Lorsque Olivia nous avait annoncé, à toute la famille, que son p'tit ami Marius avait enfin fait sa demande en mariage à une fille aussi prompte et spontanée qu'elle... j'ai failli cracher toute l'eau qui reposait au fin fond de ma bouche, tellement j'étais surprise.

J'ai failli salir ma blouse préférée, au passage. Celle avec les motifs de feuilles, fleurs et ronds colorés à gogo.

Tantes et oncles s'étaient tous regardés silencieusement pendant trois bonnes secondes. Maman et Papa avaient affiché le plus grand sourire de leurs vies.

Les p'tits cousins avaient applaudi et hurlé de leurs voix les plus aigües. J'ai cru que mes oreilles allaient exploser.

Comme si ce n'était pas assez, Olivia avait, tout de suite après, fait sa seconde annonce: elle voulait que l'une de ses demoiselles d'honneur (qui allaient l'accompagner durant la planification de ce mariage, soit dit en passant) ne soit autre que... bibi!

Moi, sa grande sœur de vingt-six ans encore célibataire. Qui de surcroît, ne s'imagine même pas se marier.

Enfin si. Peut-être. Mais pas avec n'importe quel homme.

Au début, j'avais essayé de refuser. Refuser à tout prix la responsabilité d'organiser son enterrement de vie de jeune fille, celle d'être sa confidente. Mais ses yeux bleu océan me suppliaient d'être là pour elle. Comme elle l'avait toujours été pour moi.

Oh, je détestais cette capacité qu'avaient les yeux d'Olivia de parler à sa place!

D'abord, j'avais soufflé. Comme une gamine de six ans à qui on refuse un bonbon.

— O.K., je serai ta demoiselle d'honneur. Mais je veux une jolie robe aussi, avais-je ensuite contrecarré; une condition qui l'avait faite hocher la tête comme une folle.

Voilà comment je me suis retrouvée à côté de ma petite soeur tandis qu'elle regarde, de ses yeux larmoyants, l'homme qu'elle a choisi d'aimer pour la vie.

Dois-je vous en dire plus?

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Il s'avère que si, je dois vous en dire plus...

Je reconnaîtrais entre mille l'homme en costume bleu marine qui s'avance timidement, donnant des petits coups d'œil anxieux à la foule qui regarde.

En effet, le temps a peut-être creusé ses joues, créé des cernes sous ses yeux autrefois rieurs... mais il n'a pas osé enlever les innombrables taches de rousseur qui parsèment son nez. Ni la couleur orangée de ses cheveux, que je devine coiffés par une montagne de gel.

Son apparition inattendue — enfin, que JE n'attendais pas — me fige sur place.

Je ne peux pas croire qu'Olivia et Marius aient oublié ce détail-là.

Les yeux noisette de Liam se posent sur les miens, au moment même où il arrive juste à côté des demoiselles d'honneur. Immédiatement, ses yeux s'animent d'une lueur inconnue. Sa bouche s'ouvre légèrement sous l'effet de la surprise.

Apparemment, lui non plus n'avait pas été prévenu que je serais là.

Serions-nous venus ici, si nous avions su que nous nous retrouverions pour la première fois depuis des années?

Peut-être.

Tout ce que je sais, c'est que nous semblons avoir le regard collé l'un à l'autre pendant le discours que délivre la mairesse. Et que je connais la sensation chaude qui parcourt mon corps, fait battre mon cœur.

Je l'avais presque oubliée. Presque, est le mot-clé ici.

Tout d'un coup, Liam s'approche de Marius; ses mains tremblent, je le vois.

Mais les anneaux ne tombent pas au sol. Ne roulent pas loin des promesses d'amour éternel qui remplissent la mairie, en ce moment même. Elles rejoignent comme prévu les annulaires des mariés.

— Vous pouvez embrasser la mariée!

Et, sur l'invitation joyeuse de la mairesse, ce fameux baiser rapproche ma sœur de son mari, mélangeant son costard à lui et son voile à elle.

Pourtant, tout ce que je peux regarder, alors que mes applaudissements se noient dans ceux des deux familles présentes... c'est Liam.

Mon Liam.

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Si parfois certaines sorties de la mairie se voient ruinés par un imprévu, il n'en est rien aujourd'hui de la sortie de Marius et Olivia.

Elle a l'air majestueuse dans sa robe bouffante de princesse, le voile qui couvre son chignon blond volant au vent frais d'été. Et, étonnamment, c'est là que je surprends une larme en train de rouler sur ma joue.

Que c'est beau.