Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

XVIII. 𝙲𝚘𝚕𝚘𝚖𝚋𝚎 𝙶𝚎𝚜𝚌𝚑𝚠𝚒𝚝𝚣

XVIII.


« Ça fait un mois jour pour jour que l'eau ne coule plus des robinets, le lit de la chambre d'amis émet des bruits de sanglots rauques et quelque chose se balance dans le grenier. »

Les mots de la toute jeune femme grésillaient encore dans le crâne d'Hawthorne, alors qu'il épluchait le peu de documentation dont il disposait sur le petit morceau de forêt où vivait ladite cliente. Le chasseur de vampires était habitué à des couples éplorés ; rarement à un genre de vieille fille diplômée de vingt-neuf ans (Marie l'aurait proprement tapé si elle avait su son emploi du qualificatif, mais aux dernières nouvelles elle n'était pas télépathe) dont la voix par téléphone évoquait un genre de fermeté militaire. Il croyait à la forte impression que peut donner un fantôme à une paire de jeunes gens fraîchement installés qui n'attendent que la paix sauvage des bois. Hawthorne doutait bien plus de l'effet que pouvait avoir ledit fantôme sur l'appréciation qu'il s'était faite de cette femme.

Le téléphone avait sonné tôt, vers dix heures ; il avait décroché. Au bout du fil, Colombe Geschwitz, inconnue totale au bataillon qui ne se privait pourtant pas d'une voix déterminée, et sacrément bien réveillée pour l'heure (Hawthorne comptait encore la quantité de dés à coudre qu'il pourrait ranger soigneusement dans ses propres cernes) qui lui avait jeté l'équivalent d'un seau d'eau glacée au visage en lui contant en quoi elle aurait besoin des services immédiats du 5, rue Champeau.

Colombe Geschwitz allait sur ses vingt-neuf ans. C'était une femme dont la voix seule évoquait un visage mince, pâle, légèrement arrondi, et d'un genre de beauté neutre et garçonne et provocante peut-être ; robe midi, crêpe de soie, jersey de laine, et puis probablement de courts cheveux noirs en carré sous un chapeau cloche. Hawthorne avait beau trouver que la mode actuelle rendait tout le monde franchement semblable (au point qu'il en finissait par appeler des gens « Machin » par pure flemme), il se sentait capable de reconnaître la voix si caractéristique de concision de cette femme à peu près dans n'importe quelle situation. En quelques secondes, elle parvint par clarté à en arriver aux faits ; le tout resta succint, presque tranché d'une objectivité professionnelle.

Mademoiselle Geschwitz, donc, — vivait seule dans une petite maison récente quoi qu'isolée aux abords de la forêt de Chaource.

« Seule ?

Oui.

Vous n'êtes pas mariée ?

Non. Ça ne m'intéresse pas.

Non mais après, pour ce que j'en dis. »

Colombe s'était assez bien débrouillée pour faire rapidement comprendre à son interlocuteur que ses questions dépourvues du moindre rapport avec la situation commençaient à lui courir, et ce, contrairement à la majorité des individus qui se retrouvaient coincés dans un dialogue sans queue ni tête avec le chasseur de vampires. Par respect, peut-être, Hawthorne l'avait laissée poursuivre son propos :

« Ça fait un mois jour pour jour que l'eau ne coule plus des robinets, le lit de la chambre d'amis émet des bruits de sanglots rauques et quelque chose se balance dans le grenier.

C'est la première fois ?

Pardon ?

Que, euh, ça arrive.

Non.

Donc, du coup, ça fait un mois que vous n'avez plus pris de bain, » avait osé Hawthorne.

...Le silence franchement dubitatif qui avait régné pendant quelques secondes au bout du fil était tout de même assez éloquent pour faire comprendre au chasseur de vampires qu'il commençait à être lourd.

« ...Je vous promets, si vous redites une seule chose de cet acabit, je me débrouille pour que vos canalisations soient bouchées à tout jamais avec un lapin décédé, » avait lâché Colombe. Hawthorne avait manqué de s'étrangler, de surprise, — parce que la plupart des gens se contentaient de le traiter comme un genre de petit enfant un peu débile dès qu'il commençait à raconter n'importe quoi par pur sens de l'absurde ; qu'on ait cette franchise était déstabilisant, certes, mais aussi forçait le respect. — Quoique, il était censé ronchonner pour le principe. Finalement, il avait décidé qu'il n'en avait pas grand-chose à taper.

