Partie 1
Tes doigts glissent sur ce qui semble être le reste d'un verre. Tu le prends délicatement, une odeur de whisky s'échappe. Tu laisses tes yeux déambuler le long du cristal, froid, transparent, tranchant ; ces éclats sont éparpillés aux quatre coins de la pièce. Dans la nuit, ils ressemblent à des petits diamants étincelants à la lumière de l'écran de télévision. À cet instant, tu te dis que ce sont bel et bien des diamants, aromatisés au whisky, qu'il suffirait de les saisisses pour disparaitre, pour t'envoler loin de cet appartement. Ces petits bijoux qui résoudraient bien des problèmes. Malheureusement, la vapeur d'alcool te ramène à la réalité.
Il n'est pas encore minuit que la bouteille de Grant est déjà finie. Il suffirait de mettre des chaussures, un manteau, prendre un diamant et se rendre à l'épicerie pour ne plus jamais manquer de bouteilles.
Tu attrapes un petit diamant que tu glisses dans ta main, tu le serres très fort dans ta paume en soupirant. C'est exactement ce que tu dois faire. Tu déambules les escaliers, les yeux à peine ouverts pour te rendre à l'épicerie du coin. Tu sens des regards sur toi. Ta respiration s'accélère : qu'ont-ils tous à te regarder ainsi ? Une angoisse s'empare de toi peu à peu, mais tu décides de la laisser de côté. Tu as une mission : te rendre à l'épicerie.
Le vent sur ta peau te fait frissonner. Sans lâcher ton diamant, tu passes ta main gauche sur ton bras. Tu grimaces en t'apercevant que tu as oublié ton manteau. Dans la précipitation, qu'avais-tu encore oubliée ? Tu regardes si tu as bien mis tes chaussures, un pantalon et un haut. Rien à signaler. Tu sens se déverser en toi un sentiment de soulagement. Au moins, tu n'es pas sorti de chez toi à poil.
L'épicerie n'est plus qu'à quelques mètres, tu salives en pensant au gout du liquide sacré qui se déversera dans quelques instants dans tes entrailles. Tu repenses à cette sensation de chaleur, d'apaisement, de lâcher prise à chaque gorgée, comme le monde devient plus beau, comme le monde devient plus grand. Tout semble possible, tout semble accessible même à toi qui trembles quand un humain te dit : je t'aime.
La lumière du magasin t'aveugle, tu titubes jusqu'au rayon que tu connais par cœur. D'une main habile, tu attrapes la bouteille. À cette heure-ci, il n'y a personne. Plus que quelques pas avant cette fameuse union. Le caissier te jette un regard inquiet, mais tu choisis de l'ignorer. Il te demande de régler 10 euros pour la bouteille. Et toi, d'un sourire candide, d'une voix à peine audible, tu ouvres la main droite.
Le caissier paraît horrifié, tu ne comprends pas. Dubitatif, tu te demandes comment une personne peut craindre un diamant. Puis, tu baisses les yeux vers ta main, qui a pris une couleur différente. Elle semble dégouliner, le diamant est tout rouge. Tu le laisses tomber sur le tapis de la caisse. Tu essuies cette drôle de peinture en fronçant les sourcils. Une douleur se réveille subitement. Tu hurles de douleur, l'homme te regarde en ne sachant que faire. Des larmes coulent le long de tes joues. Tu ne comprends pas pourquoi, pourquoi le monde est-il aussi cruel. Pourquoi même un diamant aussi beau que celui-ci peut-il te marquer dans ta chair.
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