-D'accord... entendu, passons cet accord.

Lee parut surpris par la réponse Jin et, un peu pris de court, il acquiesça, peut-être un peu trop rapidement pour faire passer son malaise.

-Très bien, dans ce cas-là il me faut d'autres cocktails...

Comme la première fois où ils s'étaient retrouvés face à face, l'ancien manageur but beaucoup et très rapidement mais devant le regard quelque peu surpris de son dongsaeng, il finit par lâcher :

-Je ne suis pas doué pour parler, sans un peu d'alcool je suis aussi aimable qu'une porte de prison, comme dit l'autre, mais elle n'a pas tort.

Il faisait référence à Hyunju qui adorait lui donner des surnoms de tout type.

-Je comprends, fut tout ce que Jin trouva à répondre.

Il aurait voulu boire un peu pour se détendre lui aussi mais les souvenirs de la précédente soirée continuaient de tourner dans sa tête. Il n'était clairement pas prêt à se laisser aller de la sorte de nouveau.

-Je commence ?

Le jeune vendeur acquiesça et l'ancien manageur se racla la gorge :

-Le divorce a été prononcé et je n'ai plus de nouvelles d'Insook depuis, voilà.

Jin ne sut absolument pas quoi faire de cette information et tandis que Lee avalait un énième verre, Jin battit des paupières à la recherche d'une idée. Cette information tombait comme un cheveu sur la soupe.

Pourquoi était-il si difficile de faire la conversation avec lui ?

-Je suis désolé...J'avais notion que vous... que tu divorçais mais pas que la situation était tendue à ce point.

Puis il ajouta :

-Je vais envoyer un message à Jimin, il me dira s'il a pris contact avec elle, si tu veux.

-Qu'importe, souffla Lee entre deux gorgées, ça n'a plus d'importance.

Il parut si désœuvré en disant cela que Jin ne put s'empêcher de demander :

-Pourquoi elle vous ignore ? Elle est en colère ou quelque chose comme ça ?

Lee sembla amusé un quart de seconde du passage au vouvoiement et il prit quelques secondes avant de répondre :

-Disons que c'est ma faute...je ne lui ai pas caché ce qui s'est passé avec Jihoon dans notre précédente compagnie.

Les yeux de Jin s'ouvrirent et il reposa son verre brusquement :

-Vous lui avez dit ?

Lee acquiesça, le regard dans le vide et le plus jeune n'osa pas prononcer quoi que ce soit de peur de paraître impoli ou trop curieux.

-De toute façon, il y avait déjà des problèmes entre nous, avoua l'ancien manageur dans un murmure. On a consulté un thérapeute de couple il y a un an. Tu vois à quoi ça ressemble ?

-À peu près...avoua rapidement Jin.

Et soudain le jeune vendeur se rendit compte qu'il avait totalement annihilé cette option, que jamais il n'y avait pensé jusqu'à maintenant. Il repensa à Namjoon et au temps qu'ils auraient pu gagner ensemble s'ils avaient consulté un professionnel lorsque ça n'allait pas...

Quoi que non, dans leur situation, ça aurait été trop compliqué. Car dans le contexte, Namjoon ne semblait se rendre compte de rien et Jin vivait un épuisement professionnel. Il était déjà trop tard pour prendre rendez-vous avec un thérapeute à cette époque-là.

-Consulte s'il le faut, recommanda Lee, mais sache qu'ils ne sont pas vraiment là pour nous réconcilier, en fait ils sont là pour nous faire comprendre qui nous sommes, ce que nous sommes en couple, pourquoi on ne veut pas se séparer et comment on s'accroche encore.

-Vraiment ?

-Propre interprétation personnelle.

Lee souffla bruyamment, après trois cocktails avalés il semblait enfin faire une pause.

-Pour tout t'expliquer, tu as plusieurs rendez-vous, le premier en couple, ensuite trois à cinq rendez-vous individuels avant de rebasculer sur les entretiens en couple. Disons que la thérapie ne m'a pas aidé à me réconcilier avec ma femme mais a fait ressurgir ce qui était enfoui en moi...

Pour la première fois depuis des années, Jin vit quelque chose de fragile émaner de Lee. En cet instant, dans l'atmosphère de ce bar étroit et bruyant, l'ancien manageur paraissait accablé et semblait dévoiler son vrai visage.

Il n'eut pas besoin de terminer sa phrase, Jin avait compris ce dont il voulait parler. Il cacha sa surprise et sa curiosité derrière une mine neutre et pourtant il demeurait décontenancé par tant d'honnêteté.

Il n'aurait pas imaginé que Lee puisse se confier sur un tel sujet.

-Et vous lui avez dit, c'est ça ? Osa-t-il interroger.

-Crois-moi, elle ne l'a pas bien pris. Aujourd'hui il semblerait que je la dégoûte.

-Vous la dégoûtez parce que vous avez été attiré par un homme ? Reformula Jin soudain emporté par les aveux de son interlocuteur.

