Chapitre 10
En s'installant à son bureau au cours d'ethnologie, Maple se sentait un peu anxieuse. Elle surveilla la porte, attendant l'arrivée d'Ylena. Quand elle entra dans la salle, elle lui jeta à peine un regard et s'installa avec ses amis. Comme elle n'avait pas eu des nouvelles de Maple depuis leur déjeuner, elle en avait conclu qu'elle n'était pas intéressée par l'idée d'approfondir leur relation.
Pendant la première partie du cours, elle essaya d'attraper Ylena du regard. Quand enfin leurs yeux se croisèrent, Maple lui lança un sourire timide auquel elle ne répondit pas. A la pause, elle alla la voir pour lui proposer un diner.
— Un diner ? demanda l'étudiante.
— Oui, jeudi par exemple, précisa Maple en essayant de cacher sa gêne alors que tous les amis d'Ylena la fixaient.
— Avec plaisir, répondit-elle en affichant un grand sourire.
Elles se retrouvèrent le jeudi suivant pour diner dans un restaurant du centre-ville.
— C'est insolite un rencard le jeudi soir, dit Ylena alors qu'elle inspectait le menu, enfin si c'est bien un rencard.
— Oui, c'en est un, répondit Maple avec un petit sourire. Pourquoi tu trouves ça bizarre ?
— Le jeudi c'est soirée étudiante, plein de jeunes adultes qui boivent jusqu'à plus soif pour noyer le stress des exams, tu sais ?
— Désolée, je suppose que tu avais quelque chose de prévue alors.
— Non rien de spécial. Mais tu savais pas pour les soirées étudiantes ? s'étonna Ylena.
— J'en ai entendu parler, avoua Maple, mais je n'en ai jamais fait.
— Tu étais une étudiante studieuse ? demanda-t-elle séduite par cette idée.
— Je n'ai pas vraiment été étudiante, j'ai appris sur le tas, j'avais plutôt des mentors, si on peut dire. C'est pour ça que je suis ces cours aujourd'hui.
— Donc, jamais aucune soirée étudiante ? redemanda-t-elle.
— Jamais aucune soirée d'impudicité, je sais, c'est la honte.
— Mais non pas du tout. Je trouve ça, un peu triste. Mais tu es étudiante aujourd'hui, on devrait y aller.
— Quoi ?
— Je t'emmène faire ta première soirée étudiante là tout de suite.
— Mais on n'a même pas commandé.
— Aller on change nos plans, dit Ylena avec enthousiasme se levant pour remettre sa veste. On remet ce rencard à plus tard, je t'emmène manger ailleurs et on fête ta première soirée étudiante.
Maple la suivit, s'excusa auprès du personnel du restaurant alors qu'Ylena l'entrainait à sa suite dans la rue qui voyait de plus en plus de jeunes gens l'envahir.
— Mais tu n'as pas cours demain matin ? demanda Maple.
— Non, pas avant quatorze heure, il n'y a pas beaucoup de cours le vendredi matin, c'est pour ça que les soirées étudiantes sont le jeudi, expliqua Ylena. Mais toi, peut-être que tu travailles, je suis désolée, je t'embarque comme ça mais...
— C'est bon, t'inquiète pas, coupa-t-elle, la boite est à ma sœur.
Elles se frayèrent un chemin parmi les petits attroupement de personnes de plus en plus nombreuses et s'arrêtèrent devant la fenêtre d'un kebab.
— On va manger un truc vite fait et je t'emmène à une soirée chez l'un de mes amis.
— Mais je ne suis pas invitée, s'inquiéta Maple.
— T'inquiète, t'es mon plus un. On se partage un Kebab ? Tu veux des frites ?
— Euh ouai.
— Rassure-moi, t'as déjà mangé un Kebab ?
— Bien sûr que oui, s'insurgea Maple, tu me prends pour qui ?
— Je sais pas, mais comme t'as jamais fait de soirées étudiantes, je pouvais me poser la question.
Elles mangèrent en marchant, traversèrent plusieurs rues, s'éloignant de plus en plus du centre-ville jusqu'à s'arrêter devant un HLM. Elles sonnèrent à l'interphone et Maple suivit Ylena dans la cage d'escalier qui les mena au cinquième étage. Elles entrèrent sans frapper dans un appartement où des dizaines de jeunes gens s'enjaillaient avec enthousiasme dont ses amis.
— Je vous présente Maple, dit-elle à ses amis qui savaient très bien de qui il s'agissait. C'est sa première soirée étudiante.
— Vraiment, bah ça se fête, dit Emilie. Alexis, interpella-t-elle, des shooters s'il te plait.
— Pas pour moi, dit Maple avec un sourire crispé.
— Tu ne bois pas d'alcool ? lui demanda Ylena.
— Si, mais...
— Juste un verre pour trinquer, dit Alexis avant de se présenter. Votre hôte pour ce soir.
Il les avait rejoints avec un plateau contenant six verres, du sel, des quartiers de citron vert et une bouteille de tequila.
— T'es pas obligée, dit Ylena à Maple.
— Un verre pour trinquer à ma première soirée étudiante.
Ce fut le premier verre de la soirée. Accompagné des amis d'Ylena, elles ne restèrent pas longtemps chez Alexis. Ils retournèrent au centre-ville et déambulèrent de bar en bar y annonçant que c'était la première soirée étudiante de Maple. Certains barmans généreux lui offraient un verre.
— Va falloir que je me calme, dit-elle à Ylena en la tenant par le poignet. Tu vas encore me prendre pour une extraterrestre, mais je n'ai jamais pris de cuite.
— Vraiment, tu es pleine de surprise, se moqua Ylena.
— Le mot clé de ma famille c'est « modération », expliqua-t-elle, faut jamais perdre le contrôle. Si Wila me voyait enchainer les verres comme ça, il y a de grandes chances qu'elle se mette en colère.
— Elle est sévère ta petite sœur.
— J'aime bien ton tatouage, dit Maple se rendant compte qu'elle en avait trop dit.
Elle redessina le contour du tatouage qu'Ylena avait sur le poignet gauche, une pleine lune cernée de deux croissants de lune.
— Hécate ? demanda-t-elle.
— Hécate ce n'est que le premier croissant de lune, elle représente la mort et la renaissance, expliqua Ylena. La pleine lune représente Séléné, symbolisant la maturité. Et le deuxième croissant de lune représente Artémis et symbolise la naissance. Cette triade lunaire est une représentation de la femme.
— Tu te moques de moi, mais t'es une intello.
— Je plaide coupable, dit-elle avec un grand sourire. Comment se passe ta première soirée étudiante ?
— Plutôt bien, je suis en bonne compagnie, l'alcool me rend euphorique, mais...
— Mais ?
— Ça manque un peu de musique, tu ne trouves pas ? expliqua Maple. J'imaginais beaucoup plus de musique.
— Madame veut de la musique, madame aura de la musique, dit Ylena en se levant. On va ailleurs.
Maple la suivit même si elle avait cessé de compter le nombre de fois où elles avaient changé d'établissement, perdant quelques-uns de leurs amis en route. Elles entrèrent sans difficulté dans un club où Maple semblait avoir quelques habitudes. Elles descendirent au sous-sol pour rejoindre la piste de danse.
Maple hésita à suivre Ylena qui dansait au milieu de la foule. Enivré autant par l'alcool que par l'étudiante, elle finit par la rejoindre sur la piste d'un pas décidé. Sans préambule, elle l'embrassa. Ylena en fut agréablement surprise.
Après quelques morceaux et plusieurs baisers, elles quittèrent le club. Elles s'embrassèrent dans la rue et rirent aux éclats. Cette soirée ressemblait vraiment à l'idée que se faisait Maple d'une soirée étudiante.
— Tu ne veux pas qu'on aille chez moi, proposa Ylena entre deux baisers.
Maple accepta en l'embrassant de plus belle. Elle se sentait bien et ne voyait aucune raison de mettre fin à cette soirée. Les lèvres d'Ylena étaient douces, ses baisers passionnés. Elle était particulièrement enthousiaste à découvrir si elle cachait d'autre tatouage.
Alors qu'elles arrivèrent en bas de l'immeuble d'Ylena, cette dernière eu un petit sursaut.
