Chapitre 13- Lothaire Solveig
Duroche étant une cité indépendante, on ne célébrait pas la venue de membres imminents d'un royaume ou d'un empire. Il n'y avait pas de grande pompes avec un défilé, de la musique et des danses. Seulement un petit comité chargé d'amener ladite personne dans les bâtiments où avaient été prévues les entrevues. La majeure partie du temps il s'agissait de mages, puisque la ville leur appartenait quasiment. Un document officiel signé par l'ensemble des continents les en autorisait, car les mages érudits avaient prétexté que cela permettrait de conserver à l'abris de tout dangers les racines même de la connaissance. Mais à vrai dire, cela leur offrait un propre royaume rien que pour eux, bien que très petit.
Lothaire, du haut de sa monture, fut déçu de ne pas voir de foule aux abords de la ville. Il aimait beaucoup les festivités et les bains de foule. Mais cette fois-ci il n'y avait qu'un mage et une jeune femme, qu'il distinguait à peine, devant les portes de la ville. Cependant un grand soulagement emplissait son esprit, le voyage avait été épuisant autant pour les hommes que pour les chevaux. Duroche paraissait comme être un véritable oasis à leurs yeux. Le prince retira sa couronne dorée et essuya son front plein de sueur.
- Soldats ! J'espère que vous êtes assez fatigués pour amplement profiter d'une journée de repos. Exprima-t-il allègrement.
Les cinq hommes qui l'accompagnaient, bien qu'habitués et en meilleur état que le prince, hochèrent la tête et le suivirent. L'étalon royal, guidé par Lothaire, avança au trot en direction de leur destination.
L'entrée était un édifice digne des architectes les plus prodigieux, il en allait de même pour la Bibliothèque qu'ils percevaient de loin. L'entrée de la ville était un arche sculpté dans l'ébène le plus noble, gravé de symbole magiques et des figures divines recouvertes d'argent. Les courbes étaient calculées au détail près pour donner l'impression d'une perfection totale. Cela impressionnait beaucoup les Aysyans qui venaient d'arriver aux portes, et on pouvait le voir au visage de Lothaire, il avait la bouche grande ouverte. Un raclement de gorge lui fit reprendre conscience et il détourna le regard des gravures des dieux.
- Vous devez être le prince Lothaire Solveig (Le mage fixa le jeune homme).
Lothaire le jugea de la tête aux pieds également, son père lui avait toujours appris que rien qu'en observant un homme il était possible d'apprendre de nombreuses choses sur lui. Mais ce qui attira son attention était les boutons de ses habits mal attachés, hormis cela, c'était un homme tout à fait normal, visage anguleux, des cheveux bruns correctement plaqués en arrière et une posture très élégante et soignée. Le prince voulait faire bonne impression face à cet homme distingué, il releva la tête et posa sur lui un regard bleu et glacial.
- En effet, il s'agit bien de moi. Nous sommes attendus pour préparer l'entrevue avec le commandant de guerre Pursien qui aura lieu dans une semaine (Le mage le salua d'un signe de tête).
- Je vous accompagnerai dans cette ville et vous guiderai. Je me présente, je suis Priape Aquin mage-alchimiste de Duroche (Il recula et pressa le dos de la jeune femme que Lothaire avait totalement oubliée). Voici mon élève Iselde Manihar.
La jeune femme avança prudemment, comme effrayée par le jeune homme de lignée royale. Le prince la regarda à son toujours et les joues de la jeune femme devinrent pourpres. Elle était très charmante mais pas pour autant éblouissante. Elle avait des yeux bruns très communs et des cheveux noisettes coiffés en un carré très court. Son visage était pour ainsi dire un classique de la beauté du continent, fin, légèrement ovale et un nez un peu relevé. Mais la jeune femme retourna vite se cacher derrière le mage après avoir salué Lothaire d'un signe de tête, ce qui l'empêcha d'observer le reste de son corps.
Ce dernier se retourna et ordonna à ses compagnons de descendre de leur monture, ce qu'ils firent, lui compris. Voyant que l'homme de Duroche n'avançait pas d'un mètre, il le regarda avec étonnement.
- Votre couronne, prince (il tendit la main). En entrant vous n'avez plus aucune autorité.
- Je la range tout de suite dans un havresac.
- Alors méfiez-vous de notre visite dans Duroche.
L'interrogation du prince se fit sentir sur son visage, il n'avait pas compris l'allusion qu'avait faite le mage. Mais sans attendre, il retira sa couronne d'Aysya et la plaça dans une sacoche qu'il scella. Son père avait l'habitude d'imposer ses propres règles, Lothaire comprenait donc tout à fait qu'il devait obéir aux lois de Duroche. Et au moins sa tête sera moins lourde.
Priape, satisfait par l'attitude du prince, se retourna vers les six hommes vêtus d'une armures.
- Bienvenue à Duroche messieurs, suivez-moi.
Le mage parti en trombe, comme pressé par le temps.
Le groupe déambulait à présent dans les hauts quartiers de la ville, les maisons leurs semblèrent similaires à celle d'Aysya en certains points. Lothaire savait que la plupart des styles d'architecture avaient été apportés par les Kanartiens. C'était comme une véritable uniformisation des logis. Le prince se perdit presque avec les soldats dans ce dédale grégaire, et le mage ne ralentissait pas sa vitesse de marche. Cette visite paraissait être une torture de l'esprit pour l'héritier qui préférais les ruelles enneigées de son pays. Mais il essayait de cacher ses impressions pour ne pas attirer le courroux du représentant de Duroche.
- Vos appartements se situent au sein de la Bibliothèque, nous voulons garder à l'œil toutes personnes susceptibles d'engendrer un complot. Quant au lieu de l'entrevue avec le commandant, vous pouvez emprunter une de nos salles de réunions.
- Très bien, cela me convient. Ajouta le prince.
- Votre père nous a envoyé une missive dans laquelle il nous demande de vous aider dans l'organisation de votre mission, jeune homme. À présent vous pouvez vous balader dans la ville et contempler sa splendeur.
Sur ces mots le mage baissa la tête légèrement et s'éclipsa accompagné de son élève. Lothaire suivait du regard la silhouette de la jeune femme, qui l'avait intrigué par sa timidité. Les Aysyans avaient l'habitude de femmes impulsives et audacieuses.
Le jeune héritier et ses soldats pouvaient désormais profiter d'un repos bien mérité. Lothaire se retourna vers ses hommes et leur fit un grand sourire pour les inviter à disposer. Duroche était gigantesque pour une ville et le prince, lui, n'avait aucune idée des activités intéressante qu'il pourrait trouver à Duroche. Il promena son regard sur les places publiques, les auberges et les affiches en quête d'une quelconque distraction. Et sa vision se posa sur un camp d'entrainement non loin de lui. Il s'en approcha pour mieux observer les combattants se battre, mais à l'arrivée du prince ils arrêtèrent tous leur activité impressionnés par la carrure musclée du jeune homme et son imposante épée à la tête d'ours accrochée à sa taille.
- Eh toi là! Tu m'as l'air solide! Dit un homme qui interpella Lothaire. Viens te joindre à nous!
Le prince fut ravit qu'une personne ait remarqué sa musculature sous sa lourde cape. L'appel du combat était trop fort, ceci additionné à la flatterie faite plus tôt, il ne pouvait refuser. L'héritier, déterminé, retira son lourd manteau qu'il laissa tomber à terre pour laisser à découvert de puissants bras.
Lothaire foula à peine le sable de la piste de combat qu'il vit un tranchant argenté foncer sur lui. Sans une hésitation il posa un pied en arrière et fit un mouvement de rotation pour esquiver l'attaque. Son adversaire n'était autre que l'homme qui l'avait invité à le joindre. Lothaire dégaina sans attendre sa propre lame. Un sentiment de défi et de satisfaction parcourait ton son être. Les deux adversaires tournèrent en rond, yeux dans les yeux, attendant le premier coup. C'est le prince qui décida de reprendre les devant en portant un coup puissant qui alla rencontrer le fort de l'arme du second combattant. Les deux hommes continuèrent de se battre dans le bruit crissant du métal frappant le métal qui se mélangeait peu à peu à des grognements de douleur.
-
Un troupeau de spectateur s'était formé autour de la piste d'entrainement puisque ce combat était particulièrement impressionnant et divertissant. Les deux adversaires étaient inévitablement très expérimentés dans l'art du maniement d'une lame. Eranne et Clay se trouvaient également parmi la foule, la jeune femme l'avait suivi sans poser de questions, mais restait curieuse de savoir ce que lui resservait l'assassin. Elle ne comprit pas tout de suite pourquoi ils regardaient deux hommes s'affronter.
- Tu vois cet homme là (Clay pointa du doit le jeune héritier à présent couvert de bleus et de sueur)? C'est le prince Lothaire Solveig et héritier du trône d'Aysya.
- J'ai déjà entendu parler de lui, j'habi... (Clay la regardais avec de gros yeux). Et en quoi ce prince concerne l'entrainement? Questionna-t-elle son maître.
- En même temps de suivre des cours sur la magie, l'assassinat et les combats une partie de la journée, tu vas apprendre sur le terrain.
- Cela va être épuisant... Et en quoi le prince concerne une leçon? S'interrogea Eranne.
- Pour devenir Saigneur il faut avant tout que tu apprennes deux choses: n'être plus personne et être quelqu'un d'autre. Oui, cela te demandera beaucoup d'efforts. Mais c'est la vie que tu as choisie ce matin, non? Tu vas devoir suivre tout ce que je te dis, chaque parole que je prononce est importante. Sans être mégalomane. Donc je reprend, ces deux choses sont deux fondamentaux de l'art de l'assassinat, si on peut le qualifier d'art bien sûr. Savoir t'effacer du monde te permettra d'avancer en toute discrétion et devenir une autre personne t'apprendra de nombreuses choses sur tes cibles. Grâce à cela tu pourra conclure un contrat de la manière la plus parfaite qu'il soit.
Clay regarda Eranne qui buvait littéralement ses paroles, elle était très attentive au moindre mot. Cependant la jeune femme ne répondit pas et marqua un temps de pause, elle était perdue dans ses pensées, le regard noyé dans la foule de gens. Comment pouvait-elle approcher et tuer un prince? L'assassin décida t'interrompre les pensées de son élève et lui donna toutes les consignes quant à sa premières leçon.
- Je ne te demanderais pas encore de tuer un Homme, qui plus est une tête couronnée, jeune naïve! Tout ce que je souhaite c'est que tu l'approche et devienne son amie. Ce n'est pas facile, mais je ne t'ai pas dit que devenir Saigneur allait être simple. Donc, tu vas devoir battre cet héritier lors d'un tournois (Les lèvres de la jeune femme se déridèrent immédiatement). Ne t'en fait pas, tu sera suffisamment prête dans une semaine. Mais ces prochains jour vont êtres chargés en leçons sur le maniement des lames.
- Et en quoi battre un roi me permettra de devenir proche de lui? S'enquit Eranne avec une légère crainte dans la voix.
- Le deuxième fils Solveig, selon les rumeurs, est un peu trop fière de lui en combat mais sait reconnaître la valeur de son adversaire. Et si tu gagne contre lui, il n'arrêtera jamais de te provoquer en duel tant qu'il ne t'aura pas vaincue.
- Je ne suis pas sure de réussir à battre un membre d'une famille royale entraîné depuis son enfance. La seule chose que je peux faire c'est perdre contre lui ridiculement. Dit Eranne découragée.
- Je ne te laisserai pas faire une chose pareille si je ne croyais pas en ton potentiel (Il frotta son bouc). Maintenant rentrons, nous n'avons pas une seule seconde à perdre si tu ne veux pas te faire fracasser par son arme.
Eranne ne crut toujours pas entièrement à ce que l'assassin lui avait demandé, elle n'avait jamais tenu d'épée et encore moins frappé quelqu'un avec. Mais dut prendre son courage à deux main car elle s'était fait une promesse à elle même, retrouver sa famille. Puis elle acquiesça d'un signe de tête.
Le duo marcha en direction de la cache de Duroche de l'assassin alors que le combat n'était qu'au début de son apogée.
-
Les deux hommes étaient agenouillés à terre, essoufflés par l'effort considérable de cet affrontement. Cela faisait déjà presque de dix minutes que les lames n'avaient pas arrêté de s'entrechoquer. Mais ils savaient que le combat ne serait pas terminé tant que l'un n'aurait pas capitulé, trop fatigué et blessé. Lothaire, dans un sursaut d'adrénaline, rassembla toutes ses forces et jeta son bras armé sur l'homme. Ce dernier, surpris, fut percuté en plein visage par le plat de la lame. Du sang coulait à nouveau. Il répliqua après avoir craché du liquide rougeâtre et Lothaire sentit un coup d'estoc lui briser les chevilles. Il tomba littéralement sur le sable mais n'était pas découragé pour autant. Alors que son adversaire approchait pour lui asséner un dernier coup fatal avec le pommeau de son épée, le prince jeta du sable dans les yeux de l'homme incapable de voir et titubant. L'héritier fit une roulade sur le côté pour s'approcher de son ennemi et bondit une dernière fois derrière son dos pour frapper d'un coup marteau. Un craquement horrifique se fit entendre dans tout le quartier. L'homme ne poussa pas un cri car il avait eu le souffle coupé.
La foule scanda le mot étranger, car ils ne connaissaient pas le prince en personne. Il était inéluctable que cette fois-ci, le combat était terminé. Et Lothaire avança tant bien que mal vers son adversaire qui souffrait également. Il tendit sa main pour le saluer et le deux hommes partirent chacun de leur côté sur des brancards, accompagnés par des soigneurs.
La victoire du prince avait rempli son cœur de fierté, il n'avait jamais eu de combat aussi dur et palpitant depuis que son maître d'arme s'était blessé contre lui. Or, la douleur calma très rapidement son orgueil. Le médecin présent palpait ses chevilles, mais cela ne faisait qu'aggraver son mal.
- Elles sont brisées, mais ne vous inquiétez pas je vous mettrais de la pommade et des sangles pour les maintenir. Elles seront réparées pour le tournois de la semaine prochaine. Quel est votre nom? La foule entière demande votre inscription.
- Un tournois? Demanda Lothaire surpris.
- Dans une semaine, sir. Vous êtes bien sir n'est-ce pas? Vu votre épée...
- Lothaire Solveig, c'est tout ce dont vous avez besoin de connaître. Je compte sur vous pour me guérir du mieux que possible!
Le prince était très enthousiasmé par un tournois et pensait qu'y participer plairait à son père puisque cela montrerait au peuple de Duroche la puissance des Solveig. Il regarda attentivement le médecin lui prodiguer des soins, il lui bandait les chevilles et couvrait ses bleus et plaies d'une matière crémeuse qui sentait la menthe. Cela lui faisait beaucoup de bien après un affrontement. Mais il savait qu'il devait absolument se reposer dans un lit pour récupérer toutes ses forces.
Une fois soigné il se releva et reprit son équipement. La fatigue mordait tout son corps, il tenta alors de repérer la Bibliothèque au loin et s'y dirigea. Ce bâtiment immense était facilement visible depuis n'importe quel point de vu de Duroche. Une fois dans ses appartements le prince s'allongerait confortablement dans un lit et profitera d'un long sommeil mérité.
Cette première journée dans une autre région du monde fut couverte d'un grand succès pour Lothaire, il s'était mêlé aux gens du peuple et allait pouvoir leur montrer la totalité de sa force très prochainement.
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