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Chapitre 19

[Je peux vous présenter Sorel, comédien, et également protagoniste de ce roman. C'est également un frère, un romantique, un passionné, un homme aux mille facettes. J'espère qu'il vous plaît !]

« J'ai éclaté en sanglots. J'ai un faible pour cette expression.

On n'éclate jamais de faim ou de froid. En revanche, on éclate de rire ou en sanglots.

Il est des sentiments qui justifient qu'on vole en éclats. »

-Albert Espinosa


Héliodore foulait le sol insensible des rues parisiennes à la manière d'une âme errante. Errante, mais infiniment heureuse.

Un sourire flottait au creux de ses lèvres et il ne chercha même pas à se fustiger. Même la nuit dépourvue de toute étoile ne parvenait pas à déteindre sur son humeur. Lui qui avait subi son existence, qui y avait assisté à travers un voile, semblait ouvrir les yeux pour la première fois. Aucune trace de culpabilité ne le ralentissait. Il flânait dans les rues, à peine conscient des remontrances qu'il s'apprêtait à subir.

Pour l'heure, il se complaisait dans cette légèreté nouvelle. Chaque pas semblait plus aisé, moins lourd, moins laborieux. Il sentait encore nettement le souffle brûlant de Sorel sur sa peau. L'oublierait-il seulement un jour ? C'était bien peu probable et Héliodore chérissait ce souvenir. Ses sens répondaient encore aux caresses de son amant, aussi sûrement que si ses mains retraçaient encore les courbes de son corps. C'en était grisant et le jeune homme se sentait ivre, à tel point qu'il peinait à comprendre comment il parvenait encore à retrouver sa route. Était-ce donc cela, l'amour ? Cette pensée subtile dont s'encombraient les hommes et qu'Héliodore avait toujours méprisé comme tout ce qui échappait à son intelligence pragmatique ? Il comprenait désormais ce langage ô combien précieux, la langue du cœur.

Héliodore fuyait le contact aigre de la réalité et se complaisait dans cette inconscience pleine de libertés nouvelles. Il savourait ce qui lui était offert sans songer à l'instant qui y mettrait probablement un terme. Sa main s'enroula autour de la porte de la maison et, dans un silence qui parut lui indiquer la démarche à suivre, il pénétra dans l'entrée. Il y faisait plus noir encore que dehors, où les lumières des réverbères perlaient comme des gouttes d'or dans les profondeurs d'un lac. Le calme, ce mutisme consenti, qui régnait lui fit l'effet d'une gifle. Un retour à la réalité qui n'était pas encore complet, mais qui s'avéra suffisante. Héliodore prit toutes les précautions nécessaires et ses pas effleuraient à peine le parquet ciré. Sa mère dormait sur le fauteuil qu'elle n'avait pas eu le courage de quitter, immobilisée par des douleurs que la chaleur rendait plus intolérables que jamais. Un fléau de moins à affronter, Héliodore venait de gagner quelques heures de répit.

Il gravit les marches dans cette même économie de mouvements. Il avait rechaussé ses lunettes, il s'était revêtu et seul son souffle irrégulier, seuls ses orbes moins lointains qu'à l'ordinaire, plus brillants aussi, trahissaient ce qu'il venait de vivre. Un échantillon de la nuit, un morceau d'éternité que Sorel avait partagé avec lui. Héliodore avait croqué dans le fruit défendu comme il avait embrassé le péché : de toute son âme.

Il s'immobilisa devant la porte et déposa son front brûlant sur la surface lisse et fraîche. Il inspira une profonde goulée d'air. Cette maison semblait aspirer toute euphorie, toute essence et Héliodore en vint à se demander si ce n'était pas ce lieu qui l'avait rendu si apathique. Une sorte d'enfer personnel duquel il s'échappait laborieusement. Un enfer qu'il lui fallait affronter. La main crispée sur la clenche, il l'abaissa dans un claquement sinistre, presque un couteau qui s'abat aussi sûrement que s'il se tenait à genoux devant l'échafaud.

