33. Ce que tu perds ne reviens jamais
Je le savais. Je savais que je commettais une grosse erreur en exposant ma relation avec Cole. Je le savais pertinemment et je me suis tout de même laissé à croire que ça pouvait marcher.
Bien-sûr, il a fallu que Jasper arrive pour tout détruire. Ne pouvait-il pas, pour une fois, rester loin ? Non, évidemment. J'avais cru pouvoir gagner quelques jours de répit, mais non ! Le pire dans tout ça, c'est que j'ai mis Cole en danger. Et je ne permettrai pas qu'il lui arrive malheur par ma faute.
Et tous ce que j'ai trouvé pour arranger cette situation pour l'instant, c'est fuir. Je vais donc rester enfermé dans cette chambre, sans bouger, jusqu'à ce que Jasper dégage de cette émission. Ou que Snakelace me vire pour avoir contrevenu aux règles en restant cloîtré dans cette pièce.
— Lucas !
Je sursaute et manque de tomber du lit. Thomas entre en trombe, claque la porte derrière lui et se dresse au-dessus de moi, mains sur les hanches. Je les étudie quelques minutes, lui et ses habits aussi sombres que ses cheveux et son âme ; avant qu'il ne m'assène une énorme gifle.
Je hurle de surprise plus que de douleur et me redresse d'un mouvement vif. Il ne m'a pas frappé très fort, mais ma mâchoire a déjà souffert du coup de Jasper.
— Mais qu'est-ce qui te prends ? je crie.
Il fait un pas en arrière, comme pour s'assurer que je le vois bien et pointe un doigt accusateur vers moi.
— Toi, tu vas m'écouter bien attentivement.
Je ne peux retenir un éclat de rire nerveux.
— Pas besoin de faire ton bad boy avec moi, Thomas. Je me fiche pas mal de ton background.
Je vois ses yeux s'agrandir sous l'effet de la colère et il se jette sur moi. Ses mains fermement accrochées à mes épaules, il m'écrase sur le matelas. Je ne l'ai jamais vu comme ça. Il me ferait presque plus peur que Jasper, à cet instant. Mais qu'est-ce que je fous ? Depuis le début de cette émission, je fais vraiment n'importe quoi et je me retrouve sans cesse dans des situations impossibles.
J'observe ma respiration s'accélérer, mon cœur s'affoler. Ses battements ne sont plus aussi doux que lorsque je suis avec Cole.
— Arrête, je souffle. Tu me fais mal.
Thomas relâche un peu son étreinte mais me maintient toujours étendu sur le lit. Il met tout son poids sur mon corps, si bien que je peux à peine bouger la tête. Au-dessus de moi, je le vois fermer les yeux et je prie pour que sa colère retombe. S'il y a une chose pour laquelle je suis doué, c'est bien mettre en rogne les mecs violents.
— J'en ai ras le cul de toi. Je me fous bien que tu t'intéresses à moi autant qu'à la première fois de ta grand-mère ; ce que je n'accepte pas, en revanche, c'est que tu fuis au moindre truc. On n'est pas dans un jeu vidéo ou un livre de cuisine où tu suis ta foutue recette à la lettre.
Il prend une grande inspiration et rouvre les yeux pour les planter dans les miens. Ses iris sombres me jettent des éclairs.
— Si ça ne tenait qu'à moi, je te laisserais crever sous les coups de Jasper. Mais on est une équipe. Et cette idée à beau m'arracher autant de joie qu'une vidéo de chatons, c'est-à-dire aucune ; c'est notre meilleure chance de rester dans cette émission. Retiens bien ça : si je sauve tes fesses, c'est uniquement pour les caméras.
Je bouge un peu pour tenter de libérer ma cage thoracique et utilise le peu d'air dans mes poumons pour souffler :
— Il n'y a pas de caméras, ici.
Le sourire qui se dessine sur le visage de Thomas me donne envie de prendre mes jambes à mon cou. S'il ne me maintenait pas aussi fermement, je crois que je serais en train de trembler de tout mon corps.
— C'est ce que tu crois.
Il rapproche son visage du mien, si bien que je sens son souffle sur mes lèvres et que son haleine se mélange à la mienne...
— Tu n'as pas le droit de lâcher Cole comme ça. Tu n'as pas le droit d'abandonner l'amour pour un gars comme Jasper. C'est la vraie vie ici. Tout ce que tu perds, tu ne le retrouves jamais. Jamais, tu m'entends ? Alors laisse-moi te dire une bonne chose, Lucas...
Il s'arrête pour reprendre son souffle et enfonce ses ongles dans mes épaules. Je retiens un cri de douleur.
— Tu vas te lever, descendre ces maudits escaliers et aller récupérer ton mec. On n'abandonne pas les gens qu'on aime juste par peur. Se laisser dominer par la peur c'est pour les mauviettes. Tu es une mauviette, Lucas ? Certainement pas. On perd trop à se tenir loin des choses et des gens qui font battre notre cœur plus fort. Quand ils disparaissent, on regrette et ce n'est plus la peur qui nous brise. Ce sont les souvenirs manquants, ce qu'on n'a pas construits par peur. Alors bouge ton cul, vainc ta peur et imprime bien toutes ces maudites images dans ton crâne d'imbécile.