-Moi aussi je me dégoûte Kim, d'avoir fait ça sur mon lieu de travail, de m'être emporté, d'avoir flanché devant ce gamin sans écouter la voix de la raison...

Puis il se redressa brusquement et Jin recula contre le dossier de sa chaise, un peu brusqué.

Il était vraiment difficile de cerner cet homme, de savoir ce qu'il allait dire ou faire, ça mettait le plus jeune dans une situation compliquée.

-N'empêche, merci de m'avoir trouvé dans ce placard, sans cela je pense que je me serais fourvoyé longtemps, je me serais caché, j'aurais continué dans un métier impossible et terrible. Au moins aujourd'hui je me sens mieux.

-Euh... de rien, balbutia Jin un peu déboussolé. Je suis quand même désolé pour votre mariage, vous... étiez mariés depuis combien de temps ?

-Douze ans.

Lee eut un léger sourire, il continuait de fixer le vide comme s'il voyait défiler les souvenirs de sa vie. Cette expression le rendait nettement plus apaisé qu'il ne l'était habituellement.

-Insook et moi on s'est toujours connus, depuis le jardin d'enfant.

-Vous avez eu une relation très longue... commenta Jin.

-Oui, on avait seize ans quand elle m'a déclaré ses sentiments. Je l'ai trouvée vraiment cool, c'était si rare les filles qui se déclaraient à nous à cet âge-là.

Jin partagea son rire quelques instants.

-En fait je ne me suis jamais posé de questions, ma vie était tracée de A à Z, mes deux frères avaient réussi, je devais marcher dans leurs pas. J'avais Insook avec moi, elle est partie en section de danse contemporaine tandis que je suis rentré dans la même grande école de management que mon premier frère aîné. Une fois diplômé, j'ai eu un premier travail dans une petite compagnie puis une seconde entreprise, on envisageait l'achat d'une maison, avec une chambre pour un bébé... Mais rien ne s'est passé comme prévu.

Il se renfrogna :

-Ce travail était aberrant et affreux, j'étais stressé et très probablement stressant. Elle et moi, on a commencé à se disputer... Le psy a dit que je devais avoir de la frustration en moi, quelque chose d'inconscient, qui ressurgissait.

-Vous n'aviez jamais été attiré par des hommes avant ? Osa demander Jin sans pouvoir cacher sa curiosité.

Il y eut un silence et le jeune vendeur sentit ses oreilles chauffer, était-il allé trop loin dans sa question ?

-Si... je crois que c'était ça le problème, répondit finalement Lee. J'ai aimé Insook, vraiment, mais il y avait quelque chose envers certains hommes, une sorte de fascination. Ça m'est arrivé deux fois par le passé.

Jin acquiesça avant de marmonner :

-Ça a dû être difficile pour vous.

Un énième verre d'alcool arriva et Lee l'avala quasiment en entier avant de se racler la gorge :

-On arrivait à la fin de la thérapie de couple, j'étais encore plus confus, je suppose que Park Jihoon avait dû le remarquer et il m'a tenté alors j'ai succombé bêtement. Quand Insook l'a appris, elle a demandé le divorce.

Jin se tortilla les doigts, mal à l'aise, avant de s'armer de courage pour dire :

-Je vous trouve courageux, ce n'est peut-être pas la chose à laquelle vous vous attendiez mais vous avez appris sur vous-même, vous vous êtes découvert et aujourd'hui vous êtes dans une meilleure situation que vous ne le croyez. Même si le travail ne fait pas tout, le Purple est un endroit agréable et bienveillant. Votre frère...

-Hyung ne sait rien, coupa Lee en le regardant cette fois, Jihyo noona non plus.

Jin se tut mais l'ancien manageur reprit :

-Je... enfin, je vais attendre un peu avant de leur dire quoi que ce soit.

-Vous pensez qu'ils le prendront comment ?

L'aîné des deux hésita avant de répondre :

-Ils seront surpris mais pas fermés d'esprit, contrairement à mon frère aîné et sa femme et je ne te parle même pas de mes parents...

Il termina son verre avant de soupirer :

-Aussi étonnant que cela puisse paraître, c'était tout de même agréable de discuter de ça...

Jin se redressa en souriant, rassuré :

-Tant mieux, je suis content si vous...

-Tu.

-Si tu, se reprit le jeune vendeur en sentant ses oreilles chauffer à nouveau, si tu as pu te sentir soulagé. Je sais que ma position est particulière parce que c'est moi qui ai... ouvert la porte du placard mais je t'assure que je ne suis pas du genre à porter un jugement sur les autres.

-Oui, je m'en doute.

Cela fut prononcé si doucement que Jin ne fut pas sûr d'avoir bien entendu.

Une nouvelle commande de cocktail arriva, et Jin essaya de ne pas se laisser tenter par un verre d'alcool alors que Lee lançait :

-À ton tour, Kim.

Le plus jeune déglutit en tentant de sourire.

-Je n'ai rien d'aussi particulier à confier, c'est très puéril de ma part en plus d'être contrarié là-dessus...

Jin sentit qu'il résistait. Comme habituellement, parler de lui se révélait être une tâche difficile mais se confier à son ancien manageur était d'autant plus impossible. Néanmoins il ne pouvait pas s'empêcher de vouloir rendre la pareille à Lee. Ce dernier, même s'il avait dû boire pour cela, avait tout de même confié quelque chose d'intime qui semblait le peser et Jin ne pouvait pas le laisser seul dans cette situation.

Ils avaient passé un accord, après tout.

-C'est à cause d'un de mes dongsaeng...

-Celui qui est venu au Purple la semaine dernière ?

-Oui...

-Il n'était pas là à la sortie en boîte de toute notre équipe, si ? interrogea-t-il.

-Non, il était absent. Il a 23 ans, il est encore en étude et en milieu de semaine ce n'était pas possible pour lui avec ses cours...

Lee fronça les sourcils :

-Il s'appelle Kim aussi ?

-Non, Jeon.

Face à sa confusion, Jin reprit une gorgée de sa boisson avant de reprendre :

-Ça peut être surprenant mais je suis proche de personnes bien plus jeunes que moi. Jungkook, qui est venu Purple, est le maknae de notre bande.

-Ce sont des amis ou des membres de ta famille ? Interrogea Lee sans comprendre.

Jin se tut en souriant doucement :

-C'est les deux mais c'est une longue histoire.

Face au silence de son interlocuteur, Jin comprit qu'il avait le choix, de raconter cette histoire ou de la taire. Pourtant en cet instant, il fut surpris d'avoir envie de la confier à quelqu'un pour la première fois. Il n'avait jamais parlé de tout ça à qui que ce soit, même pas à ses anciens collègues, Ken, Hyoyeon et Jisoo.

-Ça ne va pas vous... enfin, te paraître intéressant, bafouilla-t-il.

-Est-ce que ça ce n'est pas à moi d'en juger ?

Face à cette réplique le jeune vendeur ne put qu'acquiescer avant de prendre une grande inspiration.

-Nous sommes sept, il y a les quatre que tu as vus à la soirée : Yoongi, Hoseok, Jimin et Taehyung et deux autres, Jungkook, le maknae qui est venu au Purple la semaine dernière, et Namjoon qui habite à Washington actuellement. Ce sont mes dongsaeng mais aussi ma famille.

Lee fronça les sourcils mais sans ajouter quoi que ce soit alors Jin avoua :

-On vient tous du même orphelinat à d'Ilsan.

Cette fois l'aîné changea de position, reposant son verre, se démarquant avec un air plus sérieux et surpris que particulièrement morose et fermé.

-Vous êtes des enfants placés ?

Jin acquiesça et Lee reprit :

-Je suis désolé, je l'ignorais, c'était mal avisé de ma part de te demander ça.

-Non, ça va, assura le jeune vendeur en mettant une main en avant dans un signe d'apaisement. Ce n'est pas un secret en soit.

-Ça prend tout son sens maintenant.

Puis Lee reprit, d'un air un peu maladroit :

-J'ignorais qu'il y avait un orphelinat à Ilsan.

-Il n'y en a plus, il a été fermé il y a sept ans environ. Notre pays a changé de président et ce dernier a misé davantage sur les nouveaux foyers d'insertions que sur les anciens orphelinats qui existaient depuis l'après-guerre.

Lee hocha la tête d'un air entendu :

-C'est vrai, je me souviens d'avoir entendu ça à la radio.

-On s'est tous connus là-bas et on est restés proches.

-Vous avez des différences d'âges importantes non ?

-Oui, pour certains seulement, par exemple Jungkook a cinq ans de moins que moi.

-Quel âge tu avais quand... osa demander Lee d'une voix mal assurée.

-J'avais dix ans, confia simplement Jin devant le regard concentré de son interlocuteur.

Le jeune vendeur bu une gorgée avant de changer de position.

Lee voulut poser une question mais se ravisa, cependant Jin savait ce qu'il souhaitait demander. C'était souvent délicat de demander une chose comme telle alors il prit les devants :

-Mes parents sont morts lors d'une traversée en mer de Busan à Jeju à cause d'une tempête. La disparition du ferry Moon, ça te dit quelque chose ?

-C'était il y a presque une vingtaine d'années ? Je crois me souvenir de ça...

-Eh bien voilà, mes parents étaient dedans et ils ont disparu comme le reste des touristes et l'équipage. Ils en ont parlé longtemps à la télé. D'abord la protection de l'enfance a voulu me confier à un membre de ma famille mais mes parents étaient enfants uniques et pas en bons termes avec leurs oncles et tantes, pour de vieilles querelles d'argent et puis mes grands-parents étaient morts avant ma naissance. Une tante éloignée a bien voulu s'occuper de moi mais quand elle a appris que l'argent de l'héritage et les frais de dédommagement versés aux familles des victimes dans le procès contre la compagnie de ferry, ne me seraient versés qu'à ma majorité, elle m'a déposé à l'orphelinat le plus éloigné de chez elle.

