17. Havre de paix
17.
Rien n'était discernable au premier abord, une mer de lumière inondait tout le paysage. C'était un flash aveuglant, qui prit quelques secondes à se dissiper. Rien, juste un voile de blanc, et beaucoup de résonnance. Son nom, peut-être, flottait dans le mouvement.
« Seungmin ».
Encore.
« Seungmin ».
Sa tête tournait, il ne voyait même pas son propre corps mais pouvait sentir le vent sur ses bras, sur son visage, comme le souffle inquiet qui effleurait son oreille. Tentant de se défaire de cette torpeur, Seungmin eut un sursaut. En bougeant, il prit conscience de la pression qu'il avait sur lui, et la lumière faiblit.
— Seungmin, t'as pas à avoir peur.
Il se rendit compte qu'il était debout, mais ses jambes flageolaient, les genoux légèrement fléchis. Sa pupille se dilata mais son faciès n'exprima pas la surprise qui le prit. Les plaines apparurent sous ses yeux. Une étendue verdoyante, semblable aux landes et pourtant bien différente.
Le chapelier leva la tête, comme pour vérifier qu'il en avait encore le contrôle. Une main le retenait au bas de son dos, sa silhouette vacillait et les bras de Hyunjin étaient là, autour de lui, alors que son visage reposait précédemment contre son épaule.
Il n'avait pas perdu connaissance, mais presque, il devait avouer que le changement aussi brusque de réalité lui avait donné un sacré coup de mou.
— Hyunjin ?
Ce furent ses premières paroles quand il parvint à se redresser, observant d'une mine encore peu alerte, le faciès du mage à ses côtés. Hyunjin lui laissa plus d'espace, gardant un appui sur son épaule tout en le laissant tenir par lui-même. Pourtant, encore léthargique, Seungmin gardait ses doigts vissés à son poignet.
Il essaya de poser une question. Où on est ? Pourquoi ? Comment ?
La prairie souffla alors depuis le ciel, le vent vint déposer des poussières de couleur contre ses joues. Sa bouche se ferma, comme si ses mots allaient briser le salut qu'on lui offrait. L'herbe se couchait, répandant une vague de lumière sur toute sa surface, les reliefs des montagnes et l'or qui coulait dans les nuages. Ce n'était pas une ville, pas un village. Pas âme qui vive si ce n'étaient la leur. Au loin, entre deux bosses de terre, une maisonnée des plus modestes, et des arbres, rares, qui s'éparpillaient comme les premières étoiles.
— Où sommes-nous ? parvint-il à dire entre deux souffles émerveillés.
— Là où j'ai grandi, lui répondit Hyunjin.
Seungmin baissa le regard vers ses pieds, ils étaient près d'un ruisseau, à peine discernable sous le tapis de fleurs et de verdure.
— Je ne m'attendais pas à ça...
— A quoi ?
Le chapelier se tourna, la main de Hyunjin glissa de son épaule pour effleurer son bras. Il essayait de lui sourire, même si c'était un peu lourd à porter sur ses lèvres.
— Le repère noir... je pensais que c'était quelque chose de monstrueux, où tu disparaissais la nuit.
Hyunjin le lâcha. Ce n'était pas un geste hostile, mais simplement pour avoir une vue plus vaste sur ce qui les entourait.
— C'est bien là, la différence. La nuit, ça n'a rien à voir.
— Qu'est-ce que tu veux dire ? Seungmin le suivit dans ses pas.
— Nous sommes en guerre, tu le sais n'est-ce pas ?
Cet endroit ressemblait à un monde à part, un huis clos. A croire que personne ne pouvait y mettre les pieds, presque féerique, hors de la réalité. C'était si étrange pour Seungmin, le repère noir s'effilait dans ses pensées comme des ténèbres sans fins, un désordre de flammes et d'obscurité, là où Hyunjin vivait ses nuits les plus effroyables et revenait la tête pleine de misère. Parfois, Seungmin pouvait sentir que quelque chose en lui se cassait quand il y restait.
— Je déteste cette guerre, et tout ce qui s'y rapporte, lui partagea le mage d'une voix plus faible. Je ne veux pas que cet endroit soit touché par leurs bombes et leurs machines, mais je ne suis qu'un homme. Peu importe tout ce que je fais pour les tenir éloignés, ils sont là.
Comme un point ancré dans l'océan, Seungmin suivait sa silhouette qui marchait entre les brins, ses doigts qui effleurèrent le premier arbre et la voute céleste miroitant dans l'étang. Ils s'approchèrent de la maison, le moulinet tournait encore à côté, trainant le courant dans son mouvement. Ce n'était pas silencieux, mais le bruit, pour une des rares fois, n'avait absolument rien d'angoissant.
— La nuit, je vais en guerre.
Seungmin se figea.
— Quoi ?
— Sa majesté de Magnecourt, madame Sulliman, veux m'avoir aux côtés de ses soldats pour qu'on remporte la bataille. Mais moi je veux pas m'allier à quelqu'un, combattre depuis un camp pour anéantir le second. Je vais en guerre pour arrêter la guerre.
— Donc, tu te bats contre le monde entier ?
Hyunjin s'arrêta lui aussi de marcher, son corps pivota. Cette fois, il souriait vraiment, mais ce n'était pas de la joie.
— Il faut bien que mon maléfice serve à quelque chose non ?
— Ton maléfice ?
— Calcifer t'a donné un indice, la sorcière des Landes t'en a donné un autre. Moi aussi, je suis prisonnier de quelque chose.
Le noiraud se pencha, tendant la main vers une marguerite échouée dans les brins. Un rayon doré se posait sur ses pétales et Hyunjin la laissa tomber dans le ruisseau. Arrivant à ses côtés, Seungmin suivit le cours d'eau, le point d'or qui s'écoulait jusqu'à la plus grande étendue, près de la maison.
— Depuis que je suis enfant, c'est ici que je viens me réfugier. Mais maintenant, c'est à double-tranchant.
— Tu y viens toujours seul ? Personne d'autre ne passe cette porte ?
Seungmin parut stupéfait, se tournant vers la petite bâtisse de laquelle ils étaient sortis plus tôt, un simple tas de béton de la largeur de deux bras, avec un toit et de nombreuses lianes qui y poussaient. Hyunjin hocha la tête, et quand le chapelier lui rendit son attention, ils s'observèrent enfin sans barrière.
Sans aucune retenue ni aucune gêne ? Peut-être pas encore, mais là ils étaient seuls, sans les vociférations agacées d'un esprit du feu, ou les questions trop curieuses d'un enfant de neuf ans. Ici, personne ne leur demandait de choisir ce qu'ils étaient, le temps ne les précipitait pas dans une réponse qu'ils n'avaient pas envie d'énoncer.
Du bout des lèvres, le noiraud murmura, plus aux nuages dans le lointain qu'au jeune homme à son bras :
— Pourtant, aujourd'hui je t'y ai amené...
— Pourquoi tu l'as fait ?
Hyunjin, c'était indéniable qu'il tenait à son jardin secret. Même Jisung ne semblait pas savoir grand-chose de cet endroit, c'était inhabité, isolé, mais n'inspirait pas les aspects néfastes de la solitude.
— Parce que tu as le droit de savoir ce que je cache au monde.
— Pourquoi moi ?
Et ça, cette question, elle ne se limitait pas qu'à maintenant. Elle englobait un tout, un univers, une continuité. La rupture avec le Hyunjin qui montrait au monde son assurance et l'éloquence qui faisait tomber le peuple dans ses griffes. Pourquoi lui, le jeune chapelier d'une petite ville portuaire, qui croulait sous le travail de son défunt père et qui était sûrement bien trop tête en l'air. Seungmin n'était pas spécialement le genre de garçon qui remarquait les belles personnes dans les rues marchandes, qui rêvait d'une rencontre féerique dans un café au petit matin. Il savait reconnaitre le charme et la beauté, quand elle lui était mise sous le nez, pas quand elle passait en coup de vent. Pour Seungmin, il était impossible de ne s'accrocher qu'à un unique instant.
Et pourtant, ce jour-là, sa rencontre avec Hyunjin avait été comme telle, juste un instant. Pour la première fois, une simple unité de temps s'était ancrée dans sa mémoire.
— Pourquoi toi ? Je me suis posé cette question dès le premier jour. Tu sais quoi Seungmin ? Je n'en ai toujours aucune idée.
Hyunjin tendit la main vers son visage, les yeux de Seungmin s'ouvrirent en grand, mais encore une fois, à part ses prunelles, le reste de son expression tenta de rester posée. Les doigts de Hyunjin s'arrêtèrent, à quelques millimètres de sa joue, il pouvait l'effleurer, comme le souffle du vent le ferait. Au lieu de ça, il l'abaissa vers son cou découvert, la peau claire parcourue de frissons. Les phalanges du mage passèrent sous un morceau de tissu, s'accrochant à la petite cordelette pour découvrir la pierre précieuse cachée.
Son collier d'émeraude.
— Je t'ai reconnu, avec cette émeraude. J'aurais même pu croire que c'était elle qui t'avait ramené à moi.
— C'était Navet.
Hyunjin pouffa, Seungmin fronça les sourcils.
— Pourquoi tu rigoles ?
— Parce que t'es quand même quelqu'un d'étrange, répondit le noiraud. Tu vis dans un château qui marche, tu es sous l'influence d'un sort qui t'a vieilli de soixante-ans, tu voyages aux quatre coin du pays grâce à une porte et tu discutes tous les jours avec un esprit du feu. Et malgré tout ça, tu ne peux pas croire que ce n'est pas un hasard si on a été amenés à se revoir ?
Seungmin mordit sa lèvre, triturant ses doigts alors que Hyunjin replaçait délicatement son collier autour de son cou. Lorsque le noiraud tenta de reculer, la poigne du gris vint se refermer sur son bras, glissant sur la peau avec une crainte durement dissimulée.
— Ça me fait bizarre tout ça, lui avoua le garçon. Parfois, j'ai juste l'impression que je suis pas dans la réalité. Que je vais me réveiller et que tout ça, ça n'a jamais existé.
— Et tu aimerais ? lui demanda Hyunjin.
— Jamais de la vie.
Il se rendit compte qu'il n'avait pas réfléchit en répondant, que c'était sorti comme une inspiration brusque. Et les joues de Seungmin se colorèrent sous le sourire de Hyunjin. Sourire qui pourtant, s'effila pour laisser place à une ombre dans ses yeux.
— Je t'ai amené ici pour te montrer quelque chose.
— C'est ce que tu disais.
— Et peut-être que tu fuiras.
Hyunjin coupa le contact, leurs peaux se séparèrent, leur toucher s'évapora dans les montagnes. Il fit plusieurs pas à reculons, comme pour laisser à Seungmin suffisamment d'espace, pour détaler si ça devenait trop dur à voir.
Hyunjin se tint droit, les sourcils froncés et les pupilles plus petites. Les bourrasques autour de lui devinrent plus fortes et Seungmin se barra les yeux de son avant-bras pour mieux discerner ce qu'il se passait.
D'abord, le plus jeune ne comprit pas. Tout ce qu'il vit fut la peau du mage qui sembla s'assombrir, adopter une teinte plus obscure, comme un morceau de ciel dans la nuit, ou la brulure d'un épiderme. Seungmin le vit grimacer, ses yeux se plissèrent, alors par reflexe, il avança d'un pas.
— Ne t'approche pas.
Seungmin se figea. Une plainte, une supplique s'échappa des lèvres du mage, puis rapidement, sa peau fut percée d'aiguilles, ses poings se serrèrent pour l'empêcher de laisser la douleur se voir sur son visage. Fierté ou peur, Hyunjin se faisait misère pour cacher à son cadet que c'était douloureux, que cette métamorphose, en plus de lui secouer les entrailles, les déchiraient un peu plus à chaque fois.
Les aiguilles parcoururent son corps, Seungmin porta une main à sa bouche. D'une certaine façon, il avait envie de lui dire d'arrêter, de ne pas se faire ça. Quelle force mentale devait avoir cet homme pour supporter de telles transformations. Faisait-il cela à chaque fois qu'il désertait ?
Les aiguilles devinrent un plumage bleu nuit, lui recouvrant la totalité de la personne. Comme une ouverture vers le chaos, deux grandes ailes se déployèrent de part et d'autre de son dos. Seungmin, sous la surprise, eut un puissant mouvement de recul, ses doigts plantés dans la peau de ses prorpres bras. Hyunjin, dans le processus pénible de son changement, sourit tristement en le voyant autant pris au dépourvu.
Puis, la dernière étape fut ses mains, devenant de grandes serres de rapace, plus imposantes, plus menaçantes, capables d'éventrer la carcasse d'un bombardier et d'en déchiqueter l'intérieur.
Se tenait devant Seungmin, le monstre, la face cachée du prince d'Ingary, un animal. Celui que sa majesté voulait utiliser pour combattre en l'honneur du pays, faire de Hyunjin une autre machine de guerre.
Plusieurs minutes s'écoulèrent, et personne ne bougeait. Il n'y avait qu'eux, que leurs propres pensées, leurs décisions et leurs réflexions. Adultes ou enfants, l'âge ne comptait plus pour quelque chose d'inconnu.
— Est-ce que tu as peur de moi ? fit-il en retenant un geignement de douleur.
Pour Hyunjin, cette question était rhétorique. Qui n'aurait pas été terrifié ?
Ce fut pourquoi ses pupilles se dilatèrent quand Seungmin s'approcha, d'un pas, puis de deux. Certes, sa démarche était légèrement tremblante, mais pas forcée. Et devant cette image, cette détermination, Hyunjin fut celui qui se retint de reculer, le regard grand, n'arrivant pas à comprendre. Il aurait eu envie de rire nerveusement, lui désigner la porte du repaire dans son dos et lui dire « Seungmin, la sortie c'est par là-bas. ».
Mais les choses ne fonctionnaient pas toujours suivant un pronostic, et l'humain avait sous sa manche plus de facettes que quiconque pourrait le croire. Peut-être que quelques semaines plus tôt, Seungmin n'aurait pas eu ce courage, et qu'au contraire il aurait déjà disparu dans les landes pour retrouver sa maison. Maléfice ou pas, le Seungmin d'avant n'aurait pas eu la volonté d'affronter des démons qui n'étaient pas les siens.
Et Seungmin arriva face à Hyunjin, qui à cause de la métamorphose, était aussi devenu plus grand. Ses ailes déployées le rendaient immense, une créature de l'ailleurs, d'un autre univers. Pourtant, quand Seungmin tendit ses mains, et les posa de chaque côté de son visage, cette créature, légendaire et monstrueuse, parut devenir minuscule, s'effondrer sous son toucher.
— Tu ne me fais pas peur.
Hyunjin se figea, les traits de son visage exprimèrent une telle stupeur que ses serres frémirent contre son plumage. Seungmin l'observait, sous toutes les coutures. Ses mains passèrent dans son cou, sur ses épaules, frôlant les arabesques de couleur, devinant pourtant sous tous ces artifices la même chaleur et les mêmes essences.
— Pourquoi j'aurais peur de toi ? lui demanda-t-il.
Mais Hyunjin n'arrivait pas à répondre, quelque chose dans sa gorge l'empêchait de prononcer la moindre parole sans qu'il ne menace de tomber dans le néant. Il n'avait pas les réponses à tout ce qu'il ressentait, c'était aussi délicat que dévastateur.
De la même façon, le mécanisme se remit en marche, à l'envers. Seungmin resta à ses côtés quand les ailes disparurent, quand les plumes rétrécirent pour revenir se loger sous sa peau, embryon de douleur. Le noiraud grimaçait, geignait, essayant de se raccrocher à la sensation des mains de Seungmin, qui ne le lâchaient pas quand bien même parfois, l'image de sa souffrance provoquait un frisson désagréable au chapelier. Et peut-être qu'entre deux sifflements dans la montagne, le noiraud se retenait de pleurer de désarroi. Le vent n'était plus aussi fort, il ne restait dans les vestiges de sonate, que quelques mots rassurants.
Lorsque Hyunjin reprit sa forme humaine, il avait le souffle court et les membres embrasés, il se cambra et ses jambes lâchèrent.
— Hyunjin !
Le mage s'écroula, entrainant Seungmin avec lui. Dans l'herbe un peu haute de ce jardin d'Eden, sa respiration se fit encore forte, ses yeux se fermèrent. Quelques mèches lui tombaient sous les paupières, et Seungmin s'assit, calant délicatement la tête de son ainé sur ses jambes. Son corps avait subi, il se remettait de la discorde. Cet endroit était son havre de paix, là où le temps ne lui courait plus après et où il cherchait du réconfort avec lui-même. Aujourd'hui, il y avait amené quelqu'un, il ne le faisait jamais. Il pensait que ce serait la première et la dernière fois, car il pensait qu'après, Seungmin aurait juste disparu de leur vie.
Mais ils étaient là, tous les deux, l'un reprenait difficilement ses esprits, et l'autre, posait une main sur son front en lui demandant, soucieux, s'il avait encore mal.
— Tu as essayé de me faire fuir, déclara le chapelier en passant une main rassurante dans ses cheveux.
— Je n'ai pas essayé... je pensais juste que c'était ce qui allait se passer.
— Tu t'es trompé.
Les nuages tournèrent au-dessus d'eux, Seungmin sentait son cœur battre dans sa poitrine, il mordit sa lèvre. Il dégagea quelques mèches qui tombaient sur le visage du jeune homme, ses yeux mi-clos dans lesquels disparaissaient peu à peu quelques tourments. Il se pencha vers lui, ses prunelles tentant de capter les siennes, il frôla sa joue.
— Je n'ai pas peur de toi, lui répéta Seungmin.
— C'est absurde.
— Pourquoi ?
— Parce que toi, tu me fais peur.
Hwang Hyunjin pensait qu'il était juste destiné à errer, profiter de la vie tout en la regardant paradoxalement lui glisser entre les doigts. Quelque part, la venue de Seungmin avait bouleversé bien trop de choses, qu'il ne savait pas encore prêt à laisser faire. Il était toujours normal pour un magicien d'avoir soif de savoir, de connaissance, de chercher le sens de tout et de le relier à la science et aux grimoires. Cependant, il y avait d'autres choses qui ne se trouvaient nulle part, ni dans la littérature, ni dans les sortilèges les plus puissants.
Quand Hyunjin parvint à se redresser, une dizaine de minutes plus tard, le soleil avait légèrement décliné. Le ciel était un peu plus pâle, il laisserait bientôt place aux lueurs enchantées d'un début de crépuscule. Les journées passaient plus vite, les nuits, plus lentement. Surtout quand il n'était pas à la maison. C'était un contraste presque affligeant, et il aurait fallu qu'ils se voilent la face de nombreuses fois, avant d'enfin comprendre que ce qui changeait la dynamique de leur quotidien, était la présence de l'autre.
— J'arrive pas à savoir où ça nous mène, souffla Hyunjin en se penchant vers lui.
— Pourquoi tu cherches toujours une réponse à tout ?
Seungmin prononça ces paroles, avant de tourner la tête vers lui, et le laisser poser ses lèvres contre les siennes. Ce fut bref, comme une simple piqure de rappel, comme pour essayer de se souvenir si les autres fois n'avaient pas été rêvées. Juste le toucher volatil de deux paires de lèvres. Alors, Hyunjin se recula pour l'observer, ça n'avait été qu'un contact innocent. En un regard, ils semblèrent se partager des mots muets, l'esquisse d'une nouvelle page qui se tournait. Parce que Seungmin n'avait pas fui quand il l'a vu.
Il revint lentement contre lui, sans que le gris ne cherche une seconde à empêcher ce nouveau baiser. Ils fermèrent les yeux, et pour la première fois, ils n'eurent pas l'impression que les choses leur échappaient, qu'ils n'étaient que sous l'influence de quelque chose qui les dépassait. Ils étaient bien conscients, lucides, maitres de leurs gestes. Les mains de Hyunjin se posèrent sur les hanches du plus jeune, celle de Seungmin glissa sur sa joue, traçant telle une sculpture, chaque détail de sa peau sous la pulpe de ses doigts.
Et leur baiser s'approfondit, laissant peu à peu cette envie prendre le dessus. Il n'y avait personne ici, les plaines dansaient sous le chant du lointain, ils entendaient le cours d'eau, les oiseaux, la vie dans cette nature oubliée. Seungmin passa ses bras autour du cou du mage, lequel fit se rencontrer leur torse dans une étreinte plus forte et plus enivrante. Leur parfum se mélangeait, et plus rien ne comptait vraiment. Le chapelier se sentit frissonner, la langue de son vis-à-vis ne tarda pas à rencontrer la sienne, tandis que ses doigts se plantaient doucement dans sa peau.
Prenant un plus grand appui sur l'autre, Seungmin sentit l'herbe dans son dos quand il bascula. Il sentit la main qui alla se nicher dans sa nuque, et le baiser qui bientôt, lui fit perdre la raison. Le corps de Hyunjin se pressa contre le sien, ils se raccrochèrent à l'autre comme si tout pouvait disparaitre en un instant. Tout devenait plus poussé, plus avide. Ils ne pouvaient plus faire semblant, ils se voulaient, corps et esprit.
Les lèvres de Hyunjin délaissèrent les siennes pour plonger dans son cou, y déposant une ribambelle de baisers qui le firent frémir un peu plus fort. Seungmin inspira, les yeux toujours clos, appréciant toutes les sensations qui s'éveillaient en lui.
— Je crois qu'on a été interrompus ce matin, lui chuchota Hyunjin sur un ton à la fois espiègle et brûlant.
Et Seungmin laissa échapper un rire, avant de le tirer un peu plus contre lui.
Ils n'auraient qu'à dire qu'ils avaient été cueillir des fleurs.
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