Acte III - III
Watson, catastrophé, se tenait debout devant la chambre de Holmes.
Le détective était partit, emportant avec lui ses affaires de voyage.
Mais pour où ?
Au supplice, le docteur se triturait l'esprit et le cœur pour savoir pourquoi Holmes l'avait laissé en plan.
Mais se lamenter était inutile. Watson prit son chapeau, son manteau et sa pipe et descendit dans la rue héler un fiacre. Il avait dans l'idée d'aller faire un tour à Whitechapel, où les irréguliers, les enfants qui aidaient parfois Holmes dans ses affaires, pourraient peut-être l'éclairer...
Par prudence, il laissa passer les deux premiers cabs avant héler le troisième.
Il grimpa à l'intérieur et donna son adresse au chauffeur... Qui partit à toute berzingue dans la direction opposée.
Watson n'avait aucune idée de ce qui était en train de se passer, mais se maudit de ne pas avoir emmené son revolver.
Le fiacre s'arrêta enfin.
Il se trouvait en face de la gare Victoria.
Le cocher ouvrit la porte et, sans plus de cérémonie, entra avec lui à l'intérieur du fiacre, où il se laissa tomber avec un soupir de lassitude.
-Holmes ? Espéra Watson d'une toute petite voix.
-En effet, répondit l'autre. Mais pas celui que vous auriez aimé voir...
L'homme déroula la large écharpe qui lui cachait la moitié de la figure, révélant...
-Mycroft Holmes ?
Le docteur ouvrit des yeux ronds. Voir Mycroft Holmes conduire un fiacre et enlever des docteurs dans la rue, c'était tout aussi improbable que de voir la reine en maillot de bain.
-Nous n'avons pas de temps à perdre, lança l'aîné des Holmes avec l'autorité de celui qui se sait obéi. Sherlock a pris le train du continent à la poursuite de Moriarty.
-Moriarty... ragea Watson. Lui, encore lui !
-Oui... Mais cette fois, ajouta Mycroft d'un ton grave, j'ai peur que leur rencontre s'avère... Mortelle.
Le cœur de Watson rata un battement. Non ! Pas Holmes !
-Que dois-je faire ?
-Veillez sur lui. À tout prix. Vous êtes la dernière chose qui le retient encore. Arrêtez-le, pour l'amour de Dieu !
Watson prit le billet de train que lui tendait Mycroft et sauta hors du fiacre. Son poing s'était serré, froissant le papier.
-Rien ne m'empêchera de le ramener, lâcha-t-il d'une voix si menaçante que Moriarty, s'il eut été là, en aurait revu tout son plan.
Le docteur, retrouvant toute sa fureur d'ancien combattant, claqua la porte du fiacre et se rendit sur les quais.
Au dos de son billet était écrit quelques lignes, qu'il lut dans un état second.
« Prenez l'express du continent. Quatrième wagon. Compartiment réservé. Un abbé italien. »
Le docteur sauta dans le wagon concerné, et ouvrit une à une les portes des compartiments, sans prendre la peine de s'excuser auprès des passagers effrayés par la colère sur son visage.
Il ouvrit la dernière porte avec fracas, entra à l'intérieur, et la claqua dans son dos.
-Je suis désolé, mon fils... tenta l'abbé qui s'y trouvait dans un Anglais hésitant, mais ce wagon est réservé...
Watson prit l'abbé par le col, le souleva et, d'un même mouvement, lui arracha ses favoris et sa perruque grise. Holmes, car c'était bien lui, lui envoya un regard contrit... Avant de se prendre un magistral uppercut en pleine figure.
-Étais-ce vraiment nécessaire ? Grogna-t-il en se frottant la mâchoire, affalé sur la banquette.
-Oui, lâcha Watson d'un ton froid qui fit déglutir le détective.
Il n'avait jamais vu Watson dans une telle fureur.
-Comment avez-vous pu supposer... commença le docteur avant de s'étrangler de colère, les poings serrés.
-Je ne voulais pas vous impliquer...
-JE SUIS DÉJÀ IMPLIQUÉ ! Rugis le docteur en se saisissant de nouveau du col de Holmes pour le secouer comme un prunier.
Quelque chose tomba de la poche du détective. Il tenta de le ramasser avant que son ami ne le voit, mais Watson fut le plus rapide.
-Qu'est-ce que c'est que ça ? Demanda-t-il en examinant la fleur séchée qu'il venait de ramasser.
-De toute évidence, grommela Holmes, une rose.
La colère de Watson s'évanouit d'un coup, remplacé par une stupéfaction des plus totale.
-On dirait... La rose que je vous ai offerte.
-Pure coïncidence.
Je voulais emporter quelque chose de vous dans ce combat, faillit dire Holmes. Pour me souvenir de qui j'étais.
-Vous devriez vous asseoir, dit-il à la place. Le train va bientôt démarrer. Je suppose que vous ne voulez pas partir ?
-Vous supposez bien, répondit l'autre en prenant place en face de lui. Je ne vous lâcherais pas d'une seule semelle !
-Eh bien, voilà qui promet des nuits agitées...
-Holmes ! S'exclama Watson en rougissant violemment.
-Celle-là, Watson, je vous la devais !
Le docteur ne put s'en empêcher. Il explosa de rire.
Son rire résonna haut et fort dans le compartiment, rebondissant sur les cloisons comme sur le cœur de Holmes, qui ne put empêcher ses lèvres de suivre le mouvement.
-Où allons-nous ? Demanda le docteur, son hilarité enfin calmé.
-En Suisse !
-Mais nous ne sommes pas dans le bon train !
-Nous en changerons en court de route, Watson ! J'aimerais avoir quelques jours d'avance sur ma Némésis.
-Tant que vous ne me laissez pas derrière... répondit le docteur en se levant pour s'étirer. Mais je suis partit en hâte, il faudra que je me rachète une garde-robe au passage !
Mine de rien, il s'approcha de la porte du compartiment et poussa le loquet.
Puis il se laissa tomber à côté du détective et posa sa tête sur son épaule. Il glissa sa main dans celle de son ami, qui ne réagit pas, et la serra le plus fort possible, comme pour se persuader que Holmes était vraiment là, avec lui.
Même si ses pensées étaient à des miles et des miles de là. Toutes entières consacré à un autre homme. Un autre lieu.
Une autre fin.
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