« On va éviter. » Avait-t-il admis. « Votre maison est-elle ancienne ? Auriez-vous des raisons de penser qu'un fantôme puisse y vivre pour une quelconque raison ?

Non ; elle a été rebâtie très récemment, » etc, etc, etc.

Et puis, après plusieurs minutes de discussion, Hawthorne avait fini par raccrocher. La situation ne lui disait rien qui vaille ; pas plus que pour n'importe quel autre dossier, admettons, ...mais tout de même. Il aurait dû être heureux — du reste, c'était peut-être un peu fort ; soulagé conviendrait mieux — de pouvoir reprendre du service. Ne restait à l'intérieur de lui qu'une sorte de vide légèrement inquiet, comme ce qui s'agite au creux d'un ventre quelques secondes avant l'orage.

Voilà comment Hawthorne s'était retrouvé là, assis à la grande table du petit séjour aveugle, ...avec dans les mains le mince dossier que le Département avait déjà accumulé sur le coin en question. Certains points pouvaient parfois s'avérer névralgiques dans l'étude des fantômes, et paradoxalement il ne s'agissait pas toujours des vieilles ruines estrillées par de grosses masses de vent. Parfois, c'était les lieux isolés, où personne n'irait voir un tueur enterrer un corps de plus. Il y avait aussi les précipices, les renfoncements de terre noire où certains s'abîmaient dans l'obscurité. Ça n'était...pas toujours le même schéma, non plus.

Ce qui était inscrit sur ces pages est retranscrit ci-joint :


Une fois, j'ai vu un cerf.


Rasmus


...Hawthorne décida qu'il avait quand même déjà drôlement bien épluché le dossier en question et qu'il allait falloir se bouger le derche. Il en était à ce genre de considérations plus ou moins basses du front lorsque la lourde porte du salon grinça, un peu, ...avant que de la cuisine n'émerge l'imposante silhouette de Karadec, — découpée en rétroéclairage comme un trou ciseleux sur la lumière que les persiennes émaciaient déjà. Par-derrière, un peu de clarté venaient griffer le mur d'en face. Il amenait avec lui quelques morceaux de jour.

Hawthorne savait que l'une des portes de la cuisine menait à un petit débarras où le prêtre exorciste secondaire gardait quelques objets de deuil, mais il ne releva pas, faisant mine de compulser avec une concentration intense les deux lignes complètement débiles que Rasmus avait écrites.

« Que fais-tu ? » demanda son collègue, s'asseyant à une chaise de la table. Hawthorne aperçut seulement, du coin de l'œil, — sa large ombre s'abaisser à côté de lui. Il ne répondit pas tout de suite.

« On a reçu un appel. Ça te dirait, d'ouvrir un nouveau dossier ? Une dame dont la baraque est probablement hantée, » proposa-t-il, affectant un air détaché. « De toutes façons, on ne peut rien faire sur le dossier, euh,...

— Jérémie Vuillemin ? » lui souffla aimablement Karadec.

« ...C'est ça. Et puis, si ça marche pas, ben, on lui dit que c'est un problème de plombier. Ça passera comme une lettre à la poste.

— J'avoue que je ne te suis pas.

— T'en fais pas. » Le chasseur de vampires eut un genre de geste vague de la main. « Tu connais, la forêt de Chaource, tout ça ? Rumilly, Aumont, le Devois...

— Je viens de Bretagne ? » déplora Karadec, comme un rappel, avec une grimace désolée. « Non, pas vraiment. C'est dans ce coin-là ?

— Je veux, que ça l'est. Elle habite, euh, en bordure. Un endroit assez isolé.

— Diable. Ça nous change de la capitale de l'Aube, » admit l'exorciste. « C'est un coin à disparitions, il faut l'admettre. »

L'homme avait le visage différent d'à l'habitude, Hawthorne commençait à en être de plus en plus sûr — il y avait quelque chose, une lourdeur fatiguée dans les grands yeux trop bleus, et puis la façon qu'avait la lumière chiche de la cuisine de lui lécher les angles du visage. Les deux hommes se connaissaient depuis bien longtemps. Après tout, il était à peu près reconnu qu'Hawthorne lui-même avait eu un bénitier pour premier landau ; la renommée discrète — quoique, pas dans le milieu — du nom de famille qu'il avait discrètement modifié n'y était pas totalement étrangère. Tous deux avaient fait connaissance sans surprise. Le monde de l'occulte était si petit.

Et pourtant, ...en ce jour, Quincey Hawthorne eut une intuition : quelque chose taraudait son ami, et pas qu'un peu.

« ...T'en as gros sur la patate, » devina-t-il soudain en se redressant. Karadec faillit avoir un petit tressaillement, tiré trop brutalement de ses pensées.

« Oh, non, » le rassura-t-il doucement, en évitant toutefois son regard. « C'est...j'ai parlé à Rasmus. C'est tout.

— Et ? Il a essayé de te corrompre au projet de table de billard ? Tu sais très bien que je voudrais garder l'argent pour nous mettre un toboggan, » tenta le chasseur de vampires. Un pâle sourire passa sur les lèvres de son collègue, mourant comme une étoile filante.

« C'est pas ça, t'en fais pas. Il...aurait parlé à quelqu'un, c'est tout. Par téléphone.

— ...Oh.

— Et...j'ai cru un moment que c'était... »

Il n'eut pas besoin de finir sa phrase ; le reflet qui miroitait soudain dans le bleu de ses yeux parlait pour lui-même. C'était une clarté bouffée aux mites de tristesse, de deuil, ...et aussi de regrets.

Hawthorne se qualifiait lui-même de progressiste. La société n'irait pas bien loin selon lui avec dans les pattes l'univers déformé d'une guerre mondiale. Ils se connaissaient déjà, à l'époque, — celle où Karadec avait fini aumônier dans la boue des tranchées, et lui, il avait encore ces foutus souvenirs de terre et de froid et du givre au fond des crevasses et de sang et de larmes et de chair éclatée. Et puis le limon rougi qui sentait la merde comme un tas de tripes, et les rats, le froid aussi, ...la peur dévorante du prochain coup de canon. Il s'en était bien sorti, du reste. Pas les autres.

Pas beaucoup trop des autres.

Un sifflement en acouphènes s'écrasa dans son tympan gauche, un hurlement fantôme qu'il chassa d'une tape sèche sur son oreille, comme pour lui faire fermer sa g...

...Ça n'était pas le moment.

Quoiqu'il en soit, donc, ...il se qualifiait de progressiste. Hawthorne trouvait que la déconstruction personnelle était une activité sacrément chouette et il s'en gardait toujours un créneau le dimanche matin. Et puis il n'était pas aveugle non plus ; il y avait des choses qui se voyaient.

Et, typiquement, ...Karadec parvenait à cacher ses émotions avec à peu près autant de talent qu'un gamin de deux ans qui se mettrait les mains sur la figure en se félicitant d'avoir trouvé la cachette d'une vie.

« ...Fredriksson ? » proposa-t-il doucement, comme pour combler le silence. Karadec se raidit. L'immobilité qui suivit sembla durer une éternité, où les ombres en contre-jour paraissaient dévorer l'espace.

« ...Oui, » admit Karadec, les lèvres sèches. « J'ai cru. Et c'était faux.

— Qui te dit que ça l'était ? »

Karadec releva des yeux presque teintés de reproche vers son collègue, un genre de : ...oh, je t'en prie. tacite. De tels faux espoirs étaient en-dessous de la ceinture.

« Les morts ne parlent pas sans raison, » commença l'exorciste, d'un ton sérieux.

« ...Et les vivants ne les écoutent pas sans espoir. » Compléta Hawthorne. Et bim. Il le méritait.

Mortui sine causa non loquuntur, et vivi sine spe non audiunt. C'était la devise que sa famille s'était trouvée, autrefois, après de sombres événements qui les avaient tous laissés exsangues — et c'était le cas de le dire. Et puis, la phase avait plus ou moins infiltré les briques du Département lui-même ; Hawthorne évitait d'en parler. Il ne savait pas sur quel pied danser, à ce sujet.

« Tu as raison, ça n'est sûrement pas lui, » mentit Hawthorne. « Il faut tourner la page. » ...Il donna une grande tape joyeuse dans la table, arrachant carrément un sursaut à son collègue et démontrant du même coup toute l'ampleur quasi-surnaturelle de son manque d'intelligence sociale : « allez ! Viens, on va marcher un peu, ça va te changer les idées. De toutes façons, on a encore rien sur ce dossier. Pars devant, mets, euh, ...ton manteau, tes chaussettes, un truc, ce que tu veux, je te rejoins. »

Pour lui rendre ce qui lui revient, Karadec ne protesta pas vraiment. Peut-être vit-il effectivement le talent de comédien franchement bancal de son collègue et décida-t-il que ledit talent n'était pas un critère à leur amitié — ou peut-être se contenta-t-il de ne pas poser de questions ; quoiqu'il en soit, il se redressa après quelques secondes d'un air franchement perplexe, ...puis finit par se diriger vers la porte du hall d'entrée. À mi-chemin il se retourna vers le chasseur de vampires, ouvrit la bouche, — avant de se faire couper dans son élan par un geste de main. T'en fais pas, pars devant sembla être le message vaguement articulé d'Hawthorne. Aussi Karadec finit-il par sortir, l'air un peu perdu.

...À peine eut-il disparu du champ de vision de son collègue que le visage de ce dernier changea du tout au tout. D'un air presque détaché, ses traits passèrent à un genre de préoccupation intense. Fredriksson


Hawthorne les connaissait tous, plus ou moins (Charles était nouveau mais au fond il était descriptible en un seul mot : "gentil"). Et l'exorciste principal n'avait pas fait exception à la règle.

Hawthorne était sûr d'une chose ; s'il y avait bien quelqu'un pour qui Natanael Fredriksson serait revenu d'entre les morts, ...il venait de quitter la pièce.

Tout ça ne lui disait rien qui vaille — ce fut exactement le contenu de ses pensées lorsqu'il se carra dans l'assise de sa vieille chaise, le regard sombre, perdu sur le bois de la table. L'individu avait toujours fait cavalier seul, et ce d'une façon si vastement difficile à cerner qu'ils préféraient la plupart du temps le laisser dans son coin sans poser de questions. Fredriksson n'était pas foncièrement mauvais, mais trouble. Il était véritablement difficile de discerner les contours de sa loyauté.

...S'il revenait, ...c'était que ça commençait à puer.

Et s'il voulait avoir le moindre espoir de distinguer quoi-que-ce-soit dans son possible plan, il allait devoir se pencher sur l'une des dernières pièces rapportées de feu leur collègue.

Hawthorne chopa un morceau de papier sur la table, un crayon qui traînait probablement on-ne-savait-où aux limites de sa conscience et y griffonna rapidement quelque chose. À ces heures, elle dormait, et, il le savait, — c'était pratiquement impossible de la réveiller. Un sommeil de plomb en journée n'était pas non plus un des signes particuliers les plus pratiques dans la vie mais après tout ; il avait tout son temps.

« J'arrive ! » clama-t-il d'une voix forte, comme pour encourager Karadec à prendre son mal en patience, avant de repousser vivement sa chaise et se diriger à grands pas vers l'escalier de l'étage supérieur — dont il engloutit les marches quatre à quatre ; puis, le mur aux crucifix. Sur sa droite...

...C'était une porte comme on en connaît tant, un simple battant si anodin qui faisait à peine un léger renfoncement dans la paroi du mur. On y voyait comme à-travers une pelle et pourtant Hawthorne savait une chose.

Il ne fallait

surtout

pas

l'ouvrir.

...Alors, il s'agenouilla et glissa doucement le petit papier sous la porte, sans un bruit.

Et, dans un rayon de lune, ricochèrent une demi-seconde les lignes qu'il y avait inscrites :


Rendez-vous cette nuit


Je vais avoir besoin de ton aide

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro