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Confessions

Neige

Au début de la quatrième semaine, Astre commença à agir étrangement. Très étrangement.

Il me tournait autour avec un drôle d'air, visiblement pensif, mais sans essayer de me parler, ni de me séduire d'aucune manière. Il m'observait du coin de l'œil, mais se détournait dès que je le regardai en retour.

Inquiet, j'essayai de caresser ses pensés et me rendu compte, horrifié, qu'il m'était difficile de l'atteindre, comme si je devais traverser une muraille d'eau ralentissant les sons et les mouvements. Je ne captai de lui que quelques images, quelques sensations lointaines, atténuées, de confusions, de stupéfactions, d'hésitation et de timidité.

De timidité.

Jamais, au grand jamais, mon loup n'avait été timide envers qui que ce soit.

Plus rien n'allait. Et si je l'avais trop éloigné ? S'il se mettait à reconsidérer sa promesse ? Il fallait que je fasse quelque chose, n'importe quoi...

Paniqué, je perdis le peu d'appétit et de sommeil qu'il me restait, rassemblant silencieusement assez de courage – ou de désespoir – pour faire enfin le premier pas.

Un soir, Carol se retira plus tôt et Antoine déclara qu'il avait à faire autre part. Nous étions seuls dans la bibliothèque, lui près de la cheminée, moi derrière mon bureau. Je pris une grande inspiration, repoussai mon grimoire et m'approchais de lui en focalisant mes pensées sur le désir qu'il m'inspirait.

Trois semaines que nous n'avions pas fait l'amour... Son corps me manquait si fort que c'en était presque douloureux.

Il sursauta en m'entendant approcher, surpris. Je lui souris en rajustant mon col, regrettant silencieusement l'absence de mon chaperon.

Il me lança un regard gêné et détourna le regard.

Cela me choqua si fort que j'en fut cloué sur place. Astre n'avait jamais manqué une occasion de me sauter dessus. Debout à côté de lui, j'eus soudain l'impression qu'un gouffre nous séparait, un vide infranchissable. Qu'avais-je fais ? Astre ne voulait plus de moi. Le monde s'écroulait de toute part.

Que m'importait la magie, les autres humains ou l'endroit où je vivrai, si je n'avais pas Astre ? Quel stupide fou j'avais été ?

Je reculai, les larmes aux yeux.

Il se leva aussitôt, l'air catastrophé, et s'approcha de moi en tendant une main, mais sans me toucher, comme s'il craignait que notre contact ne brise l'un d'entre nous. Ses yeux sombres plongèrent dans les miens. Il était beau, beau à couper le souffle, comme toujours.

Ses lèvres dessinèrent un sourire tremblant, comme s'il invoquait un courage qu'il n'était pas sûr d'avoir.

Et s'il... Oh non. Non, non, non, il devait y avoir un moyen de réparer ça, il devait...

— Neige, dit-il lentement, posément, dans la langue des hommes.

— Oui ? répondis-je d'une voix mal assurée.

Je n'aurais pas dû en attendre autant de lui. J'aurais dû me contenter de ce qu'il m'avait donné. Pourquoi avais-je été aussi avide ? Pourquoi avais-je voulu venir ici ? Mon confort n'importait pas, si Astre me quittait.

Me quittait.

Cette image était si horrible que je sentis d'autres larmes paniquées perler au coin de mes yeux.

— Neige, répéta-t-il en hésitant, je... Tu... Tu... Tu es... Raaaaah, pourquoi est-ce si compliqué ?!

— De quoi ? balbutiai-je en m'attendant au pire.

— Je voulais te dire que je... enfin... voilà. Tu comprends ?

Je secouais la tête en signe de dénégation. J'avais bien trop peur de comprendre – j'étais terrifié – à l'idée de comprendre, mais je ne voulais pas tirer de conclusions sans en être certains.

Il gémit, visiblement frustré.

— Je parlais avec Antoine, tenta-t-il d'expliquer, et il m'a aidé à... heu... comprendre des choses.

— Antoine ?

Que venait-il faire là-dedans ?

— Oui, reprit-il en tentant de paraître plus assuré. J'ai compris ce que tu m'as dit et je voulais te répondre. Je voulais te dire... Neige...

Il posa une main sur ma joue. Cette chaleur m'aspira tout entier.

— Je voulais te dire, bégaya-t-il, que je... je... Pour moi, tu... Enfin...

J'étais perdu.

Au comble de la frustration, il se rabattit sur le langage des loups et m'envoya de plein fouet une masse d'émotion bouillonnante si compacte, si massive, que je reculais d'un pas, légèrement sonné.

— Que... lâchais-je, incapable de discerner quoi que ce soit dans cet océan en pleine tempête.

Son esprit se referma. Son absence faillit me faire éclater en sanglot.

— Oh, je suis nul... gémit-il. Nul, nul, nul...

— Astre ?! m'alarmai-je. Astre, que se passe-t-il ? Tu vas bien ? Je suis désolé, tellement désolé, c'est moi qui suis nul et idiot et ingrat et... Nous aurions dû partir plus tôt, je suis désolé, désolé...

Son visage s'empourpra de fureur. Je vacillai, comme si j'avais été frappé, avant de comprendre que c'était contre lui qu'il était en colère.

— Je suis nul, répéta-t-il, j'essaie de te dire quelque chose d'important et je n'arrive qu'à t'attrister...

Je m'approchai de lui, pris sa main et la reposait sur ma joue. Il sourit doucement.

— Je suis à toi, Astre, murmurai-je. Tu le sais, n'est-ce pas ?

— Oui, souffla-t-il en avançant son visage tout près du mien. Oui, Neige.

— Ne me laisse pas...

— Jamais.

J'étais soudain incroyablement conscient de sa proximité, de la chaleur de son corps, de son parfum, du grain de sa peau...

— Nous sommes seuls ici, remarquai-je avec un sourire en coin. C'est dangereux, non ? Imagine, si je venais à croiser un grand méchant loup...

Je sentis la paume de sa main frémir sur ma joue et ses iris s'étrécirent légèrement, trahissant mon désir. Prends-moi ! hurlai-je dans ma tête. Je voulais être au plus près de lui, le serrer contre moi, me donner à lui et tout oublier au profit du plaisir.

Un instant, je crus qu'il allait me plaquer contre le bureau et me déshabiller. Mais au lieu de se précipiter pour me renverser, comme d'habitude, il continua à s'approcher de moi, centimètre par centimètre, tandis que son pouce caressait ma joue.

Mon cœur trembla, tout ébranlé.

Ce n'était pas une avance érotique. C'était...

— Astre ? soufflai-je.

Un oiseau furieux s'était visiblement coincé dans ma poitrine. Il battait des ailes à une vitesse folle en se cognant dans les recoins de ma cage thoracique.

— Neige... répondit-il dans un souffle en posant ses lèvres sur les miennes.

Il m'embrassa lentement, comme s'il savourait le simple goût de ma peau. C'était doux, très doux, et très tendre.

Était-ce possible, après tout ce que j'avais fait... Était-ce possible qu'il cherche à m'avouer...

Je dû me tendre inconsciemment car il se recula, l'air bouleversé.

— Ce n'était pas bien, n'est-ce pas ? Gémit-il en croisant les bras sur sa poitrine, un signe de vulnérabilité que je ne l'avais jamais vu arborer.

— Quoi ? balbutiai-je, encore complètement chamboulé par ce baiser, ce centième, millième baiser, qui était pourtant, quelque part, notre premier.

Et fit vole face et s'enfuit, comme un animal face à un trop grand danger.

— Astre ! criai-je en partant aussitôt à sa poursuite. Astre, attends ! ATTENDS !

Il voulait me dire... Il voulait me dire... Et je l'avais fait fuir, comme un imbécile !

— Astre ! criai-je encore.

Mais le temps que j'arrive au bout croisement, le couloir était déjà vide. Mon loup courrait aussi vite que le vent.

— Nom de... marmonnai-je en nous maudissant tous les deux.

Le couloir se séparait en trois. L'un montant, l'autre descendant, une autre allant tout droit. Une porte était aussi entrouverte sur ma gauche. Je m'en approchai et passai ma tête dans l'embrasure. Elle donnait sur un couloir plus petit qui descendait en s'enroulant dans l'obscurité.

Un éclat de pas, suivit de voix, me parvint d'en bas. Sans réfléchir, je me précipitai en avant et dévalais les marches. Pourvu que je parvienne à le rattraper ! Je comptais le coincer quelques parts et lui avouer mes quatre vérités, qui impliquaient beaucoup d'amour et de regrets.

Les éclats de voix se précisèrent. Ce n'était pas Astre, hélas, mais Antoine. Serait-il ensemble ? Ils trainaient toujours tous les deux, dernièrement. J'accélérai encore un peu en me concentrant pour ne pas rater une marche.

Il commençait à faire froid, vraiment froid. Je devais avoir dépassé le niveau du rez-de-chaussé.

Enfin, les dernières marches se dessinèrent, suivit d'une porte. La voix d'Antoine me parvint de nouveau, plus discernable, et plus chargée de colère.

— Carol, soit un peu raisonnable ! tonna-t-il. Nous ne savons rien de cet objet ! L'utiliser, et l'utiliser ici, pourrait tous nous détruire !

— Il a raison, intervint Annuka. Carol, j'ai ramené cette relique des Anciens parce que je savais qu'elle vous intéresserait, mais je ne pensais pas que vous songeriez à l'utiliser en plein cœur de la ville...

— Réfléchissez, vous deux ! répliqua le seigneur, visiblement exaspéré. Les Anciens avaient un pouvoir sur le monde que nous n'imaginons même pas ! Et si cette machine nous aidait à combattre les Chasseurs ? Auriez-vous oublié ce qu'ils ont fait à mes parents ? Et à ta jambe, Antoine ? Tu n'as pas envie de te venger, parfois ?

— Pas si cela pourrait blesser quelqu'un, et surtout si ce quelqu'un est toi ! répliqua le bibliothécaire avec, dans la voix, une note qui me fit de la peine.

Je savais que Carol n'entendrait pas cette note. Il était naturellement très peu doué pour comprendre les gens et ses maigres capacités s'évanouissaient dès qu'il commençait à se passionner pour quoi que ce soit. Son esprit ne fonctionnait simplement pas comme celui de la plupart des autres humains.

— Je n'ai pas besoin que tu me protèges, Antoine ! répondit-il froidement. Je n'ai besoin de personne !

— Carol... commença son ami avant de s'arrêter net.

Le caillou dans lequel je venais de taper y était certainement pour quelque chose.

J'hésitai un bref instant à faire volte-face et partir en courant, mais il fallait être réaliste : ma vitesse de course égalait celle d'un manchot aveugle.

Annuka ouvrit brusquement la porte, un poignard à la main et une expression terrifiante sur les traits. Je dégluti, figé. Au bout d'une ou deux seconde, elle me reconnu et se détendit, mais ne rangea pas son couteau.

— Neige ? Que fais-tu ici ?

— Je ne voulais pas vous interrompre ou vous espionner, promis-je d'un ton que j'espérai convaincant, j'étais à la recherche d'Astre et j'ai entendu des voix...

Un éclair de suspicion passa dans les yeux de l'humaine. Mon cœur rata un battement. C'était la première fois qu'un ami devenait un potentiel ennemi et l'expérience n'était pas réellement plaisante.

— Neige ! s'exclama Carol en sautillant pour voir par-dessus l'épaule d'Annuka. Enfin quelqu'un de sensé ! Laisse-le passer Annuka, je suis certain que ça va l'intéresser !

— Carol ! s'étouffa Antoine. Il n'a que quinze ans et on ne sait pas encore si cet objet est dangereux !

