Rôles
Un chapitre un peu en avance pour changer XD
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Astre
Les domestiques remontèrent plusieurs couloirs pour nous guider vers trois chambres inhabitées. Elles étaient évidemment plus petites que celle où nous nous étions introduits plus tôt, mais bien plus grandes que toutes celles où j'avais dormis auparavant.
La forêt me manquait déjà. Que m'importait la taille des pièces s'il n'y avait ni vent, ni herbe, ni parfum de rosée ? Des murs restaient des murs, fussent-ils dorés. Par la fenêtre, j'apercevais les arbres domestiqués – mutilés – des jardins, et le chant de la liberté grondait en moi comme un appel enfoui.
Plus tard, me promis-je intérieurement. Plus tard. Il faut que je sois fort, pour mes amis.
Heureusement, la joie de retrouver Tasha, Ned et Tom me consolait largement. Dès que nous fûmes en sécurité dans la chambre, je les pris dans mes bras pour les serrer fort, très fort, en respirant leurs odeurs familières. Je n'avais pas réalisé à quel point je m'étais attaché à eux durant mon emprisonnement, à quel point il m'avait manqué et comme j'avais eu peur – si peur ! – de ne pas les retrouver. Le soulagement me coupait presque les jambes.
Je ne les avais pas abandonnés. La culpabilité que je ressentais malgré moi depuis ma fuite s'estompa un peu.
Assis en rond sur le grand lit, je leur présentai de nouveau Neige, qui semblait un peu nerveux. Peut-être à cause de cette histoire de pluie de jus de pomme sur laquelle les jumeaux n'arrêtaient pas d'insister...
J'aurais pu intervenir, mais je savais qu'ils le faisaient consciemment tourner en bourrique sous leurs airs innocents et, honnêtement, c'était hilarant.
Puis ils me racontèrent, dans le désordre et en s'interrompant mutuellement, ce qui leur était arrivé après notre séparation dans la forêt. Les Charognards avaient rassemblé tous les esclaves qui ne s'étaient pas échappés dans un même wagon et s'étaient dépêché de rejoindre Solaris, où ils les avaient vendus au premier venu. Le marchand les avaient séparés en fonction de leur âge, de leur forme physique et de leur docilité, les enfants ensembles et les deux femmes à des endroits différents.
Les jumeaux avaient directement été menés aux écuries du palais. Khany les avaient pris sous son aile, leur avait expliqués les règles de l'endroit et leur avait évité quelques raclés. Les soldats, apparemment, ne se gênaient pas pour taper des enfants.
Nous aurions dû leur faire plus mal lorsque nous en avions l'opportunité.
Tasha, de son côté, avait été parquée une journée entière dans une sorte d'entrepôt cauchemardesque avant d'être placé dans un groupe en direction du palais. Elle ne savait pas que les jumeaux s'y trouvaient déjà. À son ton, je devinais qu'elle ne pensait jamais les revoir.
— Je parie que tu as été méchante avec les gardes, jubila Ned en ricanant.
— Disons que je ne me suis pas laissé faire, confirma-t-elle en ébouriffant ses cheveux trop courts. Je n'ai pas envie de mourir ou de me faire battre, mais des choses ont plus de prix que la vie.
Je hochais sombrement la tête. Je comprenais : s'il n'y avait pas eu Neige, j'aurais probablement tenté quelque chose d'idiot et de désespéré lorsque j'étais prisonnier. Plutôt risquer de se faire tuer que de se trouver privé de la plus élémentaire des libertés.
Nous n'évoquâmes pas une fois Joan. Les jumeaux faisaient comme si elle n'existait pas – ce qui était plutôt perturbant – et le front de Tasha se plissait d'angoisse à chaque fois qu'elle se retenait de prononcer son nom. Elle avait peur. Pire, je la devinais complètement terrorisée. Le silence était probablement son dernier rempart entre l'espoir et l'angoisse qui menaçait de la submerger. Joan et elle avaient voyagé des mois ensemble après tout, toutes les deux contre le reste du monde... Je pense que malgré ses airs bravaches et ses répliques cinglantes, Tasha avait plus peur de la perdre que de mourir elle-même.
Je crois qu'elle l'aimait.
Finalement, Khany, qui nous avait écouté en silence, s'étira et annonça qu'elle prendrait l'une des chambres qu'on nous avait donné pour se reposer jusqu'au soir.
— Attends, l'interrompit Neige, qui n'avait pas non plus beaucoup parlé jusqu'ici. Que vas-tu faire à présent ? Réponds-nous franchement, s'il te plait. Je comprends ton envie de te venger, mais je ne serais pas le complice d'un meurtre. C'était mal de ta part de nous utiliser pour atteindre Jédima et c'était mal de vouloir assassiner Éliope alors qu'il ne t'avait rien fait.
Elle haussa les épaules en regardant ailleurs, embarrassée.
— On fait ce qu'on peut dans la vie, se défendit-elle. Je ne vous connais pas. Je ne vous dois rien. Vous n'avez même pas fait exprès de me délivrer dans les écuries. Il n'y a pas d'avenir pour les gens comme moi, de toute façon. Je voulais simplement les faire souffrir avant de disparaître. Leur faire comprendre ce que cela faisait d'avoir mal. D'être impuissant. Vulnérable. Terrifié.
— Je comprends, intervins-je. Si quelqu'un attaquait Neige, je lui arracherai probablement les entrailles. Mais je ne pense pas qu'un innocent mérite de souffrir aussi.
Mon sorcier me jeta un regard en coin, légèrement perturbé par la façon calme dont j'avais prononcé ce qui était pourtant une évidence.
Il se leva et marcha jusqu'à Khany, auquel il tendit la main. Elle la regarda quelques secondes avant de la prendre en hésitant.
— Reprenons depuis le début, d'accord ? dit-il gentiment. Je m'appelle Neige. Je suis un sorcier. Et je ne crois pas que « les gens comme toi », comme tu dis, n'ont pas d'avenir. Tout le monde a un avenir.
— Facile à dire quand on peut trucider les gens à distance, marmonna-t-elle sans lâcher sa main.
— Ce n'est pas faux, s'amusa-t-il. Mais je pourrais trucider les gens à distance pour toi. Je veux dire, pour te protéger. Si tu veux rentrer dans notre petite Meute... Enfin, si les autres sont d'accord, évidemment.
Il se tourna vers moi, une question au fond des yeux. Je hochai la tête. Elle avait protégé les jumeaux, fait preuve de courage, et était seule. C'était bien assez aux yeux d'un loup.
Tom et Ned frappèrent dans leurs mains, surexcités. Calendre eut l'équivalent d'un haussement d'épaule. Riza somnolait et Tasha sourit simplement. Elle avait l'air de se sentir des pulsions de grande sœur envers cette adolescente revêche – ce qui était complètement injuste, puisqu'elle avait mis des jours entiers avant de me parler sans m'agresser.
Je me retins in extremis de bouder. Ce n'était pas le moment.
Même si c'était quand même injuste.
— Eh bien voilà, conclut Neige en souriant. Bienvenu parmi nous, Khany.
La jeune fille ouvrit la bouche et la referma plusieurs fois, visiblement confuse.
— Juste... comme ça ? balbutia-t-elle.
— Ne cherche pas, intervint Calendre. Ces deux hurluberlus ne font jamais dans la demi-mesure.
J'eus l'étrange impression que ses paroles contenaient une menace sourde, discrète, mais bien présente. Son regard, fixé dans celui de Khany, avait prit des teintes inquiétantes. Avec un frisson au cœur, je compris que le félin cherchait à nous protéger. Si tu leur fais du mal, je te le ferais payer.
Elle hocha la tête de nouveau, l'air toujours aussi perdue, quoique moins désespérée, et sortit de la pièce sans ajouter un mot.
— Quand est-ce qu'on mange ? demanda Ned, qui avait toujours été un petit garçon sensé avec un bon sens des priorités.
— Ce soir, lui assura Tasha.
— Mais c'est pas juste, protesta son frère, vous avez eu des biscuits tout à l'heure ! On a vu Astre en manger un dans le couloir !
« Traitre », articulai-je silencieusement.
Il me tira la langue.
Neige me jeta un regard amusé. Je levais les mains pour clamer mon innocence.
— Il n'y en a plus, désolé. C'était le dernier.
— Maiiiiiis... ! rugirent les deux démons en me sautant dessus.
Je m'écroulais en riant, cherchant à chatouiller leurs petits corps mouillés par leur bain improvisé. Du coin de l'œil, je vis Tasha se lever et ouvrir une armoire.
— Il y a des vêtements, ici ! lança-t-elle à l'intention des jumeaux. Venez-vous changez, vous allez attraper froid !
Je m'attendais à ce qu'ils protestent, mais ils abandonnèrent aussitôt le jeu pour lui obéir. Ils n'avaient probablement pas envie de rester plus longtemps dans les tuniques sales et élimés qui leur arrivait aux genoux.
Lorsque Tom leva les bras, j'aperçus énorme marque violacé sur son ventre et une forte nausée me prie, renforcée par une colère monstrueuse. Je détournais le regard alors que Tasha finissait de les habiller, sans le moindre commentaire et sans la moindre plainte de leur part.
Je me sentis soudain très las et très triste, comme si une masse noire m'était brusquement tombé dessus.
Tant de gens blessés, perdus, abandonnés. Tant de choses mauvaises, tant de violence et de gâchis. Pourquoi ? Pourquoi les humains se faisaient-ils tant de mal ? J'avais envie de pleurer.
Une main se posa sur mon épaule. Solide, rassurante et douce. Mon cher Neige.
Il déposa un baiser dans mes cheveux, comme un pansement sur une coupure.
— Tasha, lança-t-il, est-ce que cela ira si nous vous laissions tous les trois ici ? Je pense que nous avons besoin de nous reposer, nous aussi. Nous serons dans la chambre d'à côté. Nous nous retrouverons avant de descendre au diner, d'accord ?
Tasha embrassa le front de Tom, tapota l'épaule de Ned et nous souris.
— Ne vous en faites pas, répondit-elle du ton qu'elle utilisait généralement pour les jumeaux. Ça ira. Allez dormir un peu tous les deux. Et verrouillez bien la porte de votre chambre, d'accord ? Ne laissez entrer aucun étranger. Cet endroit est bien plus dangereux qu'il en a l'air.
Mon sorcier hocha la tête. Je m'approchai et la pris dans mes bras, la gorge toujours serrée. J'avais beau jouer les durs, me battre, tenir tête aux méchants et protéger Neige, je me sentais petit à cet instant, vulnérable, inexpérimenté. Mes deux mamans me manquaient terriblement.
Tasha m'étreignit doucement en me caressant la nuque.
— Tu vas voir, murmurai-je à son oreille, autant pour la rassurer que pour me réconforter, tout va bien se passer.
Sa main glissa sur mon épaule alors qu'elle s'écartait légèrement. Puis elle me sourit, entièrement, franchement, pour la première fois depuis que je l'avais rencontré.
— Tu es un miracle, Astre, déclara-t-elle en m'embrassant sur la joue. Je ne m'inquiète pas. J'ai confiance en toi.
Je lui renvoyai un regard stupéfait, mais elle pouffa et me poussa vers Neige.
— À tout à l'heure ! lançai-je aux jumeaux, qui se faufilaient sous les couvertures en chuchotant.
— À tout à l'heure ! répondirent-ils en cœur.
— Tu reviendras, hein ? s'inquiéta Tom.
— Oui, promis-je en ouvrant la porte. Toujours.
Nous sortîmes dans le couloir et Neige referma le battant derrière moi. Je soupirai profondément et me frottai les yeux en m'adossant au mur.
— Ça va ? s'inquiéta-t-il.
— Ça va, lui assurai-je, même si ça n'allait pas vraiment.
Puis, après quelques secondes de réflexions, j'ajoutai, un peu perplexe :
— Tasha m'a dit que j'étais un miracle. C'est bizarre, non ? Peut-être qu'elle voulait parler de toi...
Il ouvrit des yeux surpris, puis attendris.
— Oh non, mon loup, soupira-t-il en caressant ma mâchoire, si doucement que ses doigts ressemblaient aux baisers d'une brise. Non, mon loup, tu es un miracle.
