Acte I - II
Deux semaines plus tard
Ça faisait près de trois jours que Holmes ne lui avait pas adressé la parole autrement que pour dire « bonjour » ou « bonne nuit ». Et pas forcément dans le bon ordre.
Watson ne savait plus quoi penser. Bien sûr, il détestait quand Holmes était dans un état d'abattement total, mais cette surexcitation était-elle vraiment meilleure pour lui ? Depuis qu'il avait résolu sa dernière enquête, il ne cessait d'entrer et sortir du 221, affublé de costumes toujours plus hétéroclites. Il prenait ses repas à pas d'heure, entre deux sorties, compulsait frénétiquement de vieux carnets de notes qu'il jetait ensuite négligemment à travers la pièce, et, à chaque fois que Watson lui posait une question, il lui envoyait un regard pétillant et répondait :
-J'ai flairé quelque chose, mon cher Watson ! J'ai flairé quelque chose !
Enfin, le soir du troisième jour, le brave docteur n'y tint plus. Il tendit la main pour attraper le bras de Holmes, qui allait encore sortir en coup de vent.
Le détective esquiva avec son habilité habituelle... Et Watson le saisit carrément à bras le corps pour le renverser sur le sofa.
-Watson ! S'exclama Holmes, légèrement choqué. Mais qu'est-ce qui vous prend ?
-Il me prend, Holmes, répliqua acerbemment l'autre en s'asseyant à califourchon sur sa poitrine pour le bloquer, que vous ne me dites rien, et que j'aimerais bien savoir ce qui se passe !
-Vous savez bien que c'est ma façon d'agir, rétorqua le détective sur le même ton. Si vous n'étiez pas d'accord, il fallait le dire plus tôt. Beaucoup, beaucoup plus tôt.
-Comme si ça aurait changé quelque chose.
-Watson, vous agissez comme une femme jalouse.
-Pardon ?
-Ce n'est pas parce que vous vous sentez délaissé qu'il faut être égoïste. Laissez-moi enquêter tranquillement, et attendez-moi à l'appartement, comme le bon ami que vous êtes...
Et avant que Watson ait pu réagir, Holmes lui avait fait une prise de son art si étrange, et le brave docteur se retrouva projeté au sol, les quatre fers en l'air.
Holmes rajusta d'un coup sec son veston, ouvrit la porte du salon, fit un pas dehors, bien déterminé à sortir, et jeta un bref regard en arrière...
Watson, à genoux par terre, se massait l'épaule, la tête basse et le regard triste.
Un petit pic de douleur perça le cœur du détective.
Il s'approcha tout doucement de son ami et posa une main sur son épaule.
-Je vous ai fais mal ? Murmura-t-il.
-Oui, répondit sèchement le docteur en se redressant. Mais pas à l'épaule.
-Watson... Je...
Le docteur lâcha un profond soupir et s'assit au bord du sofa.
-Ça va, Holmes.
Le détective consultant s'agenouilla devant lui pour poser sa tête sur ses genoux et entourer sa taille de ses bras.
-Holmes, ce n'est rien, répéta le docteur en passant la main dans les cheveux de son ami.
-Je suis désolé. Ne me laissez pas...
-Mais qu'est-ce que vous racontez ? Ce n'est pas la première de nos dispute ! Comme si j'allais vous abandonner ! Maintenant, asseyez-vous et racontez-moi ce qui se passe !
Le détective sauta sur ses pieds, toute son énergie retrouvée.
-Une araignée, Watson ! Un Napoléon ! Un génie ! Voilà ce que j'ai trouvé !
Le docteur leva un sourcil sceptique, et jeta un regard significatif à la boite d'acajou contenant la solution à sept pourcents du détective.
Holmes lâcha un petit rire et s'assit à côté de son colocataire. Il appuya doucement sur ses épaules pour le faire s'allonger, et s'étendit sur son torse.
Le menton posé sur ses deux mains, confortablement installé sur la poitrine du docteur, il continua.
-Il y a quelqu'un derrière les trois quarts des crimes commis à Londres, voire dans tous le pays !
-Quelqu'un ?
-Quelqu'un qui manipule, quelqu'un qui se joue de Scotland Yard... Un génie.
-Un génie qui commet des crimes ?
-Oh non, Watson, il ne les commet pas !
-Mais vous venez de dire...
-Il ne les commet pas, parce qu'il se contente de les concevoir! C'est un criminel consultant dont je viens de flairer la trace, Watson ! Un criminel consultant de génie ! Mon exact opposé !
-Parce que, naturellement, vous êtes un génie ?
-Naturellement.
Watson sourit et posa ses mais sur les tempes de Holmes, qui se suréleva un peu pour que sa tête soit au-dessus de celle du docteur.
-Et maintenant, Holmes ? Vous allez partir en chasse ?
-Pas tout de suite, répondit le détective en se penchant pour l'embrasser.
Watson goûta longuement ce baiser passionné, frémissant lorsque la main du détective s'égara dans le creux de son dos.
-La nuit est encore longue, murmura Holmes. Et j'ai beaucoup de chose à faire...
Le docteur le fit taire d'un autre baiser.
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