Chapitre 3
La nouvelle année inspirait visiblement Axel Desmarais en matière de plan machiavélique. Un soir, alors qu'Astrid préparait le dîner, elle eut un appel de ce dernier. Björn était sous la douche. En entendant la voix sèche, elle frémit jusqu'aux orteils et chercha à s'appuyer sur un fauteuil. Il sait ! paniqua-t-elle. Il sait que je suis enceinte !
- Bonsoir, Astrid Cavaleri.
- Bon...bonsoir, lâcha la jeune femme.
- S'il vous plaît, allez sur Internet. Maintenant.
Astrid se dirigea vers l'ordinateur et l'alluma, le cœur déjà au bord de la rupture.
- Ce soir, il y a un concert gratuit à Naples, tout près de chez vous. Ça commence dans une demi-heure, je crois. Vérifiez.
- Euh...oui. À vingt-et-une heure.
- Regardez la liste des chanteurs présents. L'un d'entre eux... va mourir.
Astrid parcourut la dizaine de noms et eut un haut-le-corps. Évidemment.
- Vous...
Mais Axel Desmarais avait déjà raccroché. Astrid se releva, piétina un moment nerveusement, sans savoir où aller ni quoi faire. L'arrivée de Björn lui remit les idées en place et elle se précipita sur lui pour l'agripper par le tee-shirt.
- Il faut qu'on parte tout de suite ! Desmarais va tuer Domenico !
- Hein ? Qui ?
- Va mettre tes chaussures, je prends les clés de la voiture et...
- Du calme ! Desmarais va tuer qui ?
- Domenico, dans...vingt minutes !
- Domenico ? Attends, ton chanteur ?
- Oui ! S'il te plaît, Björn, dépêche-toi !
Le Suédois finit par s'habiller à la hâte mais, quand il fut au volant de la voiture, il réalisa soudain :
- Mais enfin, c'est de la folie ! Comment va-t-on pouvoir empêcher un meurtre, sans rien savoir ? Sans compter que tu es enceinte, et que par conséquent, nous ne devons prendre aucun risque ! Je n'ai même pas pris d'arme et...
- Tu veux que je laisse Domenico se faire tuer sans rien faire à cause de moi ? Démarre, bon sang ! Nous trouverons un moyen...
Björn, avec un soupir, consentit à partir. Ils mirent de longues minutes à dénicher une place de parking qui n'était pas trop éloignée de la scène en plein air, ce qui acheva de réduire le calme d'Astrid en miettes.
- Calme-toi ! Ce n'est pas encore lui, regarde ! C'est un grand type frisé...
- Il est peut-être déjà mort !
- Et tout le monde aurait continué le concert comme si de rien n'était ? Astrid, écoute, ce n'est vraiment pas une bonne idée. Dans ton état, je préférerais que...
Mais la jeune femme écartait déjà la foule de spectateurs pour se diriger vers le premier rang. Björn la suivit, surveillant surtout que personne ne la touche ou la bouscule.
Domenico Sorabella apparut. Astrid le trouva beaucoup mieux qu'au temps où elle l'avait connu : il avait abandonné sa ridicule teinture trop noire et laissait ses cheveux grisonner naturellement. Il était vêtu d'un costume élégant et moderne, bien plus seyant que sa veste jaune ringarde. Il prit le micro avec assurance, sourit au public et commença sa chanson. Astrid parcourait chaque visage de l'assistance pour trouver lequel était hostile. Björn la tenait par le bras, plus attentif à elle qu'à l'éventuel assassin. La jeune femme remarqua alors une spectatrice sans âge, qui lança une rose sur la scène avant de se fondre dans la masse.
