Chapitre 7
Godefroy avait appréhendé l'individu qui revendait les vélos volés sur internet. Il se doutait qu'il n'était pas seul derrière ce trafic, mais l'homme d'une quarantaine d'années ne comptait pas dénoncer ses complices aussi facilement.
— Où trouvez-vous les vélos que vous revendez ?
— En bas de chez moi, répondit l'homme fier de lui.
Godefroy avait l'impression de perdre son temps en interrogeant ce petit malin sur des vélos au lieu de participer à l'enquête sur l'étripeur.
— Et ils arrivent comme par magie ?
— Faut croire que le Père Noël est généreux avec moi.
— Très bien, acquiesça Godefroy avec un sourire carnassier. Je résume : vous revendez des vélos qui ne vous appartiennent pas, qui sont déposés devant chez vous par le Père Noël, énuméra-t-il en relisant ses notes. Avec ça vous aurez sûrement le droit à une cellule avec vue sur la cour.
— Quoi ? s'interloqua l'homme persuadé que sa combine le mettait hors de cause. Mais j'ai rien volé.
— Vous revendez des vélos qui ne vous appartiennent pas, comment vous appelez ça vous ?
— Mais je ne les ai pas volés, ce n'est pas moi.
— Je ne suis pas sûr que le juge soit du même avis et il a de très bonne relation avec le Père Noël, je doute qu'il l'inculpe, ironisa Godefroy.
L'homme tapa du poing sur la table et se décida à passer aux aveux.
Au moins une enquête de clôturer pensa le lieutenant Delaplace en envoyant son compte rendu au Commissaire. Il pouvait enfin retourner à l'enquête de l'étripeur. Des photographies avaient été ajoutées au dossier sur le site d'interpole. Il lui paraissait clair qu'il s'agissait bien d'une nouvelle victime du tueur. On y voyait un homme d'une trentaine d'années couchés sur son lit le torse et l'abdomen ouvert et entièrement vidé de ses organes, la boîte crânienne découpée, le cerveau manquant et cela sans aucune éclaboussure de sang. On pourrait trouver sa poétique s'il ne s'agissait pas du cadavre d'un homme. Comment ne pas être obsédé par un crime aussi bien mené. Les quelques théories émises par les enquêteurs en charge parlaient d'un groupuscule volant et revendant les organes sur le marché noir, ce qui ressemblait beaucoup à son histoire de vélos volés, mais en beaucoup plus organisé. Le ou les tueurs étaient certainement des médecins formés à la chirurgie ce qui expliquait leurs précisions dans la découpe des corps humains. Mais rien n'expliquait l'absence de sang, même certains pensaient que le corps était déplacé après opération. Ce qui pouvait expliquer également l'absence de traces quelconques laissées par le tueur. Comme d'habitude, les enquêteurs ne semblaient pas avoir la moindre idée de l'arme du crime, à moins que cette information n'apparaisse pas sur le site. En effet, Godefroy n'avait pas accès à toute l'avancée de l'enquête. Il devait se contenter de ce que les différents commissariats partout en Europe acceptait de partager pour élaborer ses propres théories.
Plus il lisait et relisait les comptes rendus d'enquête, plus il visionnait les preuves, plus il était convaincu qu'il s'agissait d'un rite surement sectaire qui se propageait dans toute l'Europe. Il avait essayé d'en parler à ses supérieurs, mais on lui avait ri au nez en lui rappelant qu'il ferait mieux de s'occuper d'enquête à son niveau et de laisser faire les experts. Pour eux, l'idée qu'une secte soit derrière tout ça était bien trop absurde.
Godefroy imprima le dossier d'Interpole, récupéra les feuilles et les amena chez lui pour pouvoir y réfléchir posément, loin du brouhaha du commissariat où il avait toujours l'impression qu'on se moquait de lui.
Quand il passa le pas de la porte de son deux pièces, Goldy lui fit la fête, heureuse de retrouver son maitre. Après l'avoir caressé, il jeta ses affaires sur la table de la salle à manger, saisit la laisse et sortit accompagné de la belle chienne pour une longue balade. Il prit sa voiture pour sortir de la ville et laisser Goldy courir dans les champs.
Il en profita pour réfléchir au dernier crime de l'étripeur. D'après les quelques informations qu'il avait pu récolter, la dernière victime était un homme d'une trentaine d'années bien tassée, célibataire, travaillant dans une grande entreprise et se préparant à partir en voyage à Dubaï. Les victimes de l'étripeur pouvaient être très différentes, seul le modus operandi rester plus ou moins le même. Il y avait des jeunes, des moins jeunes, des hommes, des femmes, des sportifs, des opposants politiques, des messieurs et mesdames tout le monde. Il était difficile de trouver un mobile. Les premiers meurtres lui étant attribués remontaient officiellement à 2003. En quatorze ans, il y avait eu cent trois meurtres recensés, cent quatre avec celui de Bruxelles. Parfois plusieurs la même semaine et des pauses de plusieurs mois. Les enquêteurs supposaient qu'il répondait à la demande du marché noir de ventes d'organes, ou à des pulsions de meurtre soudaine. Godefroy n'était pas d'accord avec ces deux théories, mais il avait tout au temps de mal à justifier ses théories à lui. Si seulement on l'avait laissé enquêter, il était persuadé qu'il serait sur le point de trouver l'étripeur.
Il avait de plus en plus l'impression que cette enquête était une blague et que les enquêteurs ne faisaient que constater les meurtres, les référencer, mais qu'ils ne menaient pas réellement l'enquête. Est-ce que cela était dû à une absence de communication entre les divers services de police ? Ou à une pression quelconque, politique ou économique ? Il n'en avait aucune idée, mais ne pouvait pas imaginer que tous les officiers des forces de l'ordre puissent être corrompu.
Godefroy observa au loin Goldy qui cherchait des lièvres, il l'appela, la chienne eut du mal à résister à son instinct de chasseur, mais revint finalement aux pieds de son maitre. Il la félicita et pris un chemin au travers d'un petit bois où la chienne trouva de nouvelles traces d'un animal à chasser. La voir si enthousiaste à cette promenade qui n'avait rien de spécial réchauffa le cœur du policier. Son père était déjà malade quand il l'avait adoptée, Godefroy était persuadé qu'il l'avait fait simplement pour pouvoir lui laisser. Il ne voulait pas que son fils unique reste seul après sa mort. Il lui en avait voulu quelques temps, jusqu'à ce que la chienne se love dans ses bras en plein milieu de la nuit alors qu'il venait de se réveiller en sueur après avoir rêvé une énième fois de la mort de ses parents. Il avait pleuré, elle l'avait consolé.
Après une bonne heure de promenade où il avait observé Goldy avec amour, Godefroy pensait toujours à l'étripeur, mais il était plus apaisé, elle avait ce pouvoir sur lui. Son père avait eu raison de lui offrir ce chien.
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