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53× L'Enfant Maudit


Hadrian

Mes parents étaient morts, par ma faute.
Mon histoire débuta dès le jour de ma naissance en l'an 1064. Les drames s'étaient enchaînés depuis mon plus jeune âge. Ma mère avait tout d'abord succombé à la maladie en laissant mon paternel dévasté par le chagrin. Quelques mois plus tard ce fut à son tour, il se fit tuer par un voleur qui avait tenté de s'emparer de la charrette contenant ses dernières récoltes. Je m'étais retrouvé orphelin dès l'âge de quatre ans, mais à ce moment là je ne me doutais encore de rien. Habitant dans un village voisin, mes grands-parents m'avaient recueilli. Trop bouleversé et déboussolé par la mort de mes géniteurs, dont je ne me rappelais plus le visage à l'heure actuelle, je mis un certain temps à apprécier ceux qui m'avaient accueilli. Ils étaient pourtant si gentils...
Un an et demi passa, je m'apprêtais enfin à vivre joyeusement quand la mort les rattrapa tous deux. Ils décédèrent d'une crise cardiaque, à leur âge s'était normal disait-on. En plus de mes aïeuls, trois des amis que je m'étais fait avaient de même trouvé la mort de causes incertaines.

À cette époque, certains émettaient déjà l'hypothèse que j'étais "l'un d'eux" ; je ne comprenais pas vraiment de quoi ils parlaient. Seule une jeune femme me défendait contre les dires des autres villageois. Elle m'avait même accueilli chez elle, c'était quelqu'un de très appréciée au sein du village. Elle était belle et bienveillante, si bien qu'un jeune noble de la ville voisine l'avait repéré et voulait faire d'elle son épouse malgré sa condition de paysanne.
Bien sûr après quelques mois, elle mourut d'un poison qui avait été versé dans sa nourriture, probablement par l'une de ses rivales, jalouse à l'idée qu'elle devienne la femme d'un aristocrate. Je l'aimais vraiment beaucoup et fus horrifié que l'on pût dire que j'étais la cause de sa mort. Elle était la seule personne qu'il me restait. Je ne voyais même plus les autres enfants. En effet, leurs parents leur avaient ordonné de ne plus m'approcher, car j'avais depuis fait encore un autre mort parmi mes jeunes amis.
Dès lors, les villageois n'eurent plus aucun doute sur ma véritable nature : j'étais un Enfant Maudit. Quelqu'un qui tuait ceux qu'il aimait.

Les habitants n'eurent pas le courage de tuer un enfant si jeune et préférèrent me bannir du village. Je devais désormais me débrouiller seul dans cette nature effrayante. Une semaine plus tard, j'étais déjà en train de mourir de faim, perdu au plus profond d'une épaisse forêt. J'avais bien essayé de chasser, mais, sans grand succès. Et ce n'était pas non plus la saison des fruits de la région. Sanglotant dans les bois, je marchais sans but entre les arbres orange ; j'avais abandonné toutes raisons de vivre. Soudain, j'entendis les feuilles qui jonchaient le sol derrière moi craquer. Je me retournai vivement et aperçus, caché derrière un arbre, un adolescent aux cheveux blancs me fixer avec intérêt. Il portait un arc dans son dos, peut-être était-il en train de chasser ? Il s'approcha de moi avec prudence, pour éviter de m'effrayer, et s'accroupit à ma hauteur pour finalement me demander d'une voix rassurante :

- Pourquoi pleures-tu ?

- Les villageois m'ont rejeté, hoquetai-je.

Le jeune homme aux yeux bleu-gris d'environ dix-sept ans me dévisagea avec étonnement et continua :

- Pourquoi ont-ils fait ça ?

- Ils disent que j'ai le pouvoir de tuer les gens en les appréciant !

Il me fixa un instant puis un sourire s'étira sur ses lèvres. Je croyais pourtant que n'importe qui s'affolerait en apprenant une telle information.

- Tu es quelqu'un que l'on traite d'Enfant Maudit, n'est-ce pas ?

J'acquiesçai timidement. Il se releva alors et s'exclama d'un ton enjoué :

- J'ai réussi à te trouver ! J'étais sûr que tu t'étais réfugié ici !

