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Le voyage était passé vite avec le suspenseur. Cinq jours à vitesse de croisière pour atteindre les Himinbjörg où Heimdall siégeait. Kalyan, absolument inconscient de ce qui s'était passé à Stronstall, avait le moral au beau fixe, et il m'avait fait visiter en faisant quelques détours. Nous avions survolé des montagnes enneigées, des lacs étales d'un turquoise un peu trop similaire à mes yeux, des plaines peuplées de hordes de bovidés et de lapins. Nous nous étions à chaque fois arrêtés pour camper pour la nuit, accompagnés par les crépitements du feu de camp – qu'il me forçait à allumer avec ma foudre – et par sa guitare. Une ambiance qui jusque là m'avait été inconnue, mais que j'appréciais bien.

Au dernier jour, plutôt que de s'épuiser loin d'une ligne de flux comme nous l'avions fait pour atteindre Thrymheim en urgence, nous avions remballé le suspenseur. Enfin, nous... Kalyan l'avait fait disparaître d'un simple geste dans son inventaire magique malgré la dépense d'énergie colossale que cela requérait. Nous avions pris des chevaux au pied de la montagne, chez un fils d'Heimdall affilié à son père qui gérait le service de déplacements jusqu'au Bifröst, troqué nos vêtements confortables contre d'épaisses combinaisons thermiques et des doudounes.

Et nous étions en train de grimper aussi lentement que les descendants de Sleipnir le permettaient, soit à un rythme qui engloutissait cinq mètres à chaque pas environ.

Je gigotai sur ma selle, songeuse. Nous allions rentrer. Bientôt. Dans quelques heures à peine.

Et, aussi brusque qu'un coup de tonnnerre claquant à mes pieds, la pensée de mettre en péril tout ce que Kalyan et moi avions construit ici me frappa et m'effraya.

— Kal ? soufflai-je.

— Mmhm ?

Il leva la tête vers moi avec un sourire et, instantanément, un peu de mon anxiété soudaine me quitta. Je me rappelai ce que je m'étais dit quelques semaines plus tôt, quand nous avions décidé d'entretenir cette alchimie étrange qu'il y avait entre nous. J'étais une Loki, et lui un Thor. Il y avait un million de raisons pour que ça ne fonctionne pas. Les mensonges seraient l'une des premières causes de notre échec.

Et, ô combien la réponse me faisait peur, je décidai malgré tout de poser la question qui me brûlait les lèvres :

— Qu'est-ce que tu comptes faire une fois rentré à Midgard ?

Il plissa le nez, l'air songeur, et ses yeux se perdirent au loin. Nous chevauchâmes quelques longues dizaines de secondes en silence, et plus il demeurait muet, plus la boule dans mon ventre se nouait encore davantage.

— Certainement pas rentrer chez les miens, en tout cas, répondit-il finalement.

Je soufflai doucement, rassurée. Les yeux étaient les fenêtres de l'âme, et les mots donnaient le rythme du cœur. Sa phrase avait été assurée, ferme. Il avait dit chez les miens et non chez moi. Ce que je voulais entendre, je l'avais entendu. Il ne comptait pas retourner au sein de la Maison de Thor, pas tout de suite en tout cas. Son cœur et son allégeance n'y étaient plus.

— Et toi ?

Je grimaçai légèrement, mais je connaissais déjà ma réponse. J'y avais réfléchi.

— Je n'ai pas nécessairement envie de retourner à la Confrérie... mais je ne peux pas la laisser aux mains de la commandante. Pour peu qu'Ekrest n'ait pas réussi à l'arracher à Kaiser...

— Il n'aura pas réussi.

— Ah ?

Je fronçai le nez, l'air sceptique, et il poursuivit sans la moindre trace d'hésitation dans sa voix :

— Je ne prétends pas connaître les Élites comme toi, mais je les ai suffisamment fréquentés pour savoir qu'ils fonctionnent à la rage. Surtout maintenant qu'ils sont libres.

Il fit une brève pause, parut réfléchir, puis ajouta :

— Ils vont essayer de la détruire. Enfin je pense. Imagine les motivations de quelqu'un comme Kirstin ou Ingmar... ils n'ont rien à retrouver au sein de la Confrérie d'aujourd'hui. En revanche, ils savent qu'ils peuvent détruire ce que votre commandante a essayé de construire.

— Tu penses ?

Question stupide, et j'eus envie de la ravaler immédiatement. Autant n'avais-je aucune certitude au sujet d'Ekrest, autant effectivement, Kirstin, Ingmar, Ake$ et Tyko n'étaient pas les plus proches de notre Confrérie actuelle. Bien des choses avaient évolué ces quelques dernières années, tandis qu'ils étaient officiellement morts depuis plus de deux décennies. Je passai une main dans mes cheveux, songeuse, finis par acquiescer.

— Effectivement. En plus ça ne va pas être facile, même pour eux. Kaiser est intelligente, elle va se terrer dans le Manoir. Elle n'en sortira pas.

Kalyan hocha la tête.

— Vos défenses sont solides.

Je levai un sourcil interrogateur dans sa direction, et il se fendit d'un rire narquois :

— Ce n'est pas faute de les avoir analysées pourtant.

Je ricanai.

— Trop souvent ?

— Pour mon propre bien, oui. À mon avis, si tu veux te débarrasser de Kaiser sans avoir à mettre les pieds dans le Manoir, il va falloir que tu trouves une solution alternative. Et je pense que j'ai une idée.

— Oh ?

Il laissa passer un long moment de réflexion, et je me contentai de chevaucher à côté de lui, écoutant le vent et le pas régulier de ma monture.

— Si tu prends le problème à l'envers : tu as lâché une horde de Loki vengeurs, emprisonnés depuis des décennies, dans le monde libre. Mais ils ne peuvent pas accéder au Manoir parce que les détecteurs sont suffisamment intelligents pour les repérer. L'accès par l'extérieur n'est pas possible, à moins de vouloir se confronter à votre Labyrinthe...

— Ce qui n'est pas impossible pour eux, ils seraient capables de s'en sortir.

— Certes. Mais même s'ils entrent, ils n'atteindront pas Kaiser, elle se sera carapatée ou barricadée. Comment vont-ils réagir ?

Je pris le temps de réfléchir, devinant que la question était plus sérieuse qu'elle n'en avait l'air. J'essayai, un instant, de tirer sur les émotions que j'avais un jour ressenties au travers d'une liaison mentale avec Kirstin. La peur. La solitude. La haine. Le gouffre béant de l'abîme qui s'ouvrait devant mes pieds faillit bien m'avaler tout de suite. Les souvenirs de cet échange de sentiments étaient encore trop vifs, trop intenses.

— Je m'acharnerais, répondis-je, toujours projetée dans un autre esprit que le mien. J'essaierais de la forcer à sortir de son trou. Je prendrais un otage, j'exigerais une rançon, je passerais...

Ma propre conscience voulut m'arrêter, mais je savais ce que ce vide dévorant provoquait : une rage inconsidérée, déraisonnable, contre l'univers tout entier.

— Je passerais ma rage sur d'autres qu'elle, sur ceux qui travaillent pour elle.

Kal hocha la tête, peiné mais guère choqué. Il y avait une question muette dans son regard – comment et pourquoi je me projetais dans leur esprit – mais il ne la formula pas. Il se contenta d'enchaîner :

— Tout ça, si je peux l'escompter de leur part, elle le peut aussi. Elle compte à mon avis sur leur haine – ça lui permet d'alimenter aussi son propre cycle vicieux, qui consiste à les transformer en monstres renégats aux yeux des autres Loki.

C'était un problème que j'avais commencé à envisager ces derniers temps. Si nous étions ceux qui massacrions les membres de la Confrérie, comment pouvions-nous prétendre être meilleurs que Kaiser, comment devions-nous justifier de la déstituer et de lui faire payer ses crimes ? Dans le pire des cas, nous devenions les monstres qu'elle avait cherché à éliminer, et cela devenait pour elle une cause juste, vu notre comportement.

