Chapitre 12
Vendredi soir, Ylena et Maple discutèrent par SMS, ce qui était assez nouveau pour la seconde. D'ordinaire, elle n'avait pas de réelle conversation par messages, ceux qu'elle échangeait était souvent de nature factuelle.
L'étudiante s'inquiétait de la situation entre Maple et sa sœur, elle espérait que les choses allaient vite s'améliorer et ne pouvait s'empêcher de se sentir coupable.
« Ne t'en fais pas. On se dispute souvent et ce n'est jamais rien de grave. D'ici une semaine, on aura oublié et on sera de nouveau les meilleures sœurs du monde. » avait envoyé Maple.
Pour changer de sujet, Ylena lui avait parlé de son cours de société moderne et du sujet de leur exposé. Ils avaient choisi de parler d'une affaire de crime qui sévissait depuis plus dix ans et qui n'avait pas encore été résolu, le meurtrier avait été surnommé l'étripeur. En lisant son message, Maple eut une grimace, elle voulut la dissuader de travailler sur ce thème qu'elle qualifiait de glauque, mais Ylena était déjà très enthousiasmée par les informations qu'elle avait pues glaner.
Le lendemain, elles se retrouvèrent pour une sortie qu'elles avaient estimée d'intello. Elles visitèrent la nouvelle collection du musée d'arts contemporains. Ylena fut particulièrement attendri par la sensibilité de Maple face à certaine œuvre. Elle l'observait contempler une peinture, son visage prenant un air sérieux, alors que son regard s'illuminait. Elle restait silencieuse, ses doigts glissant subtilement dans le vide alors qu'elle détaillait l'œuvre, comme si elle s'imaginait la toucher. Ylena ne dit rien de ce spectacle qui l'émerveillait, elle ne voulait pas interrompre ce moment de grâce et de contemplation.
Les choses se passaient particulièrement bien entre elles. Plus elles apprenaient à se connaitre, plus elles s'appréciaient. Elles étaient sur un petit nuage, rougissant dès que l'autre prononcé un compliment, patientant pour pouvoir s'échanger de doux baisers.
Les amis d'Ylena appréciaient aussi beaucoup cette relation naissante qui leur donnait matière pour se moquer gentiment de leur ami et de son expression niaise lorsqu'elle voyait, entendait ou simplement pensait à Maple.
Au cours d'ethnologie, Ylena n'arriva pas en retard et s'installa, le rouge aux joues, à côté de Maple. Elles s'échangèrent un petit salut timide, mais ne s'embrassèrent pas, l'étudiante ayant appris que sa nouvelle petite amie n'aimait pas trop se montrer démonstrative en public.
A la fin de leur cours, Maple proposa à Ylena qu'elles sortent le weekend prochain et que cette fois-ci elles partagent un vrai premier rencard. L'étudiante était flattée par cette invitation, mais elle dut décliner.
— Je vais chez mon père ce weekend, désolée.
— Ce n'est pas grave, dit Maple quand même un peu peinée. On se fait ça le weekend suivant si ça te dit.
— Avec plaisir. Ce weekend on pourra quand même s'appeler et s'envoyer des messages.
Maple se sentait comme une adolescente qui vivait son premier amour. C'était un peu le cas, elle avait eu d'autres petits amis par le passé, mais il n'y avait jamais rien eu de sentimental. C'était quelque chose qu'elle évitait. Elle ne comprenait pas pourquoi les choses étaient différentes avec Ylena, pourquoi elle se laissait à l'apprécier, pourquoi elle envisageait plus. L'influence de son frère Kase ne devait pas y être étranger.
Le jeune homme s'inquiétait quelque peu pour sa sœur. Wila leur menait souvent la vie dure par son exigence. Elle l'était encore plus avec Maple. Petites, elles étaient très complices, fusionnelles, jusqu'à ce que quelque chose se brise entre elles. Kase ne doutait pas qu'elles s'aiment d'un amour inconditionnel, mais il savait qu'elles n'avaient pas une entière confiance l'une en l'autre. La benjamine estimait que sa sœur gâchait son potentiel, alors que Maple trouvait que Wila en faisait toujours trop, prenant des risques inutiles pouvant les mettre tous en danger. Mais pour le bien-être de sa fratrie, elle avait accepté de suivre les consignes de sa sœur. Ni Cimeon, ni Kase ne voulaient intervenir dans leur relation, mais le second avait bien compris qu'il était important que sa sœur puisse prendre ses distances de la famille et surtout de Wila pour son équilibre mental. Il la soutenait donc dans toutes ces entreprise, la rassurait, l'encourageait et peut-être même un peu plus, comme le pensait Maple.
