Il est impossible pour moi de voir ce qu'il se passe. Cependant, j'entends tout : les voix, les pas, les souffles. Je reconnais qui me portent par les odeurs, aussi. Incroyable mais vrai, je sais de source sûre que j'ai Minho à ma droite et Thomas à ma gauche.

J'arrive également à situer exactement où se trouvent les autres.

Ils ont l'air subjugués par ce qu'il se passe. Apparemment, nous sommes dans une sorte de couloir. Je le comprends car le son de leur pas résonne, mais pas autant que si nous étions dans un immense hangar, vide.

En même temps, plusieurs sons se répètent, s'éloignant de plus en plus. Je ne saurais dire ce que c'est... Mes amis avancent dans le silence. J'aurais bien aimé qu'ils me décrivent ce qu'ils voient.

Je les entends finalement parler :

— Ils sont sérieux, là ? demande Fry.

Je ne comprends pas forcément d'où lui vient cette réflexion. Le groupe s'est arrêté. Je me sens glisser des bras de Thomas, mais il me remonte tant bien que mal. Je dois commencer à le peser. Mais il tient bon. Puis j'entends la clenche d'une porte, mais quant à qui l'a ouverte ? Mes sens sont perturbés. Un grincement m'indique qu'ils ont poussé une porte et qu'elle est en métal.

Aussitôt, tout un tas d'informations me parviennent. D'abord, une odeur âcre et métallique : celle du sang. J'imagine plusieurs corps allongés là, sur le sol. Puis, un son continu. Celle d'une alarme. Où sommes-nous ?

Puis, je sens la respiration de Minho s'emballer. Il a peur ? Il finit par demander :

— Il s'est passé quoi ici ?

Ça me tue de ne rien voir ! Mais, d'un autre côté, du fait de leur réaction je ne trouve ça pas plus mal.

Nous continuons d'avancer et je reconnais un crépitement électrique, ainsi que des sons semblant provenir de moniteurs. Nous venons de changer de salle.

Le groupe s'arrête de nouveau et, cette fois, c'est Newt qui dit :

— Alors c'est vrai... ils nous surveillaient ? Depuis le début.

Pourquoi est-ce qu'il dit ça ? Est-il tombé sur une retranscription vidéo où apparaît le bloc ? Voit-il Gally sur des écrans ? Peut-il savoir s'il va bien ? Soudain, quelqu'un semble appuyer quelque part car une voix éclate, quelque part dans la pièce.

Quelqu'un a lancé une vidéo ?

— Bonjour.

Un nouvel éclair me foudroie. Cette voix... cette voix... je l'ai déjà entendu quelque part, mais impossible de me souvenir où.

— Je suis le professeur Ava Paige, directrice des opérations du WICKED, département Catastrophe mondiale et Zone mortelle.

Je sens le groupe s'approcher de la voix, tendu et sur ses gardes.

— Si vous écoutez cet enregistrement, c'est que vous avez brillamment passé les épreuves du labyrinthe. J'aurais aimé être là pour vous féliciter en personne, mais il semble que les circonstances m'aient privé de cet instant. J'imagine que vous devez être troublé de découvrir tout ça.

Au même instant, je sens Thomas et Minho se tendre. J'imagine tant bien que mal l'état d'esprit du reste du groupe.

— Troublés et en colère, continue la voix féminine. Effrayés, même. Mais ce que je peux vous dire, c'est que toutes les épreuves que vous avez vécues, tout ce que nous vous avons fait endurer, n'est nullement le fruit du hasard.

Et là, je pense à toutes ces horreurs dont nous avons été témoins dans le labyrinthe. La mort de Ben et celle de tous les autres. Comment toute cette mascarade pourrait être légitime ? Qu'est-ce qui pourrait justifier cette captivité, si longue pour certains ? A quoi cela peut-il rimer ?

— Vous ne vous en rappelez pas, poursuit la femme toujours sur le même ton de voix, mais le soleil a calciné notre monde. Des milliards de vies humaines, en proie aux flammes. A la famine. Une souffrance planétaire... les répercussions furent inimaginables.

Je tremble face à ces révélations. J'imagine le monde en feu à la suite d'une éruption solaire. Mais... en quoi avons-nous un rôle à jouer là-dedans ?

— Mais le pire était à venir. On l'a appelé "Braise". Un virus mortel qui attaque le cerveau. Il est violent, imprévisible. Incurable.

Je sens tous les autres se crisper. Ils reculent, avant de s'avancer à nouveau. Voient-ils des choses ? Au sujet de cette... "Braise" ?

— Où du moins, c'est ce que nous pensions. Avec le temps, une nouvelle génération est apparue, qui est devenue résistante au virus. Dès lors, nous avions eu l'espoir de trouver un vaccin. Nous savions que l'entreprise serait difficile. Il fallait faire des essais sur de jeunes sujets. Parfois, les sacrifier dans un environnement hostile. Mais il fallait étudier coûte que coûte leur activité cérébrale.

Voici donc la raison de notre présence dans ce labyrinthe. Ce qui veut dire que nous sommes résistants à ce virus ?

— Concentrer nos efforts pour comprendre pourquoi ces personnes n'étaient pas comme les autres. Comprendre pourquoi vous, n'êtes pas comme les autres. Vous ne le réalisez peut-être pas, mais vous êtes d'une importance capitale. Malheureusement, vos épreuves ne font que commencer.

Comment ça peut être pire ? J'entends du bruit en arrière-plan : des cris ? des tirs ? Mais qu'est-ce qui peut bien se passer ?

— Comme vous pouvez vous en douter, nos méthodes ne font pas l'unanimité. Les progrès sont lents et les gens ont peur. Il est probablement trop tard pour nous, pour moi. Pas pour vous. Dehors, le monde attend. N'oubliez jamais : WICKED est bon.

En même temps, un tir effroyable résonne, me faisant vriller les tympans. Thomas et Minho vacillent, comme pour ne plus regarder leur interlocutrice. Quelqu'un lui a vraisemblablement tiré dessus, à bout portant, et ça ne devait pas être beau à voir.

Le groupe, bien que toujours tendu et silencieux, se remet en mouvement. Moi qui pensait que nous trouverions des réponses, me retrouve avec encore plus de questions.

Soudain, le groupe s'arrête et une autre alarme retentit, brièvement. Une porte semble s'ouvrir, provoquant un souffle de dépressurisation. L'alarme s'arrête. Un courant d'air me parvient. Mes amis voient-ils le monde extérieur ? Pourquoi ne disent-ils toujours rien ?

— C'est vraiment fini, là ? demande Chuck.

Je suis rassurée de l'entendre. Allons-nous enfin sortir d'ici ? Vais-je un jour pouvoir retrouver le contrôle de mon corps ? J'en ai marre d'être un poids pour les autres. Minho me réajuste sur ses épaules. Il commence à souffrir. de me porter et je le comprends.

— Elle a dit qu'on était important, continue Newt que j'entends derrière-moi. Qu'est-ce qu'on est censé faire ?

— Je sais pas, réponds Thomas, choqué. Mais quittons cet endroit.

Ils font un pas quand une voix retentit, derrière-nous. Moi qui me vantait d'entendre tout, je ne l'avais pas entendu arriver.

— Non !

Cette voix... Le groupe s'arrête et se retourne. Je n'ai pas besoin de le voir pour le reconnaître. Cette voix...

Elle appartient à Gally.