Chapitre 11- Contrats
Clay Tlimb avait quitté le logement avec un profond malaise. Les vagues souvenirs du contrat qu'il s'était promis d'oublier le hantaient à nouveau. Mais le pire restaient les souvenirs d'elle, sa fille, à cause de la robe bleue qu'Eranne portait. L'assassin était en proie à un tourbillon de souvenirs qu'il lui faisait perdre pied. C'était un réel danger pour un assassin, il devait absolument balayer cette tornade mentale autrement il serait incapable d'agir en cas de problème. Se rendre dans un lieu confortable et qui lui permettrait d'oublier ses souvenirs semblait la meilleure solution. Et quoi de mieux que de l'alcool et des filles pour noyer sa mémoire?
Il s'était rendu à l'établissement La Dame Du Lac, situé à quelques rues tortueuses de sa cache. Il n'avait jamais vu cette maison close et cela l'inquiétait d'aller dans un endroit qu'il ne connaissait pas. Mais il devait être proche d'Eranne pour la protéger des autres ou d'elle même, en cas de nouvelle crise. L'assassin n'avait pas oublié le visage de bête enragée vu à Souchefume, c'était une des raisons pour laquelle il la gardait à l'œil. Cependant, Clay sentait bien qu'il avait développé de l'attachement, pourtant prohibé dans sa profession. C'était plus fort que lui, comme si la déesse Pureté le punissait pour sa fille.
Continuer à se torturer l'esprit ne servait à rien. L'assassin secoua sa tête pour chasser ses pensées noires et pénétra dans l'établissement. Il y repéra la moindre issue, chassant toutes menaces potentielles . Ses yeux sondèrent tout le bâtiment tel un rapace survolant les plaines.La Dame Du Lac, qui semblait être pour les clients les plus fortunés, possédait trois petites fenêtres rondes à l'étage et une unique porte. De plus, les armes étaient conservées dans une pièce qui leur à part.
Ils mettent les gens complètement à nu, pensa l'assassin peu rassuré et avec une légère teinte d'amusement.
Clay vérifia mentalement l'emplacement de ses armes, son épée toujours accrochée à sa ceinture, le poignard dans son dos, les quatre dagues accrochées à ses cuisses et dans ses bottes, enfin le stylet caché dans sa ceinture. Même si il y avait peu de chances que toutes les armes soient prises et que quelqu'un tenterait de le tuer, aussi effrayant soit-Clay, il s'agissait d'un des préceptes les plus importants du métier de Saigneur, toujours être armé et capable de se défendre. Car dans leurs croyance La Mort devait nécessairement venir les prendre une fois leurs jours sur terre écoulés. Cependant, ils savaient tuer par l'usage de la magie ou de leurs propres mains, puisque leur corps était forgé pour le crime.
Une dame blonde au sourire radieux, habillée d'une robe légère et transparente vint l'accueillir. Elle ne dit rien mais regardait l'assassin les yeux plissés d'une joie surjouée. Elle lui retira sensuellement son épée au pommeau de rose et la déposa sur une table métallique. Elle continua en dansant comme les femmes exotiques du Sud de l'Empire Karnatien, des ondulations de leurs bras gracieuses autour de leur corps drapé dans des voiles fins. Mais, bien qu'envoûtante pour les autres hommes, cela ne fit rien à l'assassin, toujours rongé par ses souvenirs. La femme aux cheveux d'or passa la main sous sa cape, elle prit le poignard et le déposa à côté de l'épée. Ses mains descendirent jusqu'au cuisses de l'assassin. Soudain elle senti une poigne de fer lui arracher le bras tout en broyant son poignet.
- Tu m'as l'air dans savoir beaucoup sur mes cachettes, s'enquit Clay en plongeant son regard sombre dans les yeux de la femme.
- Sand L'Entaillé est le plus fidèle de nos clients (elle montra à l'assassin les bleus qui recouvraient ses deux bras).
- Ce fils de putain est à Duroche ! s'exclama Clay d'une voix colérique alors que les femmes se retournèrent vers lui.
Sand L'Entaillé, Saigneur réputé dans les contrées dans les contrées d'Aysya et de l'Empire Karnatien pour voler des contrats à ses confrères et les signer de sa main, même si le code d'honneur les en interdisait. Clay le détestait au plus au point, même dans un monde de meurtre et de sang un code d'honneur restait un code d'honneur. Malheureusement ces mêmes lois l'empêchait de tuer Scaris L'Entaillé de ses propres mains, l'assassin se contentait de lui vouer une profonde haine et de cracher sur sa réputation. On disait aussi de l'Entaillé qu'il aimait conclure ses meurtres de la manière la plus violente qu'il soit. Cette attitude excessivement brutale se retrouvait aussi dans son comportement quotidien : des femmes battues à sang, des fenêtres fermées à chacune de ses balades, des regards fuyards... Clay s'en voulait de ne pas pouvoir agir contre cela, il préférait regarder les taches bleutés avec dégoût et adopter un comportement plus amical.
- Laisse, je sais très bien retirer mes armes seul.
La femme enleva ses mains, tête baissée, mais restait près de l'assassin pour prendre ses armes qu'elle posa sur le meuble. L'idée de se retrouver complètement à nu ne lui plaisait pas. Il avait essayé de partir et de laisser la jeune femme avec ses quatre dagues, son épée et son poignard. Mais la fille de joie semblait très au courant sur la manière de dissimuler les armes. Cela rendait l'assassin très suspicieux, il la garderait à l'œil de temps de sa beuverie pour s'assurer qu'elle n'était pas autre plus q'une putain.
Le salon principal se composait de neuf klinés de marbre décorés des attributs des Neuf dieux, un arbre d'une taille colossale pour La Vie, une pomme pour La Pureté et un crâne d'oiseau pour La Mort. Ceux des dieux secondaires et des dieux des Hommes, plus petits, étaient déjà occupés par des travailleuses du plaisir. Cela aurait été un affront aux yeux des prêtres et de leurs adeptes de commettre l'acte de la chair sur ces meubles divins, mais ces les clients étaient trop occupés et se souciaien à peine des magnifiques ornements. Des tissus colorés et fins étaient accrochés de toutes parts au plafond, qui donnait une certaine mysticité à la pièce. La décoratrice possédait un talent indéniable pour embellir un lieu. Mais cette ambiance agréable et élégante était gâchée par un feu étouffant qui brûlait dans une cheminée.
Clay retira sa cape, la chaleur le faisait transpirer, et s'installa à une table où il pourrait profiter du spectacle des femmes. Car non, il ne voulait pas les toucher, juste les voir danser dans un déhanchement gracieux lui suffisait amplement. Son propre code moral lui interdisait d'imposer des souffrances physiques par plaisir à une femme qui ne voulait pas non plus. Il n'avait pas pitié d'elles, car c'était la manière dont elles gagnaient leur vie. Lui bafouait bien volontairement son âme.
Il commanda une bière, mais fût rapidement déçu, dans ce genre d'établissement noble on ne buvait que du vin. L'assassin n'aimait pas cette boisson, si bien qu'en avalant d'un trait deux bouteilles il grimaça et faillit arroser l'âtre de cheminée ardente de ce même liquide. Cependant, il se forcerait car il recherchait l'effet enivrant de cette boisson.
- Femme, apporte moi quelque chose de buvable, tonna-t-il à la fille rencontrée à l'entrée.À la place, une dame aux cheveux bruns ondulés approcha, une bouteille à la main. Sa tenue, moins légère que les autres filles, démontrait son rang de proxénète de l'établissement. C'était une beauté glaciale au visage anguleux qui contrastait avec la beauté exotique des autres filles. Elle déposa violemment la bouteille remplie sur la table de l'assassin qui la regarda de travers, sans aucun doute, c'était une femme de caractère.
- Du vin au miel, l'un des plus doux, dit-elle d'une voix ferme.
- Vous savez où vous pouvez le foutre votre vin doux ? répondit Clay d'une voix fortement avinée.
La femme posa son regard assuré et dédaigneux sur Clay, visiblement perdu dans ses pensées. Elle se retourna et repartit tout en glissant une petite feuille de papier sur la table. Clay avait déjà une idée de ce que cela pouvait être, il se força à le prendre et le déplier.
Un contrat...
Il ne voulait pas s'embarrasser d'un crime si important, pis encore il s'agissait de son client le plus influant de toutes les contrées de l'Empire et d'Aysya. Heureusement le meurtre devait avoir lieu dans plusieurs semaines, l'assassin ne s'imaginait pas tuer dans un état d'ivresse. Il eut même du mal à lire les différents termes. Clay replia alors le papier, le mit dans son plastron de cuir afin d'étudier d'étudier le document le lendemain.
Il se leva et sa chaise crissa sur le sol en bois, il ne se préoccupait pas de l'agacement que cela leur procurait. Il n'oublia pas de payer sa dette quant aux innombrables bouteilles de vins jonchant le sol. Une autre jeune femme lui apporta ses armes qu'il regarda comme ses plus précieuses possessions. L'assassin les remit toutes à leur place, il se sentait à nouveau prêt à affronter les ténèbres. Puis il quitta La Dame Du Lac, maison close dans laquelle il n'irai plus jamais.
- Bonsoir Clayounet, dit une voix qui masquée par l'obscurité.
La silhouette d'un homme puissant se dessina devant Clay. L'assassin ignora l'homme et continua son chemin en le bousculant. Mais ce dernier était plus fort et plus grand que Clay. Si puissant qu'une simple main posée à l'épaule l'arracha de sa marche.
- Content de me voir à Duroche ?
Le poing de l'assassin s'écrasa sur le visage de la silhouette qui ne broncha pas. Clay était trop aviné, l'emploi de ses armes ou encore de la magie, était à éviter. Et ses coups de poings n'étaient pas suffisamment puissants.
- Sand, je te jure qu'une jour je te tuerais.
Le second Saigneur s'étouffa presque de rire.
- Clay, je te jure qu'un jour je ne volerai plus tes contrats, ironisa Sand. Le code d'honneur ne fait pas de toi un Saigneur, non. Un Saigneur tue, c'est tout.
- Justement, c'est ce même code d'honneur qui te garde en vie, répliqua Clay. Si nous avons voté pour ton admission. Alors il est aussi possible de réunir un nouveau conseil, et ainsi, te renvoyer à ta vie de misérable. Et là, je te tuerais.
- Essaye un peu... Je vais te laisser, j'ai des affaires à reprendre !
En s'approchant des lanternes qui éclairait la porte de la maison close, Sand dévoila une balafre, à la fois hideuse et effrayante, qui parcourait son visage carré. D'où son surnom de l'Entaillé. Il regarda une dernière fois son confrère avec un sourire moqueur et disparut dans l'établissement.
- Bon courage Clayounet ! le salua-t-il.
Clay le détestait, mais ne voulait pas gâcher le reste de sa soirée en se battant avec un pseudo camarade. Il s'en alla et tituba jusqu'à sa cache de Duroche. L'alcool avait réussi à chasser momentanément ses idées noires. Dès à présent, il se devait d'évacuer le vin. Heureusement la magie des Saigneurs permettait de mieux résister à l'alcool.
Mais le jour n'allait pas tarder à se lever et il allait devenir Maître Saigneur pour la première fois.
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