A la fin de la semaine, Wila vint se réconcilier avec sa sœur, elle n'aimait pas qu'elles soient fâchées. Maple était assise dans le canapé du salon et lisait un livre. Sa sœur s'installa à côté d'elle, posa sa tête sur son épaule et survola les pages du regard.
— Ça se passe bien avec ta copine ? lui demanda-t-elle.
— Oui, répondu Maple sans quitter son livre du regard.
— Je suis désolée de t'avoir engueulé, j'ai dépassé les bornes, comme toujours.
Maple ferma son livre et regarda sa sœur la moue boudeuse. Au-dessus de son œil, Wila portait toujours des strips de sutures.
— C'est moi qui aie été imprudente, dit Maple, et je t'ai frappé, je n'aurais pas dû.
— Non, non, tu as bien le droit de t'amuser. C'est vrai que tu t'es laissé emporter, mais tu es rentré dès que tu t'en es rendu compte. Je n'aurais pas dû te tomber dessus comme ça et c'est moi qui t'ai frappée la première.
Maple serra sa sœur dans ses bras. Elle savait qu'elle était sincère comme elle l'était elle-même, mais n'ignorait pas que d'ici quelques semaines il pouvait y avoir une nouvelle dispute peut-être plus, peut-être moins violente et toujours pour des raisons plus ou moins absurdes.
Ylena était loin de toutes ces considérations, elle se demandait simplement si leur histoire allait durer.
Pendant son weekend chez son père, un repas de famille fut organisé. Elle aimait à croire que c'était sa présence qui engendrait ce genre de festivité, mais en réalité, tous les weekend sa famille se réunissait pour au moins un repas. Elle y croisa sa cousine Deborah qui l'interrogea en la voyant sans cesse penchée sur son téléphone portable.
— Il est possible que je sorte avec quelqu'un, dit-elle avec un grand sourire.
— C'est vrai ? Comment elle s'appelle ? Elle est jolie ? Comment vous vous êtes rencontré ? s'enthousiasma-t-elle. Je veux tout savoir.
— Elle s'appelle Maple. Elle a trois ans de plus que moi. Elle travaille dans l'entreprise de sa sœur, énuméra Ylena. Je l'ai rencontré en cours d'ethnologie qu'elle suit en candidat libre. Elle est intelligente, même un peu intello sur les bords. Et elle est magnifique, la plus belle femme que t'ai jamais vu.
— T'as une photo ?
— Non, elle aime pas trop ça, mais je peux te la décrire.
— Je suis tout ouïe.
— Elle est très grande et mince, elle doit faire pas loin d'un mètre quatre-vingts.
— T'es une lilliputienne à côté d'elle.
— Oui, dit Ylena le regard s'illuminant, mais ça ne me dérange pas du tout, au contraire. C'est une métisse avec de beaux cheveux châtains bouclés. Elle a de longs doigts fins, des lèvres douces et timides...
— Je crois que tu m'as donné assez de détails, coupa Deborah en mimant l'embarrassement. Ça fait combien de temps que tu es sur ton petit nuage ?
— Dix jours.
— C'est tout nouveau, je comprends les étoiles dans tes yeux, se moqua-t-elle.
Deborah était heureuse pour sa cousine et lui demanda si Maple n'était pas la jeune femme qu'Ylena avait remarqué à l'un de ses cours. Cette dernière rougit en acquiesçant, elle avait l'impression d'être dans une comédie romantique.
Au cours du dimanche, alors qu'elles s'étaient envoyées des messages tout le weekend, Maple commença à mettre plus de temps à répondre. Ylena ne s'en inquiéta pas, elle savait qu'elle n'avait pas l'habitude d'envoyer des messages. Elle supposait que Maple était occupé avec sa fratrie, d'autant plus qu'elle s'était réconciliée avec sa sœur. Mais le lundi, elle eut encore moins de nouvelle, Maple ne la prévenant même pas qu'elle ne serait pas en cours d'ethnologie le mardi matin suivant.
Après le cours, elle se décida à l'appeler pour savoir ce qui se passait, plaisantant sur le fait qu'elle lui devait un déjeuner. Maple ne rit pas :
— Désolée, je n'ai pas pu venir aujourd'hui, dit-elle d'une voix non assurée. Mmmh on verra plus tard pour le déjeuner si tu veux bien.
— Quelque chose ne va pas ? s'inquiéta Ylena.
— Euh non, enfin oui. Un petit problème familial.
— Tu veux m'en parler, je suis là pour toi.
— Non, enfin ce n'est rien. Mon frère s'est fait arrêter.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro