Chapitre 14
Une semaine passa, la bête ne se manifesta pas. J'avais presque oublié que j'étais possédée par un monstre et je me sentais de plus en plus ordinaire.
Je me levais chaque jour à 6 heures, je prenais mon petit-déjeuner et j'allais à mon travail.
Cette monotonie de la vie me plaisait beaucoup, sans rebondissements, sans choses à découvrir ou d'autres à cacher. Simplement, vivre! Tout cela m'avait beaucoup manqué.
Alice ne venait plus au travail depuis que je lui avais parlé ce jour là. Je ne savais pas ce qu'elle était devenue, si sa situation était réglée, ou pire, si son père l'empêchait de venir travailler. Je n'avais ni son adresse, ni son nom de famille et donc, je ne pouvais pas la contacter.
Au moins, cette petite discussion avec elle m'avait permis de m'ouvrir un peu au plus aux gens qui m'entouraient, de leur parler, de leur sourire. Certes, ça semblait si facile à faire, mais pour moi c'était un grand pas en avant.
J'avais toujours eu peur des gens, pour je ne savais quelle raison. Je n'osais pas leur parler car je craignais qu'ils me fassent du mal. En gros, je ne faisais confiance à personne.
Joe était la première personne, hors ma famille, à laquelle j'avais pu parler ouvertement. Et je n'avais pas été déçue.
Le lendemain de ma rencontre avec Alice, j'avais fait connaissance d'une jeune fille de mon âge. Elle s'appelait Marie.
Elle travaillait dans le restaurant de l'hôtel. J'avais vite sympathisé avec elle, tellement nos vies semblaient identiques. Seulement, elle était atteinte d'épilepsie. Parfois, elle avait des crises, elle tombait et ne pouvait plus bouger.
Ça me rappelait ce que je subissais moi, à la tombée de la nuit. Quand elle me racontait ses souffrances, la douleur qu'elle ressentait, j'avais l'impression qu'elle décrivait mon état à moi.
Sa situation familiale n'était pas des meilleures. Elle était en charge, à elle seule, de ses trois frères et sœurs. Ses parents étant morts dans un accident de voiture, elle avait la responsabilité de veiller sur eux.
Pour la première fois, j'avais compris que je n'étais pas la seule à souffrir. On se réconfortait mutuellement et je faisais de mon mieux pour l'aider.
Un jour, alors que j'avais fini mon travail, je sortis de l'hôtel et entrais au restaurant pour saluer Marie. C'était devenue une habitude à nous deux.
J'ouvris la porte, marchais quelque pas avant de trouver Marie, effondrée par terre. Le gérant du restaurant, debout devant elle, était en train de lui parler d'un air sévère.
- Ces derniers jours, tu ne fais que t'effondrer. Tu ne termines pas ton travail. Si tu es si malade, tu n'as qu'a rentré chez toi.
- Je suis désolé monsieur, je ferais de mon mieux.
- Commence plutôt par faire ton travail correctement.
Il s'en alla en la laissant en pleurs.
Je me précipitai vers elle en lui disant:
- Ne t'inquiète pas, tout va bien se passer.
- Il va me virer si je ne livre pas cette commande. Aide moi à me relever s'il te plait.
- Tu vois bien que tu n'es pas en état de le faire. Tu peux à peine bouger.
- Je suis bien obligée.Tu le sais très bien.
- Je vais le faire à ta place, ça ne doit pas être si loin que ça.
- Et ton travail?
- Ne t'inquiète pas. J'ai terminé, j'étais venu que te saluer.Allez donne moi ça.
Je pris le déjeuner à livrer et me mis en route, toute fière de pourvoir aider mon amie. C'était la première fois que j'en avais une et je n'étais pas prête à la perdre.
La maison en question était un peu plus loin que prévu. Je partis au pas de course et finis par y arriver.
C'était une très grande propriété, à la clôture immense, peinte avec du blanc.
Je sonnai. Une domestique m'ouvrit. Je lui donnais le repas, pris l'argent et rentrai.
Je me sentais soulagée. J'avais pu livrer à temps et Marie n'avait plus rien à craindre. De plus, j'avais terminé mon travail et ne me restais qu'à rentrer chez moi et à me faire une petite sieste.
Sur le chemin du retour, je croisai une vieille femme qui avait du mal à porter des sacs remplis de nourriture de toutes sortes . En me voyant passer, elle me dit:
- Mon enfant, pouvez vous, s'il vous plait, m'aidez à porter ces sacs?
- Oui bien sûr. Où habitez- vous ?
- Non loin du pont.
- Ah c'est justement là où je me rends.
- Merci beaucoup.
Cette journée promettait des merveilles. Si ma mère me voyait aider Marie et maintenant cette vieille dame, elle serait si fière. " Toujours aider son prochain", voilà ce qu'elle ne cessait de nous dire. Et me voilà en train de l'appliquer à la lettre.
Cette vieille dame habitait dans un appartement au cinquième étage.
Une fois arrivée devant l'immeuble en face du pont, je montai tant bien que mal les marches avec les lourds sacs dans mes mains. J'étais à bout de souffle quand j'arrivais enfin devant son appartement. Je lui dis:
- Voilà, c'est là?
- Oui c'est bien ici. Pouvez -vous, s'il vous plait, me les déposer sur le potager de la cuisine. Je suis si vieille que je ne peux le faire.
Elle m'ouvrit la porte. Je pénétrai dans ce petit appartement où régnais un ordre hors du commun. Je fus surprise en voyant chaque chose à sa place. Tout était méticuleusement rangé.J'avais imaginé l'appartement d'une vieille dame, qui avait du mal à marcher, autrement.
Je déposai les courses sur le potager et m'apprêtai à sortir quand elle me dit:
- Voyons, venez boire une tasse de thé chaud. Mon mari ne va pas tarder à rentrer. Je ne supporte pas d'être seule.
- Non, sans façon! Merci
- S'il vous plaît, venez! Venez avec moi !
Elle arborait un sourire étrange, je dirais presque qu'il avait quelque chose de maléfique. Mon intuition me disait de ne pas accepter son offre, et je me sentais obligée de la suivre.
- Je suis désolée madame, mais mon travail m'attend.
Voilà une excuse en or qui allait me permettre d'esquiver cette fameuse invitation.
Elle ricana en me disant:
- Quand même, un hôtel peut bien trouver une remplaçante pour faire le ménage.
- Non désolée, je ne..... Au fait, comment savez vous que je travaille dans un hôtel?
- Eh bien vous me l'avez dit.
- Je ne m'en souviens pas. Et comment savez vous que je fais le ménage?
Elle se mit à rire et me dit:
- C'est mon mari qui me l'a dit.
- Votre mari? Qui ça?
A ce moment la porte s'ouvrit. Un homme pénétra dans la chambre.
En voyant son visage, je restai figée sur place. C'était lui! C'était l'homme auquel j'avais vendu mon âme, c'était l'homme qui était dans le tableau. Que faisait- il ici ? Étais- ce un piège? Une sueur froide commençait à couler sur mon front.
Il se mit à sourire et me dit:
- Ah comment on se retrouve. Je ne m'attendais pas à vous revoir de si tôt.
Il regarda sa femme et lui dit:
- Beau travail Louise. Je savais bien que je pouvais compter sur vous.
- Maître, je ne suis là que pour vous servir.
- Tu peux préparer à notre invitée un dîner.
- Bien sûr, Maître.
La vieille femme se leva, pris quatre sacs remplis de nourriture avec une facilité incroyable et commença à préparer le dîner.
La peur s'emparait de moi petit à petit. Je devais absolument sortir, quitter cet appartement. Mais comment? Si je me mettais à courir, Dieu savait ce qu'il allait me faire. Il avait sans doute des pouvoirs très puissants. Non! Je devais rester calme et choisir le bon moment pour m'enfuir.
Je lui dis:
- Qu'est ce que vous me voulez?
- Voyons, vous le savez très bien.
- Je n'en sais rien.
- C'est vous qui m'avez vendu votre ombre. Personne ne vous a obligé à le faire.
- Vous voulez dire mon âme. Je sais tout à propos de vous. Vous ne me faites pas peur. Sale monstre!
Ces dernières paroles sortirent toutes seules. J'avais le sang qui était en train de bouillir dans mes veines.
Il s'approcha de moi avec une vitesse incroyable et me gifla.
- Sale garce. Vous osez m'insulter moi qui vous ai épargner. J'aurais pu vous tuer mais je ne l'ai pas fait seulement pour votre père.
- Mon père.....
Avant que je ne puisse continuer ma phrase, il me fit tomber sur le sol et me piétina si violemment que du sang sorti de ma bouche.
Je voulais me relever, mais c'était impossible. Il avait ses jambes sur mes bras ce qui m'empêchait de bouger.Je me sentais si faible. J'avais mal partout.
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