je sens ma poitrine se serrer, reconnaissant cette voix alors que je ne l'ai jamais entendu. Pourtant elle fait échos dans les tréfonds de mon âme et fait jaillir un mélange de terreur et d'excitation.
« Non ? Alors tu n'es pas encore prêt. Mais sache que tôt ou tard, il te faudra ouvrir les yeux, Zephilis... »
« Votre Altesse ? »
La voix d'une domestique de l'autre côté de la porte me réveille brutalement. Mes paupières papillonnent n'ayant plus personne contre moi. Je peine encore à me remettre de mon rêve étrange, regardant les recoins comme si je m'attendais à tout moment à le voir, lui, mon ancien moi dont je n'imagine pour l'instant qu'un homme encapuchonné à la voix grave.
Puis je me rappelle de Hyunjin et je me rends compte qu'il n'est plus loin. Ni sur le lit, ni vers le paravent qui cache la baignoire. Je me redresse parcourant la pièce du regard quand à nouveau on frappe contre le bois de la porte
« Votre Altesse ? Je viens vous débarrasser des affaires du bain. »
Je regarde un instant ma tenue d'Adam, l'état déplorable de la chambre, puis je jure entre mes dents avant de sauter hors du lit. Je tourne sur moi-même une seconde, à la recherche de mes vêtements éparpillés dans la pièce. Je manque à deux reprises de me péter la gueule à cause de toutes l'eau qu'on n'a pas épongé la veille. Je m'habille à la hâte, essayant de ne pas tomber alors que je saute à cloche pied à travers la pièce, frappant un petit guéridon au passage. Puis retrouvant enfin mon arme toujours attachée à la ceinture que je tiens à une main, j'essaie de l'autre de terminer de refermer ma chemise.
Je pensais avoir quelques secondes mais la porte s'ouvre brusquement et comme un voleur pris sur le fait – et je sais exactement de quoi je parle – je regarde les yeux grands ouvert la porte, débraillé et sans aucune excuse ou argument pour ne pas paraître trop bizarre.
Sauf que ce n'est pas la domestique qui a ouvert mais tenant un plateau de fruits avec théière fumante étain, le Prince me regarde d'un air ahuri. Il longe finalement son regard sur ma tenue plus que ridicule, la chemise mal boutonnée, à peine rentrer, un pantalon qui me tombe sur les pieds et la ceinture tenue à une main. Le spectacle est ridicule et je ne suis même pas étonné de voir peu à peu le visage du Prince se fermer, puis ses joues se gonfler alors qu'il se retient d'éclater de rire.
« Oh pitié, tu vas finir par t'étouffer, je dis las en levant les yeux au ciel.
- Pouhaha ! Tu- Haha ! Mon Dieu je vais mourir ! Il s'exclame hilare. »
Son plateau chancèle dangereusement alors qu'il se plie littéralement en se tenant le ventre, laissant libre court à en un véritable fou rire. Je pourrai jouer le garçon vexé, blessé dans son égo mais au lieu de ça, je me plais à écouter un rire aussi franc emplir la pièce. Son visage larmoyant, rougissant sans aucune gêne. C'est un sentiment profondément humain, honnête. Il n'y a rien de plus vrai qu'un rire incontrôlé et je savais en l'observant se moquer de moi, sans aucune malignité, que cette image resterait graver dans mon esprit pour de nombreuses années. Et peut-être plus encore.
Je jette finalement ma ceinture sur le bord du lit et m'approche pour venir lui prendre le plateau des mains avant de le voir renverser par terre. Ma proximité soudaine a pour effet de calmer sa crise, encore légèrement secoué de quelques petits restes puis il descend sur mon regard et ma bouche qui s'approche sans aucune hésitation. Je plaque un baiser papillon sur ses lèvres avant de revenir en arrière, déposant le plateau sur une petite table ronde près de la fenêtre ouverte.
Je me tourne pour le regarder à nouveau, Hyunjin est resté pantois près de la porte.
« Tu ne viens pas ? » Je lui demande.
Il met une seconde à comprendre ce que je dis mais finalement, il soupire et sourit, essayant tant bien que mal de cacher les petites rougeurs qui réchauffe ses joues.
Il referme la porte derrière lui et me rejoint après avoir récupéré une petite chaise dans le coin de la pièce. Il attrape rapidement un quartier de pomme découpé et l'apporte à sa bouche sans me quitter des yeux.
C'est agréable, je le sens suivre mes gestes, garder cette proximité douce et en même temps palpable d'une tension sous-jacente. C'est grisant, sans être trop passionnel. Juste un petit jeu de regard, de moues discrètes, au moindre mot qui peut en cacher un autre. Une bonne façon de faire comme si tout était normal, sans pour autant faire semblant. Ne pas parler de l'éléphant dans la pièce mais ne pas le renier pour autant.
« Qu'est-ce que tu as fait de la domestique qui voulait débarrasser la chambre ? Je demande alors. Je suis persuadé de l'avoir entendu frapper.
- Je lui ai demandé de repasser plus tard », il dit simplement.
Hyunjin prend un grain de raisin qu'il me tend. Je le regarde une seconde, agréablement surpris puis j'ouvre la bouche pour qu'il le dépose entre mes dents. Il me sourit, satisfait et je lui rends.
« J'ai croisé Changbin, il t'attendait au camp ce matin.
- Ah merde ! Je jure alors sans gêne. J'ai oublié, je devais faire un dernier entrainement avant mon départ. Il va me tuer...
- Je t'ai dispensé ». Il me dit aussi tôt.
Je lève les yeux et les siens se figent alors à leur tour. Nous comprenons tous les deux les sous-entendus, les questions silencieuses que cela suppose, tant pour moi que pour lui, et c'est à nouveau le défiler d'images sulfureuses. J'imagine bien sa propre nervosité grimpée en flèche.
Alors dans un raclement de gorge, j'essaie de faire bonne figure.
« Ce n'était pas nécessaire, je dis sans sentir ma voix légèrement déraillée tant elle est demeure fermement serrée au fond de ma gorge. Je me sens bien et...
- Je le voulais. Il m'interrompt. C'est ton dernier jour alors...Je voulais que tu restes...Avec moi. Juste moi. »
Ce n'est pas juste. Cet homme n'est absolument pas fairplay. Je meurs d'envie de lui sauter dessus, de l'embrasser à nouveau comme si ma vie en dépendait, sans aucun regret, sans aucune retenue. Qu'il soit Prince maudit ou je ne sais quelle esprit ancien ou héritier impérial ou je ne sais quoi d'autre, je me moque de tout ça. C'est lui, Hwang Hyunjin, qui me rend complètement fou.
Je me découvre des facettes que je ne soupçonnais pas. Ce besoin viscéral de m'imposer, de l'enlacer et ça n'a rien de romantique, c'est encore plus profond. C'est presque douloureux tant ça me tire le ventre, me fait grincer les dents. Lutter contre une telle envie n'est proprement pas humain.
Est-ce qu'il se rend seulement compte du véritable merdier qu'il fout dans ma vie ? Il me met la tête en vrac et le cœur complètement à l'envers. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un comme lui, jamais personne n'a éveillé autant d'émotions, vives, chaleureuses et intenses. C'est un vrai cyclone.
« Hyunjin », j'appelle sans m'en rendre compte.
Il se redresse, curieux et je me retrouve encore à l'observer, ne sachant pas si j'ai réellement quelque chose à dire. J'ai la tête vide et cette boule incandescente qui se propage au fond de mon estomac. Alors je ne trouve qu'une chose, la chose la plus instinctive.
« Je reviendrai. Quoi qu'il arrive. »
Il penche légèrement la tête, essayant peut-être de voir le message caché ou simplement de procéder avec si peu. Il pourrait encore une fois tirer des conclusions hâtives, avec lui je m'attends à tout. Au lieu de quoi, il se contente d'un petit signe de tête, avant de reprendre à nouveau un grain de raison et de porter son regard vers le paysage extérieur.
« Je sais. Tu me l'as juré.
Soulagé, je laisse filer un petout sourire tandis que je me souviens de la première fois que je lui ai fait mon serment.
- C'est vrai. Ma vie entière je te protégerai.
- Me protéger de si loin... Ça n'a pas de sens. Reviens simplement. C'est tout ce que je te demande.
- Pourtant c'est bien pour te protéger que je pars, il le faut, si je veux pouvoir t'enlever cette malédiction.
- Bien sûr. Et si ça ne marche pas ? Tu feras quoi ?
Son ton est devenu brusquement plus dur, presque agressif.
- Tu ne crois pas en moi ? Je demande alors sans pour autant m'énerver.
- Ce n'est pas une question de croire en toi ou non.
- Alors quoi ? Tu baisse les bras ? Tu préfères ne pas tenter ta chance ? »
Hyunjin ferme les yeux, je sais qu'il se retient encore de laisser parler sa colère et sa frustration comme la veille. Il pourrait tout envoyer valser comme il fait d'habitude mais cette nuit a changé la donne. Tant pour moi que pour lui. Le fait d'avoir succombé, de plus ou moins l'assumer, lui donne peut-être la sensation de me devoir un minimum d'explications. Et c'est tout ce que je veux des explications. Pouvoir comprendre sa pensée, même si je le désire autant que je le redoute.
Cela pourrait aussi signer la fin de quelque chose qui n'a jamais commencé.
« Ne te méprends pas, il dit alors en expirant. Je comprends pourquoi tu le fais mais moi je me suis préparé à l'idée de vivre avec toute ma vie et que cette dernière soit courte. C'est ma destinée et toi tu essaies de me donner de l'espoir mais je n'en veux pas. Ce n'est pas que je n'ai pas confiance en toi, c'est simplement que je ne veux pas être déçu, si ça ne marche pas.
- Je vois. Je comprends.
- Non tu ne comprends pas. Tu ne peux pas comprendre. Toute ma vie, depuis que j'ai senti les premiers mouvements de la marque dans mon dos, j'ai su que je ne ferai pas vieux et que comme mes pères, je finirai par partir à cause d'elle. C'est dur mais c'est aussi préférable. Je n'ai pas à me sentir triste d'avoir cru. Je suis conscient et tout ce que je veux maintenant, c'est profiter de ce qu'il me reste. Et toi...Toi qui a réussi à me donner envie d'un peu plus...Tu me quitte pour un infime espoir de me sauver avant que la malédiction ne m'emporte. Alors oui, je te laisserai partir, parce que tu es Zephilis et que c'est ton destin... Mais ne dis pas que c'est pour moi que tu le fais. Ou alors ouvre les yeux, car il y a plus de chance que tu me fasses plus du mal en partant...Je sais que j'ai l'air ingrat de te dire tout ça mais tu voulais savoir. »
Hyunjin ne semble même pas attristé de le dire, un peu mélancolique peut-être, et surement résigné car quoi qu'il dise, quoi qu'il éprouve, je ne resterai pas. Il le sait et je le sais. Car je suis Zephilis et que je n'ai pas le choix. Et si je l'avais eu, je serai parti, car s'il est né sans espoir, moi, après cette nuit, l'espoir est encore vivace. Je le sauverai, coûte que coûte, et je n'ai jamais été aussi prêt de le faire qu'en apprenant que j'en étais moi-même l'auteur dans ma vie antérieure.
A moi de lui faire comprendre qu'il a le droit d'y croire.
« Tu as raison. Je pars parce que je suis Zephilis mais je peux te promettre que rien ne me motive plus que de te retirer ce mal qui te ronge...
Le Prince baisse la tête, les mains soudainement crispées sur le bord de la table. Doucement, j'approche les miennes pour les soulager de leur tension, obligeant ses perles noires à se lever sur moi.
« Alors à ton tour de promettre... », je termine d'une voix basse.
Le cœur palpitant, je sens ses doigts venir s'entrelacer aux miens.
« Promets que tu vas attendre... Que tu vas tenir le coup jusqu'à mon retour. Parce que ce jour-là, j'aurai quelque chose d'important à te dire... »
Il tressaille, son visage s'illumine une seconde puis peu à peu, se teint d'un délicieux carmin. Il se racle la gorge, essayant de ne pas se laisser prendre par l'émotion alors qu'un petit rire embarrassé secoue ma poitrine. Il secoue la tête retira l'une de ses mains de la mienne pour venir prendre un nouveau petit morceau de fruit, tout en gardant la seconde fermement tenue, au milieu de ses longs doigts bagués. Celle là même qui attire mon regard et qui réchauffe ma poitrine d'un sentiment de béatitude.
« T'es vraiment culotté. Demander à un Prince d'attendre. Tu mériteras que je t'enferme pour ça.
- En d'autre circonstances, ça pourrait me faire plaisir, je souris sournoisement.
- Me tente pas sale petit voleur... », il chuchote en croquant son morceau de pomme.
Et c'est presque ce que nous avons fait. S'enfermer dans la chambre du Prince, couper du monde et de l'avenir incertain. Il voulait que je sois juste avec lui et c'est ce qu'il s'est passé. Nous nous sommes perdu à profiter du temps à deux. Parfois sur son petit balcon, parfois à se câliner au milieu de son lit. Il m'a parlé de sa vie à Agora, de sa jeunesse avec seulement sa mère pour compagnie. Cette dernière le cachait du monde, l'avait pratiquement séquestré dans son appartement alors qu'il n'avait que cinq ans. Il se souvient avoir voyagé mais c'est un peu flou, il se souvient être arrivé dans la cité de Mirin et s'être dit qu'il n'avait jamais vu pareil endroit. Rien d'aussi grand. Ses hauts remparts, les maisons qui se collaient presque tout en flan de vallée dont le point culminant était le Palais.
Il me raconte sa rencontre avec la famille royale, immédiatement accueilli par le Roi Marius à l'époque qui avait juré à sa mère de tout faire pour les protéger, jusqu'à l'épouser. Sunhee et Marius n'étaient pas un vrai couple, ce n'était qu'un mariage de façade pour empêcher les autres rois de soupçonner son existence : la descendance d'Eivor Vagari, l'héritier du trône.
Konrad avait été tué sur le champ de bataille par Fenrir, il lui avait tranché la tête comme une symbolique. Et tous savait qu'Haendel rêvait de plus qu'une simple indépendance, il voulait le trône, l'Empire et pour cela, il lui fallait détruire Vagari et attendre le bon moment. Sauf que la décision de trancher la tête de Konrad n'avait pas eu l'effet euphorisant qu'il escomptait, au contraire, le peuple avait été traumatisé et plutôt que de se tourner vers le dragon de glace pour élire un Roi spirituel au sommet des autres, c'était Marius qui avait hérité de la couronne invisible. Le Roi d'Agora faisait office de force tranquille, d'intelligence et de sagesse. Après tant de guerres et de massacres, il leur fallait la paix et seul Marius Bang leur avait insufflé ce sentiment. Jusqu'à son décès prématuré. Sa femme l'avait été pendant la guerre et elle incarnait une âme immortelle.
« Qu'est-ce que tu veux dire ? Je demande alors perplexe. Elle était un mage, elle aussi ?
- C'était Enkil. Me confirme Hyunjin. Elle était le Mage blanc et en mourant, l'âme s'est à nouveau réincarnée mais on ne sait pas encore où. Chan le cherche depuis toujours sans succès...La seule chose qu'on sait c'est qu'il a bien élu son hôte. Chan le sait depuis son achèvement. Il ne peut pas savoir qui mais il sait qu'il est déjà dans ce monde, il le sent à travers Callum.
- Je vois... Je me demande pourquoi il ne m'en a pas parlé, je dis alors à voix haute.
- Ca n'a pas vraiment d'importance tu sais, en tout cas rien en ce qui concerne ta propre réincarnation. Il ne voulait peut-être pas te préoccuper avec des affaires sommes toutes politiques...
- Qu'est-ce que tu sous entends ?
Hyunjin penche la tête en arrière, allongé sur le côté, sur le lit. La tête posée sur le haut de sa cuisse, je le regarde curieux.
- Je ne sais pas si je dois t'en parler... La mère de Chan, son père, on ne sait pas vraiment ce qui les a tués. Ils sont morts brusquement, comme l'a été mon grand-père, l'Empereur Aden. Une maladie subite, inconnue, aussi foudroyante que mortelle. En quelques jours seulement leur état s'est dégradé de la même façon et si pour Aden on soupçonnait la malédiction, pour le Roi Bang et son épouse... Ca parait impossible.
Je me redresse brusquement sur mes coudes.
- Tu veux dire que le Roi d'Haendel...Vous pensez que c'est lui ?
Hyunjin hausse les épaules.
- Chan le pense... Nous n'avons aucune preuve. C'est pour ça qu'il ne fait rien. Pas temps qu'il n'aura pas trouver tous les mages du Geai Bleu.
- Et que fera-t-il une fois qu'il les aura trouvés ?