— Mais donc ? relançai-je pour essayer de comprendre où il voulait en venir.

— Va l'affronter sur un terrain qu'elle pense maîtriser. Qu'elle domine, même. Un endroit où elle n'irait même pas te chercher parce qu'elle est trop sûre de ses appuis.

— Comme par exemple ?

— La justice de Glitnir, lâcha-t-il presque nonchalamment.

— Je ne... Quoi ? bégayai-je.

Il m'avait fallu une brève seconde pour faire l'association d'idées et atterrir là où Kal voulait m'emmener. Forseti, le dieu de la justice et de la réconciliation, qui siégait dans la halle aux toit d'argent et aux pilliers d'or, Glitnir. Forseti, dont la Maison s'occupait à Midgard de la résolution de la plupart des conflits qui prenaient un peu trop d'ampleur et menaçaient la stabilité d'une famille ou d'une alliance.

— Attends... un thing ?

— Elle ne s'y attendra pas.

— Ah ça, moi non plus je ne m'y attendais pas. Mais comment veux-tu que je...

— En allant appeler la voix suprême de la justice midgardienne. Le seul qu'elle n'aura pas pu acheter. Avriel.

Je faillis me laisser tomber de mon cheval, totalement sidérée.

— Kal, je veux bien être une ancienne Élite, une bonne combattante. Mais je n'ai pas les contacts pour m'amener devant le Juste.

Le chef des Forseti, l'incorruptible.

— Moi je les ai, sourit-il simplement. Je peux l'appeler en rentrant, lui demander une audience privée pour débattre d'un problème politique majeur.

Ce qui restait de bonne volonté dans mon esprit abandonna la partie. Je le fixai avec un ahurissement non feint, absolument incapable de concevoir comment il voulait m'amener à dialoguer un jour avec Avriel le Juste, le chef des Forseti.

— Il va falloir que tu m'expliques.

— Quoi, comment j'ai son contact ? Ça s'appelle le nom de famille, heureusement ou malheureusement.

— Non, comment... comment je pourrais bien renverser Kaiser via un thing.

Il soupira, finit par comprendre que j'étais mortellement sérieuse, et entreprit de m'expliquer :

— Le thing est la plus haute instance de la justice norroise, comme tu le sais probablement.

— Jusque là, aucun problème.

— Et si la plupart des juges ne sont pas incorruptibles, ce n'est pas le cas d'Avriel.

Je haussai un sourcil, perplexe. J'avais vu des milliers d'hommes intègres céder, que ce soit à cause de la cupidité, de la haine ou de la menace. Avriel avait beau être une légende dans notre milieu, il n'était pas pour autant un homme à qui j'aurais confié ma vie, loin de là même.

— Tu n'as pas l'habitude de faire confiance aux gens, mais fais-moi au moins confiance là-dessus. Il a préféré sacrifier cinquante des siens pris en otage par les Odin pour éliminer la Triade des Fauves.

Surprise, je pinçai les lèvres, et la remarque que je prévoyais de lui renvoyer sur la prétendue incorruptibilité des hommes resta coincée en travers de ma gorge. Cinquante des siens ? Un massacre, pur et simple.

— Il aura toujours du temps à accorder à la vérité, et surtout dans le cas d'une trahison aussi importante que celle de Kaiser.

Je fus touchée par ses mots. Kalyan et moi ne parlions plus que rarement de ce qui s'était passé au Q.G. des Thor, de ce qui nous avait amenés à nous rencontrer. Je préférais ne pas ramener la trahison de Kaiser à la surface tant que je le pouvais, et il esquivait les questions délicates sur les tortures que j'avais subies ou les souvenirs de nos âpres négociations. Qu'il le formule aussi fermement et directement me rasséréna quelque peu. J'étais parfois hantée par un infâme syndrome de l'imposteur, qui me faisait remettre en question tout ce que je vivais, toute l'incidence des évènements sur ma vie. L'entendre, de la part de quelqu'un d'extérieur au conflit, qui avait simplement assisté aux évènements et pouvait témoigner, me permettait de reconsidérer la véracité de mes émotions parfois conflictuelles.

Car la lutte pour ne pas retomber dans mes acquis, ne pas placer la Confrérie sur un piédestal, était difficile malgré la trahison. Les années passées à sacraliser ma famille, à toujours penser à l'ensemble de la fratrie plutôt qu'à moi-même, se confrontaient à la douleur, vive et implacable, d'avoir été la survivante d'un tel coup monté contre moi. J'avais du mal, encore aujourd'hui, à concilier cette nouvelle vision avec la foi que j'accordais par principe à ma famille, ma commandante incluse.

— Tu penses qu'il acceptera d'écouter une criminelle intermondialement recherchée ? osai-je, mes doutes encore présents.

— C'est là où il va probablement falloir ruser, admit-il avec un bref sourire. Surtout pour entrer dans l'ambassade. Je pense qu'il vaudrait mieux que, jusqu'à ce que tu sois face à lui, tu utilises ton... autre identité.

— Ça implique de lui révéler mon secret.

Il inclina la tête, et ne répondit rien, me confrontant au choix.

— Tu penses que c'est un risque acceptable ?

— Pour moi, oui, répondit-il sans hésiter, mais je le connais. Toi qui ne le connais pas... et lui qui ne te connaît pas... honnêtement, je ne sais pas. C'est une décision que je ne voudrais pas prendre à ta place.

Je renversai la tête en arrière vers le ciel d'un bleu limpide, pareil à la couleur actuelle de mes yeux. Avriel le Juste. J'essayais de rassembler toutes les informations acquises sur lui au cours des années, mais il y en avait si peu. Je n'avais jamais été confrontée directement aux Forseti, jamais assisté à un véritable jugement. J'étais totalement novice dans la matière, et c'était aussi une raison pour laquelle je n'osais pas imaginer aller me confronter à Kaiser dans ce domaine.

En outre, comme Kalyan l'avait dit, je ne connaissais pas Avriel. Je ne savais pas s'il n'hésiterait pas à me faire arrêter sur le champ, s'il prendrait au moins le temps de m'écouter, s'il se contenterait de voir ce que ma commandante lui avait décrit. S'il garderait le secret sur mon identité de sang-mêlée, ne s'en servirait pas pour me plonger dans l'embarras. Je n'osais pas y croire, mais il était vrai que c'était l'une des propositions les plus raisonnables pour s'en prendre à Kaiser sans essayer de venir la chercher sur un terrain où elle serait toute-puissante.

— Comment ça se passe ? Si je veux déposer une plainte, admettons.

Durant tout le reste du voyage, il m'expliqua tout ce qu'il savait, depuis sa propre expérience en passant par toutes les connaissances légales qu'il avait acquises. Il me parla de son propre jugement, de la manière dont cela s'était organisé, de la procédure préalable pour enregistrer la plainte. J'écoutai patiemment le fonctionnement de la justice norroise, posai des dizaines de questions sur toutes les failles possibles que je pouvais imaginer, traquai la petite bête qui m'enverrait par le fond jusqu'à ce que je sois trop épuisée pour avoir quelque chose à relever.

La discussion nous occupa durant toute la remontée du col. Le temps que nous finissions d'aborder toutes les connaissances que nous pouvions mettre en commun, il faisait quasiment nuit, et nous nous mîmes d'accord pour descendre de selle et établir un camp pour la nuit. Le sentier caillouteux serpentait le long de la montagne, raide et pentu, aussi, je préférai m'en éloigner pour chercher une zone un peu plus plate. C'était peine perdue. En désespoir de cause, et alors que la nuit se faisait si sombre que je regrettais pour la millième fois de ne plus avoir mes flammes pour m'éclairer, nous tendîmes une tente sommaire entre trois arbres et attachâmes les chevaux.

Ce soir-là, il n'y eut pas de feu de camp, pas de guitare. Nous nous couchâmes tous les deux, totalement éreintés par la route, et pour ma part, je m'endormis comme une masse, bercée par le bruissement du feuillage et le discret mouvement de balancier de la tente.

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