— Il n'a peut-être que quinze ans, rétorqua le seigneur en me prenant par la manche pour m'attirer à l'intérieur, mais il en sait déjà plus que toi !

Affreusement gêné, je pénétrai dans la pièce. Il s'agissait d'une cave aux dimensions vertigineuses. De grandes étagères étaient posées contre les murs, regorgeant d'objet étranges. Malgré moi, ma curiosité me poussa à faire quelques pas vers eux. Leurs formes étaient trop bien définies pour être naturelles. Ronds, carrés, rectangles parfaits, complètement lisses ou gravés de motifs inconnus aux contours presque effacés... Une drôle de sensation me serra la gorge, comme de la nostalgie. Pourquoi ?

Et puis, soudain, je me rendis compte que j'agissais exactement comme Carol – ou comme je l'avais fait depuis que j'étais arrivé ici – en ignorant mes amis pour mes sujets d'étude. J'avais déjà fait assez de mal à Astre comme ça. D'ailleurs, où était-il, mon loup ? Que faisais-je ici, au lieu de repartir à sa recherche ?

Il fallait que je le retrouve, que je m'assure qu'il aille bien, et que je lui fasse comprendre qu'il pouvait me dire tout ce qu'il souhaitait.

J'ouvrais la bouche pour annoncer mon départ lorsque Carol m'attrapa de nouveau par le bras pour me tirer vers une table supportant une sorte de boite étrange, un peu plus large que ma tête, seulement épaisse de quelques centimètres. Une surface rectangulaire légèrement enfoncée était gravée sur une de ses face, comme un cadre. Trois petits ronds ornaient le cadre, en bas à droite. Je ne connaissais pas la matière dont il était constitué, quelque chose de noir et de lisse qui ne paraissait pas très solide. Je ressentis de nouveau cette inexplicable nostalgie sentit plus tôt.

— Tu te rends compte, Neige ! s'enthousiasma Carol sans me lâcher. Un véritable artéfact des Anciens ! Annuka me l'a ramené de sa dernière expédition ! Je l'ai étudié sous toutes ses coutures et je crois que j'ai vaguement compris comment le faire fonctionner !

Je me tournai vers l'exploratrice, l'air interrogateur.

— Je l'ai trouvé dans un bâtiment souterrain, expliqua-t-elle à regret, en plein milieu du Désert Perdu. Cela faisait longtemps que j'entendais des rumeurs à propos d'une citée en ruines au cœur du désert et j'ai décidé de tenter ma chance... J'ai mis des semaines à la trouver. J'ai même faillis y rester plusieurs fois. Elle se trouvait pile au centre du désert, à l'endroit le plus difficile d'accès... En fait de citée, il s'agissait plus d'une forteresse. Hélas, je n'avais pratiquement plus d'eau lorsque je l'ai atteinte et je ne pouvais pas rester longtemps. Je me suis contenté d'exporer rapidement le rez-de-chaussé. J'y est trouvé des salles contenant des dizaines et des dizaines de ces objets rectangulaires, plutôt bien conservés par la sécheresse de l'air. Vous n'imaginez pas la peine que je me suis donné pour le ramener !

— Crois bien que j'apprécie ! répondit Carol, des étoiles dans les yeux. Oh, bon sang, Antoine, cesse de faire cette tête ! Tu as si peur que ça ? Tu vois, c'est pour ça que je ne t'en ai pas parlé avant, tu n'as jamais aimé les Anciens.

Je déglutis. J'avais très envie de disparaître dans le sol. La main de Carol, qui tenait toujours mon bras, commençait à me faire mal.