Un pli barra le font de Lee mais Jin haussa simplement les épaules :

-Ça ne fait rien, je lui suis plutôt redevable, je pense que j'aurais été plus malheureux avec elle qu'à l'orphelinat.

-À ce point ?

-C'étaient les meilleures années de ma vie, répondit Jin d'un ton assuré. Pas au début, bien sûr, mais avec l'arrivée des garçons , je crois que c'étaient les meilleurs moments de mon existence.

Jin reprit, ses yeux se perdant dans le décor :

-La politique de l'orphelinat c'était : « les aînés s'occupent des plus jeunes ». On était environ une trentaine de gamins et il n'y avait que deux ahjummas pour nous encadrer. Peu de moyens, pas de locaux rénovés, une salle de bain commune, c'était très limité. L'ambiance était tout de même bonne. Au début, un aîné s'occupait de moi mais parce que j'avais dix ans, j'étais déjà considéré comme autonome alors on m'a rapidement demandé de m'occuper des autres. Ça m'a rendu plutôt indépendant. Les orphelins d'Ilsan étaient éparpillés dans les écoles, collèges et lycées aux alentours, l'État nous payait notre scolarité mais dans des centres d'éducation assez bas de gamme. Pas de quoi intégrer de bonnes écoles après le diplôme de fin d'étude à moins d'avoir les meilleures notes aux résultats régionaux.

-Je ne suis pas surpris, avoua Lee d'un air entendu, notre système d'éducation a certains problèmes de fonctionnement.

-À l'orphelinat, malgré notre nombre et nos pauvres moyens, on avait quand même des adoptions mais c'était plus facile d'adopter les bébés abandonnés que des enfants plus âgés. Je craignais qu'on ne veuille m'adopter que pour l'argent que je gagnerai une fois majeur alors j'ai fait en sorte de ne jamais me faire adopter.

-C'est plutôt compréhensible, admit Lee.

Jin eut l'impression qu'on lui avait délié la langue et ce, sans même avoir consommé de l'alcool. Les mots venaient avec fluidité et facilité, pourtant l'espace de quelques secondes il hésita à poursuivre. Lee pouvait-il garantir que ces informations seraient gardées ?

Néanmoins si ce dernier avait admis être attiré par des hommes peu après son divorce sans même que sa famille soit au courant, il n'allait clairement pas crier ce qu'il entendait sur tous les toits.

Ça semblait être difficilement son genre.

-Après moi est arrivé Yoongi, nous n'avions que trois mois d'écart. Il avait fait deux orphelinats, deux familles d'accueil mais ça n'avait pas marché. C'était un enfant mutique, enfin au début, pas vraiment dynamique, pas souriant. Ils mettaient les familles en échec et il était maintenant trop grand pour être ré-adopté. Vu que j'allais sur mes onze ans, j'étais devenu un « aîné » alors je devais m'occuper des petits maintenant que j'entrais au collège. Yoongi et moi partagions la même chambre, nous étions dix dans la même pièce mais son lit était à côté du mien. Yoongi et moi je ne sais pas... le courant est passé rapidement entre nous sans même qu'il ait besoin de parler. Ça a pris un an pour qu'il m'adresse la parole. C'était un enfant vraiment brillant en fait, mais très renfermé. Il avait été abandonné dans la rue à l'âge d'un an et avait été balloté entre différents orphelinats et maisons d'accueil par la suite. Yoongi supportait difficilement le bruit et les autres enfants, enfin jusqu'à ce qu'arrive Hoseok.

-Le type qui a passé la soirée à boire avec hyung, l'autre soir ? demanda Lee.

-Celui-là même. Hoseok est arrivé l'année d'après, il avait quasiment neuf ans et sa mère l'avait abonné à une fête foraine. Il l'a attendue toute la journée tout seul, jusqu'à ce que les vigiles fassent leur ronde durant la soirée pour fermer le parc et ne le trouve. Une enquête a été ouverte, des appels à témoins ont été lancés mais on n'a jamais retrouvé sa mère, c'est comme ça qu'il a été envoyé à Ilsan.

Jin se mit à pouffer, nostalgique :

-Contrairement à aujourd'hui, c'était un gamin horrible au départ. C'était compréhensible, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait et rejetait le fait d'avoir été abandonné. Il était méchant avec les autres enfants, faisaient des crises de colère et de larmes pendant des heures. Il dormait à côté du lit de Yoongi, ce qui a valu que ces deux-là se détestent dans un premier temps. C'était le jour et la nuit, ils se fâchaient régulièrement et je devais faire le gendarme pour les séparer. Mais passé une année ensemble, ils ont fini par s'entendre et s'apaiser mutuellement. Je crois que c'est Hoseok qui a fait parler Yoongi et Yoongi qui a redonné le sourire à Hoseok. Après tout, en tant qu'enfants sans parents, nous n'avions pas d'autres choix que d'avoir de la ressource pour nous en sortir.

-Comme si vous étiez forcés à grandir plus vite que les autres ?

-Exactement, avoua Jin satisfait que Lee comprenne où il voulait en venir. Quelques mois après Hoseok, est arrivé Namjoon.

-Celui qui vit à Washington actuellement ? interrogea Lee

-Oui, il est né la même année qu'Hoseok mais contrairement à nous autres, Namjoon était déjà ordinaire d'Ilsan et surtout c'était lui qui avait choisi de venir à l'orphelinat.

-Comment ça ?

-Il faut savoir que Namjoon était un gamin intelligent et, enfin... c'est toujours un homme brillant.

Jin se mordit la langue pour empêcher sa voix de trembler.

-Sa mère était décédée d'un cancer du poumon quelques mois plus tôt et son père croulait sous les dettes des frais d'hôpitaux. Ils étaient très pauvres et vivaient dans des conditions précaires. Son père devait s'occuper de ses propres parents très âgés. Au lieu d'être une charge, Namjoon a décidé de lui-même de convaincre les assistants sociaux pour qu'il soit placé à l'orphelinat pour ainsi ne pas être un poids financier pour lui. Il disait qu'en faisant ça il protégeait son père.

-Je n'ai jamais entendu un tel truc, confia Lee sans cacher sa surprise.

-Namjoon était quelqu'un de très différent, même à dix ans, il avait déjà une compréhension précise du monde qui nous entourait. Arrivé dans notre collège, il avait de si bons résultats qu'ils lui ont fait sauter une classe. Il est resté une année dans la même classe que Yoongi avant de sauter une autre classe et de venir dans la mienne. On est restés souvent ensemble, Namjoon, Yoongi, Hoseok et moi. On allait ensemble à l'école, on était littéralement les uns sur les autres mais on aimait cette proximité, ça nous donnait déjà l'impression d'être une famille. Puis est arrivé Jimin.

Cette fois Jin marqua un temps de pause avant de reprendre :

-Jimin vivait avec sa mère sur Busan, elle était polytoxicomane. Les services sociaux ont fini par intervenir après une plainte déposée par le voisinage pour tapage nocturne, violence entre la mère et ses petits amis, insalubrité des locaux et plus encore... Ils ont retiré Jimin à sa mère, l'ont placé dans un orphelinat mais il s'enfuyait régulièrement pour la rejoindre. Il avait environ onze ans et elle lui faisait faire ses courses pour acheter de la drogue. Les services sociaux ont donc envoyé Jimin chez nous, à des centaines de kilomètres pour éviter ça. Contrairement à nous, c'était un enfant qui avait vécu dans la violence, de ce fait son comportement était compliqué à gérer au départ...

Jin bougea, ses sourcils se fronçant :

-Il y avait des nuits où il faisait des crises de terreur et je devais me lever pour le calmer. Les crises de Jimin réveillaient les bébés et tout l'orphelinat ne dormait pas de la nuit. Il était assez impulsif comme enfant alors c'était difficile de l'approcher, de seulement jouer avec lui. Mais parce qu'Hoseok avait déjà vécu ça, il prenait sur lui pour l'aider. C'était aussi la période où on est passés de deux ahjummas la journée à une seule qui devait tout gérer. Certains aînés avaient quitté l'orphelinat à seize ans et des enfants étaient soit adoptés soit envoyés dans d'autres foyers où il y avait de la place. Namjoon, Yoongi, Hoseok et moi étions des aînés alors on se partageait encore plus de tâches.

-Vous deviez avoir vos vies de collégiens et vous occuper d'enfants en même temps ? S'étonna Lee

-Aider la ahjumma aux courses, à la cuisine, aux linges, entre autres, énuméra Jin.

-Clairement pas la vie d'un collégien moyen de nos jours

-Non, confia-t-il. Mais avec l'aide de tout le monde on est parvenus à gérer Jimin. Le temps a passé, je suis entré au lycée avec Namjoon et on eut ensuite un nouvel arrivant qui est arrivé en hiver. Taehyung. Il avait environ treize ans et le courant est tout de suite passé entre lui et Jimin. La situation de Taehyung était vraiment particulière, personne ne savait d'où il venait. Tout ce qu'il a voulu nous dire c'est qu'il avait vécu avec son père. Ils ont vécu dans la rue pendant des années, sans domicile fixe et il avait passé le plus clair de son enfance dehors sous des conditions météos extrêmes jusqu'à ce que son père décède. Il a erré pendant longtemps avant que la protection de l'enfance ne le trouve et ne l'envoie chez nous. Taehyung était un gamin sauvage et indiscipliné, il était très difficile à prendre en charge.

Jin soupira :

-Mais aussi étonnant que ça puisse paraître, il s'est attaché à nous. À Jimin notamment parce qu'ils avaient le même âge. Taehyung avait beaucoup de difficultés à respecter les règles de hiérarchie de l'âge voir même toutes les règles. Mais il s'entendait aussi avec Yoongi. Ils avaient l'accent de Daegu et il était si fort chez Taehyung que seul Yoongi le comprenait au départ. J'ai usé de beaucoup de patience sur Taehyung, pour l'éduquer, lui faire respecter les règles de vie en communauté, le faire aller à l'école, faire ses devoirs, l'empêcher de voler dans les magasins...

Y repenser le fatiguait comme s'il revivait les scènes du passé.

-Néanmoins tous ensemble, malgré les difficultés de chacun, on s'amusait et on passait du bon temps avec pas grand-chose. On jouait dehors exclusivement, l'orphelinat n'avait pas les moyens de nous payer des jeux vidéo ou quoi que ce soit. Il y avait de nombreux conflits entre nous mais on ne pouvait pas se passer les uns des autres. Les années semblaient durer cent ans. Jimin et Taehyung étaient les plus durs et les plus difficiles à gérer et pourtant tout ça s'est calmé quand ils sont devenus eux-mêmes des aînés lorsqu'est arrivé le dernier de la bande.

-Celui venu au Purple, la semaine dernière ? précisa Lee.

-Oui, Jungkook. C'était non seulement le dernier à rejoindre notre petit groupe mais ce fut aussi le dernier enfant à être placé à Ilsan avant sa fermeture.

-Quel âge avait-il ?

-Il avait dix ans, quasiment onze quand il est arrivé. C'était le jour du printemps, sa mère l'a amené et déposé devant la porte. Ils sortaient d'une Mercedes rutilante alors ça attirait l'attention de tout le quartier. On était surpris de voir une voiture allemande pour la première fois donc tout l'orphelinat était allé les regarder par la fenêtre. Sa mère était une belle femme, comme on n'en avait jamais vue. Notre orphelinat et nos classes scolaires étaient exclusivement faits de garçons et la ahjumma qui s'occupait de nous avait un certain âge. Je me souviens qu'elle était très mince, très bien habillée et qu'elle avait un chauffeur. Elle a déposé Jungkook, avec sa valise et une peluche de lapin rose sur le parvis, comme on dépose un objet et elle lui a promis qu'il resterait « à la colonie de vacances » temporairement puis qu'elle reviendrait le chercher.

-Elle a menti à son enfant ? interrogea Lee, surpris.

-Oui, et vous... enfin, tu n'imagines pas à quel point ça a fait des dégâts dans la vie de Jungkook ensuite.

-Je suppose qu'il l'a attendu...

-Oh oui, il l'a attendu toute sa vie.

Jin soupira, le cœur encore serré dans un étau en repensant à cette histoire.

-Elle n'est jamais revenue, il a vécu avec nous presque deux ans en répétant à qui voulait l'entendre qu'on était une « colonie de vacances » même si nous ne partions jamais en vacances. Jungkook était un beau petit garçon, très bien éduqué, très poli, très naïf, qui suivait tout le monde. Il était très enfantin pour beaucoup de choses. Il avait un côté un peu compétitif et n'aimait pas que d'autres aient plus d'attention que lui. Il avait été gâté, ça se voyait qu'il n'avait jamais manqué de rien alors découvrir la frustration de la vie, notamment la nôtre, ça n'a pas été simple. Pour Jimin et Taehyung, qui étaient infernaux, devoir s'occuper de Jungkook les a fait grandir et ça les a profondément changés. Parce nous tous, nous savions que jamais sa mère ne reviendrait.

Jin tira sur sa paille, faisant de bruit avec son verre vide.

-Parce que c'était le bébé de notre petite bande, tout tournait autour de lui et c'était fou à quel point certains de nos maux se calmaient en nous occupant de lui. Il était si adorable. Néanmoins à l'inverse des autres qui ont pu s'apaiser en grandissant, notamment Jimin et Hoseok qui ont fait le deuil de leur mère, Jungkook, lui, est devenu dur et exigeant. Il n'a jamais voulu croire que sa mère l'avait abandonné. Ça lui ait resté comme une blessure impossible à cicatriser malgré tout l'amour qu'on a pu lui apporter...

-Comment vous en êtes-vous sortis, de cet orphelinat ?

-Namjoon et moi avons eu notre diplôme du lycée en même temps, confia Jin. Heureusement qu'il avait été là, sans ça j'aurais eu difficilement mes examens, je n'étais pas fait pour les études. Il m'a aidé malgré le fait que son père soit décédé d'un infarctus la même année. Namjoon avait l'habitude de dire que j'étais bien trop investi à m'occuper des autres pour me concentrer sur l'essentiel. Il y avait de moins en moins d'enfants et la ahjumma qui allait prendre sa retraite nous a prévenus environ six mois à l'avance de l'arrêt des aides et du financement. Donc si nous ne sortions pas de l'orphelinat par nos propres moyens, l'État allait nous dispatcher dans d'autres centres. De ce fait, diplôme en poche, j'ai trouvé un appartement pour qu'on ne soit pas séparés. On s'est entassés à sept dans quelques mètres carrés et j'ai commencé à travailler.

-Quel âge avait le dernier à ce moment-là ?

-Même pas quinze ans, il était au collège. Jimin et Taehyung venaient d'entrer en première année de lycée, Hoseok en seconde année et il ne restait qu'un an à Yoongi pour être diplômé. Là, ça a été la période la plus difficile pour nous...

-Pourtant vous viviez déjà ensemble ? S'étonna Lee.

-Oui mais l'adolescence et tous ses travers était difficile pour certains, précisa Jin. Peut-être parce qu'on avait grandi plus vite, peut-être parce que beaucoup de choses du passé ressurgissaient mais la question de la sexualité a mis quelques bâtons dans nos roues. La question du corps, du regard de l'autre, la compréhension de ce qu'on pouvait penser de nous en tant qu'orphelins, la résurgence de nos syndromes d'abandons, la tentation, l'enfreint des limites, les fugues, la drogue, la violence... Bref ça faisait beaucoup à gérer et multiplié par cinq, j'avais du mal à voir le bout.

-Tu parles comme s'il s'agissait de ta responsabilité, fit remarquer l'ancien manageur.

-J'étais l'aîné de tous, asséna le jeune vendeur, la règle d'Ilsan c'était « les aînés s'occupent des plus jeunes. »

-Mais vous n'étiez plus à Ilsan...

La parole de Jin se coupa et il se rembrunit, soudain contrarié mais Lee reprit :

-Attends tu m'as bien dit tout à l'heure qu'une fois majeur tu toucherais l'argent de l'assurance et ton héritage, non ?

Jin se mordit la lèvre avant d'avouer :

-Oui, j'ai touché l'argent de mes parents et la somme de dédommagement donnée aux familles de victime lorsque la compagnie du Ferry faisant le trajet Busan-Jeju a perdu son procès. Je n'en ai utilisé qu'une partie pour trouver un appartement où vivre à sept et j'ai commencé à faire plein de petits boulots.

-Et le reste ?

Il prit une grande inspiration :

-J'ai fait un choix, j'ai utilisé cet argent pour envoyer Namjoon dans une grande université sur Seoul.

Lee papillonna des yeux sans comprendre mais Jin reprit :

-Namjoon avait un QI très élevé, plus élevé que la moyenne, il sortait du lot. Nous autres, nous étions condamnés à finir notre lycée et ensuite trouver du travail car aucun de nous n'avait vraiment les moyens d'aller dans des grandes universités. Pour Namjoon, c'était du gâchis d'être si intelligent et de devoir se contenter de si peu. Il méritait mieux que ça. Je n'avais pas assez d'argent pour que nous allions tous à l'université, les frais étant bien trop élevés. Mais si l'un de nous pouvait être sauvé de cette galère de vie professionnelle sans sens, ça devait être lui. Son intelligence devait servir à quelque chose. Il a fait une demande dans les plus grandes universités du pays, avec ses notes excellentes il a été pris et sa bourse d'étude ne payant pas l'entièreté des frais scolaires, j'ai utilisé l'argent pour les lui régler pendant cinq années consécutives. Même si Namjoon n'était pas ambitieux et qu'il ne souhaitait pas prendre mon argent, tous les autres étaient d'accord avec moi. Et ça lui a finalement réussi.

-Qu'est-ce qu'il est devenu Namjoon aujourd'hui ? demanda Lee

-Il termine son doctorat en astrophysique à Washington avant d'être embauché par la NASA.

La levée de sourcils marqua la surprise mais aussi la considération de cette nouvelle de la part de l'ancien manageur.

-Le reste de l'argent a servi à ce qu'on aille tous sur Seoul, chacun, l'un après l'autre. J'ai coupé la somme restante en plusieurs parts pour chacun. Ça nous a permis de nous lancer un peu, avec un peu plus de chance, dans la vie. De mon côté, j'ai cumulé plusieurs petits jobs avant d'arriver à avoir un peu d'expérience dans chaque domaine. C'était toujours mon rôle de les aider. Yoongi travaillait aussi, mon argent lui avait servi à acheter du matériel pour composer de la musique. Il voulait être producteur mais c'est un milieu tellement difficile à percer. Il a galéré longtemps. Heureusement Hoseok a pris des cours de danse pour passer des concours et a été sélectionné. Un danseur professionnel qui dirigeait un crew l'a pris sous son aile et l'a aidé à se lancer. Jimin a aussi passé des concours pour avoir des bourses pour des écoles d'arts et de danse où il a été pris. Taehyung a été repéré dans la rue, un peu avant son diplôme de lycée, pour faire du mannequinat amateur. Enfin, chacun de nous s'est cotisé pour qu'on puisse payer les études que souhaitait Jungkook à ses 19 ans. On ne pouvait pas l'envoyer dans une très grande université mais on a réussi à payer une école modeste d'art et de graphisme.

-Je vois, alors quel est le problème avec le dernier ?

Cette fois le visage de Jin se ferma. Il s'était laissé emporter par le passé, par leur histoire, qu'il en avait quasiment oublié le présent.

Les souvenirs de sa conversation avec Jungkook remontèrent et il se mordit la lèvre. L'émotion le gagna.

-Il.... veut partir, il veut s'en aller, balbutia Jin. Il veut nous quitter pour aller à l'étranger.

Lee resta les sourcils froncés à le fixer avant d'étrangement se radoucir :

-Tu sembles avoir raison en parlant de liens familiaux concernant tes dongsaeng, tu t'inquiètes pour ce maknae comme s'il s'agissait de ton propre petit frère.

-On a toujours été ensemble. Nous sommes une famille. On s'est promis de se soutenir et de s'entraider les uns et les autres, face à tout, face au malheur, l'adversité et ... je ne m'attendais pas à ce que...

-Et ce Namjoon, alors ? Lui aussi est parti.

La mâchoire de Jin se crispa et Lee parut légèrement surpris de sa réaction.

-C'est différent.

-En quoi ?

-Je ne veux pas en parler, asséna le jeune vendeur d'un air dur.

-D'accord mais franchement Kim, avec la technologie qu'il y a aujourd'hui, la distance c'est quand même devenu autre chose qu'il y a vingt ans. Pour un garçon de 23 ans je trouve ça entendable et compréhensible qu'il ait envie de partir à l'étranger.

-Ce n'est pas ça, rectifia Jin d'un air peu aimable, ce n'est pas ce qu'il cherche à faire...

-Qu'est-ce qu'il cherche à faire ?

Mais Jin ne répondit pas, un sentiment d'agacement commençant soudain à grandir dans sa poitrine.

-En même temps est-ce que tu peux vraiment lui interdire de partir ?

-Évidemment ! Et puis je suis censé prendre soin de lui, pourquoi va-t-il dans un pays où je ne peux pas faire ça ? S'écria le plus jeune.

-Prendre soin de quelqu'un ne veut pas dire le contrôler à ce que je sache, répliqua Lee.

Cette fois Jin en eut assez et se leva rapidement :

-Je vous trouve culotté de faire des remarques alors que j'ai été d'une grande écoute pour vous tout à l'heure quand vous parliez de votre femme.

Lee croisa les bras en levant un sourcil :

-Donc je ne peux rien dire de la situation ?

-Restez en dehors de ça, vous ne comprenez rien !

Lee soupira avant de dire, d'un air sévère qui rappelait son comportement d'autrefois :

-Ce n'est pas que je ne comprends rien, c'est que tu refuses d'écouter un autre avis que le tien.

-Qu'est-ce que vous savez de la solitude, hein ? Scanda Jin en enfilant sa veste. Qu'est-ce que vous savez des liens qui m'unissent aux six autres ? Vous avez vous-même dit que votre vie était toute tracée. Vous avez dû être gâté, tout a dû être facile pour vous. Vous ne savez rien de ce que c'est que d'être un orphelin ! D'être livré à soi- même ! Mes dongsaeng sont ma famille, on doit rester ensemble. On se l'est promis et si je décide qu'on doit rester ensemble, on doit rester ensemble !

-Qu'est ce qui te donne le droit de décider de ça ? Tes dongsaeng sont des individus à part entière, ils ont leurs propres ressentis et leur propre volonté, non ?

Jin le fixa, plein de rage avant de persifler :

-Je n'ai rien à entendre de votre personne, vous n'êtes personne de toute façon, votre parole ne vaut rien.

Jin fit volte-face, quittant l'étroit endroit d'un pas décidé, les poings serrés de colère.

Pour qui se prenait-il ?

Cet accord était foireux depuis le début, il n'aurait jamais dû confier ça à Lee.

Plein de regrets, il marcha jusqu'à l'arrêt de bus avec hargne. Une fois assis dans le véhicule, il rongea son frein, ruminant, regrettant toute l'histoire qu'il avait raconté.

Il déplorait le fait d'avoir voulu évoquer son passé. Il ne l'avait jamais dit à personne et finalement il avait eu raison toutes ces années. Les autres ne pouvaient pas comprendre.

Il ne pouvait même saisir l'essence de leurs liens à tous les sept.

Plus jamais il ne raconterait ça à qui que ce soit.

Il arriva chez lui une vingtaine de minutes plus tard. Toujours l'esprit embrouillé et contrarié, il prit une douche rapide avant d'envisager de se coucher.

Mais en quittant la salle de bain une notification clignota sur son téléphone posé sur la couette.

Jungkook : « Hyung, est-ce qu'on peut se parler, s'il te plaît ? »

Les cheveux encore humides, en peignoir, prêt à enfiler un pyjama, Jin soupira avant de déverrouiller son écran.

Penser à Jungkook faisant reflamber son irritation alors l'aîné choisit de ne pas répondre. Mais en faisait défiler ses messages, le jeune vendeur se figea en relisant l'ancienne conversation qu'il avait eu avec Namjoon avant leur rupture.

Avant que tout ne change.

Le profil de « Namjoon » s'afficha accompagné de son numéro de téléphone.

La colère était encore là.

La rancœur.

Les regrets.

La douleur.

L'amour.

L'espoir.

Et son pouce appuya sur « appeler le contact ».

*******

Chapitre corrigé par @Cla_ra25

*******