— Tu ne vas pas me croire, dit-elle, tu me fais vraiment beaucoup d'effet, mon soutif vient de péter.
Elle éclata de rire, mais Maple se figea.
— Euh, je crois que finalement, ça serait plus sérieux que je rentre chez moi.
— Quoi ? Quelque chose ne va pas ? s'inquiéta Ylena.
— Non, ça va, mais je pense que je vais rentrer.
— Tu vas pas conduire dans cet état.
— Non, bien sûr que non, dit Maple de plus en plus anxieuse. Je vais rentrer à pied.
— Mais qu'est-ce que tu dis ? s'inquiéta Ylena qui ne comprenait pas comment elles en étaient arrivées là. Tu peux dormir chez moi, on est pas obligé de... enfin tu vois.
— Non, t'inquiète, il n'y a pas de soucis, j'habite pas si loin que ça, dit-elle en commençant à marcher.
— Tu m'as dit que tu habitais à l'extérieur de la ville, dit-elle en la suivant.
— J'ai l'habitude, ne t'inquiète pas.
Ylena accepta de la laisser partir en lui faisant promettre de lui envoyer un message dès son arrivée chez elle. Dix minutes plus tard, elle reçut ledit message et se demanda si Maple n'avait pas pris sa voiture finalement. Elle était rentrée entière, n'avait pas eu d'accidents, Ylena décida de ne rien lui dire pour le moment et de lui souhaiter une bonne nuit.
— Tu rentres bien tard, dit Wila qui s'était levé en entendant sa sœur franchir la porte d'entrée. Tu t'es bien amusée.
— Oui, répondit Maple en essayant de dissimuler son ivresse.
— Vous avez fait quoi ?
— Euh, bah, on a diné et on est allé danser, bégaya-t-elle.
— Et je crois que tu as bu aussi.
— Si peu, menti-t-elle en voulant partir.
Wila la retenu par le bras, la fixant avec sévérité.
— Beaucoup trop.
— C'est bon Wila, ne joue pas les petits chefs avec moi, rétorqua Maple en se dégageant.
— Tu sais qu'on ne doit pas...
— Perdre le contrôle, coupa-t-elle. C'est bon, j'ai pas perdu le contrôle, j'ai simplement profité de ma soirée.
— Ah oui ? Et que penses-tu des sous-vêtements de ta copine ? dit Wila d'un ton de colère.
— C'est bon, laisse-moi tranquille, dit Maple en prenant la direction de sa chambre.
Wila la rattrapa, elle ne pouvait pas feindre l'indifférence, sa sœur était allée trop loin, elle avait pris trop de risques. Elle ne put se retenir de la gifler alors qu'une forte averse se fit entendre contre les fenêtres. Choquée, Maple repoussa violemment sa sœur, ce n'était pas la première fois qu'elles en venaient aux mains et ça ne serait pas la dernière fois.
— Tu veux me punir physiquement pour avoir bu quelques verres et avoir voulu coucher avec une jolie femme ? Mais pour qui tu te prends ? demanda Maple.
— Tu sais très bien que c'est plus que ça.
Cimeon et Kase firent leur apparition dans le couloir, se demandant s'ils devaient intervenir, mais ils n'avaient pas particulièrement envie de devenir des victimes collatérales. Alors qu'un coup de tonnerre se fit entendre dehors, Maple attrapa sa sœur par le col de son pyjama et lui donna un coup de tête violent, lui ouvrant l'arcade.
— Tu me reproches de ne pas savoir me maitriser, mais regarde toi, dit Maple avant de jeter sa sœur au sol.
Wila resta silencieuse au sol, sentant le sang couler sur son visage, alors que l'orage s'atténua pour disparaitre aussi vite qu'il était apparu.
Quelques minutes plus tard, quand Maple sorti de sa douche, elle entendit la voix d'un homme qu'elle supposa être un médecin ou un infirmier venu soigner l'arcade de sa sœur sans poser de question. Elle se sentait quelque peu coupable, mais ne s'en formalisa pas, elle savait qu'après deux ou trois jours de silence, ce conflit ridicule serait oublié.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro