Will me laisse et s'avance prudemment vers Cerbère qui grogne à son approche. Je le regarde en me mordant la lèvre, anxieuse qu'il lui arrive quelque chose. Il longe le mur côté porte, la où le chien ne peut l'atteindre. Les petits rubis des têtes nous fixent en alternance. Anticiperait-il une diversion de Will pour que je me faufile ? De toute façon je ne m'y risquerai pas.

Je ne vois plus Will. Il est caché contre la roche humide qui tapisse les murs. Je m'élance à mon tour devant Cerbère. Je veux voir le mythe de plus près. C'est aussi effrayant que fascinant. Ses pupilles rétrécissent au fur et mesure que je viens vers lui. Ses crocs sont maintenant visibles. Quel animal somptueux. Il dégage une aura puissante.

Will est maintenant dans mon champ de vision, il explore les environs et regarde les plantes et leurs racines qui s'étalent partout. Il se tourne brusquement vers moi :

« Viens voir ce que j'ai trouvé !

Je pars à sa rencontre. Le chien se lève d'un bon et me suit pour voir se qui se trame. Will me tend des petites baies noires.

- C'est des mûres !

- Ça tombe bien, il nous manquait notre dessert.

Il me fait un clin d'œil et cueille tout ce qu'il peut. Il m'en donne de temps à autre. Elles sont vraiment délicieuses. Je m'y mets aussi pour le coup, ça se fait pas si je lui pique toute sa réserve. Mes mains fouillent dans les branches lumineuses et racines calcinées. Puis, derrière tous ces végétaux, une lueur rouge. Comme avec ma goutte de sang, pour ouvrir la porte. J'y pose ma main et la lumière brille de plus belle.

- Regarde Will.

- Quoi ?

- Bah regarde je te dis.

Mes doigts se heurtent à une surface froide et rougeâtre. Je renifle ceux-ci. Ça m'a tout l'air d'être du métal rouillé. Will se penche nez dans les feuillages.

- C'est quoi ce truc ?

- Je n'arrive pas à bien voir, ta tête me cache la vue, nounouille.

- Nounouille ? Sérieusement ?

- Yes. Allez décale-toi de là !

Je pousse les feuilles gênantes et dégage du mieux que je peux les racines encombrantes. Je pousse un soupir de mécontentement. Cerbère souffle des braises, il n'a pas l'air d'apprécier la façon dont on fouille dans les branchages. A-t-on mis le doigt sur quelque chose d'intéressant ? De toute évidence oui, son attitude parle pour lui.

- Laisse-moi couper les branches, on arrivera à rien si on ne voit pas ce qu'on fait.

Sur ces bonnes paroles, Will va chercher son couteau suisse à côté de notre feu. Le suivant du regard, je vois l'océan s'évanouir à nouveau dans le noir. Will revient quelques secondes plus tard, outil en main.

- Pousse-toi et laisse faire le chef.

- Ça va les chevilles ?

- Tranquillou bilou. »

Je ris à sa dernière remarque. Il sectionne tout, jusqu'à ce qu'on voit tout le mécanisme parfaitement. Le mur de pierre est craquelé à l'endroit j'avais posé mes doigts. Au milieu de cette fissure, une manivelle est coincée au milieu de la pierre. Une douce lumière rouge rubis, comme les yeux de Cerbère s'échappe discrètement.

J'appose ma main droite sur la manivelle. A mon contact, celle-ci brille de mille feux. La lumière m'aveugle aux larmes mais s'évanouit presque aussitôt qu'elle est apparue. Une inscription est maintenant affichée au mur.

Les symboles ressemblances à des hiéroglyphes. Non. Plutôt des lettres d'une écriture de martiens, parce que je ne vois pas vraiment à part ça. Will murmure quelque chose dans sa barbe. Il s'écrit soudainement :

« C'EST UNE BOÎTE A MUSIQUE.

- Hé mais calme toi j'ai bien cru que tu allais me rendre sourde.

- C'est une putain de boîte à musique.

- Tu me la refais sans le « putain » ?

Will prend des deux mains fermement la manivelle et actionne une douce mélodie. Comment a-t-il pu déchiffrer le message ?

Une bouffée de chaleur m'envahit tout à coup. La mélodie s'intensifie dans ma tête et alourdit mon crâne. Je tombe à genoux en me tenant par les cheveux. Mais qu'est ce qu'il m'arrive ?!