Je l'attirai dans mes bras pour l'embrasser.
Comme son corps était fragile contre le mien, petit mais puissant, doux, passionné, familier... Ses lèvres étaient toujours aussi chaudes, aussi tendres. Une bouffée de bonheur gonfla ma poitrine. Il était mon foyer. Je voulais l'embrasser ainsi pour toujours, à l'abri dans ses bras, en le serrant assez fort pour oublier le monde entier.
Ma main glissa dans ses cheveux, cherchant à presser un peu plus son visage contre le mien, tandis que sa bouche s'ouvrait pour mêler nos souffles et nos langues. Neige...
Lorsque nous nous séparâmes, beaucoup trop tôt – toujours trop tôt – il plongea son visage dans mon cou. Je respirai son parfum à m'enivrer. Dans ce monde absurde et violent, il était mon ancre, mon cœur, ma plus belle raison d'exister.
— Allons dans la chambre, murmura-t-il finalement.
Je hochai la tête avec enthousiasme et lui prit la main pour le tirer d'autorité vers la porte concernée. Il rit devant ma précipitation.
Sur le seuil, nous trouvâmes Riza et Calendre en grande discussion. Tiens, ils arrivaient à se parler sans s'étriper maintenant ?
— Ça va ? s'inquiéta Neige en s'agenouillant devant notre ami de Terdhome.
Le félin hocha imperceptiblement la tête, sa fierté l'empêchant de faire plus. Il avait probablement honte d'avoir craqué tout à l'heure et disparu dans la capuche de Neige. Je ne lui en voulais pas : à sa place, j'aurais probablement cherché à disparaître tout court.
— Je vais faire un tour en ville, lâcha Riza, histoire de m'assurer que quelques-unes de mes connaissances sont encore vivantes. J'emmène l'aristo. Il a besoin d'exercice.
— Vous ne m'emmenez pas ! protesta Calendre, outré. Je vous accompagne !
— Mais oui, mais oui. Répète-toi ça.
L'espace d'un instant, je crus que nous allions avoir droit à une décapitation au milieu du couloir, mais Calendre acquiesça finalement d'un air tragique, envoya un regard à Neige, l'air de dire « tu vois ce que je dois supporter ? » et partit à la suite de Riza vers les escaliers.
— Oh, attends ! interpelai-je la chatte.
— Oui ?
— Pourquoi as-tu dit à Jédima que tu ne boirais pas trop pendant le bal ?
Elle ricana.
— Un mois après qu'elle eut cessé de harceler les chats sur les quais, elle est sortit en ville, pensant que nous lui avions pardonné. Nous nous sommes relayé pour pisser à l'intérieur de son carrosse par un trou du plafond. Les gens l'ont appelé « Pluie-pisse » pendant au moins deux ans.
Je pouffais tandis que Neige et Calendre secouaient la tête, dépités.
— Vous serez revenu avant ce soir ? s'inquiéta mon sorcier.
— Oui, le rassura le chat roux. Ne t'inquiète pas. Allez vous reposer.
Et il partit.
Je pris la main de Neige pour le relever et l'entrainai vers la porte. Je le poussai à l'intérieur, tournai la clef dans la serrure et le plaquait sauvagement contre le mur pour l'embrasser.
— Neige... gémis-je en insinuant mes doigts sous sa chemise. J'ai envie de toi...
Mon autre main descendit jusqu'à son derrière. Il laissa échapper un petit bruit surpris avant de m'embrassant plus fort.
Encouragé par ce vif succès, j'attrapais ses deux fesses, puis ses cuisses, que je relevai d'un coup. Ses jambes s'enroulèrent autour de ma taille alors que je continuai de le presser contre le mur, savourant la sensation de son corps pris au piège contre le mien.
— Astre... souffla-t-il contre mes lèvres.
Je me retournai et titubai jusqu'au lit pour me laisser tomber sur lui. Je l'embrassai encore et encore en baladant mes mains sur ses habits, défaisant en froissant le tissu qui osait s'interposer entre mes lèvres et lui. Son chaperon tomba, vaincu, et sa chemise remonta, dévoilant ses tétons roses, dressés, désespérément appétissants. Je les embrassai à leur tour, les caressai, les mordillai...
Oh, Neige...
Son bassin bougeait contre le mien, sa poitrine frémissait sous moi et je pouvais sentir son cœur battre vite, de plus en plus vite, en posant mes lèvres contre son cou.
Je le voulais. Je le voulais si fort que j'aurais pu me consumer de l'intérieur, là, maintenant, dévoré par la chaleur pure de mon désir, qui se répandait comme un brasier dans mon bas-ventre.
— Astre... gémit-il de nouveau.
Je haletai contre son ventre. Son odeur m'affolait. Mes mains agrippèrent son pantalon pour le baisser.
Je sentis quelque chose passer dans son esprit, influençant son humeur, et me redressai légèrement. Il souriait d'un air qui me fit frissonner d'anticipation.
— Tu te souviens de ce que tu m'as proposés lorsque j'étais sur ton dos ? susurra-t-il.
Je penchai la tête sur le côté, perdu. Mon sexe dur, compressé par mon fichu pagne, m'empêchait de me concentrer.
Sans prévenir, il échappa à mon étreinte, recula et me sauta dessus. Je basculai en arrière, écrasé par son poids. Oh, réalisai-je, émoustillé. Ça !
— Et si nous échangions nos rôles ? énonça-t-il dans mon oreille, parfaitement conscient de l'effet qu'il me faisait. Tu m'as fait comprendre que tu aimais le fait que je sois puissant...
Une brise magique souleva ses cheveux tandis qu'il glissait ses mains jusqu'à mes poignets.
— Incroyablement puissant, répétai-je en souriant béatement.
Il immobilisa mes bras sur le côté et m'embrassa. Une de ses jambes glissa entre les miennes. Je voulus attraper son visage pour l'attirer vers moi, mais il m'en empêcha.
Une étincelle de panique me traversera. Je l'étouffai aussitôt. C'était Neige. Tout allait bien. Ce n'était qu'un jeu.
Son genou pressa contre mon sexe, le raidissant de nouveau entièrement. Il n'était pas très lourd, mais il pesait tout de même sur moi. L'étincelle revint, cette fois sous forme de malaise. Il tenait toujours mes poignets. Un cri se bloqua quelque part dans ma gorge. Je n'aimai pas être prisonnier.
Mais c'était Neige. Je désirai Neige. Il voulait faire ça et je le lui avais demandé. Je ne pouvais pas me défiler maintenant. Tout allait bien...
— Astre ?
J'inspirai profondément.
— Tu ne continues pas ? tentai-je de l'encourager en ouvrant un peu les jambes.
Il me lâcha et s'assit à côté de moi.
— Ça ne va pas ? s'inquiéta-t-il.
— Mais si, mais si ! m'empressai-je de rectifier, mortifié. Bien sûr que si ! J'étais juste... Déconcerté !
Il était hors de question que je le laisse insatisfait !
— Déconcerté ? répéta-t-il en baissant les yeux.
Je m'aperçus que j'étais en train de frotter mes poignets.
— Désolé, balbutiai-je en les lâchant. Désolé. Je vais faire mieux !
— Quoi ? Non, Astre...
Il m'attira contre lui, toujours assit. Je me laissai aller contre son torse.
— Ne t'excuse jamais pour ça, mon loup, souffla-t-il en me caressant les cheveux. Ce n'est pas grave si tu n'as pas envie de changer nos rôles.
— Mais je l'ai suggéré... Et tu voulais...
— L'idée me paraissait excitante, mais je ne le regretterai pas particulièrement si nous ne la poussons pas jusqu'au bout. Et ce n'est pas parce que tu l'as suggéré que tu es obligé de l'aimer.
Ça sonnait faux. Je le désirai, lui, et il désirait ça. Qu'est-ce qui n'allait pas chez moi ?
— Astre, déclara-t-il en prenant mon visage entre ses mains. Je ne te ferais jamais l'amour d'une façon que tu n'apprécies pas. Le ferais-tu pour moi ?
— Jamais ! m'exclamai-je, scandalisé.
— Crois-tu que je t'aime moins que tu m'aimes ?
— ... Non, avouai-je un peu plus bas, déstabilisé par la question.