Ses yeux s'habituèrent à une obscurité encore plus grande et il discerna la silhouette de son épouse dans la nuit. Un corps aux formes féminines qui trouva le sien sans effort, comme si sa place s'était toujours trouvée à ses côtés. Héliodore sentit son estomac se liquéfier. Une seconde s'était écoulée et Apolline avait fondu sur lui comme sur une proie sur laquelle elle veillait depuis des heures, affamée. Elle portait un vêtement fin au travers duquel son époux devinait son ventre fermer, sa poitrine menue et un pubis recouvert de poils blonds. Une nudité qui l'ébranla curieusement alors qu'il soufflait, soudain décontenancé :

— Apolline.

Aucun reproche, pas une remontrance et, soudain, Héliodore se surprit à espérer une telle réaction. Tout sauf cette proximité indécente à laquelle ils ne s'étaient jamais abandonnés, tout époux qu'ils étaient.

— Vous avez tardé.

— Je suis navré, balbutia-t-il.

Non, il ne l'était pas, mais cela se révéla la seule parole qui s'imposait à lui. Le parfum d'Apolline lui gonfla les narines, envahit ses sens. Une toute autre sorte d'ivresse s'offrait à lui, avec ses charmes et tout ce qu'elle avait à offrir. Son épouse était une femme qui ne se donnait pas et, derrière ses minauderies et son assurance de façade se cachaient un être qui ne demandait qu'à être rassurée. Elle cherchait à plaire à tout prix, mais ce n'était que pour combler l'indifférence d'un époux qui se refusait à elle et d'une vie qui ne la satisfaisait jamais entière. La richesse, l'opulence, rien n'était assez grand pour combler le vide qui se creusait au creux de sa large poitrine. Elle ne possédait pas la beauté qu'elle convoitait et être agréable à regarder ne lui suffisait plus. Si seulement elle pouvait être belle aux yeux de son mari, mais là encore, il ne lui avait jamais fait l'honneur d'un compliment. Derrière sa soif de gloire, d'attention nourri par la convoitise de ses amies qu'elle gavait de détails mensongers sur une vie conjugale triste à mourir, se dressait des envies simples, naturelles, que rien ne saurait combler.

— Ne le soyez plus.

Le souffle qu'elle glissa au bord des lèvres d'Héliodore l'étouffa. Elle avait bu, sans doute par sa faute et l'ivresse lui donnait la force de formuler une demande qui pourrissait en elle depuis des mois. Dans l'ombre de la pièce, son époux devinait un nez un peu fort et ses yeux, qui trahissaient le plus souvent un jugement ou de la désapprobation, dévoilaient cette fois un soupçon d'hésitation. Sa finesse n'égalait pas celle de Sorel, mais l'épaisseur de ses hanches comptait parmi les défauts choisis par les critères de beauté de ce temps. Elle ne saurait rivaliser avec son véritable rival et celui-ci n'était pas fait de drapés et de poudres pour masquer quelque imperfection que ce soit, il était fait de chair et d'os, de passion et de promesses. Tout ce qu'elle ne saurait pas offrir et qui l'achèverait dans son orgueil de femme bien née.

Apolline planta un baiser sur les lèvres d'Héliodore. Un baiser au goût de désespoir et d'alcool. Sans doute aussi le premier qu'elle donnait vraiment à un homme, avec toute sa maladresse. Sentait-elle le goût de Sorel contre la bouche de son mari ? Comprenait-elle les penchants infidèles qui avaient poussé celui-ci à l'abandonner dans sa couche des heures et des heures durant ?