Je le dévisageai, interloqué. Pourquoi cherchait-il à me retrouver ? N'étais-je pourtant pas dangereux ? En voyant l'expression déconcertée que je tirais, il m'apprit :

- Les journaux locaux parlaient d'un gamin de six ans qui avait dû fuir son village pour ce motif. J'ai donc essayé de te retrouver afin de te recueillir. Viens avec moi !

- Mais... Tu n'as pas peur de mourir ?

- Sois sans crainte, je ne succomberai pas aujourd'hui. Je suis moi aussi un Enfant Maudit. Cette malédiction ne touche pas ceux qui en sont déjà atteints.

Je demeurai bouche bée face à une telle affirmation. Comment était-il parvenu à survivre jusqu'ici s'il était comme moi ? Il paraissait pourtant bien enjoué et idéaliste pour quelqu'un qui avait vécu une histoire semblable à la mienne. Son affirmation suffit néanmoins à me convaincre de suivre son invitation.

- Au fait, je ne me suis pas présenté ; je m'appelle Sven. Et toi, quel est ton prénom ?

- Hadrian, murmurai-je.

Mes larmes avaient séché pour laisser place à l'espoir d'une renaissance. L'adolescent m'avait par la suite donné à manger en voyant ma mauvaise mine. J'avais englouti la nourriture en un clin d'œil tant la faim me tiraillait depuis des jours. Finalement, il me guida jusqu'à l'orée de la forêt où se trouvaient deux garçons d'environ quatorze ans accompagnés de trois montures.

- Eh Sven ! T'es enfin revenu ! s'exclama l'un d'eux.

- Oui et j'ai réussi à trouver celui que l'on cherchait !

Le plus âgé fit rapidement les présentations. Je n'aurais jamais pensé qu'un jour je rencontrerais des gens comme moi, ni que je m'en sortirais.

- Hadrian, tu monteras avec Bjorn, m'indiqua Sven. Mon arc ne te permettrait pas de t'agripper correctement à moi.

J'obéis et ce dernier m'aida à monter. C'était la première fois que je me trouvais sur le dos d'un cheval et c'était, à vrai dire, plutôt plaisant. Nous voyageâmes durant une journée entière avant d'enfin arriver à destination au pied d'une montagne à l'extrême nord-ouest d'Alanya, soi-disant à la frontière du Royaume d'Éphésis. Le trajet avait été fatiguant mais j'étais heureux et excité à l'idée de rencontrer d'autres de mes semblables. Après avoir dessellé et déposé les montures dans un immense pré où séjournaient d'autres de ces animaux, nous nous dirigeâmes plus loin vers une entrée cachée dans la montagne.

Nous traversâmes la première porte et je pus constater que nous surplombions dès lors un immense hall éclairé à la lumière des torches. Quelques enfants et adolescents y passaient en contournant les immenses sacs de ce que je supposais être des provisions nouvellement arrivées ou d'autres objets nécessaires à l'exploration et aux sorties extérieures. J'analysai plus attentivement les parois et remarquai qu'une multitude de galeries avaient été creusées dans la caverne, menant sans doute à de réelles pièces aménagées. Je n'avais encore jamais vu de lieu semblable à celui-ci, enfoncé de la sorte dans la montagne.

- Voici notre repaire ! Ici, c'est un refuge pour les gens comme toi et moi, me présenta Sven. Il s'agissait auparavant d'une ancienne planque de voleurs mais je l'ai trouvée totalement vide il y a quelques années. Ces malfrats avaient été arrêtés en laissant derrière eux cette petite merveille !

Je demeurai silencieux, simplement émerveillé par ce que je voyais. Une petite fille blonde d'environ mon âge, si ce n'était un peu moins, accourue soudain vers nous et me sortit de mes réflexions lorsqu'elle s'exclama joyeusement :

- Sven ! Tu m'avais manquée !

En guise d'affection, la fillette s'accrocha à la jambe de celui-ci qui ne tarda pas à répondre gaiement :

- Je ne suis pourtant pas parti très longtemps.

- C'était déjà trop ! En plus tu ne voulais même pas que je t'accompagne !

- Tu es trop jeune Freya...

Ils se chamaillèrent quelques instants avant que Sven ne décidât de continuer sa visite. Il m'emmena à l'intérieur d'une grande salle dotée de plusieurs longues tables en bois. La décoration était très rudimentaire, mais il s'y dégageait une certaine chaleur humaine. Les habitants des lieux y avaient été convoqués et s'y réunirent peu à peu. Ils semblaient plus nombreux que je ne l'aurais pensé. Il devait y avoir au moins quatre-vingt Enfants Maudits réunis ici et ceux-ci étaient tous plus jeunes ou d'un âge équivalent à celui de Sven. Ce dernier avait l'air de s'être naturellement imposé comme leur meneur. Il me présenta aux autres qui m'accueillir tous gentiment. J'étais toujours plus époustouflé de voir à quel point tous ces gens paraissaient heureux et bons. Ils avaient pourtant dû eux aussi vivre avec la mort de leurs proches sur la conscience.

Deux ans et demi passèrent, deux ans où j'avais eu le temps d'apprendre à lire, écrire et compter ainsi qu'à monter à cheval. Pour survivre dans notre base, les plus grands chassaient le gibier et cueillaient des fruits sauvages. Parfois ils partaient plus loin afin de voler des objets de fabrication humaine ou des montures.

D'autres après moi étaient arrivés. J'avais cette fois pu me faire des amis sans craindre de les voir mourir prématurément. Au cours de mon séjour en ces lieux, je pus me rendre compte que Sven était encore plus apprécié et même adulé que ce que j'aurais pu imaginer. Il était à l'origine de notre petit groupe et s'était lui-même chargé de recueillir tous les Enfants Maudits. Sans lui, la plupart d'entre nous seraient déjà morts, y compris moi. Décidément, je ne comprenais pas pourquoi les Dieux avaient décidé de faire de Sven l'un des nôtres. Il était si exemplaire, il ne méritait pas une telle malédiction.

Mais le bonheur ne pouvait être éternel. L'ambiance générale avait fini par changer six mois plus tôt lorsque l'un d'entre nous fut humilié et tué par des gens de l'extérieur. Les Enfants Maudits avaient commençaient à développer une haine qui n'existait pas auparavant. Cette situation de tensions me déplaisait et j'avais déjà bien essayé de leur faire entendre raison, que cela ne rimait à rien de haïr, mais je ne faisais que passer pour un pacifiste utopiste. Pourtant notre groupe l'était bien lui aussi à l'origine, et c'était ce que j'en avais admiré.

Aujourd'hui notre meneur et quelques uns des plus âgés avaient prévu de partir se ravitailler dans une ville à quelques heures de notre repaire. Assoiffé d'aventure, j'avais décidé de suivre discrètement leur escouade sur un petit cheval ; autrement ils ne m'auraient jamais laissé les accompagner. Freya m'avait un jour confié avoir déjà plusieurs fois tenté de suivre Sven auparavant, même si elle se faisait sévèrement réprimander quand ce dernier la surprenait en flagrant délit.

Une heure de route plus tard, ceux que je suivais finirent par s'en rendre compte. Heureusement, ils se résignèrent à ce que je les accompagne ; ils étaient trop peu nombreux pour que l'un d'entre eux quitte le cortège pour m'escorter à la base et ils ne voulaient surtout pas que j'y retourne seul, de peur que je ne retrouve jamais mon chemin.
Au bout de plusieurs heures, nous arrivâmes enfin. Je n'avais jamais vu un tel monde, nous étions obligés de marcher à pas réduits tant la foule nous entravait. Au cours de ma courte vie, je n'avais été que de rares fois dans de grandes villes ; je n'étais pas habitué à voir autant d'inconnus, ce qui était d'autant plus vrai depuis que je ne vivais plus en compagnie de simples humains. Avec tristesse, je songeai que ces derniers n'hésiteraient pas un seul instant à nous faire exécuter s'ils connaissaient notre véritable nature.

- J'ai rarement vu autant de monde, commenta l'un d'entre nous.

Des guirlandes de papiers colorés étaient suspendues entre les bâtiments et des airs de musique champêtres se laissaient entendre dans chaque coin de rue.

- C'est l'équinoxe de Printemps, nous apprit Sven. C'est normal qu'il y ait foule.

En effet, il s'agissait de l'une des quatre fêtes principales du continent. Nous nous déplaçâmes tranquillement au rythme des passants. Alors que les plus grands repéraient d'un œil expert ce qu'il serait bon de ramener à la base, je me laissai distraire avec émerveillement par tout ce que je voyais, porté par l'ambiance festive.

Un énorme rassemblement attira notre attention. Intrigués, nous nous en approchâmes sans pour autant y voir quoique ce soit. Alors que nous nous apprêtions à continuer notre route, bien vite désintéressés, une voix fit une annonce :

- Faites place à sa Majesté, le roi Haldir d'Alanya !

Nous nous dévisageâmes avec incompréhension sous les acclamations de la foule. Était-ce vrai ? Le souverain se serait déplacé jusque dans cette cité de province pour fêter l'équinoxe de Printemps ?

- L'occasion est trop belle pour que l'on ne tente pas quelque chose ! s'exclama l'un de nous.

- C'est clair, il serait criminel de ne rien faire. Il est à la tête de ceux qui cherchent à tuer nos semblables !

- Sa venue est le signe que nous devons mettre fin à son règne de persécution ici et maintenant !

Je les observai passivement, pas aussi enthousiasmé qu'eux. Je ne comprenais pas vraiment ce dont il résultait et s'il s'agissait réellement d'une bonne idée.

- Calmez-vous, intervint Sven. Il nous faut un plan. Approchons-nous d'abord.

Nous nous faufilâmes entre les citadins jusqu'à enfin percevoir l'homme qui provoquait cet engouement. Les habitants l'acclamaient avec vigueur et enthousiasme, pourtant il ne le connaissait pas. J'examinai attentivement la cible de notre plan. De toute ma jeune existence, je n'avais encore jamais vu quelqu'un d'aussi apprécié que Sven. C'était déroutant.

Le roi avançait en serrant les mains que les passants lui tendaient et en prenant même quelques jeunes enfants dans les bras. Des chevaliers en armure étaient postés tout autour de lui et lui dégageaient petit à petit le chemin. Ils formaient un rempart qui rendait son être intouchable de toute agression. C'était la première fois que j'en voyais. Ils semblaient si invulnérables et infaillibles sous ces carcasses de métal, c'était vraiment impressionnant ! Je me demandais bien comment mes aînés comptaient atteindre le monarque avec une telle garde. Trop distrait par mon environnement pour écouter leurs messes basses, je n'entendis pas leur délibération et en fus informé seulement au moment où notre meneur se pencha sur moi pour me souffler son entreprise :

- Hadrian, écoute. Je n'aime pas beaucoup te demander ça mais je ne vois pas de meilleure solution. Est-ce que tu pourrais tenter de faire diversion en allant voir le souverain comme le font les autres enfants ?

Je le considérai lui puis le roi, tour à tour, quelque peu hésitant.

- Sois sans inquiétude, nous serons toujours en arrière lorsqu'il faudra intervenir.

Son regard me pénétra de son bleu intense ; il brillait de la sincère envie de porter les nôtres vers un monde meilleur. Je ne pouvais pas me permettre de faillir à ses attentes, s'il estimait que son plan était juste alors j'étais prêt à le suivre aveuglément.

- D'accord, acquiesçai-je d'une petite voix.

Il sourit et se redressa en indiquant quelques instructions aux autres. Nous nous approchâmes davantage jusqu'à atteindre le devant de la foule. Le souverain approchait lentement. Désormais je pouvais mieux le voir. Son sourire chatoyant m'irradia alors qu'il saluait son peuple avec joie. Je demeurais pantois, pris dans l'engouement qui avait lieu autour de moi. Le roi Haldir semblait étrangement incarner tout ce en pourquoi Sven était idolâtré parmi les Enfants Maudits. Je secouai la tête pour reprendre mes esprits. Non, je ne devais pas me laisser piéger par les apparences. Je devais suivre les instructions, juste les instructions.

Lorsque l'homme d'État passa à proximité, je sus qu'il était temps pour moi d'agir. Je me faufilai jusqu'à lui à la vitesse de l'éclair pour le serrer dans mes bras et plonger mon visage dans ses précieuses étoffes. Ma soudaine irruption prit les gardes au dépourvu. Le noble stoppa ses pas et rassura aussitôt ses hommes :

- Laissez, ce n'est qu'un petit garçon.

Ces derniers s'étaient probablement crispés en voyant qu'un être trop minuscule pour arriver à la hauteur de leurs yeux avait échappé à leur vigilance. J'empoignai alors les vêtements du roi, comme par dépit, pour m'y réfugier et me délaisser de mes obligations. Celui-ci posa doucement une main paternelle dans mes cheveux. Je relevai la tête, les larmes aux yeux. Je ne voulais pas que mes camarades exécutent leur plan, qu'ils risquent leur vie au prix d'un sacrifice probablement vain. Le quarantenaire me dévisagea avec étonnement, et même une pointe d'empathie, pour ensuite me questionner :

- Que diable te met-il donc dans un tel état ?

Je continuai de le fixer sans rien répliquer, paralysé. Qu'étions-nous en train de faire ? Cette haine était déjà partie trop loin.
Des gardes nous bousculèrent au même moment pour se jeter devant nous, tout bouclier levé.

- Majesté, attention !

Deux d'entre nous avait tenté de lui sauter au cou mais s'étaient immédiatement fait plaquer au sol par des gardes royaux.

- Non ! m'écriai-je en stoppant l'étreinte que j'offrais au souverain pour m'en aller auprès de mes camarades.

L'affolement que nous avions engendré avait permis à Sven de franchir un pas de plus vers le cortège royal. Il m'accueillit aussitôt dans ses bras et profita de l'occasion pour s'engouffrer dans la brèche que je venais de créer. Il s'apprêta à lever son poignard en direction d'Haldir quand des mains gantées vinrent l'attraper de part en part pour à son tour lui faire mordre la poussière. Il rouvrit des yeux injectés de sang et planta son regard enfiellé droit dans celui de sa cible. Son ressentiment se lisait sans peine sur son visage pâle. Le voir ainsi m'attrista davantage.

Des soldats s'emparèrent aussi de moi. Je me débattis tout autant que mes aînés sans pour autant parvenir à n'avoir ne serait-ce que l'espoir de m'échapper. À partir de ce moment, mes souvenirs devinrent flous. Les chevaliers nous avaient amenés quelque part, loin de la foule, pour nous y faire prisonniers. Je me rappelais seulement que j'avais été séparé des autres et que j'avais été escorté, pieds et poings liés, dans les appartements où s'était établi le monarque. Seul, j'étais d'autant plus mort de peur. Qu'allait-il nous arriver ? Étions-nous destinés à l'échafaud comme l'avait été chaque Enfant Maudit avant nous ?

- Parle ! Pourquoi tes camarades ont-ils tenté d'assassiner sa Majesté ? Avez-vous un commanditaire plus haut placé ?

Je ne répondis pas et gardai la tête baissée pour essayer de masquer mon visage dans mes cheveux.

- Arrêtez donc de lui crier dessus, ne voyez-vous pas que vous lui faites peur ?

Je relevai les yeux pour scruter celui qui venait de parler. Pourquoi le roi demeurait-il encore bienveillant à mon égard après tout ce qu'il venait de se passer ?

- Il faut bien qu'il avoue !

- Il avouera, maintenant laissez-nous seuls.

- Bien, prononça le soldat en quittant la pièce dans une courbette.

L'homme dirigea à nouveau son regard dans ma direction. Étrangement, il ne semblait aucunement rancunier.

- Dis-moi, pourquoi toi et tes amis avez voulu attenter à ma vie ? Vous ne vous plaisez pas au Royaume d'Alanya ? Si ce n'est que cela, je me ferais un plaisir d'écouter vos requêtes. Il est de mon devoir d'être prévenant envers mon peuple.

