Chapitre 6 - La Sauvage
— Sophia ! Sophia ! acclame le groupe qui nous encercle, alors que je viens de mettre à terre un autre garçon qui a essayé de me défier.
— Tu devrais faire attention à ta garde, c'était beaucoup trop facile, je lui explique. Dans d'autres circonstances, tu serais déjà mort, lui dis-je tout en lui prenant la main pour l'aider à se relever.
Fatiguée, bien que pas assez pour aller me coucher, je me retire du cercle pour aller me servir à boire dans un gobelet. Au même moment, Gally qui ne m'a pas encore adressé la parole de la soirée s'approche de moi. Nos regards se sont souvent croisés, mais il n'est pas encore venu à ma rencontre. Sans doute qu'il n'en a pas encore eu l'occasion.
— Tu les as tous mis au tapis, rigole-t-il. Il faut aussi dire que le travail dans le bloc, que ce soit à la ferme ou autre, est le seul effort physique qu'ils pratiquent. Pas comme les coureurs, tel que Mihno.
— Comment ça ? je demande alors intriguée. Tu veux dire qu'ils suivent un entraînement spécial pour ensuite se rendre au Labyrinthe ?
— C'est ça. Comme ils n'ont pas le droit à l'erreur, ils font leurs échauffements, aussi, ça leur arrive de faire des petits footings et autres exercices au poids du corps pour garder la forme, explique-t-il.
Alors que j'allais boire une gorgée de mon eau, Gally pose une main sur la mienne pour m'en empêcher.
— Tiens, bois ça à la place, me propose-t-il tout en me tendant un bocal rempli d'un liquide douteux.
— Ça ressemble à de la pisse, ton truc. Il est hors de question que j'avale ça, je déclare en grimaçant.
— Arrête de faire la fillette. Tu ne me fais pas confiance ou quoi ? T'es capable de mettre tout le bloc au tapis mais quand il faut faire preuve d'un peu de courage, il n'y a plus personne, c'est ça ? Aller, tiens, dit-il en insistant un peu plus.
Sans rien répondre, je me saisis du bocal que j'ouvre très lentement. Je regarde Gally en même temps pour voir sur son visage, si ce n'est pas une blague de sa part. Je sens d'abord, l'odeur n'a pas l'air prononcé alors je me dis que le goût, ne doit pas être si horrible que je l'imagine. Je porte donc le bocal à mes lèvres et laisse le liquide arriver jusqu'à mon estomac quand je recrache tout en grimaçant.
Le liquide est amer, le goût est abject et j'ai juste envie de vomir. Gally explose de rire tout en grimaçant lui aussi. Effectivement, j'ai tout recraché sur son haut. Je dépose brutalement le bocal sur la table, à la place de mon verre, et lui fait signe de me suivre.
— Réglons ça dans l'arène, lui dis-je avec un air de défi alors qu'il commence à rigoler.
Il enlève son t-shirt qui mérite maintenant un bon lavage et me suit.
— Gally ! Gally ! Sophia ! Sophia ! crient les garçons.
Je marche en cercle, Gally m'imitant, un de nous deux attend que l'autre commence l'assaut. Son petit sourire en coin me fait enrager. En même temps, je ne peux empêcher mon regard de descendre sur son corps à la fois large et brut. Une vraie bête.
Je décide, comme c'est moi qui ai provoqué le duel, d'attaquer en premier. Je fais donc un pas en avant tout en tapant Gally d'un revers de la main, qu'il bloque facilement à l'aide de son avant-bras, ne protégeant pas le côté droit de son visage, j'en profite. Je porte mon autre main à son cou, que je tape du revers, ce qui a pour effet de lui faire mal et, également de couper un instant sa respiration et de le déstabiliser.
— Aller Sophia ! Met le au tapis ! hurlent-ils autour de nous, frénétiquement.
Je recule tout en souriant fièrement. Gally reprend son souffle puis lève les yeux vers moi. Il n'a pas l'air de vouloir abandonner. Il s'approche rapidement, en courant et pose une de ses mains sur mon épaule pour me plaquer au sol. En même temps, il attrape l'arrière d'un de mes genoux et le tire vers lui. Le choc me coupe un instant la respiration, lorsqu'il me plaque par terre. Il a ses deux jambes autour de mon corps, l'un au niveau de ma taille et l'autre, un peu plus bas.