Héliodore ne réagit pas un seul instant à son contact. Une part de lui se glaçait. Apolline n'effacerait pas le souvenir de Sorel, mais elle pouvait encore l'enlaidir et il ne l'accepterait pas. Il la repoussa plus sèchement qu'il ne l'aurait voulu et la jeune femme tituba avant de se laisser choir sur le lit. D'un mouvement un peu incrédule, elle alluma la lampe alors que son envie la poussait à cacher ses traits défaits, dépouillés de tout artifice. Une lumière rougeâtre envahit la pièce et, à la vue de ses paupières gonflées, Héliodore fut frappé par la culpabilité. Comment avait-il osé ?

— Pourquoi ? murmura-t-elle.

Héliodore resta muet. Il était bien incapable de placer des mots sur le déluge d'émotions qui l'assaillaient depuis une poignée de jours. Sorel avait instauré un carnage dans l'ordre inhumain de son existence en l'espace d'un temps si ridiculement court qu'Héliodore lui-même ne parvenait pas à comprendre le sens de ce bouleversement. Comment Apolline pourrait-elle le concevoir ?

— Je vous ai attendu durant des heures. J'ai espéré, j'ai désespéré. Comment pouvez-vous m'humilier de la sorte ?

— Je suis navré, répéta encore le jeune homme.

— Pour quelle putain trahissez-vous les liens du mariage ?

— Il n'y a aucune femme, vous avez ma parole.

Héliodore se mordit l'intérieur de la bouche. Une fausse vérité, voilà tout ce qu'il avait à lui offrir. Il aurait tant aimé lui avouer quel secret le forçait à pareille conduite, mais il était des bonheurs qui se vivaient cachés, surtout par les temps qui courraient. Là encore, il en vint à la même conclusion : Apolline ne comprendrait jamais. Ou peut-être bien qu'Héliodore préférait penser ainsi, dans le but égoïste de se préserver.

— Pourquoi se refuser à moi ? Je ne suis pas la femme que vous rêviez d'épouser et je ne suis pas assez sotte pour ne pas en souffrir. Cela vous contente, de me voir ainsi, misérable ? Cela satisfait-il votre orgueil ? Vous n'êtes qu'un homme, vous devriez...

— Vous céder ? Cela serait si simple.

— Vous êtes mon époux et je suis votre femme, qui y a-t-il de si complexe ? Votre mère fait peser sur mes épaules une pression constante et vous ne semblez pas en considérer l'ampleur.

— Une pression constante ? Je suis son fils et vous croyez pouvoir me parler de responsabilités ? Cette femme m'a élevé et ne croyez pas qu'elle m'ait épargné ses mots rudes, son ambition démesurée. Croyez-moi, je suis plus navré encore que vous soyez forcée de subir même une infime part de son jugement et de ses valeurs issues d'un autre temps. Plus encore que le fait de ne pouvoir vous donner satisfaction !

— Vous ne le souhaitez pas ou vous êtes incapable ?

— Qu'importe que je le veuille ou non, le résultat est le même et vous le déplorez ! Je ne puis pas vous honorer comme l'exige nos devoirs conjugaux, je ne vous demande pas de le comprendre, mais de l'accepter !

Héliodore tremblait presque autant que son interlocutrice. Jamais il n'avait autant haussé le ton et jamais ils n'avaient entretenu une discussion aussi houleuse, aussi sincère. Le poids des non-dits se libérait et cela se révélait aussi douloureux que nécessaire. L'homme ne trahissait pas son secret et pourtant, il ne s'était jamais révélé aussi sincère. Il réalisa soudain à quel point il avait vécu sans posséder le moindre contrôle sur sa vie. Apolline en avait été la victime innocente, étrangement silencieuse dans sa douleur.

— Quel avenir possédons-nous ? avança-t-elle, dans un murmure.

— Celui que nous parviendrons un construire.

Il n'y avait plus la moindre conviction dans la voix d'Héliodore. Il haïssait les promesses et plus encore celles qu'il ne tiendrait pas. Apolline frissonna dans l'air tiède de la pièce. Dénudée, elle sembla en prendre soudainement conscience et ses bras l'enlacèrent comme pour cacher ce que son époux ne prenait même pas la peine de détailler.

— Ce que vous voyez vous répugne donc tant que cela ? croassa-t-elle.

Cette phrase lui avait coûté un effort considérable et Héliodore en était pleinement conscient. Ces vérités n'avaient pas leur place dans la société comme dans les relations intimes qui se bornaient à la procréation. De quoi ouvrir les yeux de l'homme sur le péché auquel il s'était adonné un peu moins d'une heure plus tôt.

Apolline laissa le regard d'Héliodore retracer les quelques formes de ses hanches, ses seins qui disparaissaient sous des mèches blondes, son sexe qui disparaissaient dans le creux de ses cuisses. Il aurait pu l'aimer, elle et les imperfections qu'elle refusait d'accepter, elle et sa superficialité qui cachait bien plus. En fait, il avait honte d'en être incapable et de lui imposer cela, sa propre impuissance alors qu'il portait encore sur lui l'odeur d'un autre. Quelle piètre plaisanterie !

— Non.

Héliodore se sentait démuni devant cette femme qu'il ne connaissait pas et qui disait être son épouse. Sa mère avait arrangé leur union comme elle avait dirigé l'existence entière de sa progéniture. Il se reprit après quelques longues secondes de silence, toujours debout et immobile sur le seuil de la porte :

— Je suis navré de ne pas être l'homme que vous souhaitiez.

— Vous ne l'êtes pas autant que je le suis.

— Vous ne vous imaginez pas quel point.

Il s'humecta les lèvres et Apolline ne le quittait plus du regard. La colère était retombée et sur ses vestiges apparaissaient la prise de conscience nette, pénible. Il fallait décider d'un avenir commun puisqu'aucun autre choix ne leur était donné. La fièvre d'Héliodore était retombée et dans cette vaine recherche de paix, il espéra trouver un compromis :

— J'aurais dû trouver le courage de vous faire ces aveux plutôt, mais ne vous empêchez pas de vivre. J'aimerais que vous soyez heureuse sans moi. Nous continuerons de donner l'image que nous entretenions jusqu'alors et...

— Vous ne vous êtes jamais donné cette peine, le coupa amèrement Apolline.

— Je m'en excuse, mais je vous donne ma parole ce soir. Nous resterons ce couple, celui que vous aimeriez que nous devenions. Vivez, prenez un amant, plusieurs si cela vous sied et restons amis !

La jeune femme considéra gravement l'homme qui se dressait face à elle. Il lui fallait faire son deuil, peser chaque parole pour chaque acte, démêler le factice des quelques bribes de vérité. Il lui fallait du temps à l'heure où sa vie entière, ou plutôt la conception qu'elle s'en faisait jusqu'alors, venait de voler en éclats. Il ne lui restait qu'à pleurer sur les décombres.

— Bien, souffla-t-elle.

— Promettez-moi d'essayer.

Apolline hésita un instant. Elle aurait pu lui reprocher tant de choses, tant de mensonges et, par-dessus tout, cette promesse qu'il ne méritait pas. Elle se contenta d'acquiescer doucement. Héliodore ne masqua rien de son soulagement lorsqu'il embrassa le sommet de son crâne, seul geste d'affection qu'il ne lui témoignerait jamais. Il ignorait que ce maigre compromis ne formait qu'un vulgaire répit et qu'il perdrait à ce jeu comme il perdait toujours. 


Il s'agit de la première vraie confrontation entre les deux époux et pas des moindres. Apolline ne s'imagine pas une seule seconde quelle activité retenait son mari tandis qu'elle l'attendait dans le lit conjugal. Eh oui, ça paraît horrible sous cet angle et, dans un sens, ça l'est à mon avis. J'espère que ça vous aura plu, j'ai aimé écrire ce chapitre et, en règle générale, j'adore écrire ce roman !

Je vous souhaite une belle fin de semaine et courage à ceux qui reprennent les cours !

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