Je le dévisageai avec effarement, il semblait sincère dans ses propos pourtant si éloignés de ce que je m'imaginais de lui. Quelque peu mis en confiance, je me confiai :

- Je... Nous cherchions vengeance.

- Vengeance ? Pourquoi donc ?

- Je...

Non, je ne devrais rien lui révéler pourtant ma langue se déliait d'elle-même face à sa prestance.

- Vous devriez nous relâcher si vous ne voulez pas mourir, prononçai-je alors que je sentais les larmes me monter aux yeux.

Le souverain se leva et s'avança dans ma direction pour finalement s'accroupir à ma hauteur. J'eus un mouvement de recul, tant effrayé qu'impressionné.

- Pourquoi devrais-je donc mourir selon toi ?

Je ne répliquai rien, bée face à une telle question. Pourquoi devrait-il mourir ? Je ne savais pas, je ne le voulais pas. Seulement, il devait se méfier de nous et de notre funeste malédiction. Pris d'un élan de courage, ou plutôt d'inconscience, je lui révélai ce que j'avais sur le cœur en le fixant droit dans les yeux d'un regard qui ne cessait de couler.

- Nous sommes des Enfants Maudits et nous sommes venus chercher vengeance pour changer les choses.

Pourquoi lui confiais-je une chose pareille ? Il allait tous nous faire châtier ! Mes yeux changèrent d'expression pour se murer dans un effroi terrible à l'appréhension de sa réponse.

- C'était donc ça... dit-il en souriant.

Pourquoi réagissait-il ainsi ? Pourquoi réagissait-il comme l'avait fait Sven avant lui ? Il n'était pourtant pas un Maudit, il devrait normalement me craindre !

- Relâchez les autres, je vous en supplie.

À la vue de mon regard larmoyant, le dirigeant du pays se releva ; il semblait avoir pris une décision. Pourtant, contre toute attente de verdict, il commença à me narrer :

- Il y a une cinquantaine d'années de cela, mes parents ont créé "Les Lames d'Argent". Ce sont des enfants, pour la plupart orphelins, qui sont recueillis au château et promis à l'avenir de preux chevalier.

Pourquoi me racontait-il soudain tout cela ? Cela n'avait pas de sens !

- Tu pourrais devenir l'un d'entre eux si tu le souhaitais.

- Vous ne comprenez pas, un Enfant Maudit est incapable d'aimer sans dommage ! Jamais je n'aurais personne à apprécier chez ces gens et je finirais par tuer à nouveaux mes propres amis !

- C'est ce que tu crois. J'ai vu dans tes yeux ta soif de justice, tu n'es pas d'accord avec tes camarades.

Il avait raison, je n'aimais pas ce que les nôtres étaient devenus à cause de cette haine qui était venue étourdir leur bon sens. Je ne voulais pas continuer à engendrer le mal à leurs côtés. Je voulais seulement qu'ils retrouvent leur entendement.

- Veux-tu que je te confie un secret ? enchaîna-t-il. Le secret le mieux gardé du pays, celui de la famille royale d'Alanya.

Je le dévisageai, intrigué, et il ne tarda pas à continuer :

- Moi et toute ma lignée sommes intouchables face à ce genre de malédiction.

J'écarquillai les yeux, mes larmes avaient cessé de couler. Comment était-ce possible ? Je croyais que seuls les Maudits étaient immunisés entre eux ! Me mentirait-il ? Il n'avait pourtant aucun intérêt à y gagner. Le souverain termina en guise de toute réponse :

- L'un de mes lointains parents se trouvent être l'un des Dieux de la création, ce qui fait de moi un être humain au sang mêlé à celui d'une divinité.

Les dires du roi Haldir étaient tous trop déroutants pour que je parvienne à réfléchir correctement. Cet homme était spécial, tout autant que Sven, j'en avais la certitude. Cette évidence me poussa à croire aveuglément en lui.

- J'accepte de rejoindre vos "Lames d'Argent" si vous pensez vraiment que je peux être utile, conclus-je d'un regard devenu déterminé. Mais c'est à la seule condition que mes camarades soient libérés sur-le-champ et que vous ne cherchiez jamais à les traquer par la suite.

*

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