Jack souffrait. Sa tête le lançait horriblement, mais il ne parvenait pas à se rappeler pourquoi. Sur sa joue gauche, il sentait quelque chose le picoter désagréablement. Le sol sous lui était froid et dur, et l'air sentait... il sentait... une odeur que Jack ne connaissait pas. Et pourtant, son instinct lui criait que ce n'était rien de bon.

Quand il ouvrit les yeux, Jack fut d'abord aveuglé par la lumière. Il se trouvait toujours dans le palais d'Elsa, et les murs de glace reflétaient la lumière comme un millier de miroirs, si bien que la lueur qui en résultait était éclatante, mais douloureuse pour la rétine du pauvre garçon.

Cependant, quand ses yeux furent enfin capables de voir, Jack poussa un cri et souhaita ne jamais les avoir ouverts.
Sous ses yeux, une centaine de cadavres jonchaient le sol. Le flocon qui l'ornait était à peine visible sous les litres de sang qui avaient coulé, et l'air sentait... le mort. Tout simplement. Ou plutôt, la centaine de morts.

Jack se dépêcha de se relever et plaqua sa main sur sa bouche pour étouffer le hoquet d'horreur qui l'avait saisi. Au milieu de ce carnage, l'immense lustre qui ornait habituellement le plafond de la pièce gisait en morceaux.

C'est alors que tout lui revint : après sa dispute avec Elsa, Jack s'était dirigé vers la mer, en colère et persuadé qu'il n'avait plus rien à faire sur ce continent. Mais sur le chemin, la tristesse l'avait gagné et il avait abandonné ce projet, se morfondant toute la journée sans vraiment savoir quoi faire. C'est uniquement à la tombée de la nuit qu'il s'était décidé à retourner voir Elsa, pressé par un mauvais pressentiment. Et la suite des événements lui avait donné raison.

Presque arrivé au château, il entendait des bruits de lutte, et sentait que de grandes réserves de magie étaient déployées. Elsa.
Il s'était précipité à l'intérieur du palais par le balcon dont la rambarde était complètement détruite. A l'intérieur, des corps jonchaient le sol, mais Jack était sûr qu'ils n'étaient pas morts. Ou alors peut-être deux ou trois, sur cent.

C'était affreux, mais rien n'expliquait que tous ces hommes, que Jack avaient vu vivants auparavant, soient désormais sous ses yeux, bel et bien morts.

En tous cas, sur le moment, il avait réussi à faire fi du décor, se concentrant uniquement sur Elsa.

Elsa, les cheveux en bataille, la mine ravagée par la colère et la haine. Elsa, une aura polaire autour d'elle, déclenchant admiration et crainte. Elsa, un poignard de glace à la main, prête à assassiner le dernier homme debout, que Jack identifia sans peine : c'était l'amant de la princesse Anna, la sœur d'Elsa. Le Prince Hans, s'il se souvenait bien.
Mais alors pourquoi le tuer ? Et pourquoi tous ces hommes armés dans le palais d'Elsa ?

Des milliers de questions avaient effleuré son esprit, mais Jack les avait reléguées à l'arrière-plan. Il ignorait ce que cet homme avait fait à Elsa pour qu'elle veuille l'assassiner, mais il ne pouvait pas laisser cela se produire. Elsa n'était pas une meurtrière. Il l'avait vu, il l'avait senti quand ils avaient passé du temps ensemble la veille : Elsa était quelqu'un de bien, ravagé par la tristesse, la solitude et une colère sourde. Et tout ce qu'elle subissait, tout ce qu'elle faisait, c'était pour protéger les autres, et surtout, au nom de l'amour qu'elle portait à sa sœur.
Il ne pouvait pas la laisser faire quelque chose ainsi, sous le coup de la colère, en sachant qu'elle le regretterait toute sa vie.

Mais le poignard était là, dans sa main, et il était prêt à s'abattre. Alors, dans un élan de désespoir, Jack avait crié :
"Elsa ! Elsa, ne fais pas ça. S'il te plaît. Regarde-toi."
Le temps lui avait semblé s'arrêter tandis qu'il la voyait chanceler. Son bras, qui tenait l'arme, s'était baissé, lentement, très lentement, avant de lâcher le poignard. Elle s'était retournée pour examiner la pièce, et son esprit semblait se réveiller. Et sans que Jack n'y soit préparé, elle avait levé les yeux vers lui pour lui jeter un regard désespéré, un regard dans lequel, l'espace d'un instant, le jeune homme avait eu peur de se noyer, tant ses abysses étaient noires et profondes. Et par pur instinct, il lui avait tendu la main.

"Elsa, avait-il chuchoté. Viens, s'il te plaît. Regarde-moi. Ça va aller, je te le promets."

Il ne voyait qu'elle, retenant sa respiration. Quand elle avait esquissé un pas vers lui, ça avait été comme un rayon de soleil perçant les nuages.

Puis Hans derrière elle lui avait fauché les jambes, et le choc d'Elsa contre le sol avait fait céder le lustre déjà bien usé par la bataille. Des éclats de glace avaient volé en tous sens. Jack en plein milieu de la pièce, avait tenté de s'écarter, mais il avait glissé et après... Il avait sûrement dû se cogner la tête et s'assommer, car après, c'était le noir complet.

Tant de choses s'étaient produites en si peu de temps...
Mais maintenant qu'il était réveillé, Elsa n'était plus là, et le jour s'était levé. Hans aussi, avait disparu.

Jack se frotta la joue gauche, et un peu de sang resta sur ses doigts. Ce n'était qu'une égratignure, mais ça le picotait de façon désagréable. Heureusement, il savait que, étant un esprit immortel, sa blessure se refermerait bien plus vite que la normale.

La première question qu'il se posa était : pourquoi ces hommes étaient-ils tous morts ? Qu'avait-il bien pu se passer pendant qu'il était assommé ?
Il était extrêmement probable que certains aient été tués sur le coup quand le lustre était tombé. C'était l'histoire de quatre ou cinq hommes. Deux ou trois avaient été tués par Elsa.
Jack avait une explication pour la mort de huit hommes, pas plus. Et pourtant, c'était sans conteste une centaine de cadavres qui se tenait devant lui. C'était à n'y rien comprendre.

Jack tenta de récapituler une nouvelle fois.
Elsa s'était déchaînée : Trois hommes morts, des blessés et des hommes inconscients.
Le lustre était tombé : Cinq hommes morts, des blessés.
Elsa avait perdu connaissance. Jack avait perdu connaissance. Hans, quant à lui... Au fait, qu'était-il advenu de Hans ?
Jack fronça les sourcils.
Il lui semblait que Hans, étant près du mur, ne pouvait avoir été touché par le lustre. Il restait donc la dernière personne debout dans ce carnage.

Et quand Jack se réveille, il a disparu avec la Reine, et les survivants sont morts ?
C'était suspect. Extrêmement suspect.

Même si cela le répugnait au plus haut point, Jack devait en avoir le cœur net. Il s'approcha des cadavres, et en arriva à ce constat : ils avaient tous été poignardés en plein cœur.

Hans aurait donc poignardé tous ses hommes, les uns après les autres ? Mais c'était complètement affreux, complètement inhumain ! Pourquoi aurait-il fait cela ?

Cependant, c'était la seule explication plausible.

Jack avait besoin d'air frais. Toutes ces intrigues lui embrouillaient le cerveau, et la puanteur dégagée par les corps sans vie ne l'aidait pas. Il devait sortir de là.

Il s'envola par la porte du balcon, et put, enfin, respirer l'air vivifiant de la montagne une nouvelle fois. Perché dans le vide, il s'accorda une pause avant qu'une nouvelle question ne s'impose à lui.
Que devait-il faire, maintenant ?
Une partie de lui lui ordonnait de rentrer en Iroquoisie et de les laisser se débrouiller, parce qu'après tout, ce n'était pas ses affaires et que ça l'embêtait. Il pourrait très bien retourner là-bas et reprendre sa petite existence tranquille, faire des batailles de boules de neige et continuer à espérer qu'un jour, un enfant s'aperçoive enfin de son existence.
Mais une autre part de lui savait qu'il ne pourrait vivre tranquillement sans connaître le fin mot de cette histoire. Il avait besoin de comprendre, et il en avait assez de son existence monotone. Il avait besoin d'une raison de vivre.
Et surtout, il était incapable de s'en aller alors qu'il avait découvert Elsa, la seule personne capable de le voir. Elsa, qui avait les mêmes pouvoirs que lui. Elsa, qui le comprenait si bien et qu'il comprenait en retour. Il ne pouvait pas partir. Il devait l'aider.
Mais comment ? Il ne savait même pas ce qu'il lui était arrivé. S'il voulait l'aider, il allait devoir la retrouver. Il s'éleva plus haut dans le ciel pour commencer ses recherches.

Décidément, il passait son temps à lui courir après.
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Hellooo !
Un nouveau chapitre, une semaine tout pile après le précédent ! Vous y croyez, vous ?
Enfin bref, il ne se passe pas grand-chose de nouveau, mais c'était tout de même indispensable à la suite de l'histoire. N'hésitez pas à me laisser votre avis, ça m'intéresse toujours !
A+
Athésia ❤️