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Le Chant de la ville

Astre

Je courrais, je courrais, et les mots s'entrechoquaient dans ma tête, sursautant à chaque fois que mes pas heurtaient le sol. Les mots que j'avais dis, les mots que j'aurais du dire et tous ceux que je n'avais avoué qu'à moitié.

Tout s'emmêlait, tout se brouillait... J'avais beau fuir, chaque pas en avant m'enfonçait un peu plus dans le capharnaüm qu'y encombrait mes pensées. Comment avais-je pu croire un jour que les sentiments étaient simples ? À cet instant, je souhaitais de toutes mes forces revenir au temps de mon enfance, où tout était facile, où Neige et moi nous comprenions sans même le vouloir...

Le vent jouait dans mes cheveux. J'étais sorti du château. Mais ce n'était même pas le vrai vent, celui-là portait en lui des odeurs d'hommes, de machines, de charbon, de boue et de chats. La nuit qui tombait sur l'horizon n'était pas la vraie nuit non plus, celle profonde, sombre et froide de la forêt. Ce n'était qu'un simulacre, une parodie bruyante et morose dont les lumières artificielles éteignaient les étoiles.

Avec surprise, je me rendis compte que j'en voulais à Neige. Pas beaucoup, mais juste assez pour me pincer le cœur. Si nous n'étions pas sortis de la forêt, les choses auraient été plus simples.

— C'est la faute de cette stupide ville ! criai-je en donnant un coup de pieds dans un morceau de bois.

La douleur me fit m'arrêter.

— Stupide, stupide, stupide ville ! continuai-je en frappant une haie à la place. Tu es moche, terne, muette, et tu ne crées que des problèmes ! Je te déteste !

Ce n'était probablement pas très mature, mais je m'en fichai. Des larmes de frustrations menaçaient de m'échapper. Je m'essuyai les yeux en reniflant. Je me sentais lamentable.

— Bravo, quelle noblesse, railla une voix familière.

Une voix horriblement familière. Peut-être la dernière voix que j'avais envie d'entendre à l'instant.

La mort dans l'âme, je relevai les yeux.

Calendre était nonchalamment assis sur le rebord d'une fenêtre, deux étages au-dessus de la haie que j'avais laminée. Il m'observait de haut, les moustaches froncées, comme si j'étais un cloporte sur son repas. Son pelage roux paraissait plus sombre dans la pénombre et ses yeux luisaient d'un éclat jaune, comme deux petites étoiles. Il était parfaitement immobile. Je le trouvais brusquement bien plus grand que dans mon souvenir. Plus grand et plus intimidant, comme si je faisais face à un être ancien et puissant.

Ce qui était forcément ridicule...

— Ce n'est pas une très bonne idée de te promener seul la nuit, jeune loup, reprit la créature en se laissant souplement glisser jusqu'à la fenêtre d'en dessous. Pas après t'être attiré l'inimité des chats de la ville. Il pourrait t'arriver... des choses.

— Je n'ai pas peur ! répondis-je avec bravade, prêt à me battre.

J'avais désespérément envie de taper sur quelque chose qui avait plus de répondant qu'une haie.

— Tout doux, tout doux, soupira le chat. Vous, les loups, êtes toujours si prompt à vouloir résoudre vos problèmes par des coups et des griffes... Et dès que la question excède le domaine physique, vous vous trouvez complètement perdus.

— C'est pas vrai, répliquai-je en croisant les bras, incarnation même de la mauvaise foi.

Calendre descendit encore d'un étage. Il se trouvait à présent à hauteur de mon visage.

— Tu répètes que tout serait plus simple si tu étais en forêt, reprit l'insupportable animal, mais aussi loin que tu voyages, où que tu sois, où que tu ailles, tu t'emportes toujours avec toi. Si le problème vient de toi, alors peut importe l'endroit où tu te trouves, il sera là.

Je faillis lui répondre quelque chose de percutant liant sa présence à la nature de ses problèmes, mais me retint au dernier instant. Ce qu'avait dit Antoine m'avait marqué : je ne pouvais pas rejeter sans cesse ce que les autres disaient. Je n'étais pas obligé d'être d'accord, mais je pouvais au moins y réfléchir.

— Pourquoi me racontes-tu ça, boule de poils ? grommelai-je en croisant les bras.

Je n'allais pas aller jusqu'à la politesse. J'avais des limites, tout de même.

— Peut-être parce que tu me fais pitié, répondit tranquillement le chat donnant un coup de langue sur sa patte avant. Ou peut-être parce que j'ai promis à ma chère Annuka que je veillerai sur toi et ton ami, l'humain Croisé, tant que vous serez dans la citée. Tu ne pensais pas sérieusement que tu aurais pu précipiter l'un des nôtres dans une fontaine et t'en sortir, j'espère ? Tu as de la chance que je sois intervenu.

— Je n'ai pas peur de vous ! répliquai-je.

Mais les mots, en quittant mes lèvres, résonnèrent plutôt stupidement. Je refermais la bouche, légèrement honteux.

— Peut-être est-il temps de grandir un peu, jeune loup, reprit Calendre d'un ton presque paternel. Allez, suis-moi.

Sans vérifier que je lui obéissais, il se retourna et se lança à l'assaut de la façade. Lorsqu'il atteignit le toit, j'y étais déjà.

— Pas mal, apprécia-t-il en se mettant à courir.

Il se dirigea vers la limite du bâtiment et bondit sur le suivant, légèrement plus haut. Je n'hésitai pas un instant avant de l'imiter. J'avais beau dire, j'avais fini par prendre certaines marques sur cette colline d'homme et sauter d'un toit à l'autre était assez amusant.

Porté par le vent froid de la nuit, nous courûmes tous les deux au-dessus de la ville, sautant sans ralentir au-dessus des rues et des ruelles, esquivant les cheminées, prenant appui sur une façade pour sauter sur la suivante, toujours plus haut vers le sommet. Je souriais en poursuivant la tâche fuyante de son pelage roux. Je me sentais libre. Je me sentais mieux.

Bientôt, nous atteignîmes les murailles du château. Mon cœur se serra en songeant que j'avais abandonné Neige au milieu de ma déclaration avortée. Je pouvais encore sentir sur mes lèvres la chaleur du baiser que je lui avais donné. Je voulais l'embrasser de nouveau ainsi. Encore et encore, pour toujours.

Je m'attendais plus ou moins à ce que Calendre s'arrête et m'ordonne d'aller retrouver Neige, mais il obliqua sans s'arrêter, m'entrainant dans son sillage.

Quelques toits plus tard, il s'arrêta enfin. Il n'était pas essoufflé. Moi non plus. Courir était dans notre nature.

En face de nous se trouvait une vieille tour biscornue encastrée dans la muraille du château. Elle était faite de vieilles pierres en partie descellées, d'alcôves habitées par des statues sans visages et de fenêtres béantes. Son toit était plat, comme sectionné brutalement. Je cru voir des ombres se mouvoir tout en haut, mais le sommet était trop lointain pour que j'en sois certain.

— L'ancien observatoire, lâcha simplement Calendre en sautant à terre.

Son passage au sol fut de courte durée. Ses griffes à peine touchées les pavés, il rebondit et sauta sur la tour, s'accrochant sans difficulté aux aspérités de la roche. Il voulait grimper ? Très bien. Moi aussi, j'étais fort à ce jeu-là.

Mes jambes étaient robustes, ses pattes étaient solides, et le chemin dans la pierre avait été facilité par le passage de centaines de griffes. C'était comme continuer à courir, mais à la verticale. Nous ne mîmes pas longtemps à atteindre le sommet.

Le toit, aussi plat que je l'avais deviné, formait un cercle assez large pour que je roule cinq fois sur moi-même sans en atteindre les bords. Une trentaine de chat s'y trouvaient déjà, immobiles, silencieux, leurs regards luisant plongés vers la ville en contrebas. Ils ne réagirent pas à mon arrivée, probablement parce que j'étais accompagné.

— Tu te trouves dans un lieu où très peu de non-chat ont eut le privilège d'être amené, déclara Calendre dans mon dos.

En temps normal, j'aurais répondu quelque chose de désobligeant, mais je sentais qu'un honneur m'était fait et j'avais envie de m'en montrer digne ; même envers des chats.

— Pourquoi m'as-tu emmené ici ? demandai-je doucement.

Sans me répondre, il se dirigea vers le bord du toit et s'assit. Je l'imitai, tentant d'ignorer les autres chats.

— Contemple, ordonna Calendre en tendant une patte vers le paysage.

J'obéis.

Sous mes pieds, la ville se courbait comme une vague figée et s'étirait jusqu'au lac, que la lumière de la lune piquetait de fragments argentés. Les couleurs, les textures et les motifs des toits m'évoquèrent irrésistiblement les couvertures que Solana cousaient à partir de tissus différents, autrefois. Le souvenir me procura une nostalgie douce-amère, une tristesse déjà familière. C'était aussi ainsi qu'aimait s'habiller les gens d'ici, de vêtements ridiculement disparates, de teintes vives et de bijoux voyant. J'avais trouvé ça ridicule à mon arrivé, mais au fond, ils étaient en harmonie avec l'endroit qu'ils habitaient. N'était-ce pas mon cas aussi, lorsque j'étais dans la forêt ?

Quelques volutes de fumée blanche dessinaient des arabesques au-dessus des toits hérissés de cheminées. Des silhouettes humaines allaient et venaient dans les rues et derrières les fenêtres illuminées, se parlaient, se quittaient, se retrouvaient, s'enlaçaient ou se saluaient.

— Tu as dit que la ville était muette, intervint Calendre d'une voix grave, et j'en suis plutôt indigné. C'est toi qui refuse d'écouter. C'est toujours comme ça avec les loups, ils pensent que seule la forêt a le droit d'exister parce que c'est là qu'ils préfèrent habiter. Les villes, les mers, les lacs, les montagnes, les déserts et les vallé ne sont considérés qu'avec dédains. Et c'est nous qu'on traite de snob. Mais la ville a un chant. Tu n'es pas obligé de l'aimer, mais essaie d'écouter. Je ne te connais pas beaucoup, mais j'ai déjà remarqué que tu avais un cœur immense et un esprit remarquablement ouvert. Ce sont des dons que tu ne devrais jamais cesser de cultiver, jeune loup.

J'étais assez indigné qu'il parle de ma famille – mon ancienne famille – ainsi, mais je devais reconnaître qu'il n'avait pas entièrement tort. Mère-de-tous n'avait que mépris pour ce qui n'était pas forêt et me l'avait simplement transmit, sans explication. Elle m'avait dit que le reste du monde était muet. Que les humains ne savaient que piétiner, détruire, saccager, et jamais vraiment habiter.

Alors j'avais cessé d'écouter. J'avais fermé mon cœur aux portes de Terdhome.

Pourtant, je savais que tous les humains n'étais pas mauvais. Je savais qu'il y en avais au moins un que j'aimais.

Avec cette réalisation, mon esprit s'ouvrit au monde et j'entendis pour la première fois le chant de Terdhome.

La citée était comme un cœur gigantesque, toujours en mouvement, aspirant et expirant une quantité de gens qui l'irriguait en le gardant vivant. La forêt était toujours calme, lente, sereine, plongeant ses racines si loin dans le passé que le présent n'arrivait jamais vraiment. La ville, au contraire, se précipitait à toute allure vers le futur qu'elle fabriquait au fur et à mesure. C'était un organisme en perpétuelle mutation qui détruisait pour mieux créer, s'agrandissait d'un côté pour raccourcir de l'autre, s'élevait et s'écroulait en même temps, mourant et renaissant d'un seul mouvement.

Je n'aimerais jamais le chant de la ville comme j'aimais celui de la forêt, en fait, je ne l'appréciai pas particulièrement, mais je comprenais enfin ce que Neige, Antoine et Calendre lui trouvait et j'étais content d'avoir su l'écouter.

Neige... Parmi tous ces cœur battant à l'unisson se trouvait le sien, tout près, et pourtant bien trop loin.

Neige, cher, cher Neige, à qui je n'avais pas réussit à dire la phrase la plus importante de mon existence, trop effrayé à l'idée de me rendre vulnérable.

Mais je me sentais mieux, à présent, et cette peur s'était enfui. La seule qui restait était celle de ne pas réussir à le retrouver pour tout lui dire, l'enlacer, et l'embrasser. Après, nous pourrons discuter. Je ne le laisserai plus choisir aveuglément notre destination et je ne me tairai plus lorsqu'une situation ne me plaisait pas. Tout allait rentrer dans l'ordre.

À l'instant où je nous pardonnais en même temps tous nos non-sens, je retrouvais sa présence au coin de mon esprit. Il ne m'avait jamais vraiment quitté, après tout, et plus rien ne nous séparait, si ce n'était la distance entre nos corps.

Neige ? appelai-je silencieusement.

Astre ? répondit-il aussitôt. Astre ! Oh, Astre, mon Astre, je suis désolé ! Je te demande pardon !

Moi aussi je suis désolé, Neige. J'ai été un peu têtu.

J'entendis son rire dans ma tête, comme une cascade de soleil.

Et moi j'ai été un peu lâche, concéda-t-il.

Où es-tu ? J'ai besoin de te voir.

Je le sentis frémir, car le langage des loups lui avait révélé pourquoi.

Je suis avec Carol, expliqua-t-il. Je viens de lui avouer que j'étais un sorcier.

Je perçus à travers son message quelques fragments de ce qui l'entourait, une cave emplie de drôle d'objets. Je senti aussi son angoisse, celle de blesser Carol et surtout de m'avoir blessé, moi.

Tout va bien, soufflai-je dans ses pensées en lui transmettant quelques images de ce qui m'entourait, teinté du chant de Terdhome.

C'est beau, me répondit-il. Mais je croyais que les villes étaient muettes ?

Je ne sais pas pour les autres, mais celle-ci n'est pas si terrible, finalement. Mais je veux partir, Neige.

Je sais. Je suis désolé. Nous nous en irons dès que nous nous serons retrouvés.

Je souris à moi-même, ravis de cette perspective.

Astre... tenta-t-il de nouveau. Lorsque nous nous reverrons... Tu me diras ce que tu as faillis me dire tout à l'heure ? Tu m'embrasseras de nouveau de cette façon là ?

Je te le répéterai dans tous les langages du monde et je t'embrasserais jusqu'à ce que tu n'aies plus de souffle.

Je sentis son cœur battre un peu plus fort, s'accordant parfaitement au mien, et réalisai, émerveillé, que nous avions notre propre chant.

J'allais me lever pour partir lorsqu'un feulement attira mon attention. Revenant à ce qui m'entourait, je me rendis compte que les chats étaient deux fois plus nombreux autour de moi. Calendre était crispé à mes côtés, le museau tendu vers le lac en contrebas.

— Que se passe-t-il ? m'alarmai-je.

— Il est de retour.

Mes yeux se posèrent sur l'eau. Au début, je ne vis rien. Puis je notais les ridules qui troublait le reflet des étoiles et les vagues formant une flèche dirigée vers nous. Quelque chose se déplaçait sous la surface. Ou quelqu'un.

Une frayeur sourde m'envahit, parasitant mon esprit d'images de carnage et de géant dormant dans un salon en ruines.

Je plissai les yeux pour mieux voir. La chose qui avançait sous l'eau était pâle et long, comme un homme debout. Des arabesques blanches marquaient son sillage. Une chevelure. En dessous, un visage.

J'étranglai un cri paniqué.

Un Chasseur approchait.

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