— Les Anciens n'ont rien à voir là-dedans, rétorqua son ami, même si je n'ai effectivement pas l'impression qu'ils aient incarnés un bel exemple à suivre. Ce qui me dérange, c'est la façon dont tu les étudies, eux et la magie, sans aucune considérations pour les conséquences ! Tu es un bon seigneur lorsque tu t'occupes de tes sujets, toujours à l'écoute, sage, juste, raisonnable... Mais dès que la magie ou les Anciens entre en jeux, tu perds toute mesure ! Cela fait trois semaines que tes conseillers se demandent où tu es passé ! J'ai dû répandre la rumeur que tu étais malade pour qu'ils ne pensent pas que tu les avais abandonnés ! Tu te rends comptes ?

Mauvaise tactique, soupirai-je intérieurement.

— Je t'ai connu moins ennuyant, rétorqua Carol d'une voix sèche qui m'indiqua que l'attaque avait touché une corde sensible. Et toi, si tu te passionnais pour quelque chose pour changer ? Tu n'as pas peur de mourir tout desséché, à force d'être si sérieux et si raisonnable ?!

— Carol ! s'offusqua Antoine, blessé. Depuis le temps que nous nous connaissons, comment peux-tu dire que je ne me passionne pour rien ?

Il baissa les yeux et recula d'un pas, les lèvres serrées, sans voir l'air de regret qui passa sur le visage de Carol. Je retins un soupir de compassion, pour Antoine, mais aussi pour le seigneur, car je savais ce que c'était se rendre compte qu'on venait de faire du mal ceux qui comptaient le plus à nos yeux.

— Es-tu seulement au courant de ce que j'aime ? demanda le bibliothécaire d'une toute petite voix. Est-ce que tu t'intéresses à moi, parfois ? Tu ne me vois réellement que comme un rabat-joie ?

— Non, non, Antoine, répondit Carol, catastrophé, je veux dire... Oui, bien sûr, je sais ce que tu aimes, et je sais que tu n'es pas un rabat-joie, et...

Les mots se coincèrent dans sa gorge. Il me lâcha et s'avança vers son ami, la main tendue...

Mais à cet instant, comme s'il avait senti que quelque chose se produisait, l'objet des Anciens émit un très léger grésillement. Carol, qui se trouvait juste à côté, tourna instinctivement la tête dans sa direction. Lorsqu'il revint vers Antoine, il était trop tard. Le bibliothécaire, très pâle, semblait sur le point de pleurer.

— Si l'artefact est plus important, souffla-t-il, alors je te laisse avec l'artefact...

Il attendit une seconde, laissant à Carol une ultime chance, mais, le seigneur désemparé ne le comprit que trop tard.

— Antoine ! cria-t-il à l'ombre qui fuyait.

C'était, décidément, la journée des catastrophes et des discussions manquées.

Antoine disparu. Carol resta là, un bras tendit, un peu choqué. Je pouvais presque sentir la panique qui commençait à l'envahir. Il plaqua les mains sur sa bouche et commença à faire les cents pas à toute allure, visiblement fébrile, tremblant légèrement.

— Mon seigneur, déclara Annuka d'une voix glaciale en exécutant une révérence compliquée. Je ne voudrai pas vous gêner plus longtemps dans l'étude de cet objet, apparemment si important pour vous...

Elle claqua les talons et quitta la pièce en coup de vent.

Les yeux mouillés de larmes, la respiration erratique, Carol tourna la tête vers moi, attendant visiblement que je m'en aille aussi.

Je ne bougeai pas.

Il lâcha un sanglot, s'adossa au mur et se laissa tomber au sol, les genoux ramenés contre la poitrine. Il semblait sur le point de faire une crise de panique.

Je soupirai et m'accroupis en face de lui, la main posée sur son épaule.

— Ça va aller, lui certifiai-je, conscient de ne pas avoir grande crédibilité. Ça va aller.

Il cessa de trembler, mais n'avait pas l'air d'aller beaucoup mieux pour autant.

— Oh, Neige... gémit-il. Pourquoi tout est-il toujours si compliqué avec les gens ?

— Je ne sais pas, Carol, répondis-je doucement. Mais ce n'est pas si grave, vous pouvez encore vous rattraper.

Du moins, j'espère, songeai-je tristement en pensant à mes propres erreurs.

— Pardon, s'excusa-t-il dans un sanglot refoulé. C'est moi l'adulte ici, c'est moi qui devrais t'aider et te protéger...

Je songeai aux villageois de mon enfance, qui avaient voulu ma mort. Je songeai à Mère-de-tous, qui nous avait sacrifié au bien de sa Meute. Je songeai à Solana, qui n'avait rien pu faire contre le Chasseur. Les bords de ma vision devinrent flou.

— Ne vous en faite pas, soufflai-je malgré moi. J'ai appris très tôt que les adultes ne voulaient pas ou ne pouvaient pas me protéger.

Il secoua la tête au milieu de ses larmes.

— Des fois, Neige, tu as l'air bien plus mature que nous tous.

— Mais c'est faux, je fais des erreurs aussi stupides que... que...

— Que les miennes ?

— Exactement, acquiesçais-je avec un rire étranglé.

— Je crois que quelque chose ne tourne pas rond chez moi, soupira-t-il. Je suis bizarre. Mon esprit fonctionne différemment de celui des gens. Je suis sais pas comment quiconque pourrait...

— Vous aimer ? finis-je à sa place, en visualisant clairement ce que « quiconque » signifiait, c'est-à-dire un bibliothécaire en particulier.

Il se mordit la lèvre, incapable de continuer. À cet instant, le poids de mon chaperon rouge sur mes épaules me manqua terriblement. Pourquoi l'avais-je enlevé ? La réponse m'apparut d'elle-même, aussi évidente que cruelle : parce que j'avais cessé d'être fidèle à moi-même.

Et c'était assez.

Une sourde détermination m'envahit. Assez fuis. Je n'avais qu'une seule chose à faire, qu'une seule façon de rattraper mes erreurs.

Je me relevai.

— Dans le village où je suis né, déclarai-je d'une voix calme, on me traitait de monstre.

Carol leva sur moi des yeux stupéfait.

— De monstre ?! Toi ?!

— Parce que j'ai les cheveux aussi blancs que la neige et les yeux aussi rouges que le sang. Parce que je suis le fils d'un Chasseur, même si je n'en avais pas encore conscience. Et j'étais intimement convaincu que quelque chose n'était pas normal, pas correct chez moi. Je savais que personne ne pourrait m'aimer. Et puis...

— Et puis ? souffla le seigneur, même s'il avait probablement deviné la suite.

— Et puis Astre, bien sûr, répondis-je en posant inconsciemment la main sur mon cœur. Astre ne pense pas que je suis bizarre, ou que quelque chose ne va pas chez moi. Il m'aime. Il ne me l'a jamais dit, mais je le sais et j'ai été stupide de vouloir à tout prix l'entendre prononcer ces mots. Astre m'aime, et pas en dépit de ce que je suis, non, il m'aime pour ce que je suis, avec mes forces et mes failles. Il m'aime pour ma différence. Je suis certain qu'Antoine est pareil. S'il vous aime...

Je vis les yeux de Carol s'écarquiller sur ces derniers mots et sentis à quel point cette possibilité le bouleversait.

— S'il m'aimait...

Il resta un instant immobile, comme pétrifié par cette possibilité, puis sembla se réveiller d'un coup et sauta sur ses pieds.

— Je dois me rattraper ! s'exclama-t-il avec force. Je dois lui parler ! Tu as raison, Neige, c'est bien la seule chose qui compte en ce moment ! Je dois le rattraper, et je dois lui dire... Je dois tout réparer.

Il se précipita vers la sortie.

— Attendez ! criai-je pour l'arrêter.

Il pila net et se retourna, visiblement impatient d'exécuter son plan. Je respirai un grand coup. Il était temps de détruire ce qui restait de mensonges.

— J'ai encore quelque chose à vous dire, quelque chose que j'aurais dû vous avouer depuis le début. Je suis désolé, vraiment désolé. Je suis un sorcier. Et vous ne l'êtes pas.

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