Je ne peux cesser de fixer son regard, ardent - celui d'un fauve, qui a enfin attrapé le pauvre petit lapin -, son visage tout près du mien et nos deux souffles haletants s'emmêlent. Et, sans que je ne comprenne vraiment pourquoi, son regard se perd dans le vide et il semble soudainement déstabilisé. Sans attendre davantage, je relève mes jambes, entoure sa taille et arrive à grimper sur son dos. Personne ne comprend rien à la tournure de ce "combat". Moi non plus, j'ai plus l'impression de m'amuser.
Une fois dans son dos, j 'enserre son cou à l'aide de mon avant-bras et le serre modérément. Il essaie de m'enlever mais je suis hors d'atteinte, le seul moyen de m'arrêter et qu'il se laisse tomber en arrière. Mais, s'il fait ça, il franchira la limite du cercle et perdra. Mais, finalement, c'est ce qu'il se passe, il se laisse tomber.
— Sophia ! clame frénétiquement le groupe, en applaudissant.
Je baisse les yeux vers Gally qui reste allongé sur le sol, je lui tends ma main pour qu'il se relève. Il me regarde, toujours avec cet air de défi. Il refuse mon aide et se lève tout en essuyant son postérieur. Puis il plante ses prunelles bleutées dans les miennes.
— Je n'ai pas besoin de toi, la sauvage, me murmure-t-il.
Puis, il prend mon poignet entre ses doigts et le brandit, comme on le ferait avec une épée après une bataille victorieuse.
— Le premier ici qui réussit à la battre se verra attribuer le statut du meilleur combattant ! La première personne qui bat la sauvage, aura toute mon estime ! Ainsi qu'un jour de repos, déclare-t-il en hurlant dans un dernier souffle.
Les garçons hurlent en cœur, tout en sautillant et en tapant dans leurs mains. Tous semblent émerveillés par la promesse du jour de repos, ainsi, sur ces derniers mots, Gally me lâche et sort silencieusement du cercle. Sans un regard pour moi.
Je me retrouve autour d'une trentaine de garçons qui n'attendent qu'une chose, me défier. Je resserre ma queue de cheval, craque mes doigts et fait signe à un d'entre eux d'approcher.
Point de vue de Gally
Après avoir trouvé une occupation à notre nouvelle arrivante, je quitte le cercle, essoufflé. Je n'ai encore jamais crié aussi fort. Alerté par mes pas, Mihno, Newt et Chuck, accompagnés d'autres mecs, se retournent. Par rapport aux autres, ils n'aiment pas trop l'agitation et préfèrent rester à part. Newt me regarde, un rire moqueur aux lèvres, alors que je m'assieds avec eux autour d'un petit feu de bois.
— Que fais-tu là ? me demande-t-il. Elle te fatigue tant que ça, la sauvage ?
— Tu n'as même pas idée... je soupire tout en buvant une gorgée de ma cuvée spéciale. Bon sang, c'est vrai que c'est amer, dis-je pour moi-même.
En même temps, je repense à Sophia et à sa force presque... herculéenne. C'est sûrement ceux qui l'ont envoyé ici qui lui ont appris à se battre comme ça. Mais dans quel but ? Quel est l'intérêt que Sophia soit à elle seule, l'équivalent de six hommes ? Est-ce que c'est pour qu'elle se fasse respecter ? Où qu'elle nous dirige ?
— Tu penses quoi de la nouvelle ? lance Minho.
— Elle a une sacrée poigne, dis-je en me massant le cou.
Au même moment, d'autres acclamations résonnent. Un autre mec est mis au tapis. Je repense à ce moment, lorsque j'étais sur elle. Je ne peux m'empêcher d'être profondément mal à l'aise. Je secoue la tête, gênée. Cela aurait été plus simple de comprendre l'étendue de mes préoccupations à son égard. Malheureusement...
— Il y a quelque chose qui cloche, là-dedans... minaude Minho.
— Manque plus qu'à découvrir quoi, murmure Newt.
— Pas besoin de vous faire du mouron, dis-je en passant aux autres garçons, ma cuvée spéciale. Elle est balèze, c'est tout.
Je me retourne et fixe Sophia, au centre du cercle. Quelques instants, son regard croise le mien et je semble y discerner une lueur bleue aux nuances surnaturelles...
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