Épilogue : Identité
A sa question naïve, le sourire de la femme s'accentua.
"Je peux comprendre ta confusion." déclara t-elle simplement.
Le regard d'Anna s'enflamma. Ses doigts se crispèrent sur son arme qu'elle pointa sur la scientifique d'un air décidé.
"Plus un geste !" l'interpella-t-elle, tendue.
"Oh. Bien sûr."
Cette reddition semblait un peu trop facile aux yeux de Quentin. Et en effet, la femme accompagna ses mots d'une pression sur un bouton luisant de rouge à ses côtés.
Anna n'eut pas le temps de réagir : son arme lui fut enlevée et s'envola pour se coller au plafond, comme attirée par un aimant gigantesque.
Immédiatement ensuite, quatre bras mécaniques sortirent du mur dans leur dos pour agripper chacun de ses membres. Prisonnière de la machine, elle fut ramenée contre la paroi et se débattit sans résultat : les poignes de métal étaient bien trop fermes.
"Vous avez entièrement raison. On sera plus tranquilles si on parle sans trop bouger." lâcha sa geôlière, sans une certaine pointe d'ironie.
Quentin avait observé la scène avec inquiétude autant qu'avec curiosité. Pourquoi cette femme s'en prenait-elle uniquement à Anna ?... Il la dévisagea avec intensité, sans comprendre.
Il était sûr de reconnaître Sophie ! Sa voix, son visage... Mais son comportement était étrange. Plus assuré, plus... cruel.
"Tu dois me confondre avec ma sœur. Ma jumelle." évoqua t-elle en remarquant son expression d'incrédulité.
Quentin resta sous le choc de l'information plusieurs secondes... Une jumelle ? Mais alors...
"Je m'appelle Marie. Je suis le Maître du labyrinthe, mais on s'est déjà rencontrés, Quentin."
Son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Son esprit tournait à toute allure pour essayer de comprendre.
"C'était vous... Dans le labyrinthe ?" demanda t-il d'une voix peu assurée.
"A ton réveil, c'était moi, oui. C'est également moi qui me suis occupée de Frank. Mais le reste de tes rencontres, c'était Sophie."
Il avait l'impression que l'air lui manquait. Qu'est-ce que tout cela signifiait ?
"Pourquoi... Pourquoi n'avez-vous pas cherché à m'éliminer quand vous en aviez eu l'occasion, alors ?" bredouilla t-il.
"Oh, mais parce que tu es dans mon camp, Quentin." lui apprit-elle, comme si c'était évident. "N'as tu pas encore compris ?"
Il secoua la tête, autant pour exprimer son incompréhension que pour essayer de se remettre les idées en place.
"Je t'ai désigné Gardien, Quentin. Ton rôle était d'infiltrer les Candidats afin de les éliminer. Mais ça, bien sûr tu l'as oublié..." expliqua t-elle avec un geste de la main agacé.
Ce qu'il redoutait venait de se confirmer... Lui, Gardien ? Était-il vraiment un assassin de sang-froid ? Une sensation étrange lui tordait les entrailles.
Il se détestait.
Non : il détestait son ancienne identité, mais ce n'était pas lui. Pas vraiment. Il s'était reconstruit, il n'était plus le même.
"Florence était ta co-équipière. Quand je t'ai expliqué les règles du jeu... Tu as pété les plombs, pour le dire simplement. Tu n'étais pas d'accord avec la manière de faire. Pour toi, le Labyrinthe, c'était jouer avec la nourriture... Alors tu t'es mis en tête d'aller les affronter sans perdre de temps. Tu as débarqué dans le quartier général des candidats, ils s'étaient déjà préparés... C'est là qu'ils t'ont tiré dessus avec le produit qui a provoqué ton amnésie."
Son histoire se reconstituait progressivement. Tous les éléments reprenaient leurs cohérence, petit à petit, comme un puzzle qui se reformait sous ses yeux.
"Alors, personne d'autre que moi n'était amnésique ?"
"Bien sûr que non. Frank a d'ailleurs eu du mal à cacher son ressentiment pour toi quand il a été obligé de t'accueillir. Le groupe voulait te convertir à leur cause. Je t'ai approché pour voir s'il était possible de te récupérer, mais j'ai vite compris que tu n'étais plus le même. Alors j'ai décidé de procéder à quelques manipulations, à la place."
Quentin se remémora ce qu'il avait vécu dans le dédale, et se mit à relier les événements :
"C'est vous qui m'avez envoyé la chimère ?"
"Elle était destinée à Lucien au départ... Mais c'est moi qui t'ait mené sur la piste de Frank. Lucien a découvert que tu étais Gardien juste ensuite."
"Mais alors... Il n'en n'avait pas après Chloé ?" questionna-t-il, se rappelant du sort de la jeune fille.
"Non. C'était toi qu'il poursuivait. Mais il n'a pas été capable de te rattraper, et la partie est terminée, maintenant."
"Qu'est-ce que vous voulez dire par là ?..."
Quentin en avait assez de ces formules sibyllines, de ces énigmes permanentes. Il voulait des réponses claires.
Marie ne put réprimer un nouveau sourire. Elle s'avança vers lui, tranquillement, et sortit une télécommande de sa poche qu'elle actionna. Le pistolet accroché au plafond chuta au sol avec un petit bruit mat.
"Tue la."
L'ordre était simple. Il ne pouvait l'accepter.
"Ce n'est plus moi." refusa t-il en secouant la tête, tandis qu'Anna se débattait de plus belle. "Je ne peux pas faire ça."
"Tu n'as pas changé, Quentin." assura Marie, qui le fixait d'un regard perçant. "Ce produit n'a pas pu effacé qui tu es vraiment, tu es toujours le même. Et je t'assure que tu étais parti pour le faire de plein gré. Je n'ai fait que te rendre ton identité."
Elle ramassa l'arme, et fit un nouveau pas pour la lui donner.
"Eux." fit-elle en désignant Anna. "Ce sont eux qui te l'ont cachée, qui t'ont menti. Je ne suis là que pour la vérité."
L'arme passa dans les mains de Quentin. S'était-il vraiment trouvé dans une situation ou une soif de sang l'avait poussé à s'en servir sans se poser de questions ?...
"Pourquoi ?" demanda t-il finalement. "Pourquoi tout ça, pourquoi le Labyrinthe ?..."
Les traits de Marie se tendirent, exprimèrent l'amertume :
"Les gens ont commencé à vouloir plus de sensationnalisme. Quand il ne leur suffisait plus de mettre en scène leurs représentants les plus médiocres dans des situations les plus banales... Ils ont demandé plus. Et on le leur a donné. Il s'est avéré que voir s'entre-tuer des repris de justice a été suffisant pour les intéresser. Je ne sais pas quel sera le prochain stade."
L'amnésie de Quentin lui avait fait oublier qu'une telle chose était possible. C'était donc incrédule qu'il répéta :
"Vous voulez dire, qu'ici..."
"C'est une émission, en effet. Elle fait fureur. Il semble que les gens sont accrocs à la violence."
L'absurdité de la situation le frappa, et il fixa l'arme qu'il tenait comme il aurait plongé le regard dans un abîme sans fond.
"Donne leur ce qu'ils veulent." ordonna Marie. "Redeviens toi-même. Tue la."
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro