12. Les pensées
"C'est aux pensées à nourrir les paroles, aux paroles à vêtir les pensées. "
Ces vacances ont sans doute été les meilleures de ma vie. Je me suis jamais autant amusée, mais surtout je me suis sentit vraiment moi, avec Gabriel, je fais ce que je veux et dis ce que je pense, enfin presque. Ce qui est drôle, c'est que j'ai l'impression qu'il me connait plus que je me connais moi-même.
Je l'ai vu tous les jours, il venait me chercher chez moi – je ne sais toujours pas où il habite – vers quatorze heures, mais jamais à l'heure, évidemment, après on partait au parc, le plus loin de la ville, pourquoi faire proche quand on peut faire loin. On pourrait croire que tous les jours se ressemblait, mais au contraire chaque jour était différent du précédent, ce qui les rendaient magique. Gabriel est comme son abri « anti-pluie », il est magique.
Quand il est venu me chercher la première fois, je ne savais encore pas quoi faire, comment lui dire bonjour, inutile de dire que j'avais stressé toute la matinée, le stress ça me connait et même plus, le stress c'est ma vie.
Donc je disais, que quand je suis enfin arrivée à prononcer une syllabe devant lui, il a explosé de rire, rien de pire, et ça aurait été n'importe qui d'autre je serais rentrée et je me serais effondrer. Mais lui me donne confiance en moi, je ne sais pas comment il y arrive, mais rien que pour ça je dois rester à côté de lui pour le restant de ma vie.
Une fois arrivée au parc, on s'est assis, et il voulait que je lui donne un cours sur n'importe quoi, mais je n'avais rien préparée, j'avais trop peur, je n'avais pas de cours, pas de manuels pour m'appuyer. Je n'avais aucune idée de ce que j'allais lui raconter, j'avais tellement peur de lui parler, il était redevenu un garçon qui me faisait peur quand je parlais. J'ai donc essayé de le faire parler d'abord, mais rien à fonctionner, mais je ne pouvais plus parler, je suis restée debout tremblotante.
- Ce n'est rien fait comme si tu devais passer au tableau pour un exercice. A-t-il dit en me voyant frissonner.
Cette phrase m'a rappelé qu'il ne sait rien de moi, qu'il ne me connait pas et qu'une fois qu'il m'aura vu paniquer devant tout le monde juste pour une histoire de tableau, il se moquera de moi comme les autres et je ne serais plus rien pour lui, comme pour tous les autres. Je ne savais pas s'il fallait que je lui avoue toute la vérité, une fois qu'il la saurait, il se détournerait de moi, mais il avait toujours dit qu'il voulait connaitre la vérité. Et pendant tout le temps, où je réfléchissais il me regardait droit dans les yeux, ce qui m'effrayait encore plus. Pour arrêter ce cauchemar, je m'assis à côté de lui, sans un mot et je me suis figée.
Mes yeux étaient fixés sur une branche qui avait neuf feuilles, j'ai eu le temps de les compter, mais mon esprit, à mon grand désespoir n'oubliait toujours pas la situation réelle, dans laquelle je ne sais pas où me mettre. J'étais bien dans mes pensées, j'espérais plus qu'une chose, que Gabriel s'en aille, après tout quelle personne resterait alors que l'autre et dans ses pensées. Alors j'attendais mais rien ne se passait, jusqu'à que je le vis se lever, à ce moment, je me sentais enfin revenir, mais je n'étais pas plus heureuse, peut-être que j'espérais autre chose finalement, c'est la logique des filles, si on peut appeler ça une logique.
J'essayai de rentrer dans le monde réel, mais quand j'ai levé la tête, il n'était pas parti, il était juste devant moi, il attendait quelque chose, mais je ne savais pas quoi, alors je n'ai pas bougé, et au lieu de se rasseoir, il se mit à genoux devant moi, pour ne pas que je le quitte des yeux.
- Il faut que tu m'expliques un ou deux trucs !
- Je ne vois pas du tout de quoi tu parles ! Ai-je répondu en rigolant pour changer de sujet.
- D'accord laisse-moi t'expliquer. Premièrement pourquoi tu n'as pas voulu m'expliquer un truc, je suis si mauvais que ça ?
- Non évidemment que non ! Ai-je dis avec une toute petite voix, faut dire que je culpabilisais un peu.
- Alors pourquoi ?
- Je ne sais pas ! Ai-je répondu mais cette fois plus énervée.
- Vas-y énerve toi !
- Pourquoi tu veux que je m'énerve ?
- Comme ça j'aurais peut-être une chance d'avoir les réponses à mes questions.
- N'y compte pas trop.
- D'accord si tu le prends comme ça...
- Non mais reste, ne m'en veux pas, je suis juste un peu...
- Fatiguée et effrayée.
- Voilà tu as tout compris !
- Je sais, je comprends toujours tout, mais pourquoi.
- Parce que... Tu ne peux pas comprendre.
- Je viens de dire que je comprends tout !
- Oui mais je ne peux pas.
- D'accord, alors on va rester là, comme des gens bizarres qui n'ont rien à faire de leurs journées, et croit moi je ne partirais pas, moi aussi je peux rester dans mes pensées.
C'est ce que l'on a fait, lui avait l'air d'être perdu dans ses pensées, mais moi, j'étais incapable de réfléchir à autre chose qu'à Gabriel. Je n'arrêtais pas de me tourner, de changer de sens mais rien ne marchait, il n'y avait plus qu'une solution, il fallait que je lui explique.
- Au début, j'avais juste peur de parler, comme tout le monde, mais maintenant je suis incapable de prononcer un mot devant quelqu'un sans hésiter, et j'ai trop peur de me tromper et que tout le monde se moque de moi...
- Donc tu préfères restée seule dans tes pensées, au moins tu ne peux pas te tromper. Mais tu sais...
- Donc si tu veux partir, part rien ne te retient.
- Je le ferais quand j'aurais ma phrase.
- Alors reste ne te prives pas !
- Tu sais qu'un jour, tu auras le droit à la fin de ma phrase.
- Tant que ce n'est pas aujourd'hui.
- Aucune raison, si j'ai une explication sur un sujet que je ne maitrise pas.
- Tu sais que tu deviens difficile à supporter !
- C'est mon but dans ma vie !
- Y en a qu'on des buts ambitieux et d'autres...
- Il serait mieux si j'avais le droit...
- C'est bon, on a compris !
- Oui, mais j'attends.
- Alors qu'est-ce que représente l'heure pour toi ?
- Ok tu la joue comme ça ?
- Désolée je n'ai pas beaucoup d'inspiration !
- Je vois ça, alors pour moi une heure représente soixante minutes. Lève-toi, qui ferait un cours assis.
Je me suis levée aussitôt et réfléchis à comment commencer une bonne tirade, mais rien, je n'ai pas beaucoup d'imagination certes mais lui « une heure est égale à soixante minute » ce n'est pas mieux. Et ça y est j'ai enfin trouvé comment commencer, si je parlais un peu de moi.
- L'heure pour moi certes c'est soixante minutes et si on veut rentrer dans les détails, c'est aussi égal à trois-mille-six-cents secondes, mais le plus important c'est qu'il y en a vingt-quatre dans une journée, donc on a vingt-quatre chance de faire ce qu'on a envie, par exemple, on peut regarder si on a envie plus de vingt-quatre épisode de série, ou moins de vingt-quatre film dans la journée, ou alors si on est fous on peut avoir vingt-quatre heures de cours dans la journée. Une heure c'est la possibilité de faire la chose qu'on aime, ou les choses qu'on aime. Une heure c'est aussi le temps qui passe, mais qui nous rapproche du futur, de l'avenir donc de notre rêve. Dans le cas qui nous intéresse l'heure désigne aussi les horaires, pour certaines personnes, les horaires sont des limites, mais elles sont aussi des fois le moment de faire quelque chose d'important dans sa vie, ou pour la vie de quelqu'un. Enfin par exemple le premier janvier à minuit, même si on le faite à une heure précise, ce n'est pas ça qui compte, ce sont tes proches avec qui tu viens de passer une année mémorable et avec qui tu vas passer une année inimaginable, l'heure est juste là pour te rappeler ce moment inoubliable.
- Waouh ! C'était magnifique, même si je n'ai pas tout compris à ce que tu as dit car il faudrait que tu articules plus, mais c'était magique et promis j'arriverais à l'heure !
C'est vrai, je trouve ça aussi magnifique, je dois avouer que quand j'ai commencé je ne savais pas comment j'allais finir, mais j'ai bien improvisé. Mais évidemment je ne le referais jamais devant quelqu'un d'autre, j'en serais incapable, je me serais déjà trompée à la première phrase, et comme il dit je n'ai pas articulé, pourtant moi j'ai trouvé que si, parce qu'il ne m'a jamais vu devant la classe, là je n'articule pas.
- Merci, merci beaucoup ! Ai-je répondu n'y croyant pas, et étant essoufflée, car je n'ai pas beaucoup respirée.
- Tu vois ce qu'on peut faire quand on n'est pas tout le temps dans ses pensées !
- Je vois, mais ce n'est pas une raison, c'est tellement bien...
- C'est tellement bien quoi ? Protégée, sécurisée, isolée ?
- C'est le monde parfait !
- Eloignée des autres, c'est ça ton monde parfait à toi ?
- On n'a pas toujours besoin des autres dans la vie tu sais ?
- Je suis sûr que si et je vais te le prouver si tu acceptes un marché.
- Encore toi, je suis sûre que ton monde idéal, est fait que de marché.
- Pas entièrement mais presque, alors si tu acceptes de vivre ta dernière semaine de vacances sans tes pensées, je vivrais moi dans mes pensées sans autres personnes, isolées sur cette planète.
- Impossible
- Alors tu veux avouer que tu as tort maintenant ?
Alors évidemment que j'ai accepté, avoir tort moi c'est impossible. Donc au final j'ai passé mes vacances loin de mes pensées, c'était dur au début puis après on s'en passe, je ne vais pas avouer que Gabriel à raison mais presque. Les jours d'après se sont enchainés à une vitesse, le matin je dormais, après je courais voir Gabriel, je rentrais toujours trempée, il n'a pas arrêté de pleuvoir cette semaine, je voyais maman et Nicolas, le temps du diner, parfois je regardais un film avec eux, mais il finissait par s'endormir, donc je montais et ainsi de suite. C'était un cycle, je déteste les cycles, c'est ce que je reproche à la vie, mais je me suis peut être trompée depuis le début, cette semaine j'ai appris plein de choses sur la vie. Ce cycle a été pour moi le début d'une nouvelle ère, mais peut être que cette ère du recommencement va se finir demain.
Demain c'est la rentrée, et on ne sait jamais les bonnes surprises ou les mauvaises, que nous réserve la rentrée
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