Pour n'importe qui, ce n'était qu'une fleur innocente, mais Astrid comprit que c'était un piège. Elle repoussa Björn de toutes ses forces et escalada la scène. Domenico avait ramassé la rose et la portait à ses lèvres au moment où elle la lui arracha des mains. Elle jeta la fleur le plus loin possible, mais elle explosa en plein vol, la projetant elle et le chanteur violemment en arrière. La foule se mit à hurler. La fumée issue de la mini-bombe, soigneusement dissimulée dans la rose, obstruait la scène et Björn, épouvanté, s'y hissa à tâtons.
- Astrid ! Astrid ! cria-t-il.
Il la trouva étendue près de Domenico, miraculeusement indemne. Le chanteur, bien que sonné, ne présentait pas de blessure non plus. L'explosion avait surtout fait du mal à une enceinte qui n'était plus qu'un tas de plastique.
- Astrid ! Le bébé ! souffla Björn.
- Il va bien...répondit-elle. Je n'ai rien. Je...ça va.
Des secours se précipitaient sur scène, ramassaient Domenico et voulurent aider Astrid. Mais Björn la releva en premier et la maintint contre lui.
- Ma femme est enceinte ! clama-t-il. Il faut vérifier que l'enfant aille bien...
Une infirmière emmena la jeune femme se faire ausculter, sans que Björn ne la lâche.
- Je te rappelle que je ne suis pas ta femme, lui murmura Astrid.
- Je le sais. Je ne pouvais pas dire : la fille que j'ai mise enceinte pendant une nuit de désespoir !
Astrid parvint à sourire. L'examen rassura tout le monde : elle n'avait aucune séquelle et le bébé était toujours là.
- C'est plus solide que l'on croit, assura l'infirmière. Mais si vous avez des saignements, allez le plus vite possible à l'hôpital.
Björn pensait naïvement qu'ils pourraient s'en aller sans encombre, mais un type de la sécurité leur tomba dessus :
- Comment saviez-vous pour l'explosif ?
- Je...j'ai trouvé que la femme avait un comportement bizarre. Et j'ai vu quelque chose clignoter dans la rose, mentit Astrid.
- Vous allez tout de même vous rendre au poste de police et...
- Laissez-la, fit une voix derrière eux. Je veux parler avec elle.
Domenico, le visage fermé, vint s'interposer et posa une main sévère sur l'épaule d'Astrid.
- Toi, viens avec moi. Tout de suite.
Il l'entraîna à l'écart du tumulte et la fit asseoir sur une grosse caisse avant de se placer devant elle, les bras croisés. Björn afficha aussitôt un visage farouche et passa un bras protecteur autour des épaules d'Astrid.
- Tu m'expliques ? siffla Domenico. Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?
- Domi, c'est...
- Ah non, pas de ça ! Je m'appelle Domenico et je crois même que tu ferais mieux de m'appeler « monsieur ».
- Vous vous prenez pour qui, pour lui parler sur ce ton ? répliqua Björn. Elle vous a sauvé la vie !
- Je ne sais pas qui vous êtes, mais vous n'avez rien à faire ici !
- Quoi ? Je suis son...compagnon et elle est enceinte !
- Elle vous a raconté qu'elle s'est foutue de moi pendant des semaines pour me soutirer de l'argent ?
- Elle a aussi sauvé votre fils junkie, que je sache ?
Les deux hommes s'affrontèrent du regard. Astrid soupira et se leva pour se mettre entre eux.
- Domi...nico, c'est une longue histoire. Je vais t'expliquer.
- Tu étais au courant, pour cette foutue rose piégée ? C'est à cause de tes magouilles illicites que j'ai failli me faire tuer ?
- Je...pas vraiment. J'étais au courant, mais...
- Donc, si je comprends bien, je ne serais jamais tranquille ? Je serais constamment en danger parce que j'ai couché avec la fille d'un mafioso ?
- Je t'en prie, ne t'énerve pas ainsi...
Björn était encore plus en colère. Il saisit brusquement Domenico par la veste.
- Écoutez-moi bien ! Je comprends que vous ayez eu peur, mais si vous parlez encore comme ça à Astrid, je jure que je vous fous mon poing dans la...
- Björn, ça suffit ! Laisse-le ! Il a raison...
La jeune femme se sentit soudain très lasse. Elle se rassit, prise d'un léger vertige.
- Astrid !
- Ça va. Il est bien accroché. J'ai juste eu très peur, moi aussi.
Domenico se radoucit. Il s'assit à côté d'elle, ce qui fit froncer les sourcils de Björn.
- Tu as risqué ta vie et ton bébé pour me sauver, et je t'en suis très reconnaissant. Mais tu comprends que je ne peux pas te laisser partir sans explication...
- Elle vous a dit que c'était une longue histoire, et elle est fatiguée, fit durement le Suédois.
- C'est vrai, approuva Astrid. Viens donc déjeuner chez moi, demain. La Villa Gialla, à San Gennaro. Je te raconterai tout.
- Déjeuner ? s'étrangla Björn.
- Oui, déjeuner. Si ça ne te dérange pas, Domenico.
- Je viendrai.
- Je ferai des pennes aux champignons.
Le chanteur pencha la tête sur le côté avec un léger sourire, détendant ses traits qui, sans être harmonieux, pouvaient être charmants.
- Tu t'en souviens ? C'est ce que nous avons mangé le premier soir où j'ai dormi chez toi.
- Je m'en souviens. Je sais que tu adores ça, alors...
Björn, qui ne pouvait pas en supporter d'avantage, attrapa fermement Astrid par le bras.
- Il est temps d'y aller...au revoir.
Le Suédois la raccompagna à leur voiture sans un mot. Il faisait ostensiblement la tête.
- Qu'est-ce que tu as ? soupira Astrid.
- Tu aurais pu trouver autre chose qu'inviter ce vieux beau à manger chez nous !
- Comme quoi ? Que je l'invite au restaurant ?
- Ne me provoque pas ! Je te préviens, s'il dit un mot de travers, je le mets à la porte !
- Il a le droit de savoir.
- Peut-être, mais il n'a pas le droit de te parler mal ou de te draguer.
- Il ne me drague pas, alors arrête ton cinéma !
Le lendemain, Björn continua à bouder, mais Astrid l'ignora et prépara les pennes avec une sauce aux champignons de Paris. Elle connaissait exactement la dose de poivre et de sel à mettre pour plaire à Domenico. Je me souviens de cela, mais je ne sais même pas quel est le plat préféré de Björn, réalisa-t-elle.
Le chanteur se présenta à midi pile, avec un ravissant bouquet, non pas de roses, ce qui aurait été plutôt de mauvais goût, mais de camélias et de gardénias. Astrid le glissa dans un vase sous le regard agacé de Björn qui, personnellement, l'aurait directement mis à la poubelle.
La jeune femme s'efforça de raconter le plus clairement possible, en omettant bien sûr quelques détails, le « dossier Axel Desmarais ». Domenico l'écouta sagement en faisant honneur au repas, au contraire de Björn qui massacrait ses champignons à coups de fourchette sans jamais en mettre un dans sa bouche.
- Quelle histoire...cet homme a l'air d'être un véritable psychopathe.
- Oui. Je suis désolée qu'il se soit attaqué à toi, Domi.
- Eh bien...il a raté son coup. Grâce à toi. Merci encore.
- C'est normal.
- En tout cas...la grossesse te va bien. Tu es rayonnante.
Björn se redressa subitement, sans que le chanteur ne s'en aperçoive.
- Merci beaucoup, Domi.
- Je croyais qu'il voulait qu'on l'appelle « monsieur » ? siffla le Suédois en ne sachant pas très bien lequel des deux il devait fusiller du regard.
- J'ai changé d'avis, répondit simplement le chanteur. Après tout, Astrid et moi nous connaissons bien. Elle sait même quel est mon plat préféré.
Il indiqua le plat de pennes et se resservit en souriant. Björn vira au rouge pivoine et se tourna vers Astrid :
- Quel est mon plat préféré, à moi ?
- Quoi ? balbutia la jeune femme, prise de court.
- Mon plat préféré ?
- Mais enfin...tu as quel âge ? Ce n'est pas un concours !
Elle cherchait à gagner du temps. Elle se souvint de la réflexion qu'elle s'était faite en préparant les pâtes. Quelle ironie ! Mais, même en fouillant profondément dans sa mémoire, elle ne trouva que le plat préféré de Daniel (l'osso buco), celui de Salvatore (les poivrons farcis), et celui de Lars (le saumon fumé à l'aneth) dont le souvenir lui arracha une petite grimace douloureuse.
- Alors ? insista Björn.
- Et le mien, tu le connais ? répliqua-t-elle.
- La tarte aux noix de pécan de Mama.
C'était exact. Elle rendit les armes :
- Je n'en sais rien. Mais est-ce que c'est vraiment important ?
- En effet, c'est un détail, approuva Domenico, qui ne pensait pas provoquer un tel drame.
- Vous, la ferme ! J'en ai assez !
- Mais assez de quoi, enfin ?
Björn se leva et se mit à singer Astrid :
- Oh, Domi, Domi, Domi gnagnagna ! Merci beaucoup pour les fleurs ! C'est vrai que tu me trouves ravissante ? Oh, merci Domi ! Je connais ton plat préféré, regarde, j'ai fait des pennes aux champignons !
- Non, mais ça ne va pas ? Qu'est-ce qui te prend ?
Björn se retourna vers Domenico qui ne savait plus quoi faire ou dire.
- Et vous là, espèce de connard ! Qu'est-ce que vous cherchez ? Astrid n'est plus libre, vous comprenez, elle est avec moi et nous allons avoir un enfant ! Alors, bas les pattes !
- Tu délires ! s'écria Astrid. Arrête de...
Mais Domenico, échaudé par l'insulte, envoya soudain son poing dans la figure de Björn, qui répliqua aussitôt. Les deux hommes s'empoignèrent et manquèrent de renverser la table. Astrid eut beau crier, ils ne cessèrent pas : alors elle décida d'intervenir, voulut les séparer, mais reçut un coup de coude dans le nez qui la fit tomber. Immédiatement, Björn lâcha Domenico et se précipita vers elle.
- Merde ! Tu as mal ? Tu saignes ?
- Laisse-moi tranquille ! siffla Astrid. Tu te comportes comme un imbécile, tu te comportes comme...
Lars. Mais le prénom ne franchit pas ses lèvres. Des larmes lui montèrent aux yeux.
- Ce n'est pas parce que...je suis enceinte de toi que je suis ta propriété privée, Björn ! Aurais-tu déjà oublié Leïla ?
Sa question fit mouche. Le Suédois s'immobilisa brusquement.
- Bien sûr que non...non, je ne l'ai pas oubliée...
- Alors fais en sorte de ne pas lui faire honte !
- Je lui fais honte en protégeant mon enfant ?
- Pousse-toi. Je veux que tu t'en ailles, Björn.
- Ah oui ? Et où ça ?
- Je n'en sais rien, mais je ne veux plus te voir !
- Très bien ! clama-t-il. Je pars, je te laisse avec ton cher Domi ! Mais je reviendrai ce soir, je te préviens !
- C'est ça. Et tâche de revenir dans ton état normal.
Le Suédois bouscula Domenico au passage, et, avant de sortir en claquant la porte, lança :
- Et pour information, mon plat préféré, c'est les boulettes de viande !
Il y eut un long silence. Astrid s'essuya le nez et les yeux avec sa manche.
- Si je comprends bien, il n'est pas toujours ainsi ? fit doucement le chanteur en l'aidant à se relever.
- Oui...ce bébé le rend complètement fou.
- Tu sais, j'étais un peu pareil quand Francesca était enceinte. Nous, les hommes, nous devenons...des chefs de meute qui protègent leur territoire et leur progéniture. C'est l'instinct animal.
Astrid trouva un sourire pour cette comparaison.
- Eh bien...j'ai toujours su que les hommes étaient des animaux...mais à ce point-là...
- Il tient à toi. Tu as de la chance...pardonne-moi si je me suis montré trop...entreprenant avec toi. J'ai visiblement attisé sa jalousie.
- Ce n'est pas grave...
Elle s'allongea de tout son long sur le canapé, épuisée par l'émotion. Domenico proposa gentiment :
- Je peux faire la vaisselle.
- Oh, merci beaucoup.
Quelques minutes plus tard, Astrid dormait profondément, et rêva même de ses parents.
La veille au soir, en rentrant du concert, elle avait rouvert son vieux journal intime et y avait écrit sa première « lettre aux disparus ». Une sorte de psychothérapie...
Mon cher papa,
Si tu savais le nombre de fois où Salvatore et Antonio m'ont parlé « d'Alvaro » ! D'ailleurs, je te demande pardon, mais dans mon esprit, parfois, je ne t'appelle pas « papa » mais « Alvaro ».
Il paraît que j'ai le même nez, le même entêtement, et la même « réaction à la souffrance » que toi. Salvatore me l'a souvent dit. Quand il était en colère, des fois, il me sortait : « Tu es comme ton père, une fichue tête de mule ! ». Je lui répondais qu'il ne valait pas mieux avec son caractère de cochon, et que de toute façon, nous, les Espagnols, nous sommes comme ça.
J'aurais bien voulu te voir avec eux. Vous étiez le « trio infernal » de Naples, l'un beau (Salva), l'autre charmeur (toi) et le dernier intelligent (Antonio, selon lui-même). Des stars !
Ils m'ont dit que tes parents connaissaient très bien ceux d'Antonio et que c'est lors de vacances ensemble à Capri que vous étiez devenus amis. Et que tu t'aies tout de suite bien entendu avec Salvatore, bien qu'il joue au brun ténébreux. Maintenant, il est plutôt « gris ténébreux » !
Il s'est bien occupé de moi, je ne peux pas le nier. Je l'adore. Mais parfois, il me mettait vraiment en rogne, alors je passais des nuits entières à me demander comment aurait été ma vie si j'avais vécu avec toi et maman. Quand tu as appris qu'elle était enceinte, il paraît que tu as dansé la rue. Cela veut sûrement dire que tu étais content de m'avoir. Que l'on aurait été heureux...
Je ne te connais que peu, mon papa, mais je t'aime très fort quand même. Tu sais, bientôt, tu vas être grand-père. Je suis enceinte. Pas de l'homme que j'aurais voulu, fondamentalement. Mais j'ai encore perdu Daniel. Je perds tout le temps Daniel, c'est comme ça. C'est le destin. Et Lars...Lars est mort. Je l'aimais. Il me manque. Vous me manquez tous beaucoup, c'est pour ça que j'ai décidé de vous écrire. Les mots écrits sont plus forts que les paroles. Enfin, c'est ce que je crois.
J'ai vu la vidéo que tu m'avais laissée avec maman. Je l'ai vu peut-être cinquante fois. Ou cent. Je ne sais plus. Mais ce n'est qu'une vidéo...
Je suis aussi allée dans votre appartement de Grenade. Il y a encore ta brosse à dents et ton rasoir dans la salle de bain. C'était étrange, de vivre au milieu de tes affaires, mais sans toi. Comme si je vivais dans un musée.
Voilà comment tu vis à travers moi, papa. Avec une vidéo et des souvenirs racontés par d'autres. Mais tu es dans mon cœur, ça, c'est pour de vrai.
Je t'aime. J'espère que tu seras fier de ton petit-fils ou de ta petite-fille.
Tu hija, Astrid.
Merci <3
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