Quelqu'un me porte. Il me soulève délicatement, ne me réveille pas. À travers mes paupières je crois entr'apercevoir des yeux dorés. Mais personne n'a d'iris doré. Je replonge doucement dans les abysses de Morphée.

Je suis dans ma chambre. Mama est là, je me précipite sur elle pour la serrer dans mes bras. Sa main caresse tendrement mes cheveux et elle dépose un baiser sur ma joue. Je savoure ce moment, tout à ma joie de la retrouver.

Soudain sa main se transforme en griffe et sa bouche s'approche de mon oreille pour me susurrer un avertissement d'une voix déformée :

"-N'ai confiance en personne."

Je me libère de son étreinte devenue prison et recule. Ma chambre est devenue une forêt obscure aux branches difformes et des yeux m'épient de part en part. Une chaleur insoutenable envahit la clairière et des flammes dévorent les monstres ainsi que les lambeaux de mon rêve.

Je m'éveille en sursaut, les échos des hurlements des monstres résonnant encore dans mes oreilles.

Repoussant les couvertures chatoyantes qui recouvrent mes jambes, je m'appuie sur les coussins calés sous ma tête pour me redresser. Mon sac repose sur un tabouret près du lit et un chiton propre est plié à mes pieds.

Méfiante j'observe la pièce dans laquelle je me trouve. Il s'agit d'une chambre aux murs ocres, encombrée de nombreux engins dont l'usage me semble inconnu.

En me levant, j'essaie de n'en heurter aucun mais le bazar est tel que je finis par faire tomber une figurine en métal. Le bruit fracassant quand elle rencontre le sol me pétrifie. J'entends avec horreur des bruits de pas qui arrive précipitamment. Agitée, je tente de me cacher dans un coin de la pièce derrière une pile d'engrenage.

J'essaie de faire appel au Don des ombres mais la pièce est trop éclairée pour que cela ait la moindre utilité.

Un grincement strident résonne dans la pièce. L'ombre de la porte tranche violemment avec la nouvelle source de lumière émise dans le couloir. Une nouvelle ombre entre et à mesure que ma vision s'accommode à la luminosité, je distingue une forme d'homme. Élancé et fin, il porte une tunique par dessus un pantalon.

Les pantalons sont des vêtements non conventionnels m'a toujours dit Mama. Ils sont plus pratiques qu'un chiton mais ne sont pas conseillés par les Moires. Et qui s'oppose aux Moires est destiné à périr, rejeté par la société.

Pourtant la soie de sa tunique et l'or des bracelets cerclant ses avants bras montrent qu'il est riche. Pendant mes divagations, l'inconnu a inspecté la chambre et levé le sourcil face à la pile intacte sur le tabouret. Lorsqu'il se retourne il sursaute en me voyant accroupie, mon couteau tendu à bout de bras dans sa direction.

"-Bonjour toi, me dit-il nerveusement. Je m'appelle Sthénélos et toi ? "

Je le regarde, n'osant répondre.

Il soupire, refait mon lit et sort de la chambre. Je le regarde, pétrifiée. Je ne comprends pas.

Pourquoi m'avait t-il recueilli ? Me veux t-il du mal ?

Quelques instants plus tard, l'inconnu passe à nouveau la porte et dépose devant moi un bol rempli de nourriture.

L'odeur alléchante réveille mon estomac qui grogne de mécontentement. Apparemment il n'apprécie pas d'avoir été négligé durant plusieurs jours.

"Tiens, ce n'est pas grand chose mais c'est tout ce que j'ai, déclare t-il. Je suppose que tu as faim après autant de temps dans le Thépios.

-Comment sais-tu que j'ai passé plusieurs jours dans le Thépios ? Je lui demande de ma voix rauque."

Il me regarde attentivement dans les yeux.

"Je ne le savais pas, je l'ai deviné à l'état de tes vêtements et des débris de nourriture dans ton sac."

Je continue de l'observer, n'esquissant aucun mouvement malgré les bruits de mon ventre.

"Je voulais te dire que tu peux rester autant de temps que nécessaire. Y a t-il quelqu'un qui pourrait te recueillir ?"

-Non."

Ma réponse sèche semble le décomposer.

"Ah. Je vais donc te laisser."

Il se relève en s'appuyant sur ses genoux.

"Érèbe."

"Qu'as tu dis ? Me demande t-il en se retournant.

-Mon nom. C'est Érèbe."

Un sourire sincère éclaire son visage.

"Merci, me répond t-il doucement avant de fermer la porte."

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Lexique de l'Univers:

Chiton: En Grèce ancienne, tunique, vêtement de dessous et d'intérieur porté long ou court par les hommes et long par les femmes. C'est une tunique de lin au plissé fin, cousue sur les côtés ou tissée sans coutures, cintrée à la taille, portée par les hommes comme par les femmes : elle est courte et sans manches pour les hommes, longue et avec manches pour les femmes. D'abord confectionné en dans les périodes les plus anciennes, le chiton est ensuite fabriqué en et gagne alors en ampleur pour se porter avec une à la taille. Le port de ce vêtement est complété par une ceinture parfois teinte.