- Tu veux dire, que fera-t-il en premier ? Sourit tristement Hyunjin. Ma malédiction ou faire payer Fenrir ? Je ne sais pas, en tout honnêteté, il refuse de me mettre dans les discussions qui concerne la gouvernance du Royaume, il en parle bien plus avec Minho. Son excuse est de dire qu'il ne veut pas « m'accabler de ce poids qu'est la couronne ». Il me surprotège comme toujours. »
Et sa réponse ne semble pas le satisfaire. Les yeux perdus dans le vide et surement dans sa frustration, sa colère envers son frère autant qu'il l'admire et l'adore. Pour une raison inconnue, ça ne me fait que le trouver encore plus beau. A cet instant, j'ai d'autant plus envie de le prendre dans mes bras, alors je ne me gêne pas et me glisse lentement sur son torse, jusqu'à le faire s'allonger me retrouver coucher contre sa poitrine, à écouter son cœur battre. Je viens tracer des formes invisibles près de sa clavicule, tirant doucement sur le haut de sa tunique.
« Je crois que je le comprends, même si je désapprouve, je lui dis alors d'une petite voix. Tu as le droit de savoir, tu as le droit de l'aider mais en même temps, il craint que tu ne t'approche de trop près des espions du Roi Fenrir, déjà que tu as failli te faire tuer à plusieurs reprises et je commence à saisir pourquoi... Si Fenrir le découvre, officiellement, est-ce qu'il le révèlera ? Et sera-t-il le seul à demander ta tête ? Londinium n'était pas non plus très friand de l'Empire, à mon souvenir. Eileen et Sire Neven n'en disaient pas du bien.
- Fenrir veut à nouveau créer l'Empire. Savais-tu qu'il y a deux façons de proclamer un Empire ? Par la guerre ou par la diplomatie. Deux solutions possibles s'offrent donc à lui, tuer tous les protagonistes et s'accaparer les trônes par la délégation du traité d'Alliance, si le Roi meurt à défaut d'héritier. Ou bien révéler au monde notre existence, et prendre le risque que le peuple nous acclame au lieu de demander notre tête. Dans le cas contraire, le peuple demandera la guerre et il n'aura qu'à ramasser la couronne de l'Empire qui lui sera servi sur un plateau. C'est néanmoins un risque, alors il préfère pour le moment ne pas le prendre. C'est comme ça je le vois en tout cas.
- Pour quelqu'un qui n'est pas très au fait par son frère, tu me sembles bien informé, je souris impressionné par sa perspicacité.
- Je suis un Prince, il se contente de dire. J'ai appris à l'être. Et puis, j'ai souvent les oreilles qui traînent, j'avoue », dit il cette fois sur le ton de la confidence, presque avec malice.
Je ris doucement, me hissant juste ce qu'il faut pour atteindre ses lèvres et les mordiller avant de plonger dans un baiser plus dense, plus profond.
« Felix », il gémit au milieu du baiser qui se veut de plus en plus passionnel, réchauffant nos ardeurs.
Je me lève alors pour m'asseoir en califourchon sur ses hanches, empoigner son visage et complètement le consumer dans un ballet fiévreux. Sa tête se redresse, se penche presque pour en réclamer plus, encore plus. Par instant nos lèvres se détachent pour se retrouver, sa langue glisse contre la mienne, l'enroule, vient caresser le creux de mes lèvres.
Ses mains viennent agripper mes fesses, les presser contre lui faisant rencontre nos érections déjà bien durcies sous nos kimonos, seuls vêtements que nous avons gardé toute la journée. Doucement, il fait remonter les pans du tissu de soie sur mes cuisses qui se contractent autour de son bassin. Ses doigts appuient sur ma chair, pincent ma peau et viennent à nouveau à la rencontre de haut de mes reins, à même la peau. La sensation me fait cambrer, venant attraper sa lèvre entre mes dents avant de lécher la légère rougeur que j'ai créé. Hyunjin ouvre tout juste les yeux, me provoquant presque alors qu'il me rapproche encore, et d'un coup de bassin me fait me tordre.
« Aah... », je laisse filer entre mes lèvres.
Mon souffle chaud se mêle au sien mais je n'ai pas le temps de reprendre ma respiration qu'il m'embrasse à nouveau langoureusement. Ses mains reviennent alors vers la ceinture de tissu qui perd de son utilité, à mesure que mon kimono s'ouvre à chaque ondulation. Il la retire d'un geste efficace, rapide, tandis que mes propres mains se perdent à caresser ses pectoraux, en imprimer la forme et venir doucement caresser la pointe de ses tétons déjà durcis, encore sensible de nos ébats de la veille.
Hyunjin grogne contre ma bouche, se redresse et me fait me hisser un peu plus contre lui, il descend les pans du vêtement superflu sur mes bras, dénudant mes épaules qu'il parsème de baisers humides. Remontant jusqu'à mon cou que je lui offre sous un râle profond de plaisir, penchant la tête sur le côté pour lui donner plus d'accès. Je m'accroche à ses épaules, laissant peu à peu mes bras entourer son cou tandis que je frotte mon excitation pour faire gonfler encore plus la sienne.
« Hyun...Jin...
- Felix...Tu me fais perdre la tête...Ton parfum, ta peau...Ces petites tâches de sons qui recouvrent ton corps...Je n'ai rien vu d'aussi envoûtant. Tu m'as ensorcelé...
- Oh...Oui...Là... »
Ses doigts se glissent dans l'interstice de mes fesses, titillent l'entrée qu'il presse doucement. Mes dents se serrent sous la sensation mais c'est loin d'être ma première fois et je connais assez bien mon corps. J'en redemande, je bouge plus explicitement pour lui faire comprendre.
« Hyunjin...Prends moi maintenant...N'aies pas peur.»
Le Prince déglutit, il s'arrête une seconde à m'observer et je replonge à nouveau pour garder cette image dans mon esprit. Celle d'un homme sous le charme, épris. Je le souhaite en tout cas, je le rêve et je me laisse bercer de ses cette pensée alors qu'il vient me posséder. Je m'arque aussi tôt, ne ménageant pas mes cris. De la douleur mêlée à du plaisir, un étrange mélange qui me ravi. Je le sens se raidir, essoufflé, incapable de bouger alors qu'il continue de s'enquérir de mon état. Je lui montre alors que je vais bien, plus que bien et d'un sourire béat, même si légèrement tremblant, je commence moi-même les mouvements de vas et viens. Il se laisse guider. Même si c'est lui qui me prend cette fois, je continue de contrôler, de le dominer de toute ma silhouette, de toute mon expérience alors qu'il se perd dans la contemplation de mes expressions. Cette lueur délicieuse qui parcourt ses iris, cette embrasement, intense, profond qui me chatouille le ventre et remonte jusque dans me cœur. Un pincement. Je me donne complètement et il s'accroche à ma taille, la tête basculante, des souffles erratiques, rauques, n'arrivant même plus à articuler mon prénom. Il n'y a plus que des voyelles, des bruits sans sens qui ne témoignent que d'une emprise totale de notre passion.
J'ai envie de le marquer. Comme ce dessin dans son dos, de la même façon aussi immortelle, sans être douloureuse, je veux qu'il se souvienne de moi, à chaque fois qu'il ferme les yeux, à chaque qu'il prendra son bain ou qu'il se prélassera dans ses draps. Je veux qu'il se rappelle chaque son, chaque fragrance. Je veux qu'il se rappelle le relief de ma peau frissonnante et la douceur de mes baisers. La rudesse de mes mains quand elles attrapent ses biceps, ses poignets, qu'elles l'obligent à se tenir à moi, qu'elles l'obligent à me regarder et m'embrasser. Je veux qu'il se souvienne de ma voix lui murmurer encore et encore.
« Je suis à toi...Tout à toi...Mon Prince »
De la sensation qui explose dans son corps à l'unisson avec le mien, des spasmes qui parcourent nos veines, nos visages et nous peint de cette délicieuse plénitude. L'instant présent comme graver à jamais. Jusqu'à mon retour. Jusqu'à ce que je puisse lui dire.
Je t'aime.
◯
○
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Bien le bonsoir amis lecteurs !
Encore du citron et oui. On en a jamais assez ! Mais ça va, je suis soft.
Au prochain chapitre on sera directement en route pour Pandore ! Pas d'adieux larmoyants, on part dans le vif du sujet et vous l'aurez compris, le barde va se joindre au voyage 😏
L'entrainement de mage va commencer !
A bientôt !
D.
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