— Alors tu comprends. Nous avons essayé, ça n'a pas fonctionné. Ce n'est pas un drame.
Je hochai la tête et posai mon front contre le sien.
— Dis-moi, murmura-t-il au bout de quelques secondes, qu'est-ce que tu aimes dans nos jeux, habituellement ?
— Tu veux dire, le fait que je fasse semblant de te poursuivre et de te dominer ?
Il déglutit, les joues un peu rouges. Je sentis son membre se réveiller de nouveau entre ses jambes.
— Oui, ça...
Je lui caressai la joue du bout du pouce en me plongeant dans mes pensées. Je n'y avais jamais vraiment réfléchis jusque-là, me contentant de faire ce qui nous procurait du plaisir sans me poser de questions.
— J'aime te protéger, avouai-je enfin. Te savoir complètement, entièrement vulnérable, avec juste moi pour prendre soin de toi, et utiliser ce pouvoir pour te rendre heureux. Que tu sois entièrement à ma merci, que tu abandonnes toutes tes défenses pour moi, rien que pour moi, parce que tu m'aimes et que tu me fais confiance, que tu me cèdes... Non, que tu m'offres cette responsabilité. Que tu me donnes... toi. Que tu te donnes. Je sais que tu n'as pas toujours besoin de moi dans la vraie vie et je sais que tu n'es pas réellement sans défense, mais je me sens si bien dans ces moments-là... Est-ce que c'est grave ?
Il m'embrassa tendrement. Je l'embrassai en retour, effaçant du temps quelques instants.
— Moi, confessa-t-il en s'écartant de quelques centimètres, j'aime être vulnérable près de toi. J'aime l'idée que tu pourrais me faire n'importe quoi, mais que choisis de me protéger. Au fond, je sais que même lorsque tu es brutal, tu pourrais t'arrêter a la moindre de mes demandes, et ça me donne une impression de sécurité si... Si rassurante. Le vrai monde est difficile. J'ai peur que les gens me blessent, me quitte ou cessent de m'aimer parce que je ne suis pas assez fort, pas assez... Quelque chose. Mais pas toi. Quand nous sommes dans notre monde, quand j'abandonne tout, mes pouvoirs, mes connaissances, mes capacités... Quand je ne suis plus rien entre tes bras et que tu me désires encore...
— Toujours ! assenai-je avec ferveur.
Il sourit.
— Quand tu me jettes au sol et que tu me prends comme si je te faisais fait perdre la tête, continua-t-il, j'ai l'impression d'être le centre de l'univers. Je me sens aimé et protégé et bien, tellement bien.
— Tu sais que tu me fais réellement perdre la tête, n'est-ce pas ? m'amusai-je en bougeant légèrement mon bassin contre le sien.
— Vraiment ? s'enquit-il sur le ton du jeu. Et moi qui pensais que les loups étaient de fiers et dangereux prédateurs...
— Oserais-tu remettre en question mes talents pour la chasse ?
Il me tira la langue et se redressa brusquement pour sauter en travers du lit.
— Attends un peu ! m'exclamai-je en y plongeant à sa suite, la main tendue en avant, alors qu'il s'échappait à quatre patte.
— Tu ne m'auras pas ! rit-il en retombant de l'autre côté.
Je franchis le matelas et bondit vers lui, les crocs sortis. Ma main effleura son bras.
— Tu vas voir ! grognai-je, faussement menaçant. Je vais t'attraper et te dévorer tout cru !
Il me tira de nouveau la langue. Ce petit insolent !
Je fis semblant de sauter vers la droite, mais obliqua au dernier moment. Je le percutai de plein fouet et le renversait sur le matelas, le visage dans les couvertures. Mon sexe dur pressait contre ses fesses tandis qu'il gigotait en tentant d'échapper à mon étreinte. J'attrapai ses poignets pour les enfoncer solidement dans les draps.
— On dirait que ma proie n'est pas si agile que ça, finalement... soufflai-je dans son oreille en me penchant un peu plus.
La sensation de ses fesses contre mon bas-ventre était absolument délicieuse. Il laissa échapper un petit cri étouffé par les couvertures. Le son m'excita encore plus.
Une main entre ses omoplates pour le maintenir à ma merci, je me débarrassais de mon pagne. Mon nom passa dans ses pensées, brûlant de désir.
J'appuyai le bout de mon sexe entre ses fesses, bloqué par le pantalon. Il protesta encore en gigotant. Ma main, en appuyant sur sa tête, étouffait ses paroles, mais je sentais qu'il appréciait la situation autant que moi.
Je me frottai un peu contre lui, le forçant à bouger en vas-et-vient contre le matelas avant de baisser le tissu qui le protégeait. Il n'était plus vêtu que de sa chemise remontée au-dessus de son torse. Je dévorai du regard le galbe de ses hanches, où perlaient quelques gouttes de sueur, son fessier remonté, ses bourses disparaissant dans les draps froissés et son intimité offerte.
D'une main, j'attrapai ses poignets pour les tirer en arrière, le forçant à se cambrer un peu plus, et commençait à titiller l'orifice que je comptai pénétrer.
— Astre... balbutia-t-il.
Mes doigts devinrent soudainement mouillés et visqueux. Mon sexe, pressé contre sa cuisse, laissait une même trainée lubrifiée. Ah, j'aimai la magie...
J'enfonçai un doigt en lui, puis deux, fouillant consciencieusement l'intérieur de sa chair, savourant ses tressaillements et ses petits cris. Neige...
J'aimai le son de sa voix étouffé par les draps et songeai que nous pourrions peut-être, une fois prochaine, faire exprès de le bâillonner...
Cette pensée fut trop. Je retirai mes doigts. Il ne protesta pas, comprenant ce qui arrivait. Ma main se cala sur ses reins.
Je m'enfonçai en lui d'un seul coup de bassin. Mon gémissement de plaisir se perdit dans le nom qu'il haletait.
— As...tre... As... Ah !
Je serrai ses poignets plus fort pour l'attirer, l'empaler contre moi alors que je le pilonnai sur le matelas. Neige... Neige, Neige, Neige...
Puis, comme d'habitude, tout explosa, tout se défit sauf mon désir, et j'agrippai ses hanches à pleine mains pour aller plus vite et plus brutalement. Au moment où le plaisir commença à flirter avec l'insoutenable, j'eus brusquement envi de voir son visage et me retirai.
Il cria de protestation, mais je le saisis de force, le retournai et écartai ses cuisses pour le pénétrer à nouveau, ses jambes sur mes épaules.
Neige... Neige... Neige...
Chaque battement de cœur était l'écho de son nom.
Neige... Neige...
Astre, répondait-il, Astre...
Nos esprits se fondirent, comme un seul être, un peu plus grand que la somme de ses parties.
Et lorsque la vague blanche vint enfin, elle nous emporta ensemble, tendant nos corps à les briser. Son sperme coula sur son torse, le mien à l'intérieur de lui.
Et je m'effondrai enfin, heureux, exténué.
Mes pensées dérivèrent un moment avant de se recentrer. Serré contre moi, il m'étreignait comme s'il ne comptait plus jamais me lâcher.
— Je t'aime, Astre. Je t'aime.
— Moi aussi, Neige, répondis-je en souriant.
Je me dégageai, me levai et inspectai rapidement la chambre avant de revenir avec un tissu mouillé pour l'aider à se nettoyer.
— C'était bien, n'est-ce pas ? le titillai-je en passant le chiffon autour de son membre.
Il rit.
— Ce n'était pas « bien », mon loup, c'était incroyable !
— Que dirais-tu, continuai-je en me hissant à sa hauteur, de pousser les choses un peu plus loin la prochaine fois ? Je veux dire... Puisque nous avons décidé une bonne fois pour toutes que nos rôles étaient parfaits comme ils étaient...
Je passai le chiffon sur ses lèvres gonflées par les baisers.
— Je pourrais te bâillonner. T'attacher. Te faire tout ce que je veux...
Il voulut rire, mon son hilarité se coinça dans sa gorge lorsque je pressai un peu plus fort le chiffon sur sa bouche.
Il le mordit en me regardant droit dans les yeux.
Cette après-midi n'était définitivement pas terminée.
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