Thomas presse un doigt sur ma tempe pour illustrer ses propos. À vrai dire, je suis trop étonné par ses paroles pour avoir encore conscience de la douleur ou de l'effroi qui naviguent dans mes veines. Alors je me tais et je laisse Thomas graver ses paroles en moi.
— Tu sais pourquoi Jasper en a après toi ? Parce que tu lui fais peur. (Il ricane.) Ouais, tu lui fais peur. Et tu sais pourquoi ? Parce que t'es plus fort que lui. Oh ça oui, mille fois plus fort. Ce mec est timbré, il fera tout pour gagner. Mais toi, oui, toi ; tu peux lui prendre sa place. Parce que t'es mignon et sensible et que les spectateurs adorent ça. Tu leur plais bien plus qu'un gars qui se la joue mauvais garçon comme moi.
Il s'écarte de moi et détache son poids de mon corps. Je me force à ne pas me redresser tout de suite et inspire à fond pour laisser l'air frais pénétrer dans mes poumons.
— Moi, conclut-il, je ne l'intéresse pas parce que je n'ai aucun poids dans cette compétition. Je ne suis qu'un grain de poussière pour lui. Aussi insignifiant qu'une araignée derrière l'armoire. Les gens de l'autre côté de ces caméras se foutent pas mal du mec qui n'apparaît jamais à l'écran. Toi, Lucas, tu peux tout changer pour Jasper. Tu as le pouvoir de le faire tomber. Et si tu le peux, c'est aussi parce que tu as des amis ici. Ce qui n'est pas le cas de tout le monde.
Si ce n'avait pas été Thomas face à moi, j'aurais juré que ces derniers mots étaient plus personnels qu'on ne pourrait le croire. Sauf que Thomas n'est pas le genre de personne à laisser apparaître ses sentiments, surtout pas de cette façon. Pas avec des mots. Lui, il s'exprime avec le silence.
Cette fois, il s'éloigne complètement de moi et se poste au milieu de la pièce, les traits tendus. J'en profite pour me relever et reprendre possession de mon corps engourdi. Mon esprit libéré des griffes de Thomas, l'image de Cole s'impose à moi.
Ça me coûte de l'avouer, surtout après une pareille scène, mais Thomas a raison. Une fois de plus. Je savais à quoi je m'exposais en me montrant avec Cole. Il a fait ce choix avec moi. Je savais que Jasper allait me tomber dessus à un moment ou à un autre. Et j'ai tout de même choisi de l'embrasser, parce que la peur ne m'a pas arrêté sur le moment. Elle ne vient toujours qu'après.
Soudain, je suis pris d'une envie inexplicable de rire. Je tente d'étouffer mon hilarité mais les soubresauts de ma poitrine me donnent envie de rire encore plus. Ce n'est clairement pas le moment pour ça, mais mes émotions en ont décidé autrement. Sans pouvoir me retenir plus longtemps, j'éclate de rire.
Thomas se retourne d'un seul coup et me fixe comme si j'étais fou.
— Pourquoi tu rigoles, imbécile ?
J'essaie de contenir mes crises de rire, mais les larmes s'ajoutent et, finalement, mes sentiments s'embrasent. Lorsque, après de longues minutes, je parviens enfin à retrouver mon calme, Thomas n'a pas bougé. Les mots s'échappent de mes lèvres sans que je ne puisse rien y faire :
— Pourquoi tu me dis ça ?
Je relève la tête et fixe Thomas en attendant sa réponse. Surpris, il met un moment à réagir. Finalement il se tourne vers moi et ses lèvres se relèvent en un sourire étrange.
— Pour les caméras, bien sûr. Je croyais te l'avoir dit.
— Oui, mais...
Je ne parviens pas à finir ma phrase, parce que sa discussion avec Jasper ce matin me revient. Je n'étais pas censé l'entendre, il ne se doute pas que j'ai connaissance de son lien avec le roux. Alors, soudain, tout s'éclaire. C'est pour ça qu'il m'a dit ça.
— Thomas, je...
Il ouvre la porte. Je ne l'avais même pas vu bouger. Il me fixe sans ciller et déclare du bout des lèvres, d'un ton qui fait couler une goutte de sueur froide dans mon dos :
— Tu crois peut-être que Jasper te fera du mal si tu te montres avec Cole ; mais moi, Lucas, si tu ne te remets pas avec lui... Je te tuerai.
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Bonjour chers lecteurs ✨
Bon, on fini sur une phrase un peu violente de Thomas, mais rassurez-vous, il ne va tuer personne (enfin, normalement 😅)
Par contre, tout le monde est d'accord pour être de son avis ? On veut du Lucole nous ! 😎
J'attends vos retours avec impatience, bonne semaine 🖤🤍❤️
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