Chapitre 9- Obligations D'un Prince
Le bruit sec du bois frappant un mannequin résonnait dans l'ensemble de la salle d'entrainement. Cela faisait déjà une bonne heure que Lothaire Solveig s'acharnait sur le pauvre pantin de bois. Il avait hérité, en partie, du tempérament colérique de son père: dès que quelque chose le contrariait il fallait absolument que le jeune prince défoule sa colère. Sa mère avait pourtant essayer d'y trouver une solution, de l'embrasser à chaque crise ou de le cajoler. Mais le décès de la reine lui provoqua un immense chagrin qui engendra la réapparition de ses crises de rage.
Lothaire, qui pensait à son avenir et celui de sa fratrie, frappait de plus en plus fort et de plus en plus vite, et la puissance des coups brisa l'épée de bois.
- Lothaire calme toi, dit une voix douce derrière lui.
Il sentit une étreinte qui l'apaisa aussitôt et lâcha ce qu'il restait de son arme d'entrainement. Le prince resta un long moment sans se retourner, voulant profiter de chaque seconde de ce moment chaleureux. Il finit pourtant par se retourner, et comme d'habitude, crut voir le spectre de sa mère. Or, il s'agissait de sa sœur, Oménie, qui ressemblait énormément à leur mère. Ses longs cheveux blonds caressait le bas de son dos, juste en dessous d'une ceinture ornée qui maintenait une robe de jade. On voyait à sa peau pâle qu'elle ne sortait pas beaucoup, passant la plupart de son temps dans les cuisines - ce qui mettait en rogne son père - à préparer des plats. Mais son visage doux offrit un effet calmant sur son frère. Elle posa son regard bleu sur la lame de bois brisée, tombée au sol.
- Qu'est-ce qui ne va pas Lothaire ?
- C'est père, suite au conseil il a décidé de m'envoyer loin de vous... Dit le prince d'une voix pleine de tristesse. Il veut que je parte à Duroche consolider des alliances avec le royaume de Pursie.
- Excuse ma maladresse en terme de politique, mais... Pourquoi ne pas faire ça directement en Pursie ou en Aysya ? demanda la jeune femme en fronçant les sourcils.
- Duroche est une ville-cité neutre, même si elle se trouve dans les terres de L'Empire Karnatien. et tu sais comment sont les Pursiens... aucun conflit n'est toléré sur leur territoire .
- Tu as raison, j'ai eu des courtisans Pursiens, de vrais froussards ! elle esquissa un léger sourire pensant avoir changé l'humeur de son frère.
Le prince baissa la tête, il ne voulait pas quitter sa famille, car il désirait protéger les siens. Cependant, il avait conscience de ses devoirs d'héritier du trône, ses crises n'étaient que l'expression de sa frustration. Parfois il voulait retourner sa colère contre son père, mais le roi était un homme à qui il était impossible de contester ses ordres sans en subir les conséquences.Oménie pris les mains de Lothaire, sa peau était extrêmement douce et chaude.
- Ne t'en fais pas, en attendant ton retour je prendrai soin de notre frère. Tu pourra nous envoyer des lettres en pretextant tes rapports (Le prince la regarda avec des yeux humides).
- Vous me manquerez Wille et toi...
- Combien de temps durera ton voyage ? demanda la princesse.
- Le commandant de guerre de Purssie se trouvera à Duroche dans deux semaines, mais j'y serais une semaine avant lui pour m'y installer et préparer la rencontre. Je pars aujourd'hui.
- Deux semaines...
Des larmes faillirent couler sur les joues de la princesse, mais elle devait être forte afin de ne pas l'inquiéter avant son voyage.
- Je dois dire au revoir à Wille. Veux-tu m'accompagner ?
- Bien-sur, acquiesça Oménie.
Les deux jeunes gens sortirent de la salle d'entrainement pour se rendre dans l'aile des chambres. Leur frère aîné y passait tout son temps, à vrai dire, il ne pouvait pas souvent sortir du fait de sa maladie et du roi qui surprotégeait son fils, puisque les médecins lui avaient diagnostiqué les mêmes symptômes que sa mère défunte. Lothaire se souvint qu'il avait vu son frère saigner énormément, crachant du sang ainsi que des taches bleuâtres et rosées sur ses membres, comme pour sa mère. Ce souvenir l'horrifiait encore, il ne supportait pas le fait que des membres de sa famille soient condamnés à une mort imminente. Il allait de soit que Wille Solveig devait profiter des dernières années de sa vie, c'est pourquoi le roi avait fait de Lothaire son héritier.
Quand le prince et la princesse approchèrent de la porte de la chambre de Wille ils l'entendirent réciter un poème.
Jamais plus notre toundra n'aura peur.Levez les yeux, vers le libérateur.Jamais plus les chaines de fer de Karnatia,N'ereintront vos chairs de fils d'Aysya.
Ils poussèrent aussi-tôt la porte et virent leur frère assis devant sa fenêtre, un livre et une plume à la main. Oménie regarda Wille émerveillée par ce qu'elle avait entendu. Mais le regard lourd de Lothaire emplissait l'espace de la chambre, l'héritier du trône savait à la vue des bleus de son frère qu'il ne vivrait pas un an de plus.
- Wille, je viens te dire au revoir.
L'aîné avait les cheveux bruns et les yeux bleus comme son frère et sa sœur. Son visage très creux et fin, donnait l'image d'un Homme gravement malade et proche de la tombe. Il s'avança vers Oménie et Lothaire en s'aidant d'une cane d'argent à tête d'ours. Puis il regarda son frère des pieds à la tête, laissa tomber sa canne et l'embrassa.
- Je suis fière de toi Lothaire, tu es devenu un homme fort et je suis sûre que tu réussiras la tâche que père t'as confié.
- J'aurai aimé que tu viennes, je risque de causer une double guerre, dit Lothaire en essayant de masquer sa tristesse.
Les trois enfants du roi se regardèrent, tandis que le silence remplaça leur conversation. Cependant, personne ne versa une larme.
Avant de partir seul vers les portes du châteaux Lothaire avait embrassé sa sœur et son frère. Ces derniers regardèrent à présent la silhouette de l'héritier du trône s'évanouir dans les longs couloirs du château.
Lothaire aperçut cinq hommes et six chevaux ainsi que le roi qui l'attendaient. Le prince s'arrêta devant son père qui se tenait droit et bombait le torse. Ce dernier déposa un lourd manteau en peau de loup sur les épaules de son héritier.
- Fils, je sais que tu vas réussir, car le sang des Solveig coule dans tes veines. Si l'Empire n'a pas fait peur à Solveig le libérateur, ton grand père, alors nous ne craignons aucune autres nations.
- Je ferais de mon mieux, répondit Lothaire sans regarder son père.
- Il nous faut la moitié de leur armée pour pouvoir reprendre et défendre le Sud, nos soldats se chargerons d'attaquer Karnatia. Les Pursiens sont en conflit avec les Karnatiens depuis La Guerre De Division. Tu dois attiser la vengeance de ce peuple, et Karnatia tombera sous les épées et les lances de nos royaumes.
Lothaire leva les yeux et regarda le monarque, il semblait fier de son fils qui allait découvrir la vie politique. Il déposa un dernier baiser sur le front de son héritier.
- Reviens victorieux, fils.
Sur ces mots le roi s'en alla et laissa Lothaire devant les portes du châteaux.
Le prince commandait à présent cinq hommes. Il mettrait en pratique les enseignements de son père pour les diriger. Les soldats étaient vêtus d'armure légère plaquée d'argent et décorées de l'ours des Solveig. Celle de Lothaire flamboyait encore plus, plaquée à certains endroit d'or et ornée d'un ours couronné. L'héritier monta sur son destrier aussi gris que les cendres, regarda une dernière fois le château construit dans la roche et pressa les flancs de son cheval.
- Soldats, en route vers Duroche ! s'époumona Lothaire qui voulait partir avant d'être noyé par le chagrin.
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